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Définition et étude de la cohérence des phonons

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 78-86)

thermiques

Le projet étudié dans cette partie est lié au développement de générateurs ther-moélectriques et est rattaché au projet européenNANOTEG (Nanostructured ThermoElectric Systems for Green Transport & Energy Efficient Applications).

Son principal objectif est de résoudre les difficultés de refroidissement de com-posants et de récupération d’énergie dans le domaine de transport aérien et terrestre. Pour ce faire, la nanostructuration des modules thermoélectriques a été la solution envisagée afin d’obtenir des éléments de haute efficacité avec un volume d’intégration réduit dans les composants préexistants.

Commençons par présenter les phénomènes thermoélectriques qui sont à l’origine de ces développements technologiques. Le premier effet fut découvert par See-beck au cours du 19ème siècle. Lorsque deux matériaux conducteurs de nature différente sont mis en contact et qu’une différence de température est appliquée aux deux jonctions, une différence de potentiel apparaît. Elle est proportion-nelle à la différence de température et ce coefficient de proportionnalité se nomme le coefficient Seebeck ↵ :

∆V =↵∆T. (1.82)

Ainsi, un courant électrique est créé dans le système grâce à la diffusion ther-mique des porteurs d’énergie et de charges. Quelques années plus tard, Peltier découvre l’effet réciproque. Lorsqu’un courant électrique est imposé aux jonc-tions de deux matériaux différents, une création ou une absorption d’énergie thermique est créée, selon le sens du courant. La puissance absorbée ou libérée est donnée par :

P =↵IT, (1.83)

avecI le courant électrique etT la température du module thermoélectrique.

Nous voyons donc l’intérêt technologique que peuvent susciter ces deux effets.

La figure 1 schématise les deux modes d’application d’un module thermoélec-trique. La première utilisation, représentée sur la figure 1.a. vise à contrôler avec une grande précision la température du module à partir d’un courant élec-trique. Son principal avantage est d’avoir une taille réduite, ce qui permet une gestion très localisée des températures. L’un des objectifs est de les intégrer aux circuits microélectroniques afin de diminuer la température de ces composants, ce qui est l’un des obstacles majeurs dans le développement de processeurs de taille encore plus petite.

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(a) (b)

Figure 1 – Les deux modes d’application des modules Peltier (extrait de la Référence [227]) (a) Module Peltier : un courant électrique permet de contrôler la température de la face supérieure du module. (b) Générateur électrique : une différence de température produit un courant électrique.

La seconde application s’inscrit dans le cadre de la récupération d’énergie et est schématisée sur la figure 1.b., à savoir, générer une énergie électrique à partir d’une source chaude. Le projet NANOTEG vise à générer de l’électricité à partir des pièces chaudes du véhicule et de l’acheminer dans le circuit électrique.

Des générateurs thermoélectriques sont, par exemple, installés dans les sondes spatialesVoyager etCassini afin de profiter des gradients thermiques entre les parties du satellite chauffées par le Soleil et la température de l’univers, aux alentours de 3 K.

Afin de quantifier l’efficacité d’un module thermoélectrique, un nombre adi-mensionné a été défini, appelé le facteur de mérite ZT d’un matériau :

ZT = ↵2σT

e+p, (1.84)

avecσla conductivité électrique du matériau,esa conductivité thermique élec-tronique et p sa conductivité thermique due aux phonons. Afin d’optimiser son efficacité, il est indispensable que le matériau possède de bonnes propriétés électriques et une faible conductivité thermique. Malheureusement, ↵,σ ete sont interdépendants, ce qui rend l’optimisation des modules thermoélectriques délicate. Les semiconducteurs possèdent les meilleures propriétés électroniques pour les applications thermoélectriques, avec une densité électronique intermé-diaire entre un métal et un isolant. Les synthèses de Minnich et al. [166], de Tritt [227] Shakouri [200] détaillent les progrès réalisés dans le choix des matériaux au cours de la dernière décennie. La figure 2 représente les princi-paux matériaux étudiés pour leurs propriétés thermoélectriques. Les courbes en pointillés symbolisent le facteur de mérite des matériaux massifs qui est limitée par 1. Les courbes en trait plein représentent les matériaux

nanostruc-Figure 2 –Facteur de mérite des principaux matériaux thermoélectriques en fonction de la température (extrait de la Référence [166]).

turés qui ont eux un facteur de mérite qui dépasse 1,5. La composition de ce matériau reste cependant problématique à cause de la présence d’éléments rares et/ou toxiques. De nombreux projets sont lancés pour remplacer ces espèces chimiques par des composants moins dangereux pour l’environnement.

Le facteur de mérite intervient dans la définition du rendement d’un généra-teur thermoélectrique ⌘ produisant une puissance électrique Pe à partir d’une puissance thermiqueQC :

⌘= Pe

QC = TC−TF TC

p1 +ZTm−1 p1 +ZTm+TTF

C

!

, (1.85)

avec TC la température de la source chaude, TF la température de la source froide et Tm la température moyenne du composant. Comme les générateurs thermoélectriques sont des machines thermiques, ils sont limités par le rende-ment de Carnot TCTTF

C . Le rendement actuel des modules thermoélectriques est de l’ordre de quelques pourcents, ce qui est encore très faible et rend leur utilisation encore limitée.

L’une des voies empruntées pour augmenter ZT est de réduire la conductivité thermique des phonons sans affecter pour autant les propriétés électroniques.

En effet, les libres parcours moyens des électrons dans les semi-conducteurs sont de l’ordre de quelques nanomètres, contrairement aux phonons acoustiques qui ont des libres parcours moyens de l’ordre de la centaine de nanomètres. Ainsi, la nanostructuration des matériaux, c’est-à-dire la modification de leurs structures

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à l’échelle nanométrique, permet d’affecter de manière sélective le libre parcours moyen des phonons et non celui des électrons.

L’emploi de super-réseaux de matériaux semi-conducteurs semble être partic-ulièrement prometteur pour réduire de façon drastique les propriétés thermiques des phonons sans détériorer les propriétés électroniques. Un super-réseau est un empilement périodique d’au moins deux matériaux, comme cela est représenté sur la figure 3. La présence de cette périodicité va créer des bandes

inter-Figure 3 –Structure d’un super-réseau d’oxydes métalliques par diffraction aux rayons X (extrait de la Référence [190]).

dites dans la relation de dispersion des phonons et donc affecter leur vitesse de groupe. Les interfaces jouent également le rôle de diffuseur pour les phonons.

Des phénomènes de localisation apparaissent également dans ces matériaux.

L’ensemble de ces effets diminue donc la conductivité thermique des phonons de façon drastique, la rendant plus faible que les valeurs dans les alliages, ce qui en fait un candidat de choix comme matériau pour les modules thermoélec-triques. Par exemple, le facteur de mérite d’un super-réseau de Bi2Te3/Sb2Te3

a été mesurée à 2,4, ce qui en fait le meilleur matériau thermoélectrique actuel [232].

Le transport des phonons dans ces structures reste en partie inexpliqué à cause du comportement dual qu’ont les phonons dans cet empilement périodique de matériau. En effet, les phonons sont considérés la plupart du temps comme des particules ponctuelles : ils auraient donc tendance à diffuser aux inter-faces formées par les contacts entre chaque matériau. Mais cette périodicité peut également induire des propriétés ondulatoires telles que le repliement de la première zone de Brillouin par exemple et la localisation des phonons aux interfaces. Ces deux comportements antagonistes entrent en compétition pour

La cohérence des phonons a été avancée comme une hypothèse pour expliquer les propriétés thermiques des super-réseaux observées, à la fois, aux niveaux théorique et expérimental. Il n’existe cependant pas de théorie quantitative ni de définition formelle dans la littérature qui permettent le comportement ondulatoire ou corpusculaire des phonons. Nous allons donc dans cette partie nous attacher au développement d’une théorie générale de la cohérence des phonons thermiques. À partir de cet estimateur, nous tenterons dans un second temps de comprendre le transport des phonons dans les super-réseaux.

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