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III. La question des e-déchets

2. Dons de seconde main ou dons d’e-déchets ?

2.1. Déchet : un terme polysémique

Ces déchets électroniques, dits e-déchets, ont comme caractéristique particulière de contenir des composants toxiques et autres matériaux difficiles à traiter : ils sont faits de plastiques, de verre, de métaux, comme le cuivre, le platine ou le coltan, plus ou moins toxiques selon la manière selon laquelle ils sont abandonnés, récupérés et retravaillés. De plus, les quantités sont souvent très petites, ce qui augmente la difficulté de récupération et de traitement. Il convient pour ne pas trop polluer de les démonter et de les traiter à part des autres types de déchets ce qui rend très complexe le ramassage et le tri : il est nécessaire de ne pas le mélanger aux autres.

Il paraît indispensable pour ce sujet de recherche de préciser ce terme de déchet, car ce mot est polysémique : il n’existe pas qu’une seule définition du déchet. En effet, selon les acteurs impliqués (juriste, économiste, acteur environnemental…) et le contexte auquel on se réfère, la notion de déchet diffère. C’est pourquoi nous proposons ici un rapide tour d’horizon afin de présenter plusieurs définitions en fonction du regard qui est porté sur la notion de déchet.

Aux origines du mot, « Déchet » est issu du latin discadere. La racine « dis » souligne la notion d’éloignement et « cadere » signifie tomber. Le mot a ensuite évolué pour devenir au XIVe siècle, « déchet » signifiant « il déchoit ».

86 Qualifier juridiquement un produit de « déchet » n’est pas sans conséquence : cela implique souvent des contraintes réglementaires multiples. Le législateur a souhaité réglementer le traitement des déchets en en interdisant le rejet dans l’environnement ou la revente en vue d’échapper aux obligations légales et a, par conséquent, défini précisément ce qui entre dans le cadre de la loi. Toutefois ici aussi deux types de définition peuvent être distingués : la définition issue du droit français et celle issue de la réglementation européenne. L’article 541-1 du Code de l’Environnement français définit le déchet comme « tout résidu d’un processus de production, de transformation ou d’utilisation, toute substance, matériau, produit ou plus généralement tout bien meuble abandonné ou que son détenteur destine à l’abandon ».

Notons que cette définition associe l’origine objective du déchet et la notion subjective d’abandon entendue dans un sens très large. Toutefois la jurisprudence rejette cette référence à l’abandon au profit du principe de traitement effectif. Ainsi lorsqu’un bien devient déchet, il conserve ce statut tant qu’il n’a pas été valorisé ou traité dans une filière autorisée et ce, quelle que soient sa valeur économique, ses caractéristiques physiques ou chimiques, ou le milieu dans lequel il est rejeté.

La directive cadre européenne n° 91/692 du 18 mars 1991 considère quant à elle comme déchet « toute substance ou tout objet qui relève des catégories figurant à l’annexe 1 de la directive dont le détenteur se défait ou dont il a l’intention ou l’obligation de se défaire ». L’annexe à laquelle il est fait référence est constituée d’une liste exhaustive de 16 catégories de substances considérées comme des déchets que nous n’avons pas besoin de détailler ici. En outre, au sein de l’Union Européenne, le déchet doit être considéré comme une marchandise dont la libre circulation est assurée même si sa nature particulière lui confère un statut spécial.

Sur le plan économique, un déchet est un produit qui, a priori, n’a aucune valeur marchande ou a une valeur négative (il coûte à éliminer). Toutefois cette définition reste subjective et la valeur du bien peut dépendre du détenteur, du lieu, du moment. Ainsi les déchets recyclables possèdent une valeur économique, même faible. Ainsi un déchet est un bien (privé qui devient public) qui n'a, a priori, aucune valeur marchande.

87 Sociologiquement, le déchet est le témoin d'une culture et de ses valeurs. Il est le reflet du niveau social des populations (sa définition et sa représentation en dépendent aussi) et de l'espace dans lequel elles évoluent : zones rurales / urbaines, habitats collectifs / individuels, etc.

Avec une approche fonctionnelle, la définition du déchet repose, le plus souvent, sur deux critères principaux : le type de « détenteur » final du déchet (ménages, entreprises ou collectivités) et le type de substance. Le même déchet peut ainsi faire l’objet de «classifications croisées » et d’appellations différentes : une même pile usagée sera classée dans les déchets ménagers spéciaux (DMS) si elle est rejetée par un particulier ; si elle est émise par une entreprise, elle sera considérée comme un déchet toxique en quantités dispersées (DTQD).

En adoptant un regard environnemental, les déchets sont des sources de nuisances dès lors qu’ils n’ont pas été inertés. Les effets sont directs (paysage, brûlage, percolation) ou indirects (risque du transport, déchet lors du traitement). C’est pourquoi plusieurs définitions - en premier lieu celle de la directive européenne du 18 mars 1991 - insistent sur la composition du déchet comme critère d’identification.

D'autres variantes existent et la notion de déchet peut-être abordée de façon économique, sociale, en fonction de sa nature chimique, etc.

Actuellement, une et même définition du déchet n'est pas acceptée par tous. C'est notamment le cas lors des évolutions qu'il pourra subir (opérations de collecte, tri, transformation primaire) et qui lui confère des caractéristiques physiques, chimiques et mécaniques différentes, et de fait, une valeur économique. A quel moment un déchet devient- il une matière première secondaire ?