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1,21-DEBATS INTERNES CHEZ LES DARWINIENS ET LES POST DARWINIENS

L'EVOLUTIONNISME EN OCCIDENT A L'EPOQUE DE LA CONQUETE COLONIALE

1,21-DEBATS INTERNES CHEZ LES DARWINIENS ET LES POST DARWINIENS

1,211 - Obstacles épistémologiques : variation, hérédité, sélection

Ainsi que l'a souligné Jean Gayon, auteur d'une remarquable synthèse récente sur l'histoire du concept de sélection naturelle, que nous allons abondamment citer dans les pages qui suivent : "Tout historien dont l'intention serait d'embrasser la totalité des manifestations historiques du darwinisme devrait d'abord faire face à l'extrême hétérogénéité de celles-ci. Cette remarque, évidente pour les idéologies sociales qui se sont prévalues du qualificatif de "darwinien", l'est aussi pour la théorie proprement biologique de l'évolution"87.

Ce que Darwin a lui-même défini comme "la théorie de la descendance par la variation et la sélection naturelle" a pour hypothèse centrale la sélection dans ses relations avec l'hérédité. Elle dépend donc, pour sa cohérence interne, de la conception de l'hérédité qui lui est associée. La difficulté majeure de l'entreprise est qu'au XIXe on n'avait pas de conception assise des processus héréditaires; deux hypothèses principales coexistaient :

- celle de l'hérédité par mélange, à laquelle souscrivait Darwin, hypothèse en concordance avec le constat que souvent les enfants manifestent des caractéristiques intermédiaires entre les caractères du père et les caractères de la mère. Elle envisageait que les particules héréditaires soient présentes dans tout le corps de l'individu et transmises à l'oeuf fécondé, mélangées à celles apportées par l'autre géniteur à la manière dont l'eau se mélange au vin.

87GAYON J. Darwin et l'après-Darwin. une histoire de l'hypothèse de sélection naturelle. Ed.

87 - La seconde théorie supposait une indépendance de ces particules à l'égard du soma et leur transmission aléatoire mais intégrale à la descendance (ce qui sera l'hypothèse avérée après Mendel). Cette dernière rendait compte de la différence existant entre les rejetons d'un même couple de géniteurs.

Les incertitudes pesant sur les processus héréditaires rendaient impossible une clarification de la nature des variations individuelles envisagées par Darwin. Or celles-ci constituent, dans son hypothèse, le matériel sur lequel travaille la sélection naturelle. Sur ce sujet comme sur celui de l'hérédité, les choix théoriques opérés par Darwin n'étant pas étayés par des preuves scientifiques, soumettaient l'hypothèse de la sélection naturelle à la menace permanente d'une réfutation. Ainsi que l'a exprimé Jean Gayon, "la

sélection darwinienne n'était pas en effet compatible avec toutes les hypothèses concevables sur l'hérédité, pire : elle était peut-être incompatible avec la représentation que Darwin avait lui-même de la variation héréditaire"88, aussi

entra-t-elle en crise à peine était-elle née.

Des objections furent opposées à Darwin de son vivant, qui l'amenèrent à réviser certaines positions, notamment à formuler la théorie de la pangenèse. Devant la difficulté de résoudre ces problèmes, la théorie connut une "éclipse" au tournant du siècle pour renaître par la suite du travail conjugué des biométriciens, des biologistes et des généticiens. Dans le contenu des débats on reconnaît bon nombre de thèmes caractéristiques de la génétique des populations au XXe. C'est pourquoi il importe d'en rendre compte ici.

88 1,211-A) Les objections de Jenkin89

Dans les dernières éditions de l'oeuvre (1869, 1872), Darwin mention- nait l'une des objections de l'ingénieur Fleeming Jenkinet faisait référence à son "article compétent et remarquable" publié dans la North British Review (1867). Ces objections auraient conduit Darwin à concevoir la nécessité de décrire la théorie d'une autre manière.

A1) Le problème de la réversion

Les critiques de Jenkin n'ont pas porté sur l'existence de la variation ni sur celle d'une sélection, mais les effets possibles de ces "mécanismes". Fidèle en cela à une certaine conception fixiste du XIXe, Jenkin pensait que la variation des espèces était contenue strictement dans des limites infranchissables. L'espèce était conçue comme un "type" défini par des caractères certes variables, mais à l'intérieur d'une "sphère de variation" dont le type moyen constitue le centre. La sélection dans cette perspective, si elle oeuvrait à l'intérieur de la sphère, serait impuissante à déplacer les moyennes, c'est-à-dire à modifier le type. Donc il n'y aurait pas de descendance d'une espèce à l'autre.

Cette conception, qui suppose une action normalisante de l'hérédité, s'appuyait sur les faits constatés par les éleveurs dans la pratique de la sélection artificielle : plus on sélectionne (plus on approche de la surface de la “ sphère de variation ”), plus faible est la probabilité que de nouvelles variations individuelles éloignent davantage du centre, tandis que la probabilité de variations rétrogrades s'accroît90. En somme, Jenkin mettait en question le

postulat selon lequel une fois que la sélection a agi, la variabilité continue de se

89Nous empruntons intégralement les analyses de cette partie à Jean GAYON, idem, chapitre

III: "Les objections de Fleeming Jenkin et le dilemme darwinien", pp.95-112.

89 manifester comme avant dans toutes les directions : tout se passe comme si l'hérédité manifestait une résistance à la variabilité accrue, par une tendance très forte à retourner aux moyennes définissant le type. Ce phénomène, appelé réversion, était connu de Darwin. Mais il n'y voyait pas un obstacle majeur du moment que l'ensemble des caractères est soumis au contrôle de la sélection. Sa conception de l’hérédité était du reste fort différente de celle qui supposait l'existence de "sphères" de variation, impliquant qu'un individu hérite de la totalité de ses ancêtres. Pour Darwin l'hérédité était une relation limitée aux géniteurs directs et à leur progéniture, l'ancienneté du caractère étant sans rapport avec sa capacité déterminante. Du reste Jenkin avait parfaitement compris cette divergence de vue :

“ Il y a en vérité une perspective dans laquelle il semblerait naturel de croire que la tendance à la réversion puisse diminuer. Si les particularités de structure d’un animal étaient simplement déterminées par l’hérédité, (...) et si l’enfant doit plus vraisemblablement ressembler à son père qu’à son grand- père, à son grand-père qu’à son arrière grand-père, etc..., alors les chances qu’un animal fasse retour à l’apparence d’un ancêtre éloigné de mille générations seront bien minces. C’est là sans doute la perspective de Darwin. Elle dépend du postulat qu’il n’y a ni animal typique ou moyen, ni sphère de variation, avec centre et limites, et l’on ne peut en faire usage pour prouver le postulat. ”91

Il s’agissait d'une question d'importance, qu'on peut formuler ainsi : la sélection peut-elle s'affranchir de l'action normalisante de la réversion pour créer de nouvelles normes ? En fait la réponse ne semble pas avoir constitué pour Darwin une difficulté dans la mesure où elle ne traduisait qu'une divergence de vues. Nous ne la citons que pour mémoire car le problème qu’elle pose sera en revanche au centre des préoccupations de Galton (ci- après).

90 A2) La nature de la variation : continue ou accidentelle,

unique ou distribuée ?

Darwin entendait par "variations individuelles", des variations légères et multiples, mais multidirectionnelles, la sélection retenant les variations allant continûment dans le même sens d'adaptation. Jenkin demanda que soient précisées la distribution et l'ampleur de telles variations : s'agissait-il d'écarts à la moyenne, auquel cas la distribution des variations s'organiserait selon une courbe gaussienne (Jenkin avait lu Quételet), ou de variations "anormales" ou accidentelles (du type de celles constatées chez les "monstres" auxquels s'intéresse beaucoup le XIXe) ?

Si la sélection portait sur des variations continues, ce qui aurait bien correspondu à la conception darwinienne de l’évolution graduelle entre les espèces, alors il fallait admettre qu'elle s'applique à tous les individus, puisque tout caractère individuel n'est qu'un degré dans une évolution continue92.

L'implication est celle-ci : si par exemple il est avantageux pour un lièvre d'avoir des pattes plus longues, alors ce sont virtuellement tous les lièvres qui sont avantagés par rapport à d'autres car il existe toujours plus petit que soi.

Si au contraire par variations individuelles il fallait entendre des variations accidentelles, uniques ou faiblement répandues dans une population, les caractères variants risquaient purement et simplement de se perdre dans l'énorme masse des individus qui ne se reproduisent pas :

“ Un million de créatures naissent ; dix-mille survivent et se reproduisent. Une sur un million a deux fois plus de chances de survivre que n’importe quelle autre. Les chances sont alors de cinquante contre une que les individus supérieurs figurent dans le 1 %93 des individus qui survivent. Sans aucun

doute, les chances sont deux fois plus grandes que pour tout autre individu,

92GAYON J. ibid., p.101. Darwin n'ayant pas de culture quantitative, ne raisonnait pas en

terme de population. A plusieurs reprises il écrivit à Galton pour lui demander des précisions sur certains points de la théorie des probabilités.

93Le texte comporte une correction faite et signalée par Jean Gayon à cet endroit sur le 1 %. Le

texte original est : “ The chances are fifty to one against the gifted individuals being one of

the hundred survivors ”, ce qui contiendrait en effet une erreur de calcul si l’on s’en tient aux

91

mais ceci n’empêche pas qu’elles soient énormément en faveur de quelque individu moyen ”94.

Et même si l'individu se reproduit :

« Il [l’individu avantagé95] se reproduira et aura, en moyenne, 100 enfants ; or cette progéniture sera, en moyenne, intermédiaire entre l’individu moyen et la variation singulière. Les chances en faveur de cette progéniture seront de 1 ½ contre 1, par comparaison avec l’individu moyen (...) A moins que ces individus ne se reproduisent entre eux, événement fort improbable, leur propre progéniture se rapprochera un peu plus de l’individu moyen. Elle sera de 150 avec une supériorité de 1 ¼ contre 1. Dans ces conditions il est probable qu’au total deux survivront, et donneront 200 rejetons96, avec une supériorité

de 1 huitième. Un peu plus de deux parmi ceux-ci survivront ; mais la supériorité faiblit encore, et après un petit nombre de générations, on ne l’observerait plus du tout, et elle ne compterait pas davantage dans la lutte pour la vie que l’un quelconque des nombreux avantages qui affectent les organes ordinaires.»

Dans ces réflexions de Jenkin, les objections relevant de l'hypothèse des variations graduelles largement distribuées ne constituaient qu'une invitation à réfléchir sur une définition plus rigoureuse de la variation et à ses implications en terme de population. En revanche, les objections formulées à l'encontre des faits relatifs au destin des variations isolées ébranlèrent Darwin, qui de son propre aveu, ne s'était jamais rendu compte du peu de chances que ces variations isolées avaient de se perpétuer.

A3) Nature des particules héréditaires.

Jenkin posait encore cette question : sous quelle hypothèse raisonne-t- on quant au mode de transmission héréditaire ? Admet-on que la progéniture est intermédiaire entre les parents ou que la particularité héritée est totalement transmise ? Dans l’hypothèse d’une hérédité par mélange et dans le cas d’une population vaste où les unions se font au hasard, la particularité héritée subit la loi du plus grand nombre, en somme se dilue davantage à chaque génération pour disparaître avec et malgré son avantage sélectif. Le seul moyen d’asseoir

94extrait de GAYON J. ibid. p. 104.

95(le texte entre crochet est à l’initiative de J. Gayon).

96La citation est extraite de GAYON J. ibid, p.104, mais nous avons remplacé par le mot

“ rejetons ” le mot “ survivants ” du texte prélevé, où s’est sans doute glissée une erreur, soit dans le texte original soit dans la traduction ou à l’impression.

92 l’hypothèse de la sélection aurait été de concevoir une hérédité par laquelle un caractère héréditaire est transmis intégralement à la descendance avec prépondérance, ou alors de supposer que les porteurs de la particularité se croisent entre eux, ce qui correspond à la pratique de la sélection artificielle, mais pas aux faits de nature.

Jenkin posait là, par petites touches, des problèmes que les darwiniens ont eu à résoudre, au long des décennies suivantes.

1,211-B) Francis Galton et l'eugénique

Nous aurions pu aborder le thème de l'eugénisme à toutes les divisions de notre travail puisque cette "école" de pensée rassemble et irrigue tous les thèmes abordés dans cette première partie : développement des sciences au XVIIIe et XIXe (anthropologie, physique et mathématique), darwinisme et enfin idéologies. Ce chapitre surtout, relatif à l'évolutionnisme dans les idéologies (voir plus loin), pourrait de façon très cohérente inclure cette présentation de ce qui fut incontestablement une idéologie scientifique greffée sur le darwinisme, son prolongement dans le champ politique et social.

Pourtant ce prolongement, en ampleur comme en durée, de l'eugénisme en politique, ne peut pas se mettre au même niveau que les idéologies que nous présenterons au chapitre suivant, qui la dépassent tout en l'intégrant. Nous avons préféré, dans notre chapitre sur les idéologies, réserver cette place à ce que nous avons nommé "racisme", qui sous cette acception est bien sûr davantage qu'une attitude de rejet envers un Autre physiquement différent, mais une vraie construction intellectuelle exacerbant et légitimant cette attitude97. Le "racisme" ainsi défini s'appuie sur, et amplifie, les idées 97La définition qui est celle de l’Unesco et s’est donc imposée comme telle à de nombreux

intellectuels et universitaires, est celle qu’a proposée Albert Memmi qu’il rappelle dans son ouvrage (Le racisme, 2è édition, 1994) : « Le racisme est la valorisation, généralisée et

définitive, de différences réelles ou imaginaires, au profit de l’accusateur et au détriment de sa victime, afin de légitimer une agression ».

93 eugénistes mais ne se résume pas à elles. Aussi dans les présentes pages on s'intéressera seulement aux débats théoriques visant à rendre compte des faits d'hérédité : la spécificité de l'eugénisme est que, au contraire des idéologies politiques qui ont englobé les apports de différentes sciences au XIXe, elle a développé ses propres arguments scientifiques en une nouvelle branche des sciences nommée par Galton lui-même en 1883 eugénique98. C'est de ceci qu'il

nous importe de traiter ici, en ce que cette entreprise initie les sources, les thèmes, et le champ d'application de la biométrie puis de la génétique des populations. En effet, si l'on ne parle plus guère d'eugénisme en Europe après l'issue du deuxième conflit mondial, (donc chronologiquement avant la période où s'insère le corpus d'articles qui constitue la matière de cette thèse), l'eugénique en revanche trouve des prolongements jusqu'à nos jours dans les sciences de l'Homme et de la Vie qui font le coeur de notre sujet. C'est pourquoi ce moment de notre exposé, entre sciences et idéologies et sciences génétiques, nous paraît le lieu naturel de son inscription.

Autant Darwin est un personnage controversé, autant son cousin Francis Galton a fait longtemps l'objet d'une remarquable unanimité dans le sens de la condamnation, tant de la part des détracteurs de l'eugénisme, pour qui ses théories trouvent un aboutissement inéluctable dans les camps de concentration nazis, que de la part des partisans d'un eugénisme moderne nettoyé des conceptions désavouées de son fondateur. Le recul chronologique a permis à des ouvrages plus récents d'aborder le personnage et ses travaux avec davantage de sérénité. Ils ont fait l'objet de biographies, de commentaires, de critiques scientifiques et philosophiques, et pour finir historiques. Ici on résumera les quelques faits qui contribuent à éclairer le cadre conceptuel dans

98Eugenics : néologisme introduit par Galton dans Inquieries into Human Faculty and its Development (1883) pour désigner la "science de l'amélioration des lignées". Il distinguait

l'eugénique, science de l'hérédité, domaine de l'investigation scientifique et technique, et l'eugénisme, mouvement social et politique qui s'organisa en clubs et sociétés populaires pour oeuvrer à la diffusion des résultats et à la mise en oeuvre de politiques eugénistes.

94 lequel ont travaillé les darwiniens et leurs adversaires pendant six ou sept décennies. Pour le reste on se référera à la bibliographie99.

99Se référer à J. GAYON, opus cité pp. 138-155. Lui même renvoie aux travaux de PROVINE

W.B. The Origin of Theoretical Population Genetics, 1971 ; COWAN R.S. Sir Francis

Galton and the Continuity of Germplasm : a Biological Idea with Political Roots, 1968 ; Francis Galton's Contributions to Genetics, 1972 ; Francis Galton's Statistical Ideas : the Influence of Eugenics, 1972 ; Nature and Nurture, 1977 ; FROGATT P. & NEVIN N.C.

"The Law of Ancestral Heredity" and the Mendelian-Ancestrian Controversy in England,

1899-1906, 1971 ; MACKENZIE D.A. Statistics in Britain 1865-1930, 1981 ; NORTON

B.J. Theories of Evolution of the Biometrics School, 1971, Chp.3) ; The Biometric Defense of

Darwinism, 1973 ; Karl Pearson and the Galtonian Tradition : Studies in the Rise of Quantitative Social Biology, 1978 ; OLBY R.C. Origins of Mendelism, 1966, 1985 ;

PIQUEMAL J. Quelques distinctions à propos de l'informe et à propos de sa

mathématisation, 1972 ; SENTIS Ph. La naissance de la génétique au début du 20e siècle,

1970 ; la thèse non publiée de LENAY C. Enquête sur le hasard dans les grandes théories

95 B1) L'hérédité selon Galton

Galton avait déjà utilisé dans son premier livre, Hereditary Genius (1869), les travaux de Gauss et Laplace sur les probabilités et ceux de Quételet100 sur les applications de ces probabilités au champ social. L'objet de Hereditary Genius était d'établir que les qualités intellectuelles, comme les

qualités physiques, sont héréditaires. Galton crut avoir constaté que les facultés intellectuelles se répartissaient dans la population selon la distribution des écarts à la moyenne (courbe de Gauss) et en vint à ce raisonnement : si un caractère physique jugé héréditaire, comme la taille, se répartit suivant la loi des déviations par rapport à la moyenne, alors cette loi, en retour, pourra servir d'indice de l'origine héréditaire d'un caractère propre à une population. Il y avait là un "saut méthodologique" au-dessus d'une faille comblée, sinon par l'idéologie, du moins par l'intime conviction de Galton !

Ce statut de preuve (d'une réalité biologique) accordé aux statistiques fonde et légitime l'entreprise biométrique ; celle-ci est destinée 1) au repérage des caractères héréditaires, 2) à devenir l'outil privilégié de sélection des individus dans une perspective de contrôle eugénique de la reproduction des citoyens.

Il restait à expliquer la répartition en cloche des caractères héréditaires, par une théorie biologique de l'hérédité et de la reproduction capable d'en rendre compte d'une manière cohérente. L'idée générale commune à nombre de biologistes du XIXe, consistait à poser la continuité matérielle entre les générations comme support de l'hérédité. Darwin avait publié dans The

100Quételet entendait définir un "homme type". Il se demandait si les caractères observés

(biologiques, humains) correspondent à des écarts à "une vraie moyenne". Il s'agissait de reconnaître si une moyenne arithmétique est véritablement une moyenne type de la taille humaine. Il interpréta la répartition des mesures anthropométriques autour d'une moyenne comme l'indice de l'existence d'un type imité par la nature. "La possibilité de présenter cette répartition des tailles dans une population donnée sous forme d'une courbe en cloche lui permet d'affirmer la présence d'une loi de la nature". in THOMAS J.P. Les fondements de

96

Variation of Animals and Plants under Domestication (1868), en partie

semble-t-il en réponse aux objections de Jenkin101, une théorie appelée

pangenèse destinée à rendre compte des faits d'hérédité connus et de spéculer sur les causes de la variation. L'hypothèse était que, "à strictement parler, ce ne

sont pas les éléments reproducteurs, ni les bourgeons qui engendrent les nouveaux organismes, mais les cellules ou les unités mêmes du corps entier"102. Il y proposait d'appeler "gemmules" les unités héréditaires capables

de se multiplier et de se développer en cellules, tissus et organes. Celles-ci seraient émises par les cellules du corps dont elles retiendraient les caractères protoplasmiques, et circuleraient dans l'ensemble du corps, se multiplieraient par division (modèle de la reproduction non sexuée), puis s'agrégeraient dans