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La délimitation des contours de l’égalité en droit des sociétés 42 Le délinéament du périmètre de l’égalité entre associés se fera à travers une démarche

La remise en cause du principe d’égalité entre associés en droit des sociétés

Section 1 La délimitation des contours de l’égalité en droit des sociétés 42 Le délinéament du périmètre de l’égalité entre associés se fera à travers une démarche

double. Dans une première phase, sera identifié son domaine d’application (§ 1). L’exercice consistera à répondre à la question de savoir si l’égalité doit être confinée aux rapports entre associés à l’intérieur d’une même société ou si elle peut s’appliquer en dehors du cadre sociétaire. Sur ce point, il existe un certain flou en doctrine. C’est donc une fois cette étape franchie, que nous nous interrogerons, dans un second temps, sur les termes entre lesquels cette égalité devra s’exercer (§ 2).

1 M. GERMAIN, art. cit., p. 189.

2 Y. de CORDT, L’égalité entre actionnaires, Préf. par Guy Horsmans, éd. Bruylant, Bruxelles, 2004, n°189, p. 251. 3 Par exemple, voir art. L 225-204 du Code commerce.

4 Voir par exemple les articles 1843-2 et 1844-1 du Code civil qui parlent de proportionnalité des droits au

montant de l’apport.

5 Sur ce point, voir R. CONTIN, Contrôle de la gestion des sociétés anonymes, éd., Litec, 1975, n°315, p. 217. 6 En droit des sociétés, l’égalité est mentionnée pour la première fois dans l’article 34 de la loi du 16 novembre

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§ 1. Le domaine de l’égalité en droit des sociétés

43. À travers nos recherches, nous avons pu noter que certains auteurs semblent admettre

l’idée que l’égalité entre associés puisse s’étendre au-delà de l’échelle d’une société. Il suffit de citer quelques cas pour illustrer le propos. Par exemple, un auteur7 a estimé que la décision

Nationalisation I, rendue par le Conseil constitutionnel le 16 janvier 1982, ne faisait qu’affirmer le principe d’égalité entre associés. Rappelons que les magistrats constitutionnels avaient déclaré dans cette affaire que « le principe d’égalité n’est pas moins applicable entre

les personnes morales qu’entre les personnes physiques, car, les personnes morales étant des groupements de personnes physiques, la méconnaissance du principe d’égalité entre celles-là équivaudrait nécessairement à une méconnaissance de l’égalité entre celles-ci »8. Dans la

même veine, la jurisprudence sur les abus9 de bien sociaux dans les groupes de sociétés, initiée par l’arrêt Rozenblum du 4 février 198510, a pu être interprétée comme mettant en

exercice le principe d’égalité entre associés11. Enfin, dans leurs études relatives à l’égalité

entre associés, les auteurs soulignent fréquemment le fossé qui peut exister entre les petites et les grandes sociétés12.

44. Force est d’admettre que, dans ces différentes hypothèses, l’égalité est envisagée entre

des personnes qui ne partagent ni les droits ni les obligations au sein d’une même société. Aussi, nous pensons que cette extension du champ de l’égalité demeure contestable. En effet, l’égalité du droit des sociétés se confine rigoureusement à l’intérieur de la sphère d’une société. Elle est censée unir les associés qui exercent leurs droits tout en contribuant au fonctionnement régulier de la personne morale13. Or dans les exemples cités, les sociétés ne sont ni cocontractantes ni copartageantes des prérogatives et charges d’une même société. Ainsi, seule l’égalité devant la loi a-t-elle vocation à régir leurs relations. Il n’était donc pas question, dans cette décision du Conseil constitutionnel, de l’égalité du droit des sociétés,

7 J. MESTRE, art. cit., p. 404 ; voir également, A.-L. CHAMPETIER de RIBES-JUSTEAU, Les abus de

majorité, de minorité et d’égalité. Études comparative des droits français et américain des sociétés, préf. J.-

J. Daigre, éd. Dalloz, 2010, n°287, p. 209.

8 Cons. constit., 16 janvier 1982, n°81-132 DC Nationalisations I, JO du 17 janvier 1982, p. 299 ; Rev. sociétés,

1982, p. 136.

9 Ces abus consistent généralement en des avances sans contrepartie consentis par certaines sociétés du groupe à

d’autres. Pour plus de détails la question, voir M. COZIAN, « Les avances sans intérêts », JCP E, 1995, n°48, p. 474.

10 Cass. crim., 4 février 1985, Rozenblum et Allouche, D. 1985, p. 478, note D. Ohl ; Rev. sociétés. 1985, p. 648,

note B. Bouloc.

11 J. MESTRE, art. cit., p. 404. 12 S. SCHILLER, art. cit., n°1, p. 119. 13 Y. de CORDT, op.cit., n°212, p. 298.

31 mais plutôt de celle devant la loi14 prévue par l’article premier de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen15. Les magistrats n’ont, en l’occurrence, fait que mettre en œuvre la

conception formelle de l’égalité du droit public qui exigeait que les sociétés bancaires, et par ricochet leurs associés, considérés ici comme des citoyens, soient également traités devant la loi, étant donné que leurs situations étaient identiques16. Ce raisonnement est également valable en ce qui concerne l’arrêt Rozenblum. Les sociétés d’un groupe ont simplement un intérêt commun qui est celui d’obtenir un enrichissement global supérieur à la somme des profits qu’auraient pu réaliser chacune d’elles prise isolément17. Il s’en déduit que seule

l’égalité devant la loi peut trouver à s’appliquer à leurs rapports.

45. Nous signalerons, enfin, que l’égalité étudiée ne s’applique pas, non plus, aux relations

entre les associés et les tiers18. C’est pour cette raison que la jurisprudence refuse d’appliquer l’égalité de prix entre majoritaires et minoritaires, prévue en droit financier en cas de cession contrôle, lorsqu’il s’agit de société non cotée19. Finalement, en droit des sociétés, l’égalité doit

être comprise comme s’exerçant strictement entre des associés se trouvant dans le cadre d’une seule et même société relativement aux droits et obligations qu’ils y détiennent20. Ces

éclairages ne permettent pas, pour autant, de dissiper toute les incertitudes qui entourent la notion.

46. En vérité, même au sein d’une société, les situations des associés peuvent recouvrer

des réalités factuelles et juridiques très variées et profondément différentes. Dans une étude bien connue, Philippe Bissara se demandait, à juste titre, s’il était pertinent de s’interroger sur l’égalité des associés dont « les objectifs, les modes d’accès à la détention du capital,

l’importance des investissements ou l’attachement à la société sont extrêmement variés et en voie de diversification croissante »21 ? En pratique, il arrive souvent que dans les sociétés,

14 Voir en ce sens, ALLEGAERT, Le droit des sociétés et les libertés et droits fondamentaux, éd. PUAM, 2005,

n°61, p. 92.

15 Selon lequel, « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne

peuvent être fondées que sur l'utilité commune ».

16 Pour un point de vue similaire, voir R. VATINET, « Existe-t-il un principe de proportionnalité en droit des

sociétés », LPA, 1998, n°117, p. 58, note 2.

17 D. OHL, note sous Cass. crim. 4 février 1985, D. 1985, p. 478, spéc. p. 480.

18 S. SCHILLER, art. cit., n°9, p. 124. Voir également D. SCHMIDT, « Quelques remarques sur les droits de la

minorité dans les cessions de contrôle », D. 1972, chron., p. 223.

19 Cass.com. 12 mai 2004, Bull. civ. 2004, IV, n°94, p. 97.

20 D. SCHMIDT, « Quelques remarques sur les droits de la minorité dans les cessions de contrôle », art. cit., n°6,

p. 224 ; Y. de CORDT, op.cit., n°212, p. 298.

21 P. BISSARA, « L’égalité des actionnaires : Mythe ou réalité », JCP E, 1994, Cah. dr. l’ent., 1994/5, p. 18.

Voir également M.GERMAIN et V. MAGNIER, Traité de droit des affaires, les sociétés commerciales, t. 2, 21e

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cohabitent des associés individuels, des investisseurs institutionnels22, des organisations intermédiaires d’investisseurs23, des associés « bailleurs de fonds »24 ou « consommateurs de

produits financiers », des « associés de contrôle » ou politiques25, des associés salariés26, des « associés professionnels »27, des apporteurs personnes physiques ou morales, voire des personnes dépositaires de la puissance publique. À ces différences viennent s’adjoindre celles relatives à l’âge, l’état de santé, la situation matrimoniale ou professionnelle, la culture, la nationalité, etc. Au regard de ces différences de profils28, les associés se révèlent tous uniques et donc différents. Entre eux se creuse le fossé de la pluralité. Or, étant entendu qu’il n’y a pas d’identité pour soi sans diversité par rapport aux autres, l’égalité devient paradoxale dans la mesure où la pluralité affecte l’identité29.

47. Ainsi, sans évoquer le fait que la satisfaction de l’intérêt de la société s’accommode

parfois difficilement d’un traitement égalitaire des associés30, l’idée d’égalité en droit des

sociétés se confronte à plusieurs types de facteurs : l’hétérogénéité des situations des associés, la multiplicité des variables en fonction desquelles elle peut être appréciée31, la nécessité d’une protection des intérêts des associés, etc. La question est alors de savoir comment le droit des sociétés, réputé pour être fondé sur la raison32, peut-il soumettre des situations aussi différentes à un traitement égal ? Peut-on assimiler « la veuve de Carpentras, les salariés

actionnaires, les associations d’actionnaires et l’État actionnaire »33 ? Les règles juridiques

22 F. MANIN, Les investisseurs institutionnels, th. Paris I, 1996.

23 L. DUMOULIN-MAUDUIT, Les organisations intermédiaires d'investisseurs : contribution à l’étude de la

dimension collective du capitalisme en France, th. Clermont-Ferrand I, éd. Université d’Auvergne, LGDJ, 2001.

24 Qui ne font qu’un simple placement financier avec l’espoir d’en tirer un rendement dans des délais

relativement courts. Pour une étude approfondie, voir F.-X LUCAS, Les transferts temporaires de valeurs

mobilières, pour une fiducie de valeurs mobilières, éd. LGDJ, 1997, pp. 152 et s., spéc. no327 : il distingue les actionnaires et les associés. Ne sont pas associés, selon lui, « les actionnaires pour lesquels seule la créance

importe dans l’action et qui négligent le pouvoir qu’elle peut conférer ».

25 Qui cherchent à exercer le pouvoir. On dit habituellement qu’ils sont plus attachés à la société.

26 F.T’. KINT et Y. de CORDT, « La participation des travailleurs au capital : aspects de droit des sociétés », in

La participation financière des travailleurs, éd. Bruylant, Bruxelles, 1998, pp. 149 à 185 ; J. MALHERBE et Y. de CORDT, « La participation des travailleurs au capital et aux bénéfices des sociétés : aspects de droit des sociétés », in La participation des travailleurs au capital et aux bénéfices des sociétés – Commentaires de la loi du 22 mai 2001, éd. Bruylant, Bruxelles, 2001, pp. 205 à 293.

27 P. BISSARA, « L’influence de la professionnalisation de l’actionnariat des sociétés cotées » in Mél. en

l'honneur de M. Vasseur, éd. Banque, 2000, p. 11 ; du même auteur « Les mutations de l’actionnariat et le fonctionnement des sociétés cotées », in Mél. offerts à D. Schmidt, Joly, 2005, p. 61.

28 P. MOUSSERON, op.cit., n°76.

29 J. LOCKE, Essai, chap. II, 22, Of Identity and Diversity, cite par R. NEMEDEU, « Le principe d’égalité des

créanciers: vers une double mutation conceptuelle (étude à la lumière du droit français et Ohada des entreprises en difficulté) », RTD com. 2008, p. 241, spéc. note 18.

30 D. SCHMIDT, « De l’intérêt commun des associés », JCP E, 1994, I, n°404, p. 535. 31 A. SEN, Repenser l’inégalité, éd. Seuil, Paris, 2000, p. 9, spéc. p. 17.

32 G. LAGARDE, « Le droit des affaires, droit sentimental ? », in Mél. offerts à R. Savatier, éd. Dalloz, 1965,

p. 491, spéc. p. 510.

33 ne se fondent-elles pas nécessairement sur des différentiations ? Y aurait-il règle de droit «

sans cet effort de l’intelligence qui conduit à réserver un sort différent à deux personnes ou à deux situations objectivement distinctes »34 ? C’est pourquoi, Waline avait estimé que la consécration constitutionnelle de l’égalité était une « solennelle sottise prudhommesque »35

.

Quoi qu’il en soit, face à l’évidente difficulté de la question, eu égard à cette diversité économique et juridique36, certains37 se sont demandés s’il ne fallait pas réduire l’égalité en droit des sociétés à une simple égalité entre les titres38 sociaux. Cette question renvoie à celle de l’identification des termes du rapport d’égalité.

§ 2. Les termes du rapport d’égalité en droit des sociétés

48. Égalité entre associés ou entre titres sociaux39 ? Quelle que soit la matière dans

laquelle elle est envisagée, l’égalité repose sur une comparaison40 entre deux ou plusieurs

termes41 et s’opère par le biais d’un jugement subjectif42. Par conséquent, toute étude l’ayant

pour objet requiert que l’on s’accorde au préalable sur ceux qui seront retenus. En droit des sociétés, la détermination des termes du rapport d’égalité conduit à trancher entre une égalité entre associés et une autre entre titres sociaux. Or, cette question divise la doctrine depuis très longtemps.

49. Tout est parti de l’affirmation de Paul Cordonnier43 suivant laquelle « l’expression

‘égalité entre actionnaires’ traduit imparfaitement la situation juridique qu’elle tend à définir

». Pour l’éminent auteur, « il serait plus exact de dire ‘égalité entre actions’ car, en réalité ce

que l’expression consacrée prétend mettre en lumière, c’est l’égalité des droits et obligations attachés à chacune des actions dont l’ensemble forme le capital social, ou à chacune des

34 F.-X. LUCAS, « Éditorial. Vive la discrimination ! », Bull. Joly, 2009, n°5, p. 445.

35 Voir M. WALINE, L’individualisme et le droit, 2e éd. Montchrestien, 1949 ; éd. Dalloz, 2007, p. 395. 36 Y. de CORDT, L’égalité entre actionnaires, op.cit., n°212, p. 298.

37 P. CORDONNIER, De l’égalité entre actionnaires, op.cit., n°14, pp. 48 et 49. Voir également, Y. de CORDT,

L’égalité entre actionnaires, op.cit., n°212, p. 297, qui retient une définition identique.

38 Sur la notion de titre, voir F.G. TREBULLE, L’émission de valeurs mobilières, préf. Y. Guyon, éd.

Économica, 2002, pp. 373 et s.

39 Le terme « titres sociaux » désigne ici à la fois les actions et les parts sociales.

40 P. MAZIERE, le principe d’égalité en droit privé, op.cit., n°340, p. 208 ; F. DUBET, Injustices, l’expérience

des inégalités au travail, éd. Seuil, Paris, 2006, p. 45.

41 ARISTOTE, Ethique à Nicomaque, trad. J. Barthélemy Saint-Hilaire, Paris, éd. Le livre de poche, 1992,

liv. V, chap. III, § 3, p. 200.

42 Y. de CORDT, L’égalité entre actionnaires, op.cit., n°2, p. 1.

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actions d’une même catégorie44, et non le traitement égal des actionnaires »45. Cette opinion a eu un écho favorable chez la plupart des auteurs46. Pour justifier sa pensée, le précurseur de cette thèse arguait du fait qu’en tant que sujets du droit, les associés pouvaient bénéficier, outre les prérogatives découlant de leur qualité d’associés, de droits ne prenant pas leur source dans la possession de titres de capital47. Or, selon lui48, ces deux catégories de droits sont souvent inextricables, de sorte que l’égalité entre associés devient plus fuyante que celle entre des titres ayant chacun une mesure précise49.

50. Cette position n’a pourtant pas fait l’unanimité au sein de la doctrine. D’autres auteurs

ont, au contraire, considéré que les associés devaient être retenus comme les termes entre lesquels s’exerce l’égalité. Dans cet ordre d’idées, on a fait remarquer qu’assimiler l’égalité en droit des sociétés à une simple égalité entre titres sociaux, conduit à réduire l’associé à un simple propriétaire de titres, alors que ce dernier doit être considéré comme partie à un contrat avec tous les droits et obligations qui en résultent50.

51. Sans exprimer une préférence pour l’une ou l’autre opinion, une autre partie de la

doctrine s’est contentée d’affirmer que les deux types d’égalités doivent être distingués51.

Pour ce faire, le critère de distinction résiderait dans le principe de proportionnalité52. En d’autres termes, si le partage concerne les droits dont l’étendue est déterminée au prorata de la participation dans le capital social, ce sera l’égalité entre titres sociaux qui devra être retenue, en revanche, s’il s’agit d’un droit dont la répartition est déconnectée de la mise de l’associé,

44 Marguerite Neunreuther parle d’« égalités à la carte », voir M. NEUNREUTHER Permanence et renouvellement

du principe d’égalité entre actionnaire dans les sociétés anonymes, th. Aix-Marseille, 1994, n°369, p. 251.

45 Aussi, par commodité de langage, les auteurs préfèrent-ils généralement employer le syntagme « égalité entre

associés » ou « égalité entre actionnaires », voir par exemple P. CORDONNIER, De l’égalité entre actionnaires, op.cit., n°14, p. 49 ; J.-M. MOULIN, Le principe d’égalité dans la société anonyme, op.cit., n°10, p. 11 ; Y. de

CORDT, L’égalité entre actionnaires, op.cit., n°212, pp. 297 et 298.

46 M.GERMAIN et V. MAGNIER, op.cit., n°2070, qui estiment que ce type d’égalité doit être retenu dans les

sociétés par actions ; PH. MERLE (avec la collaboration de A. FAUCHON), Droit commercial, sociétés

commerciales, 20e éd. Dalloz, 2017, n°653, p. 737 ; R. TUNC, Des avantages particuliers dans les sociétés par

actions, th. Paris, 1936, n°2-3, p. 10 ; M. De JUGLART, et B. IPPOLITO, Cours de droit commercial, vol. II, 8e

éd. Montchrestien, 1988, n°755, p. 553 ; J. HAMEL, G. LAGARDE et A. JAUFFRET, Droit commercial, t. 1, vol. II, 2e éd. Dalloz, 1980, n°530, p. 243, par G. LAGARDE ; E. SCHLUMBERGER, Les contrats

préparatoires à l’acquisition de droits sociaux, éd. Dalloz, 2013, n°412, p. 358 ; Y. de CORDT, L’égalité entre actionnaires, op.cit., n°212, p. 297.

47 L’auteur donne l’exemple des parts bénéficiaires et des droits que l’associé peut bénéficier de la qualité

d’administrateur, voir P. CORDONNIER, De l’égalité entre actionnaires, op.cit., n°14, p. 49. En ce sens, voir Y. de CORDT, L’égalité entre actionnaires, op.cit., n°212, p. 298.

48 P. CORDONNIER, De l’égalité entre actionnaires, op.cit., n°14, p. 49. 49 Y. de CORDT, L’égalité entre actionnaires, op.cit., n°212, p. 298.

50 P. MILLET, Les avantages particuliers dans les sociétés par actions, th. Paris, 1931, p. 8.

51 Voir D. SCHMIDT, « Libres propos sur l’égalité des actionnaires en cas de cession de contrôle », préc., note

6 ; J. HAMEL, F. TERRE et P. MABILAT, Sociétés commerciales, t. 2, éd. Dalloz, 1974, n°358, p. 311.

35 l’égalité entre associés devra alors être préférée. Ces divergences doctrinales ne peuvent que susciter l’embarras.

52. Il semble pourtant plus exact de retenir les associés comme étant les termes du rapport

d’égalité. Malgré leur autorité incontestable, les arguments avancés par les tenants de l’égalité entre les titres s’avèrent insuffisants pour emporter notre adhésion. Certes, comme le souligne Monsieur Cordonnier, des situations peuvent se présenter dans lesquelles les associés détiennent, en plus des droits reçus en rémunération de leurs apports, des prérogatives d’une autre origine. De plus, la distinction de ces différentes prérogatives peut, parfois, s’avérer délicate. Pour autant, peut-on retenir une égalité des titres sous le seul prétexte que les associés pourraient bénéficier de certains droits non conférés par la qualité d’associé ?

53. À vrai dire, la solution préconisée manque de pertinence et demeure contestable au

regard de la rigueur du raisonnement juridique. En réalité, l’égalité n’est que la relation de correspondance entre les associés, eu égard aux droits et obligations résultant du contrat de société, quelles que soient par ailleurs leurs différences53. Elle s’applique étroitement aux prérogatives et obligations attachées à la qualité d’associé54. En conséquence, l’argument tiré

de la possibilité que les associés puissent détenir des droits provenant d’autres sources ne saurait prospérer. Mais qu’en est-il de l’article 185155 du Code civil qui dispose que « le

capital est divisé en parts égales » ? N’est-ce pas la consécration d’une égalité entre les droits sociaux ? Il ne le semble pas car il n’est plus à démontrer que cette disposition ne vise qu’une égalité de valeur nominale56.

54. Au regard de ces éléments, les associés doivent être considérés comme les termes du

rapport d’égalité en droit des sociétés. C’est en tout cas la solution que semble préconiser le droit positif57 dans la mesure où la loi n’emploie que la formule « égalité entre actionnaires » et la jurisprudence ne sanctionne jamais les discriminations entre les titres s’il n’en résulte pas une inégalité entre les associés. Il en va ainsi, par exemple, lorsque des associés renoncent librement à souscrire à une catégorie de titres ouverte à tous. Dans ce cas, la disparité entre les titres ne sera pas réprouvée puisqu’elle n’entraine aucune discrimination entre associés. Reste

53 Y. de CORDT, L’égalité entre actionnaires, op.cit., p. 15.

54 C’est ce qui explique d’ailleurs qu’il ne puisse jamais y avoir ni égalité ni inégalité entre les associés et les

tiers sur les avantages que procure la société, voir en ce sens, Y. GUYON, « le principe de l’égalité des actionnaires et ses conséquences selon le conseil constitutionnel », Rev. sociétés, 1988, p. 234, spéc. p. 235.

55 À rapprocher de l’article L223-2 du Code de commerce pour les SARL.

56 T. GRANIER, « Titres de capital, titres donnant accès au capital », in Ingénierie financière, fiscale et

juridique, 2e éd. Dalloz, 2009, n°11.32.

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maintenant à savoir ce que signifie réellement l’égalité en droit des sociétés. À quel type d’égalité correspond-elle ? Les prochains développements permettront d’y répondre.