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POINTS DE REPERES THEORIQUES ET METHODOLOGIQUES D’UNE DEMARCHE HISTORICO – DESCRIPTIVE

C. Saraceno (1999) parle de société locale lorsqu’on peut identifier des constellations relativement stables dans le temps d’acteurs, de processus, de cultures sociales et

1.2.2 Une démarche historiographique

Une démarche historiographique qui amène un questionnement sur la connaissance historique.

Le concept d’historiographie, tel que présenté par Paul Veyne dans son livre « Comment on écrit l’histoire » précise que l’historien avec sa pensée, ses concepts, découpe le passé, où tout événement est digne d’histoire, en processus intelligibles ou « intrigues ».

A la philosophie de l’objet, de l’instrument pris comme fin ou comme cause, il substitue une philosophie de la relation et prend le problème par la pratique et le discours. Cette pratique lance les objectivations qui lui correspondent et elle s’ancre sur les réalités du moment.

« Bref dit-il, à une certaine époque, l’ensemble des pratiques engendre, sur tel point matériel un visage historique singulier ».

Paul Veyne cherche ainsi à démonter que les idéologies ne sont pas explicatives des transformations.

Avec la seule explication idéologique, on pourrait ainsi attribuer à l’influence chrétienne des régions Ouest les pratiques plus coopératives de leurs habitants. En réalité cette pratique est à associer à la mise en œuvre de nombreux projets et donc de capacités de coopération que des patronages, associations laïques et sportives, plus nombreuses que sur d’autres territoires, ont favorisé.

« Les historiens racontent des évènements vrais qui ont l’homme pour acteur ; l’histoire est un roman vrai » dit aussi Paul Veyne dans son propos introductif.

Dans cette orientation nous avons scénarisé sur 20 ans des histoires d’acteurs reliées à l’industrialisation d’un territoire. Nous avons exploré quels moteurs ont fait avancer ces histoires et nous avons découvert les figures successives du territoire à partir d’un découpage du passé en différentes séquences animées par des « entreprenants ».

Henri-Irénée Marrou dans son maître livre « De la connaissance historique », nous précise le travail de l’historien, de cette connaissance de l’homme par l’homme, de la question de la vérité et des limites de cette vérité et surtout des conditions de son élaboration.

Nous avons construit une fiche de lecture des quelques points qu’il aborde. Cette fiche précise les clés ou tout au moins quelques principes fondamentaux de cette démarche historiographique qui viennent corroborer de façon étonnante notre propre démarche de recherche. (connaissance) qu’elle se montre capable d’élaborer et non par l’utopie, l’histoire imaginaire ou le roman historique, la tradition populaire ou l’image d’Epinal à objectif pédagogique. Le passé humain, c’est le passé de l’homme en tant qu’homme, ses œuvres, ses créations matérielles et spirituelles, ses pensées, ses sentiments.

Qu’il s’agisse d’actions, de pensées, de sentiments, ils ont porté leurs fruits, entraîné des conséquences, déployé leurs virtualités et nous ne pouvons pas séparer la connaissance que nous en avons de ses séquelles.

Toute étude historique doit commencer par une introduction qui montre les antécédents du phénomène étudié et par un épilogue qui cherche à répondre à la question qu’arrive-t-il

ensuite.

Enfin un historien cherche à en savoir plus « long » qu’aucun des contemporains de l’époque étudiée en a su, ou a pu en savoir. La connaissance que l’historien veut élaborer vise à une intelligibilité qui dépasse la simple chronique locale ou régionale par exemple.

L’unique tâche de l’historien, plus que d’établir des faits, est de les comprendre.

L’histoire est inséparable de l’historien

A l’intérieur de son système de pensée, l’historien devra savoir poser le problème historique de la manière la plus riche, la plus féconde ; il devra savoir quelle question il aura à poser à ce passé. On suivra donc l’historien dans ses démarches sur la voie qui le conduira à la connaissance : l’histoire sera ce qu’il a réussi à élaborer.

L’histoire se fait avec des documents

Nous ne pouvons pas atteindre le passé directement, sauf s’il reste encore des témoins à interviewer.

Nous avons à le décrypter à travers les traces, intelligibles pour nous, que ce passé a laissées derrière lui dans la mesure où ces traces ont subsisté, où nous les avons retrouvées, et où nous sommes capables de les interpréter.

Les conditions et les moyens de la compréhension

L’historien nous apparaît comme l’homme qui sait sortir de soi pour s’avancer à la rencontre d’autrui. On peut donner un nom à cette vertu : elle s’appelle la sympathie.

Elle est à l’inverse des préconisations des positivistes qui voyaient dans l’esprit critique la vertu première de l’historien.

Le sens du réel me permet de découvrir même les limites des acteurs que je découvre et admire pour leur action, parce que ce contact brutal avec l’existant me confirme sa réalité, son altérité essentielle. Je ne cherche pas l’image idéale ou l’idéal type. L’histoire est rencontre d’autrui, elle est souvent l’expérience d’une grandeur qui nous terrasse, car les hommes d’autrefois ou d’hier qu’elle nous révèle étaient souvent plus grands que nous.

Du document au passé

Le chercheur commence à se poser une question, puis il constitue un dossier de documents y afférents que l’analyse préliminaire conduit à affecter chacun de sa note de crédibilité ; au contact des données, mais aussi des rencontres avec des acteurs de la période étudiée, la question première prend d’autres formes. L’hypothèse est reprise, corrigée complétée et ainsi peu à peu naît et grandit la connaissance historique.

Est-ce la un processus si différent de celui par lequel dans la vie quotidienne, dans l’expérience vécue du présent, on arrive à connaître, comprendre, rencontrer autrui. En est-il autrement de l’histoire ? Le commerce avec les documents nous permet finalement de connaître l’homme du passé, comme aujourd’hui l’ami connaît ses amis.

Il faut aussi savoir limiter à temps notre curiosité, exercer nos efforts dans les conditions et les bornes où ils peuvent réellement se montrer féconds.

L’usage du concept

Nous avons introduit le chapitre avec ces notions de concepts.

Le problème pour nous est de déterminer la validité de ces concepts, leur adaptation au réel, leur vérité d’où dépend, en définitive, celle de l’histoire ou de la démonstration élaborée. Les concepts idéologiques qui substituent au réel un jeu d’abstractions, amènent l’historien à rechercher dans le passé quelque chose qui ne s’y trouve pas. L’idéaltypus tend à être un stéréotype, un préjugé qui menace d’émousser la curiosité de l’historien en quête d’un contact toujours plus direct et plus intime avec le concret.

Enfin nous remarquons que la division de l’histoire en périodes dépend de la perspective choisie pour l’étudier.

L’explication et ses limites

En cherchant à appréhender son objet de façon aussi précise et complète que possible, l’histoire ne cesse pas de se préoccuper en même temps de se faire comprendre, d’en fournir un certain sens et dans certaines limites, une explication.

Plus l’enquête s’approfondit, plus se poursuit notre effort de compréhension, plus l’inépuisable réalité historique révèle posséder en son sein de liens structuraux, de rapports d’interdépendance, de coordinations entre les diverses étapes de chacun de ses développements, si bien que ce réseau de relations sur lequel nous comptions pour embrasser plus commodément le réel apparaît bientôt lui-même comme aussi complexe, aussi embrouillé, aussi confus que le réel informe qu’il s’agissait d’éclaircir…