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LES RELATIVES CHEZ LES GRAMMAIRIENS FRANÇAIS

1.6 Denis Creissels 1 :

Pour Creissels, définir les relatives comme des subordonnées, dont la fonction est de préciser ou de délimiter le référent potentiel d’un élément appartenant à la classe nominale se montre insuffisant et non pertinent, car ceci ne permet pas de distinguer la relative (à antécédent) et la complétive de nom, cf. par exemple2 : « L’idée que tu partes » (complétive de nom) et « L’idée que tu défends » (relative). Il propose que la relativisation soit définie, non en termes purement syntaxiques, mais, en prenant en considération le statut sémantico-logique des subordonnées. Par exemple, dans « Je crois que Marie

chante »3, la subordonnée complétive que Marie chante signifie un contenu propositionnel, c’est-à-dire un fait qui peut être vrai ou faux. En revanche, dans « Je ne connais pas la

chanson que Marie chante »4, la relative que Marie chante exprime une propriété précisant le référent d’un objet la chanson. Il résulte de cette comparaison que les relatives, à la différence des complétives, disposent d’une construction différente et se chargent d’exprimer des propriétés et non pas des contenus propositionnels. En bref, il estime que « la relativisation implique une opération logique de construction d’une propriété en utilisant un schème phrastique comme pour construire une phrase assertive, …5 ». Ceci se manifeste par la construction d’un constituant nominal à l’intérieur duquel la relative assume le rôle d’un élément dépendant vis-à-vis d’un nom qui lui sert de tête. Il donne l’appellation de « nom de domaine » au nom sur le signifié duquel la relative exerce une restriction.

1 Creissels, 2006, Syntaxe générale, une introduction typologique 2, Paris, Lavoisier. 2

Creissels, Syntaxe générale, une introduction typologique 2, p. 191.

3 Creissels, Syntaxe générale, une introduction typologique 2, p. 192. 4 Creissels, Syntaxe générale, une introduction typologique 2, p. 192. 5

1.7 SYNTHÈSE :

La présentation de ces différents points de vue montre que tous les linguistes sont d’accord pour considérer la relative comme une proposition subordonnée, hiérarchiquement inférieure à son point d’incidence. Mais ils ne partagent plus cette unanimité lorsqu’il s’agit de définir les caractéristiques de sa structure, ou de déterminer les rapports syntaxiques qu’elle peut entretenir, d’une part avec l’antécédent, et de l’autre avec le prédicat principal de la phrase, notamment dans les cas où le relatif n’est pas précédé d’un antécédent.

1.7.1 Le relatif :

Tous les linguistes sont d’accord pour confier au relatif les trois rôles suivants :

1) Celui de marque de subordination 2) Celui d’anaphorique

3) Et enfin, celui de pronom, capable d’exercer, au sein de la relative, la même fonction syntaxique que le nom relativisé.

D’autres linguistes comme Damourette et Pichon, Martinet, etc. estiment que le relatif peut, notamment lorsqu’il est utilisé sans antécédent, assurer une fonction nominale auprès du prédicat de la phrase ; il peut également servir de prédicat, cf. la GFF. Quant au rôle de « masque » dont ont parlé Damourette et Pichon, nous estimons que ce rôle ne diffère en rien de celui de subordonnant, étant donné que ce rôle de « masque » vise essentiellement à donner à la relative le suivant le statut d’une sous-phrase, autrement dit, d’une proposition ; ce qui correspond exactement au rôle de subordonnant.

Quant à son statut, ceci dépend du cadre théorique dans lequel l’analyse est faite. Il est tantôt considéré comme un subordonnant et comme un pronom par Arnauld et Lancelot / Martinet, Bentolila, Feuillard / Riegel, Pellat, Rioul et Creissels. Damourette et Pichon, quant à eux, préfèrent l’inclure parmi les « struments oncinatifs » au même titre que les conjonctions de subordination ; mais ils le distinguent de ces dernières par son rôle de conséquent (autrement dit, anaphorique) et sa capacité à remplir des fonctions nominales.

Tesnière, en revanche, l’analyse comme un « translatif ou transférème », c’est-à-dire comme un outil grammatical permettant à la proposition relative de passer de la catégorie des verbes à celle des adjectifs. En tant que substitut ou représentant de l’antécédent dans la relative, le relatif joue un rôle anaphorique vis-à-vis de son antécédent ; il est appelé « anaphorème » selon Tesnière. Damourette et Pichon préfèrent parler de « conséquent ».

1.7.2 La relative :

a) Du point de vue syntaxique :

La relative est présentée, chez tous les linguistes, comme étant une proposition secondaire naturellement introduite par un pronom relatif qui, à son tour, peut ou non être précédé d’un antécédent. Par conséquent, ils la considèrent comme faisant partie d’un groupe nominal qui a la vocation d’exercer une fonction syntaxique au sein de la phrase. Elle se comporte donc comme un adjectif vis-à-vis de son antécédent. Selon cette analyse, la relative joue un rôle secondaire, celui de déterminant, auprès de son antécédent dont elle dépend syntaxiquement. Elle n’entre pas en relation directe avec le prédicat principal de la phrase. Lorsque la relative est utilisée sans antécédent, les linguistes ne sont plus unanimes sur l’analyse du rôle syntaxique que joue la relative au sein de la phrase. Elle est considérée comme un nom (selon Damourette & Pichon et Riegel, Pellat, Rioul). On lui assigne également la capacité à jouer le rôle de prédicat comme dans cet exemple : « Il a

un genou qui lui fait mal1 ». Les auteurs de la GFF, quant à eux, ils préfèrent, dans le cas des relatives sans antécédent, considérer que c’est la relative qui exerce des fonctions syntaxiques au sein de la phrase et non le relatif comme dans Qui veut la fin veut les

moyens où Qui veut la fin exerce la fonction de sujet par rapport au prédicat veut. En

revanche, ils n’accordent pas à la relative sans antécédent le statut de nom, car ils distinguent nettement classe et fonction.

1

b) Du point de vue sémantique :

La relative est de type déterminatif (restrictif ou sélectif) lorsque sa suppression affecte, en l’altérant, l’identification du référent de son antécédent (la grammaire de Port- Royal, la GFF et la GMF). Tesnière appelle ce type de relative « une relative adjective essentielle ». Et elle sera appelée explicative, accessoire ou parenthétique lorsqu’elle ne joue aucun rôle dans l’identification du référent de son antécédent et que sa suppression n’altère pas, par suite, le sens de la phrase.

CHAPITRE

II