• Aucun résultat trouvé

Le Costa Rica, un modèle de développement touristique qui développe, protège et sensibilise ?

L'orpaillage nuit à la recherche scientifique ?

Chapitre 2 L’alliance entre tourisme, protection et production de connaissance :

1. La protection de l’environnement est-elle compatible avec un développement touristique en Guyane ?

1.3 Le Costa Rica, un modèle de développement touristique qui développe, protège et sensibilise ?

Nous avons choisi d’effectuer une petite analyse du tourisme au Costa Rica car ce territoire a souvent été cité lors des entretiens :

« Je n’ai jamais mis les pieds moi en Amérique centrale mais le Costa Rica il a une excellente réputation en terme de protection de la faune sauvage de la biodiversité et de mise en valeur de son patrimoine naturel mais le Costa Rica c’est l’étranger, alors que la Guyane dans l’esprit des gens, enfin oui très clairement la Guyane c’est la France il n’y a pas besoin d’un passeport pour venir en Guyane. » (Entretien N°1, restaurateur Cayenne)

En effet, le Costa Rica qui bénéficie d’une biodiversité d’exception a, depuis les années 40, suscité la curiosité des scientifiques. Suite à une réelle volonté et

135 Sacareau Isabelle. « Les transformations d'une haute montagne par le tourisme : le massif des

Annapurna dans l'Himalaya du Népal / Tourism and change in a high mountain : the Annapurna area in the Nepalese Himalaya ». In: Annales de Géographie, t. 108, n°605, 1999. pp. 21-45;

149

implication politique ; il semblerait que le Costa Rica a réussi la combinaison parfaite entre protection de la biodiversité et tourisme. À en croire les chiffres énoncés par Clémence Ratel, le Costa Rica aurait accueilli 2,5 millions de touristes en 2012 et protégé 25% de son territoire. Pourtant, nous l’avons vu, le tourisme dit de « masse » engendre une crainte pour les habitants du territoire de la Guyane. Mais tous ou presque nous parlent du Costa Rica comme modèle de développement.

Nous avons déjà évoqué le potentiel touristique du département comme modèle de développement écotouristique lors de notre travail de première année136. Or, nous avons mis en évidence que le Costa Rica a axé son orientation de développement autour de ses richesses biologiques. Mais nous avions tout de même constaté que cela était plus une question d’image véhiculée à travers le monde.

On parle plus de marketing écologique, que d’une volonté purement écologique. Lors d’un voyage d’un mois au Costa Rica en 2015, nous avons d’abord été émerveillés par la facilité et la diversité des espèces que l’on pouvait observer. Pour arriver à cela, le pays s’est réellement engagé dans la protection de la biodiversité et a mis en place toute une législation imposant un nouveau mode de vie aux habitants. Certains ont été chassés par des investisseurs étrangers pour construire des résidences touristiques, la chasse a été réglementée de façon draconienne, obligeant les populations de la forêt à renoncer à leur mode de vie traditionnel. 137 Ceci a pour conséquence une évolution du taux d’obésité. 138De plus, nous avons constaté que le Coca Cola était moins cher que l’eau…

Si son engagement démontre bien une volonté politique, le pays s’est tout de même construit grâce au tourisme, mais pas nécessairement dans une logique de développement durable. Ce que nous avons conclu lors de notre premier travail de recherche. En effet, il en ressort que 95% des résidences touristiques ne disposent d’aucun système d’assainissement des eaux. Ce qui signifie que tout est rejeté dans l’océan, avec un territoire qui accueille 2,5 millions de touristes nous pouvons imaginer les désastres.

De plus, ce chiffre (2,5 millions de touristes), c’est aussi celui, ou presque, que l’on retrouve dans les espaces protégés. La fréquentation massive des parcs nationaux, engendre, certe des emplois pour les habitants, mais condamne souvent les animaux à une dépense humaine importante, ce qui a pour conséquence un

136 Jannot Laura, « Tourisme animalier et TIC dans la perceptive d’un développement durable des

territoires », sous la direction de Laurence LAFFORGUE, 2018-2019, 173 pages.

137 Ses propos, sont dans un premier temps dûs à nos observations sur le territoire, puis à des échanges

avec des tribus Bribis. Ils ont également été confirmés par des connaissances qui travaillent dans le tourisme sur le territoire et des amis qui y vivent.

150

changement de leur comportement. Malgré le manque d’études sur ces questions, il est évident que cela impacte les animaux. Pour reprendre les travaux de SIRE Tanïa, étudiante en Géographie à la Réunion, qui s’interroge sur la compatibilité entre protection de la biodiversité et développement touristique au Costa Rica. Elle prend comme exemple les Centres de Sauvetage (Rescue Center en anglais) présents sur le pays, et notamment le Jaguar Rescue center de la côte Caraïbe sud, que nous avons visité en 2015. La conclusion de ses travaux de recherche démontre que :

« Malgré tous ses efforts, des tensions entre l’enjeu économique et les mesures mises en place pour la protection de la biodiversité sont récurrentes au JRC comme dans d’autres institutions qui ont pour but la réintroduction des animaux dans leur habitat naturel. Ces centres ont besoin d’une entrée d’argent pour survivre car il n’existe pas pour l’instant de subventions d’état pour ce genre de structures. Ce besoin de financement pour mener à bien leur mission entraîne certains travers et/ou arrangements qui visent à favoriser la venue de touristes, parfois au détriment de l’éthique, pour le maintien d’une croissance économique nécessaire à la vie du centre ».139

Cela confirme notre ressenti ! Pour exemple, nous avons une amie qui avait effectué du volontariat dans ce centre et nous avait indiqué que certaines espèces restaient « volontairement » car elles permettaient d’attirer les touristes. Lors de notre séjour nous avons été également choqués des nombreux déchets présents dans les rivières et sur les plages.

Figure 37 : Photographie d'une plage du Costa Rica140

Nos observations sont confirmées par une étude réalisée en 2015 par MARILZA DE MELO FOUCHER, s’intitulant Costa Rica entre mythe et réalité.

139 SIRE Tanïa, « l’humanité en géographie à travers protection de la faune et développement

touristique au Costa Rica ». Exemple du Jaguar Rescue Center sur le côté caraïbe sud, Sous la direction de Mr Taglioni François, 2018.

140 https://www.giornaledellavela.com/wp-content/uploads/2019/02/Schermata-2019-02-25-alle-

151

"La privatisation de la nature génère de bonnes sources de revenus et crée un avantage sur d'autres formes de tourisme. Il s’agit d’une politique purement commerciale et le Costa Rica devient un refuge pour ce type d'investissement. Ce sont les grandes chaînes hôtelières internationales qui vont acheter des terrains au Costa Rica avec tout le soutien du gouvernement. Jusque-là, sans aucun contrôle des règles environnementales, la plupart des eaux usées par exemple est déversée dans les rivières et la mer, de même pour les déchets où peu pratiquent le recyclage."141

Cette microanalyse démontre bien que malgré la présence de failles certaines, le tourisme peut générer des retombées financières importantes. Toutefois, le Costa Rica souhaite protéger son environnement dans un intérêt bien précis : le développement touristique. C’est une logique de développement opportuniste, en effet il semblerait que le rapport qu’entretiennent les Costariciens à la nature ne soit pas affectif mais opportuniste. Si effectivement, les actions mises en place pour protéger les espèces permettent leur observation, elles sont en revanche construites dans une logique anthropocentrique. Et comme nous pouvons le constater, ces actions favorisent « le bien être » des touristes, au détriment de celui de la nature et parfois même avant celui des locaux.

2. Le tourisme scientifique est-il une solution viable pour ce territoire isolé qui