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Chapitre I : Etat des lieux des théories classiques et mise au point d’une

I.3. La démarche adoptée pour la recherche

Pour cela, le chapitre II présente deux contributions renouvelant ce que nous avons précédemment appelé « les théories classiques » : l'article de Lavieu (2006), qui s'affronte précisément aux difficultés que nous avons soulevées, et propose une reconfiguration terminologique et taxinomique distinguant entre « constituants » (où se rangent les « compléments » et les « ajouts ») et « incidents » (notion définie par Marandin 1999, « Grammaire de l'incidence », disponible à l'adresse http://www.llf.cnrs.fr/documents­ fr.php).

Dans le chapitre III sera vérifiée la fiabilité des critères ainsi proposés à partir d'un corpus élargi, contenant des exemples disponibles à l’adresse http. www.cnrtl.fr., ainsi que d’autres exemples attestés ou forgés. Ces manipulations nécessitent de faire appel à l'intuition sémantique dans l’application des tests et dans le jugement d’acceptabilité qui peut varier selon le locuteur.

En fonction des résultats obtenus, il sera possible de procéder, dans un quatrième chapitre, à un classement des compléments de verbe de la forme [GP régis par à], selon le type de constructions (morpho-syntaxiques) dans lesquelles ils figurent : nous commencerons par les structures simples où le verbe appelle un seul complément et nous aborderons ensuite la structure à complémentation double. Un premier repérage des verbes concernés s'est opéré à partir d’une liste de verbes construits avec la préposition à disponibles à l’adresse évoquée supra, à partir duquel un regroupement a été fait au regard des tests syntaxiques désormais classiques (suppression, déplacement, pronominalisation). Les résultats montrent une grande variabilité dans les rapports du verbe avec le GP, d'où le recours à d’autres tests comme celui de la paraphrase celui de la substantivation et celui de « l'adjectivation ». Progressivement, cela nous a amenée à envisager un deuxième type de classement, appuyé sur un ordre scalaire, idée inspirée par les travaux de G. Lazard

42 Cf. Leeman 2008, qui montre à partir d'un corpus attesté la difficulté d'en repérer les « compléments » à l'aide des critères en vigueur.

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(spécialement son ouvrage L’actance,1994),qui considère qu’il existe, à l’intérieur d’une relation transitive, une échelle à plusieurs degrés allant des actants les plus centraux du verbe comme l’objet, aux « actants circonstants »43 .

En l'occurrence, la relation [verbe­circonstant] est caractérisée par un degré faible et la relation [verbe­objet] par un degré fort, et il y a lieu de trouver des degrés intermédiaires pour rendre compte d’autres relations moins évidentes entre le verbe et le GP qu'il régit.

Néanmoins, nous ne suivrons pas ceux qui, tel Tesnière (1959, chapitre 48), opposent l’actant au circonstant mais plutôt Charaudeau (1992 : 386), qui parle d'« actant circonstanciel ». Pour lui (op.cit. : 380), un actant est «un être, humain ou non, qui est engagé dans une action et y joue un rôle en fonction de son rapport au processus actionnel et aux autres actants ». Le terme actant sert donc à désigner les différents participants qui sont impliqués dans l’action d’une manière active ou passive. Pour définir les actants circonstanciels, Charaudeau (op.cit. : 386) précise qu’ « en réalité, il ne s’agit pas d’actants à proprement parler. Il s’agit plutôt du cadre circonstanciel dans lequel s’inscrivent les actions ». Pour l’auteur, les composantes de ce cadre sont traitées en termes d’actants44. Nous considérerons alors comme actant tout type de complément GP impliqué dans l'action exprimée par le verbe.

Afin de donner une idée plus claire de la structure d'une phrase, la linguistique contemporaine adopte souvent des schémas qui en permettent la visualisation, tels le « stemma » de Tesnière (op. cit.) ou « l'arbre syntagmatique » introduit par Chomsky (1957 trad. 1969 : 30) sous le nom de « diagramme ». Néanmoins, ces représentations ont chacune reçu des critiques : le stemma met sur un pied d'égalité le sujet et le complément de part et d'autre du verbe, Tesnière invoquant, pour le justifier, le passage de l'actif au passif, qui voit permuter le sujet et l'objet. Pour Chomsky en revanche, le sujet entretient une relation privilégiée avec le verbe puisque tous deux s'accordent (ce qui n'est pas le cas du complément) : la phrase s'organise donc en deux constituants fondamentaux, le complément étant un appendice du verbe et non un constituant symétrique au sujet. M.

43 Etant donné qu'il s'agit de travailler sur le type de relation entre le verbe et le groupe prépositionnel introduit par la préposition à dans une relation transitive indirecte, et qu’il existe dans le discours plusieurs constituants qui sont impliqués dans cette relation, nous adopterons le terme actant, utilisé par L. Tesnière (1965) et G. Lazard (1994) qui désignent le sujet comme « premier actant » ou « prime actant » : « Le prime actant est connu dans la grammaire traditionnelle sous le nom de sujet, que nous lui conservons » et l’objet comme « second actant du verbe ». « Le second actant est connu autrefois dans la grammaire traditionnelle sous le nom de complément direct, qui a été remplacé en 1910 par celui de complément d’objet. Nous l’appellerons purement et simplement objet » (Tesnière, op. cit. : 108).Le tiers actant est « celui au bénéfice ou au détriment duquel se fait l’action » (Tesnière, op.cit. :109).

44 Les termes employés par Charaudeau (op.cit. :386) pour décrire ces composantes sont :1. le locatif, qui correspond à la composante spatiale dans laquelle se déroule l’action (il travaille à l’étranger). 2. Le situatif, qui correspond à la composante temporelle dans laquelle se développe l’action (il travaille la nuit).3. Le causatif(il a évacué les lieux à cause dela tempête). 4.Le final, qui se trouve être le but visé ou atteint par l’action (il faut manger pourvivre).

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Gross (1975 : 34 sqq.) énumère bon nombre d'arguments convaincants à l'encontre de l'arbre de Chomsky et de l'analyse qu'il recouvre, sans pour autant recourir lui­même au stemma – bien qu'il reconnaisse la pertinence du point de vue tesniérien. Nous le suivrons dans son option d'une représentation « surfaciste » (selon le terme de Leeman 2004 : 38) des énoncés, notamment dans l’analyse des structures à plusieurs actants afin de distinguer le GP correspondant au SN2 dans la structure simple et au SN3 dans la structure double. Ils peuvent être introduits ou non par la préposition à. Ces étiquettes formelles seront nos dénominations pour désigner les actants (dont le rôle est sémantique).

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Chapitre II : L’état contemporain de l'analyse :