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Les debuts et contraintes idéologiques de la pédagogie rurale et indienne

Chapitre 3. Conditions philosophico-pédagogiques, conflits sociaux et religieux autour de la

3.3. Les debuts et contraintes idéologiques de la pédagogie rurale et indienne

Durant la transition politique après le conflit armé de la Révolution, le Ateneo de la

Juventud décide en juin 1911 de montrer son soutien idéologique à la nouvelle posture

politique du pays dirigée par Madero. L’Ateneo montre son soutien à Vasconcelos qui était un de ses membres les plus distingués du mouvement intellectuel, lors d’un dîner organisé dans le restaurant Sylvain Daumont afin d’attirer l’opinion publique. À cette réunion, assistent les avocats et influents intellectuels, Antonio Caso (1883-1946), Alfonso Cravioto (1884-1955), Isidro Fabela (1882 - 1964), Eduardo Colin (1880-1945), Marcelino Dávalos (1871-1923), Erasmo Castellanos Quinto (1880-1855) et Eduardo Xico (?) ; et les littéraires, José Escofet (1884 -1939), Carlos González Peña (?) et Luis Castillón Ledón (1879-1944) et le professeur Martín Luis Guzmán (1887-1976). Vasconcelos, légitimé par le fait qu’il avait soutenu le mouvement de la campagne révolutionnaire, se met alors débout dans le restaurant Sylvain Daumont pour lire son discours. Il se dresse contre ceux des invités qui n’avaient pas soutenu l’ « enthousiasme de la liberté » :

« Je pense que vous tous, alors que nous voici réunis dans ce temple qui est le nôtre, le temple de l’Ateneo, (…) vous avez frémi, lors de vos dernières rencontres, en évoquant la fureur qui dominait dehors, l’exaltation de la passion que vous avez-vous-mêmes éprouvée ; mais dont les rugissements entendus depuis le cœur de cette assemblée réunie pour méditer, ont résonné comme des menaces, et peut-être la frayeur de la rafale de vent qui pénètre dans le sanctuaire, menaçant d’éteindre la lampe sacrée qui veille sur la pensée, vous a-t-elle secouée, mais l’effet de surprise passé, peut-être avez-vous fait en sorte que le vent bénéfique, loin d’éteindre notre lumière symbolique, la ravive et améliore sa qualité.

(…) Voici donc l’union que je vous propose de consolider pour défendre la culture supérieure qui commence à s’amorcer, contre les réactions et les aveuglements que les changements politiques pourraient provoquer. Si nous nous exprimons avec sincérité, la Patrie comprendra où est son avenir, et le soutien social qui nous est si nécessaire pour tous travaux ayant trait à l’intelligence, saura choisir entre une jeunesse qui réclame ses droits à la vie mentale et une sénilité qui, hier muette sous l’oppression, entendra aujourd’hui utiliser la liberté qui n’avait pu être conquise en son temps afin de contenir notre envol et notre volonté, nés avec la révolution sur les mêmes ailes qui, au matin du triomphe, ont traversé l’aurore. »

(Vasconcelos, cité en Hernández Luna, 1962 : 136).115

        

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Version originale: « Yo creo que todos vosotros, al encontrarnos en este nuestro templo, el templo del Ateneo, (…) habéis sentido, las últimas veces que estuvisteis juntos, un estremecimiento al recordar el furor que prevalecía afuera, el frenesí del entusiasmo libertador que vosotros mismos experimentáis; pero cuyos rugidos, escuchados desde este interior de congregados para la meditación, sonaron amenazantes, y quizá os sacudió el espanto de la ráfaga de viento que penetra al santuario amenazando apagar la lámpara sagrada que vela la contemplación y pasada la inquietud de la sorpresa os opusisteis a procurar que el viento benéfico, lejos de extinguir nuestra luz simbólica, la avivase e infundiese calidad. (…) He aquí, pues, la unión que os propongo reafirmáis en defensa de la cultura superior que comienza a iniciarse, contra las reacciones y cegueras que los cambios políticos pudieran determinar. Si sabemos expresarnos con sinceridad, la Patria ha de comprender por dónde va su porvenir, y el apoyo social que tan necesario es entre nosotros para todas las obras de la inteligencia, sabrá elegir, entre una juventud que reclama sus derechos a la vida mental, y una senilidad que muda ayer bajo la

L’appel de Vasconcelos cherchant ressembler les nouveaux idéaux révolutionnaires permet à la nouvelle propagande politique signaler la liberté acquise par le mouvement armé. Les tendances philosophiques deviennent des arguments logiques des nouvelles politiques de gouvernement. En pleine effervescence revolutionnaire, lors d’une conférence à Saltillo en 1917, Federico H. González Garza (1876-1951), intellectuel et leader politique proche de Madero, dénonce probablement pour la première fois, le problème des tendances philosophico-pédagogiques prédominantes de l’époque :

« Le déplorable abandon dont a souffert la classe Indigène depuis l’époque de la Colonie, dont les conséquences sont l’ignorance et l’abjection. L’héritage des colons est un grave manque de respect aux droits et à la dignité de la race Indigène. D’une part, la classe bourgeoise, peu nombreuse, concentrait, avec l’appui des forces conservatrices et répressives, tous les privilèges ; d’autre part, 85% de la population avait une existence misérable, subjuguée, exploitée et maintenue dans la plus grande ignorance. Le radicalisme, signe conservateur, réactionnaire ou libéral, a endommagé l’éducation mentale et morale des colons. Ce radicalisme – nourri, d’une part, par l’attitude médiévale d’intransigeance et d’autoritarisme de l’Etat et, d’autre part, du dogmatisme et de l’immoralité de l’église – engendra l’extrême radicalisme des mouvements sociaux de l’Indépendance, le Réforme et le Révolution. Cet extrémisme inspira l’éducation. Tout d’abord, l’esprit médiéval orienté vers la théologie déprécia la raison, le corps et la vie sentimentale. Le libéralisme, au contraire, fit de la culture de la raison l’unique idéal éducatif. Dans certains cas, notre éducation resta désintégrée, faute d’harmonie et d’unilatéralité. L’implantation, dans les écoles secondaires, du positivisme, orienté vers l’instruction de l’homme à travers les sciences, constitue un nouvel obstacle à la réalisation de la mission éducative »

(González Garza, [1917] 1921 : 367)116.

Federico H. González Garza met l’accent sur la tendance idéologique connue comme l’extrémisme – résultat du radicalisme – qui a favorisé le maintien des injustices chez la plupart des Indiens de la nation. Il signale le problème indien « jamais compris » en raison d’une discrimination existante depuis la Conquête (comme on l’a vu précédemment) jusqu’aux derniers jours de la Révolution et dénonce comment le conservatisme des institutions nationales ont favorisé ces discriminations. Dans ce sens, il met en exergue le          

opresión, hoy pretenderá usar la libertad que no se conquistó en su tiempo y en su momento, para contener nuestro volar y nuestro querer, nacidos con la revolución sorbe las mismas alas que en la mañana del triunfo cruzaron la aurora. ». Traduction: Laurence Boularan, enseignante en espgnol, second cycle.

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Version originale : El reprobable abandono que ha sufrido la clase indígena desde la época de la Colonia, cuyos resultados son la ignorancia y la abyección. De los conquistadores se heredó una grave falta de respeto a los derechos y dignidad de la raza indígena. Por una parte, la clase alta, escasa en número, concentraba, con el apoyo de las fuerzas conservadoras y represivas, todos los privilegios ; por la otra, el 85% de la población arrastraba una mísera existencia, subyugada, explotada y mantenida en la más absoluta ignorancia.

El radicalismo de signo conservador, reaccionario o liberal, dañó la educación mental y moral de los conquistadores. Ese radicalismo – nutrido, de una parte, por la actitud medieval de intransigencia y autoritarismo estatales y, por otra, del dogmatismo e inmoralidad de la iglesia – engendró el extremo radicalismo de los movimientos sociales de la Independencia, Reforma y Revolución.

Ese extremismo infundió en la educación, primeramente, el espíritu medieval orientado a la teología y menospreció la razón, el cuerpo, y la vida sentimental. El liberalismo, en cambio, hizo del cultivo de la razón el único ideal educativo. En uno y otro caso, nuestra educación quedó desintegrada, falta de armonía y unilateral La implantación, en las escuelas secundarias, del positivismo, orientado a instruir al hombre por medio de las ciencias, constituye un nuevo óbice para realizar la misión educativa. Traduction : Stéfanie Malaussa, doctorante en linguistique hispanique, CEPED.

problème philosophique que le pays n’a alors pas encore résolu, et qui devient problématique compte tenu des changements sociaux accélérés. González Garza défend par contre le libéralisme et la raison, en opposition au positivisme mais la tendance idéologique prend une autre direction.

Rafael Ramírez, un des pédagogues de l’école active le plus importants des écoles rurales, exprime dans son livre Escuela Rural (1929) la nécessité de fonder une vie sociale “populairement libérale” qui correspond sans hésitations au discours promue durant le conflit armé de la Révolution. Le ton du livre reste bucolique et son discours envers les paysans, indiens et maîtres ruraux est empreint d’un certain paternalisme. L’école soutient alors une pédagogie nationaliste et non proprement libérale, et bien, j’ose dire, loin de la raison qui guide les institutions démocratiques. Dans son livre, distribué parmi les maîtres des écoles rurales, on apprend à lire et à écrire, on enseigne un peu d’histoire officielle d’un point de vue fort héroïque, on conseille d’aimer la mère, d’arrêter l’alcoolisme, tout en laissant la responsabilité entière aux habitants de ces zones de retrouver, par la voie de leur propre travail, l’astuce des aspirations et de meilleures conditions de vie (Ramirez, 1929).

Cette tendance idéologique propre à perpétuer un discours “égalitaire” (du fait du principe de

libérté positive qui laisse la Révolution au milieu rural) est repris dans son manuel

pédagogique lorsqu’il évoque, par une rhétorique nationaliste, des fables de la Fontaine tel que Le corbeau et el renard retraduites par Don cuervo y Don raposo et signées par l’espagnol José Augusto Trinidad Martínez Ruiz (1873-1967), plus connu sous le pseudonyme d’Azorín. Indépendamment du “plagiat” de l’époque, le constat de ce manuel cherche à consolider une morale civique. A travers la reconduction langagière des poèmes de Amado Nervo (1870-1919), Enrique de Mesa (1878-1929) entre autres, tout comme des textes lyriques, des contes, des anecdotes et des instructions moralistes, on cherchait à instruire les paysans et les Indiens sur la culture démocratique que le Mexique comprenait, voire cherchée par l’“oligarchie intellectuel” (concept définie par le Larousse comme l’aristocratie) de l’époque (ce qui nous fait penser à Bourdieu et son livre La noblesse d’Etat). A titre d’exemple, Ramírez publie ans son livre La Escuela Rural une preuve de cette aporie entre reconnaissance et oubli amorcée à l’époque, il souligne :

« ANOBLIS TA VIE ET ENJOLIVE TON PEUPLE

Tout le monde dit que la vie dans les fermes, les petits villages et les petites populations est très triste. Moi je ne le crois pas, parce qu'il n'y a pas de recoin dans la monde, aussi modeste qu'il soit, qui ne puisse pas jouir pleinement de la vie. Tout dépend de ce que ce recoin encourage des gens qui savent et veulent enjoliver et anoblir la vie.

Du sein de la communauté la plus pauvre peuvent s'élever les âmes jusqu'au ciel pour communier avec l'infini. Le secret réside dans le fait de se mettre à faire de la petite localité une œuvre d'art: des maisons gaies et blanches, des rues toujours propres, des petits jardins

domestiques ornés de fleurs de mille couleurs, du théâtre en air pour divertir les gens dans les temps de loisir, des terrains de sport pour l'entretien des muscles et pour fortifier la santé du corps, une bibliothèque populaire et une école pour le peuple pour la culture de l'esprit, et beaucoup de choses que les gens enthousiastes peut imaginer pour anoblir la vie.

Et dans cette localité aucune profession ni aucun métier est vil. Le secret réside dans le fait de faire de chaque vie quelque chose d'élevé et noble qui soit compatible avec le haut sentiment de vivre. Toi, modeste travailleur; toi, pauvre petit pasteur; toi insignifiant forgeron ou charpentier de village, tu peux te sentir grand si tu appliques ta raison à rendre plus beau et magnifique ton devoir.

Toi, aussi modeste que soit ton métier, tu peux contribuer à rendre plus agréable la vie du village, si en vivant, tu élèves constamment ta pensée vers le ciel.

Campagnard : Anoblis ta vie et embellis ta petite localité, pour que tout le monde puisse être heureux ! » (Ramírez, 1929 : 41-42)117.

En 1929, Vasconcelos, premier ministre de la SEP, en tant que candidat à la présidence de la République (élections qu’il perd par la suite), explique dans une comparaison avec les Etats- Unis le long chemin qui reste à parcourir pour éduquer le peuple. À ce moment, il souligne que seulement 30% des enfants a accès à l’école. Vers la fin des années 1930, des problèmes politiques dans le système éducatif en dévoilent les failles, tout comme les réussites. La guerre de Cristeros, dont la situation belliqueuse a lieu entre 1926 et 1929, engendre parmi les catholiques, une forte opposition, du fait du principe de laïcité, à l’école publique. Les violences se succèdent dans l’ensemble de la population, allant même jusqu’à l’assassinat de maîtres d’école. Autre exemple de violence, plus symbolique : en 1934 à Puebla, l’église menace d’excommunier les parents qui envoyaient leurs enfants à l’école, distribuant des pamphlets indiquant que le gouvernement vise l’esclavage du prolétariat, ainsi qu’ils « diabolisaient » (sic) (stigmatisent comme diaboliques les représentants de l’école) les professeurs, etc. (Quintanilla & Vaughan, 1997 : 211). Par ailleurs, en 1935, après les réformes de l’éducation en socialiste, le syndicat de professeurs manifeste contre les réductions de personnel et les nouvelles dispositions de l’Etat en matière de travail (idem : 152-155).

        

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Version originale : « ENOBLECE TU VIDA Y HERMOSEA TU PUEBLO

Todo el mundo dice por ahí que la vida en los ranchos, aldeas y pequeñas poblaciones es muy triste. Yo no lo creo, porque no hay rincón en el mundo, por modesto que sea, que no tenga capacidad para gozar de la vida plenamente. Todo depende de que ese rincón alienten gentes que sepan y quieran hermosear y ennoblecer la vida.

Del seno de la comunidad más pobre pueden ascender las almas hacía el cielo para comulgar con el infinito. El secreto está en ponerse a hacer del pequeño poblado una obra de arte : casas risueñas y blanqueadas, calles siempre limpias, jardincillos domésticos adornados con flores de mil colores, teatro al aire libre para recrear a la gente en los ratos de ocio, campos deportivos para el entrenamiento del músculo y para vigorizar la salud del cuerpo, biblioteca popular y escuela para el pueblo para el cultivo del espíritu, y tantas cosas más que la gente entusiasta puede idear para ennoblecer la vida.

Y dentro de ese poblado ninguna ocupación y oficio es ruin. El secreto está en hacer de cada vida algo levantado y noble que sea compatible con el alto sentido del vivir. Tú, modesto labrador ; tú, pobre pastorcillo ; tú insignificante herrero o carpintero de aldea, puedes sentirte grande si aplicas tu entendimiento en hacer más bella y hermosa tu tarea. Tú, por modesto que sea tu oficio, puedes contribuir a hacer más grata la vida del poblado, si al vivir, elevas constantemente tu pensamiento al cielo. Campesino : ¡Ennoblece tu vida y embellece tu pequeña aldea, para que todo el mundo pueda ser feliz! ». Traduction : Stéfanie Malaussa, doctorante en linguistique

Les problèmes sociaux qui se succèdent ont ralenti le déroulement des programmes sur la scolarisation. La population scolaire fait face à une série des situations politiques et religieuses qui se sont manifestés ralentissant les pratiques éducatives.Néanmoins, le discours de l’État, permettant la représentation dans l’école de son idéologie politique, évolue même face aux conflits sociaux. En effet, le discours sur le modèle démocratique est confirmé grâce à un fort intérêt de l’opinion publique et des intellectuels de participer au renouveau national qui continuaient à regarder des bons yeux la politique culturelle. Les débats des intellectuels dans l’ensemble de la fédération étaient soit pris en compte par le parti politique, ou bien ignorés si les répercussions ne représentaient pas un risque politique.

En conséquence de négociations et accords politiques avec les forces ecclésiastiques qui ont donné la fin à la guerre Cristera, le rétablissement de l’ordre s’est mis en place. Les masses des pauvres principalement au milieu rural étaient systématiquement confrontés à ce moment par les nouvelles politiques éducatives et par les croyances religieuses ce qui laissait croire à cette refondation de justice sociale du fait de la nouvelle pacification.

Une cohésion sociale est alors identifiée avec une culture populaire orientant les réflexions philosophiques pour ensuite préparer le processus de socialisation/civilisation qui serait mené par les programmes pédagogiques nationaux. Danilo Martucelli et Anne Barrière rappellent que « l’école est toujours responsable de la formation des citoyens, (…) [et] d’assurer la formation morale et civique du citoyen » (1998 : 651-652). La vision de nation mise en place dans la morale publique à travers la pédagogie aux débuts de la SEP repose dans les travaux de Vasconcelos sur le concept d’identité nationale et sur sa vision de l’homme enracinant les nouvelles actions revendicatives. Cette vision lui a permis de construire une continuité de son idéale parmi la classe intellectuel et politique permettant la consolidation d’un discours hégémonique sur le rapport entre l’individu et la nation à partir d’une cosmovision raciale et ouverte à l’éducation de l’âme. Au milieu rural, les fondements de cette représentation sont lisibles dans les pratiques éducatives menées par les misioneros.

Pourtant, en ce qui concerne le milieu urbain et ses élites intellectuelles, le triomphe de l’individualisme est la cause de multiples inégalités sociales qui restent prégnantes dans la société. Dans le cas du Mexique, le mérite scolaire établi par la mise en place des pratiques éducatives se construisent autour d’une structure sociale caractérisée par la combinaison de deux types de solidarité (ou formes d’égalité), de deux temps culturels (ou processus de civilisation) et de deux mondes sociaux (les nécessités et besoins pratiques) entre le milieu rural et l’élite dominante. Comme le souligne Murguenza, la citoyenneté est un problème de

rationalité pratique (1977 : 164) permettant nous rappeler du paradoxe du discours de Cárdenas en 1940 : un individu indien est un Indien, avant d’être un individu que l’Etat doit mexicaniser. La citoyenneté dénote une axiologie indéniable pour le développement démocratique d’un peuple ; toutefois, c’est dans la raison pratique, comprise comme l’action des moyens du monde de la vie (Schutz, 2007) ou la phénoménologie des acteurs (leurs expériences sociales, leur historiographie identitaire, leurs vision du monde, leur rapport à l’autre et la nature, etc.,) que réside la genèse du problème.

En résumé la tension philosophico-pédagogique du pouvoir politique, l’analphabétisme toujours présent et les conflits sociaux menés par l’église et par les syndicats118, se dévoilent comme les obstacles les plus importants pour institutionnaliser une autre éducation119. À ces problèmes, dont font partie les inégalités scolaires, s’ajoutent les difficultés économiques et les conflits internes de la société. Pourtant, la nation a conçu un appareil idéologique pouvant répondre aux « sentiments d’injustice » rencontrés parmi les différentes couches de la population. Cela a légitimé l’édification d’une politique culturelle permettant d’introduire un discours idéologique qui résoudrait, par une nouvelle « vision nationale », les grands problèmes sociaux de la société. Cet appareil réside en partie dans le système scolaire public, moyen de structuration d’une nouvelle culture nationale réorganisée au fur et à mesure que les changements sociaux s’instauraient dans la société. L’école a été présente dans la plupart des changements de la société. Elle a eu pour responsabilité d’organiser les villages et de donner du sens à la politique publique de l’Etat, d’organiser les fêtes publiques qui permettaient la cohésion et de se confronter aux problèmes de la société en général. Pour continuer avec cette argumentation il est nécessaire d’analyser les soubassements juridiques de la SEP, son organisation et les formes que l’idéologie politique véhiculée par les intellectuels a introduites et rationalisées en vue de l’institutionnalisation de l’éducation nationale.

Dans le but de comprendre comment l’éducation au Mexique, à travers une universalisation des principes et vertus sur celle-ci, a réussi à rendre « stable » un système scolaire inégalitaire, il est nécessaire d’analyser l’historiographie juridique, c’est-à-dire, la structure social de base (Rawls, 1971). C’est ce à quoi nous nous employons dans les pages qui suivent.