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De réquisits pour obtenir un bon rapport médical

Pierre-Andre Fauchère *

V. De réquisits pour obtenir un bon rapport médical

Le rôle de l’expert médical est de rendre un rapport médical ayant pleine valeur probante. Si la jurisprudence en la matière a donné quelques règles de base, le médecin expert veut aussi rappeler aux mandants l’importance des points mentionnés dans l’exposé ci-après et qui n’a rien d’exhaustif.

L’expert doit recevoir un mandat précis, explicite et compréhensible. Une ou deux phrases cernant exactement la problématique est une bonne façon de procéder.

Le questionnaire doit rester de longueur raisonnable et ne pas être un car-can limitant les possibilités d’appréciation de l’expert.

Le dossier est un élément central de l’appréciation, sachant qu’il fournit l’histoire médicale de l’assuré et donne des éléments objectifs sur ses anté-cédents et le cours de l’affection en cause. L’expert a droit à un dossier bien préparé. Les pièces devraient être classées par ordre chronologique et les doublons supprimés. Les documents d’imagerie et les rapports d’examens complémentaires doivent être joints. Le dossier doit être remis au complet. Le fait de retirer des pièces « pour ne pas influencer l’expert », est pour le soussi-gné un procédé inadmissible. Il pourrait invalider de facto la valeur probante du rapport médical puisque le praticien n’a pas bénéficié de tous les éléments d’appréciation.

Des pièces non médicales peuvent s’avérer utiles comme la description du poste de travail, les rapports d’enquête économique, les appréciations de l’employeur et certaines pièces juridiques (rapports de police, jugements). La question de fournir ou de ne pas fournir à l’expert les dénonciations ano-nymes, certains rapports officiels (inspection du travail) et des comptes- rendus d’investigateurs privés soulève des problèmes difficiles qu’il convient d’apprécier de cas en cas.

Les réquisits préalables à une bonne expertise passent aussi par la col-laboration de l’assuré. L’expert peut se montrer compréhensif face à des sujets parfois excédés et révoltés et présentant en sus des troubles de personnalité.

Il n’a pas à accepter les incivilités voire les menaces.

A ce sujet, il est important de rappeler que, quelle que soit la spécialité médicale, la médecine d’expertise dispose d’une batterie de tests. Ceux-ci sont toujours utiles lorsque la personne en cause collabore correctement. Les tests perdent le plus souvent leur validité, notamment dans le domaine du fonctionnement intellectuel, des performances de l’appareil locomoteur et de l’évaluation de certains troubles psychiques lorsque la personne en cause n’est pas collaborante.

L’expert doit posséder des compétences élevées dans son domaine de spé-cialisation médicale. Contrairement à une croyance répandue chez les méde-cins et dans le monde médical universitaire en particulier, il n’est pas pos-sible de fournir une bonne expertise médicale sans avoir des connaissances juridiques propédeutiques du droit des assurances. L’expert médical doit être bien au fait du contexte juridique de son intervention et des concepts qui sous-tendent les questions qui lui sont posées.

Les compétences des experts médicaux passent par une formation préa-lable. La Suisse romande n’offrait jusqu’ici que peu de possibilités d’acquérir des connaissances de base dans le domaine des assurances. Les facultés de médecine peinent à mettre en place de solides cursus ad hoc.

Des associations tendent dès lors à combler ce vide dont la SIM (swiss insurance medecine)6 et l’ARPEM (Association romande des praticiens en ex-pertise médicale)7. Ces associations axent évidemment leur formation dans le domaine de l’assurance invalidité, de la loi sur l’assurance-accident et des problèmes d’indemnités journalières en cas de maladie, compte tenu de la demande.

Il n’y a que peu ou pas de formation médicale pour le domaine de la responsabilité civile, sachant que les expertises médicales en responsabilité civile ne représentent que 1% des mandats d’expertises pour les assurances en Suisse. Les experts médicaux en sont réduits à se former sur le tas.

VI. Conclusion

En conclusion, l’expert médical doit posséder des qualités comme l’aisance rédactionnelle et la facilité de synthèse. Il doit savoir expliquer, argumenter, convaincre et s’exprimer de façon claire et précise. Il doit être neutre et impar-tial et ne favoriser ni l’assurance ni l’assuré.

L’expert doit être à même de faire valoir la doctrine médicale commu-nément admise dans sa spécialité. Il devrait idéalement jouir d’une certaine autorité scientifique. Il doit aussi avoir suivi une formation spécifique en droit des assurances. Il doit posséder de solides connaissances juridiques dans son champ d’activité et suivre l’évolution de la jurisprudence en la ma-tière. Comme l’a écrit J. Meine8, on doit constater que « Aussi incontestée que

6 www.swiss-insurance-medicine.ch/index.php?UserID=2.

7 www.arpem.ch/www.arpem.ch/Accueil.html.

8 Meine J., L’expert et l’expertise – Critères de validité de l’expertise médicale in L’expertise médi-cale. De la décision à propos de quelques diagnostics difficiles, Volume 2 Ouvrage collectif sous la direction de P. Rosatti, Genève (Medecine et Hygiène) 2002, 1-35.

puisse être la compétence clinique de certains chefs de services et spécialistes réputés, leurs conclusions ne seront applicables que si elles tiennent compte du droit des assurances ».

En conclusion, le rôle de l’expert médical est difficile et il n’est par consé-quent pas possible de s’improviser expert.

VII. Bibliographie

American psychiatric association. DSM-IV-TR. Manuel diagnostique et sta-tistique des troubles mentaux, Paris (Masson) 2003.

Bauby Jean-Dominique, Le scaphandre et le papillon, Paris (Robert Laffont) 2007.

Fauchère Pierre-André, Douleur somatoforme, Genève (Médecine et Hygiène) 2007.

Meine J, L’expert et l’expertise – Critères de validité de l’expertise médicale in L’expertise médicale. De la décision à propos de quelques diagnostics difficiles, Volume 2 Ouvrage collectif sous la direction de P. Rosatti, Genève (Mé-decine et Hygiène) 2002.

Organisation mondiale de la santé. CIM-10/ICD-10. Classification interna-tionale des troubles mentaux et des troubles du comportement. Critères diagnos-tiques pour la recherche, Paris (Masson) 1994.

Wade JE, Sherbourne CD, The MOS 36-item short-form health survey (SF-36), (Medical Care) 1992.

Conclusions