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LES RELATIVES EN ARABE CLASSIQUE ET EN ARABE MODERNE CHEZ LES GRAMMAIRIENS ARABES

I. Quelle que soit la fonction que doit occuper ʔælʔesm ælmæws ʕ uːl “le nom

2. Ceux qui ont une forme invariable :

1.5.2 Les éléments qui correspondent à ce que nous pouvons désigner comme relatifs en arabe :

1.5.2.7 En ce qui concerne ʔæl :

La majorité des grammairiens arabes adoptent l’analyse suivante :

1) Le relatif ʔæl ressemble formellement à l’article défini ʔæl.

2) Il est incapable d’exercer une fonction nominale au même titre que ʔællæði au sein de la phrase.

3) Il est obligatoirement suivi par un participe actif ou passif avec lequel il forme un syntagme dit nominal.

[ʔæʕrefu dʕdʕaːrebæ zæjdæn]

ًديز َبراضلا ُفرعأ

ʔæ/ʕref/u /dʕaːreb/æ zæjd/æn

p1+connaît+inacc Rel/frappe+part actif/cas dir Zayd+cas dir je connais qui frappant Zayd

Je connais celui qui frappe Zayd. (C’est celui-ci) ? qui a frappé Zayd)

Dans cet exemple, dʕest une forme assimilée de ʔæl. Le syntagme nominal dʕdʕaːrebæ

“le frappant”, composé de ʔæl et du participe actif, est considéré comme un nom qui assure la fonction d’objet auprès du syntagme prédicatif ʔæʕrefu “je connais”.

5) Les grammairiens arabes estiment que ʔæl peut commuter avec ʔællæði. Cf. l’exemple ci-dessus où dʕdʕaːrebæ “le frappant” peut commuter avec ʔællæði dʕaːræbæ “qui a

frappé”. Le remplacement de ʔæl par ʔællæði entraîne le changement de la forme du participe en forme verbale conjuguée à la troisième personne et marquée par l’accompli.

6) La proposition ʔæsʕsʕela “la suite” qui le suit ne contient jamais de pronom

anaphorique, mais les grammairiens arabes sous-entendent un pronom dit caché, qui se trouve après le participe et qui renvoie soit à ʔæl, soit à un nom supprimé qui devait remplir le rôle d’antécédent. Cf. l’exemple précédent où on sous-entend un pronom

howwæ “p3m” après le participe actif. Ce pronom devait assurer la fonction de sujet

vis-à-vis du participe.

7) En ce qui concerne le participe qui suit ʔæl, les grammairiens arabes le considèrent soit comme étant une forme verbale qui peut être remplacée par un verbe déterminé par des modalités temporelles exprimant le passé, le présent ou le futur, soit comme un nom apte à assurer des fonctions nominales au sein de la phrase.

Quant à nous, nous pensons que le fait de pouvoir remplacer ʔæl par ʔællæði ne suffit pas

pour en faire un relatif. Le remplacement de ʔæl par ʔællæði implique celui du participe actif par une forme verbale. cf. l’exemple précédent où nous pouvons le reformuler de la façon suivante :

[ʔæʕrefu ʔællæði dʕaːræbæ zæjdæn]

ًديز برضيذللا ُفرعأ

ʔæ/ʕref/u ʔællæði dʕaːræb/æ zæjd/æn

p1+connaît+inacc Rel frappe+acc/p3m Zayd+cas dir je connais qui a frappé il Zayd

Je connais celui qui a frappé Zayd.

Il ne s’agit pas, dans cet exemple, d’une simple commutation de ʔæl avec ʔællæði, mais d’une reformulation de l’énoncé : le remplacement de ʔæl par ʔællæði entraîne le remplacement du participe par un verbe déterminé par des modalités verbales et qui a son propre sujet.

Nous suggérons alors deux hypothèses :

La première hypothèse :

Nous supposons que ʔæl ne peut pas être considéré comme un relatif pour les raisons suivantes :

1) Du point de vue formel, ʔæl ne peut pas porter la marque casuelle, étant donné qu’il a la même forme que l’article défini ʔæl.

2) Du point de vue paradigmatique, ʔæl ne peut pas commuter avec un relatif comme

ʔællæði parce que ce dernier ne peut pas être suivi d’un participe.

3) Du point de vue syntaxique, les grammairiens arabes ne le considèrent pas comme pouvant assumer, au même titre que les autres relatifs, une fonction syntaxique au sein de la phrase ;

4) Le segment introduit par ʔæl ne peut pas contenir un pronom anaphorique ;

5) ʔæl peut être analysé comme un article défini, du fait qu’il introduit une unité qui peut être considérée comme un nom.

Quant au participe qui le suit :

1) Du point de vue formel, le participe est une unité syntaxique qui a une forme nominale pouvant être déterminée par les mêmes modalités nominales qu’un nom, par exemple : le participe actif sæːken “habitant” peut être déterminé par le nombre, le genre et le cas, cf. les formes suivantes :

- sæːken/æ هنكاس « une habitante » ;

- sæːken/æːni نانكاس « deux habitants » au cas nominatif ;

- sæːken/æjni نينكاس « deux habitants » au cas direct et indirect ; - sæːken/æt/æːni ناتنكاس « deux habitantes » au cas nominatif ; - sæːken/æt/æjni نيتنكاس « deux habitantes » au cas direct et indirect ; - sæːken/iːnæ نينكاس « des habitants » au cas direct et indirect ; - sæːken/uːnæ نونكاس « des habitants » au cas nominatif ;

- sæːken/æːt تانكاس « des habitantes » au cas nominatif, direct et indirect.

2) Du point de vue syntaxique, il peut fonctionner à la fois comme un nom et comme un verbe, et être suivi par un complément ou un adjectif, cf. le participe actif ħæːres سراح “gardant” ou “un gardien” dans les exemples suivants :

Ex. 1

ħæːres ʒædid ديدج سراح « un nouveau gardien » ;

ʔælħæːres ælʒædid ديدجلا سراحلا « le nouveau gardien » ;

Ex. 2

[hæːðæ ħæːresu lbæjti]

ِتيبلا ُسراح اذھ

hæːðæ ħæːres/u l/bæjt/i

dém garde+part actif/cas nominatif déf/maison/cas ind celui-ci gardant la maison

Dans cet exemple, le participe actif fonctionne comme un nom suivi d’un complément de nom au génitif ; le syntagme ħæːresu lbæjti “gardien de la maison” peut commuter avec un (pro)nom.

Ex. 3

سملأاب َتيبلا ُسراحلا لجرلا وھ اذھ

[hæːðæ howwæ rraʒulu lħæːresu lbæjtæ belʔæmsi] hæːðæ howwæ r/raʒul/u

dém p3m déf+homme/cas nominatif

l/ħæːres/u l/bæjt/æ b/el/ʔæmsi …/garde+part actif/accord déf/maison/cas dir prép/déf/hier Celui-ci lui l’homme gardant la maison hier

C’est celui-ci l’homme qui a gardé la maison hier. (nous ne pouvons pas traduire autrement cette phrase, sans l’emploi d’un relatif)

Dans cet exemple, le participe actif fonctionne à la fois comme un nom déterminé par le cas nominatif et comme un verbe suivi d’un objet. Les grammairiens arabes estiment que, dans ce genre de contexte, le participe exprime le passé ; point de vue avec lequel nous ne sommes pas d’accord car la valeur du passé est exprimée par le syntagme adverbial indiquant le temps belʔæmsi سملأاب “hier” qui le suit et non par le participe. C’est donc grâce à l’adverbe indiquant le temps du passé qu’il peut être interprété par un verbe à l’accompli.

3) Du point de vue syntaxique, le participe, dans ce genre d’emploi, ne peut pas être déterminé par la négation au même titre que les verbes, cf. l’exemple précédent où nous ne pouvons pas mettre l’unité lħæːresu à la forme négative.

4) Du point de vue sémantique, le participe actif peut exprimer uniquement (un fait général) au présent, par exemple :

[hæːðæ ħæːresu lbæjtæ]

َتيبلا ُسراح اذھ

hæːðæ ħæːres/u l/bæjt/æ

Celui-ci gardant la maison C’est celui qui garde la maison.

En revanche, si nous voulons que le fait général exprimé par cet énoncé soit localisé dans le passé ou dans le futur, nous devrons avoir recours à une unité lexicale exprimant la valeur temporelle voulue, comme par exemple : ɣadæn “demain” ou belʔæmsi “hier”.

5) De plus, du point de vue général, le participe peut être capable de constituer une relative, comme dans l’exemple (a). Mais il peut également fonctionner comme un simple adjectif comme dans l’exemple (b) :

a)

ةلاسرلا يف

يتللا

يھ

كيلإ ةلسرم

[ferresæ!læte llæti hejjæ morsælætun "elæjkæ] f/er/resæːlæt/e llæti hejjæ à/déf/message/cas ind Rel p3f morsæl/æt/un

envoie+part passé/accord en genre/cas nominatif ʔelæj/kæ

Prép (à)+p2m

Dans le message qui elle envoyé (e) à toi Dans le message qui t’est envoyé.

Ici, le participe passé morsælætun “envoyé” joue le rôle de l’élément prédicatif secondaire au sein de la proposition llæti hejjæ morsælætun ʔelæjkæ “qui t’est envoyé”.

b)

[ferresæːlæte lmorsælæti ʔelæjkæ]

كيلإ ةلسرملا ةلاسرلا يف

f/er/resæːlæt/e

à/déf/message/cas ind l/morsæl/æt/i

…/envoie+part passé/accord en genre/accord en cas ʔelæj/kæ

Prép (à)+p2m

Dans le message ʔæl + envoyé (e) à toi Dans le message qui t’est envoyé.

Dans cet exemple, le participe passé peut être interprété comme étant un adjectif s’accordant avec le nom qui le précède.

6) Le participe déterminé par ʔæl n’est jamais suivi par une unité syntaxique qui joue le rôle de sujet. En d’autres termes, selon les grammairiens arabes, le participe a comme « sujet » un pronom dit mostater “caché”, toujours sous-entendu, à la troisième personne. Selon leur analyse, ce pronom joue le rôle de pronom anaphorique qui renvoie soit à ʔæl, soit à un nom supprimé qui devait avoir sa place avant ʔæl.

7) Dans les exemples donnés par les linguistes arabes, le participe actif est toujours déterminé par le cas qui marque la fonction qu’il assure en tant que nom au sein de la phrase. Ceci veut dire que si le participe fonctionnait comme un verbe, d’après leur analyse, il n’aurait pas pu être déterminé par le cas qui ne détermine que les noms.

[ʔæʕrefu dʕdʕaːrebæ zæjdæn]

ًديز َبراضلا ُفرعأ

ʔæ/ʕref/u /dʕaːreb/æ zæjd/æn

p1+connaît+inacc Rel/frappe+part actif/cas dir Zayd+cas dir je connais qui frappant Zayd

Je connais celui qui frappe Zayd.

Pour toutes ces raisons, nous pouvons dire que ʔæl peut être considéré comme un article défini et non comme un relatif. Quant au participe, nous estimons qu’il fonctionne, dans ce genre de contexte, comme un nom et non comme un verbe, étant donné qu’il est déterminé par un article défini, et qu’il peut recevoir des modalités nominales, le genre, le nombre, ainsi que des marques casuelles. Le

syntagme, composé de ʔæl et du participe actif, peut ainsi être analysé comme une unité nominale qui a un comportement syntaxique identique à celui d’un adjectif vis-à-vis du nom. Il faudrait noter que ce type de structure a cessé d’être utilisé en arabe moderne de la même manière qu’en arabe classique ; on le remplace, entre autres, par une relative introduite par ʔællæði. Par exemple :

Au lieu de dire (en arabe classique) : لاقملا اذھ بتاكلا ىفحصلا فرعأ

[ʔæʕrefu sʕsʕoħafejjæ lkæːtebæ hæːðæ lmaqaːl] ʔæ/ʕref/u sʕ/sʕoħafejj/æ p1/connaît+inacc déf/journaliste/cas dir

l/kæːteb/æ hæːðæ l/maqaːl Rel/écrit+part actif/accord dém déf/article je connais le journaliste qui écrivant cet article

Je connais le journaliste qui écrit cet article.

On peut dire :

ذلا ىفحصلا فرعأ لاقملا اذھ بتكي ى

[ʔæʕrefu sʕsʕoħafejjæ llæði jæktubu hæːðæ lmaqaːl] ʔæ/ʕref/u sʕ/sʕoħafejj/æ llæði

p1/connaît+inacc déf/journaliste/cas dir Rel

jæ/ktub/u hæːðæ l/maqaːl p3m/écrit+inacc dém déf/article je connais le journaliste qui écrit cet article Je connais le journaliste qui écrit cet article.

On peut aussi dire : لاقملا اذھ بتاك ىفحصلا فرعأ

[ʔæʕrefu sʕsʕoħafejjæ kæːtebæ hæːðæ lmaqaːl] ʔæ/ʕref/u sʕ/sʕoħafejj/æ p1/connaît+inacc déf/journaliste/cas dir

kæːteb/æ hæːðæ l/maqaːl écrit+part actif/accord dém déf/article je connais le journaliste écrivant cet article

Je connais le journaliste qui écrit cet article.

Nous remarquons que dans cet exemple les locuteurs se passent complètement de l’emploi de ʔæl et se contentent d’utiliser le participe actif, grâce à sa capacité, en tant que verbe, de jouer le rôle de noyau central du syntagme kæːtebæ hæːðæ

lmaqaːl “écrivant cet article” et en tant que tel, de déterminer soit un nom comme sʕsʕoħafejjæ “le journaliste” (dans l’exemple ci-dessus), soit le syntagme qui joue le

rôle de prédicat (comme dans l’exemple suivant), sans avoir besoin d’un élément intermédiaire spécifique.

[ʔæʕrefu kæːtebæ hæːðæ lmaqaːl]لاقملا اذھ بتاك فرعأ

ʔæ/ʕref/u kæːteb/æ hæːðæ l/maqaːl

p1/connaît+inacc écrit+part actif/cas dir dém déf/article je connais écrivant cet article

Je connais l’écrivain de cet article. Ou, je connais celui qui écrit cet article.

Enfin, nous pensons que cette confusion au niveau de l’analyse du participe peut être liée à trois raisons :

1) La valeur dont dispose le participe, étant donné que celui-ci peut signifier « celui ou celle qui… », cf. par exemple : qaːdem “venant”, ʔælaqːdem “celui qui vient” ou kæːteb “écrivant”, ʔælkæːteb “celui qui écrit”…etc.

2) Sa capacité d’exercer des fonctions nominales au sein de la phrase.

3) Le fait qu’il est dérivé d’un verbe et qu’il puisse commuter avec un verbe. 4) Le fait qu’il puisse être suivi par un nom qui peut être interprété soit comme

objet (si le participe est analysé comme un verbe), soit comme complément de nom (lorsque le participe est considéré comme un nom), cf. kæːtebæ hæːðæ

La deuxième hypothèse :

Nous pouvons suggérer qu’il s’agit d’une variante de relative. C’est-à-dire que nous pouvons analyser ʔæl comme une variante de ʔællæði ; et la proposition qui le suit comme étant une variante de la relative, cf. l’exemple suivant :

[ʔæʕrefu dʕdʕaːrebæ zæjdæn]

ًديز َبراضلا ُفرعأ

ʔæ/ʕref/u dʕ/dʕaːreb/æ zæjd/æn

p1+connaît+inacc Rel/frappe+part actif/cas dir Zayd+cas dir je connais qui frappant Zayd

Je connais celui qui frappe Zayd.

Et

[ʔæʕrefu ʔællæði jædʕrebu zæjdæn]

ًديز ُبرضييذللا ُفرعأ

ʔæ/ʕref/u ʔællæði jædʕreb/u zæjd/æn

p1+connaît+inacc Rel p3m+frappe+inacc Zayd+cas dir je connais qui il frappe Zayd

Je connais celui qui frappe Zayd.

Dans ces deux exemples, dʕdʕaːrebæ est l’équivalent de ʔællæði jædʕrebu, ils

signifient tous deux “celui qui frappe”. Mais cette hypothèse semble assez faible pour être soutenue, puisque, comme nous l’avons déjà mentionné ci-dessus, il ne s’agit pas seulement de la commutation de ʔæl et de ʔællæði, mais il s’agit plutôt de deux formualtions bien différentes l’une de l’autre.

Nous soutenons donc la première hypothèse, et considérons ainsi ʔæl comme un article défini qui est suivi d’un nom ; le syntagme composé de ʔæl et du participe actif peut alors assurer des fonctions nominales au même titre qu’un nom, comme il peut fonctionner comme un adjectif à l’égard d’une unité nominale.