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Courbe force-longueur de tube `a tension constante . 100

A.3 Formation et croissance de tubes de membrane

A.3.2 Courbe force-longueur de tube `a tension constante . 100

ring lorsqu’une force est appliqu´ee permet aussi d’acc´eder `a la relation entre la force appliqu´ee et la longueur du tube. Diff´erentes solutions sont repr´esent´ees figure 3.7.

Il est int´eressant de remarquer la non monotonie des diff´erentes courbes force-longueur de tube. D’abord, la force augmente lin´eairement avec la force f, en accord avec l’´equation 3.12 ; la pente d´epend de σ et de la taille de la membrane Rring. La force tend ensuite rapidement vers la force f0, qui est la force n´ecessaire pour extraire et maintenir un tube de membrane. La force est alors bien ind´ependante de la longueur du tube, comme l’avaient remarqu´e Bo et Waugh [Bo and Waugh, 1989]. Ce qui ´etait plus difficile `a pr´evoir, c’est la pr´esence de l’”overshoot” au moment de la formation du tube (la bosse). Il faut donc fournir une force plus grande pour former le tube que celle n´ecessaire pour l’allonger. La taille de l’”overshoot” d´epend des valeurs prises pour σ et κ, et est de l’ordre de 0,13f0 dans des conditions raisonnables (σ = 5.10−5 N/m et κ = 10 KBT ). La pr´esence de l’”overshoot” et des petites oscillations qui le suivent sont les signatures d’une transition de forme du premier ordre (entre la forme simplement d´eform´ee et la forme avec un tube tir´e) `a la force f0, o`u f et non pas L est le param`etre d’ordre.

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A. Extraction d’un tube de membrane, statique

Fig. 3.7 – Diagramme force-d´eformation pour diff´erentes valeurs de la taille de la membrane Rring

normalis´ee par le rayon du tube R0. La force est normalis´ee par la force statique f0 et la d´eformation depuis la surface de la membrane (Z=0) par R0. Les courbes ont ´et´e obtenues num´eriquement. Ici encore, σ = 5.10−5 N/m et κ = 10 KBT . La taille de l’”overshoot” d´epend de ces valeurs initiales ; ici il est de l’ordre de 0,13f0. D’apr`es [Der´enyi et al., 2002].

La figure 3.7 montre que dans la zone o`u L augmente lin´eairement avec la force f, L augmente aussi avec la taille de l’anneau de membrane Rring. Le pic principal finit par surplomber le plateau de force f0 (pour Rring/R0>20 000) et devient instable, donnant lieu `a une transition de phase de premier ordre dans l’espace des L cette fois. La transition fmax/f0 devient discontinue.

La courbe force-longueur de tube a ´et´e mesur´ee exp´erimentalement (par pinces optiques), `a tension constante, dans [Cuvelier et al., 2005b]. L’”overshoot” avait ´et´e observ´e initialement dans [Koster et al., 2003] mais la tension n’´etait pas contrˆol´ee. Plus tard, Koster et al. ont montr´e que la hauteur d´epend non seulement de σ et κ, mais aussi de la taille du patch d’adh´esion ; c’est-`a-dire de la surface sur laquelle la force est appliqu´ee qui ne peut en effet jamais ˆetre ponctuelle [Koster et al., 2005]. Ils ont montr´e exp´erimentalement, analytiquement et par des simulations que la force maximum (en haut de la bosse) augmente lin´eairement avec le rayon de la surface d’adh´esion [Koster et al., 2005].

Pour finir, on peut remarquer que in vivo ou in vitro, les moteurs mol´eculaires exercent une force non ponctuelle (grˆace notamment `a la pr´esence de domaines prot´eiques ou lipidiques par l’interm´ediaire desquels les moteurs peuvent s’accrocher `a la membrane). Ceci permet de donner une longueur de coupure naturelle `a la densit´e d’´energie qui divergerait sinon `a l’extr´emit´e du tube [Der´enyi et al., 2002]. Cette divergence d’´energie permet cependant de pr´edire que l’extr´emit´e du tube est l’endroit le plus propice `a une rupture de la membrane. Ceci n’est pas sans cons´equence au niveau du trafic intracellulaire.

A.3.3 Relation force-longueur de tube `a tension non fix´ee

Dans tout le paragraphe pr´ec´edent, il faut noter que dans toute l’analyse th´eo-rique pr´esent´ee au paragraphe pr´ec´edent, on suppose que la tension reste constante lors de l’extraction du tube. Ceci est vrai pour les exp´eriences o`u la tension de la v´esicule est fix´ee par une micropipette, ou quand il existe un r´eservoir de membrane

Chapitre 3. Etude th´eorique de l’extraction et la croissance de tubes de membrane

permettant de ”tamponner” l’extension d’un tube. Il a ´et´e montr´e r´ecemment au laboratoire que, quand un long tube est extrait d’une v´esicule fortement adh´er´ee sur une surface et avec une tension non fix´ee, la force augmente de fa¸con substantielle avec la longueur du tube [Cuvelier et al., 2005a].

L’expression de la longueur du tube L en fonction de la force appliqu´ee f dans le cas g´en´eral (valable `a la fois dans les r´egimes entropique et enthalpique de tension de la membrane4) est donn´ee par :

L ≃ Rv f Rv 16πκ  KBT κ ln  f f0  +f 2 − f02 πκχ  (3.13) o`u f0 est la force `a la plus petite longueur de tube (juste apr`es l’”overshoot”), et χ est le module de compressibilit´e de la membrane.

A.3.4 Coalescence de deux tubes

Il a ´et´e observ´e exp´erimentalement que lorsque deux tubes de membrane sont extraits de la mˆeme v´esicule, ils ont tendance `a coalescer lorsqu’ils sont suffisamment proches [Evans et al., 1996] : les deux tubes s’attirent et se transforment en un tube unique `a la base et en deux branches au-del`a de la jonction (fig. 3.8).

Fig. 3.8 – (a) Vid´eomicrographes mon-trant la coalescence de deux tubes extraits d’une v´esicule micromanipul´ee. L’image du haut montre la configuration en ”V” des tubes ant´erieure `a la coalescence. L’image du bas montre la configuration en ”Y” des tubes apr`es coalescence, lorsque la pipette a ´et´e suffisamment recul´ee des extr´emit´es fixes des tubes. D’apr`es [Cuvelier et al., 2005b].

Ce ph´enom`ene de coalescence peut ˆetre expliqu´e grˆace `a la th´eorie d´evelopp´ee au paragraphe A.3.1 (voir une analyse quantitative dans [Cuvelier et al., 2005b]). En effet, lorsque les tubes se rapprochent (quand la v´esicule est ´eloign´ee des extr´emit´es fixes des tubes), la cat´eno¨ıde (terme logarithmique de l’expression 3.12), qui d´ecrit la forme du tube au niveau de sa connexion avec la membrane, se d´eforme du cˆot´e de l’autre tube. Cette dissym´etrie cr´ee une force attractive entre les tubes, qui donne une contribution ´energ´etique au syst`eme des deux tubes ´egale `a 2RtFtln(2l). Rt est toujours le rayon du tube et Ftest la force n´ecessaire pour maintenir ce tube, que l’on sait ˆetre ind´ependante de la longueur du tube `a tension fix´ee et l la demi-distance

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A. Extraction d’un tube de membrane, statique

entre les deux tubes au niveau de la v´esicule (voir fig. 3.9(A) pour la d´efinition des param`etres g´eom´etriques). Lorsque les tubes se rapprochent, la longueur de chacun est plus grande que la longueur qu’ils auraient s’ils ´etaient infiniment ´eloign´es, c’est-`a-dire lorsqu’ils ont une position radiale. Cette longueur devient : (Rvθ − l)2/2Rv, au lieu de Rvθ (fig. 3.9(A)). Cette d´eviation n´ecessite un travail ´egal `a : 2(Rvθ − l)2/2RvFt, qui correspond `a une force r´epulsive entre les tubes. L’´energie totale qui caract´erise les deux tubes vaut :

E = 2RtFtln(2l) + 2(Rvθ − l)2

2Rv Ft (3.14)

(A) (B)

Fig. 3.9 – (A)Param`etres g´eom´etriques d´ecrivant la coalescence de deux tubes ex-traits d’une v´esicule aspir´ee dans une micropipette (qui a donc une tension contrˆol´ee et constante). Rt est le rayon du tube, Rv celui de la v´esicule, Ft est la force n´eces-saire pour maintenir le tube, θ l’angle entre un tube et le plan de sym´etrie et l la distance entre le col du tube et ce plan. (B) Courbes donnant l’´energie du tube dans les situations (1) lorsque les deux tubes coexistent en conviguration ”V”, (2) quand les tubes coalescent et (3) quand les tubes ont d´ej`a coalesc´e et sont en configuration ”Y”. Pour passer de la courbe 1 `a la courbe 3, il suffit de diminuer l’angle entre les tubes en reculant la pipette. D’apr`es [Cuvelier et al., 2005b].

La figure 3.9 montre l’´energie des deux tubes pour diff´erentes valeurs de θ. Quand les tubes sont ´eloign´es (situation 1), aux grands θ, une barri`ere ´energ´etique de plu-sieurs dizaines de KBT empˆeche les tubes de coalescer (et avoir l=0). En revanche, pour les faibles valeurs de θ, seule la valeur triviale l=0 minimise l’´energie (situation 3). On comprend donc que pour avoir un minimum de l’´energie qui ne corresponde pas `a la valeur non triviale l=0, il faut se placer dans la situation 2, quand la barri`ere d’´energie pr´esente en (1) s’annule juste. La minimisation de E par rapport `a l donne le polynˆome du 2`eme degr´e en l :

Chapitre 3. Etude th´eorique de l’extraction et la croissance de tubes de membrane

La situation 2 de la figure 3.9 correspond au cas o`u la racine du polynome 3.15 est double. On obtient ainsi l’expression de l’angle θc et la distance lc au moment de la coalescence :

θc = 2r Rt

Rv lc = 1

2Rvθ (3.16)

Une application directe de ces exp´eriences de coalescence de tubes est la mesure de la rigidit´e de courbure de v´esicules en phase liquide ordonn´ee (contenant par exemple un m´elange ´equimolaire SM/cholest´erol, voir ch.2 §C.2.2). En effet, κ = FtRvθ2

c/8π, donc une mesure de Ft et θc donne κ ind´ependamment de la tension de membrane. Cette valeur trouv´ee, de l’ordre de 65 KBT pour les v´esicules SM/cholest´erol 1 :1 nous sera tr`es utile pour nos ´etudes post´erieures de tubes tir´es `a partir de v´esicules rigides. Nous verrons par la suite qu’il est aussi possible d’observer des ph´enom`enes de coalescence dans nos exp´eriences o`u les tubes de membrane sont tir´es par des kin´esines.

Nous venons de voir qu’il est possible de tirer des tubes de membrane `a partir de v´esicules lipidiques en appliquant une force f de fa¸con ponctuelle et quasi-statique sur la membrane. Pour des valeurs typiques de la tension de membrane (σ = 5.10−5 N/m), et de la rigidit´e de courbure (κ = 10 KBT ), cette force est de 13 pN. Si maintenant la force est exerc´ee par des kin´esines attach´ees directement `a la membrane, que se passe-t-il ? Pourquoi les lipides ne sont-ils pas simplement arrach´es de la membrane ? Nous avons vu de plus qu’une kin´esine pouvait exercer au maximum une force de 6 pN (ch.2 §B.1.3). Dans quelle mesure les kin´esines peuvent-elles s’associer pour fournir la force n´ecessaire `a la formation d’un tube ? C’est ce que la th´eorie d´evelopp´ee en parall`ele `a nos exp´eriences a r´eussi `a expliquer.

B Dynamique de formation et de croissance d’un

tube de membrane tir´e par des kin´esines

B.1 Pourquoi les lipides ne sont pas arrach´es de la