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Entre contrôle de la main-d'œuvre et ordre social

3. Contexte international et reconfiguration du problème de la main- main-d'œuvre

Il convient de s'intéresser aux tenants et aboutissants du contexte international particulier dont le point d'orgue fut la ratification, en juin 1930, de la Convention n°29 de Genève sur le travail forcé. Les discussions qui s'engagèrent avant, pendant et après la conférence de Genève permirent aux Empires coloniaux de découvrir les pratiques des puissances coloniales voisines mais aussi de négocier, reformuler et adapter leurs propres réglementations en matière de régime de travail colonial.

3.1 Travail forcé et opinion internationale

Dans les années 1920, sur la scène internationale, les préoccupations vis-à-vis du travail forcé et obligatoire se firent de plus en plus fortes326. Divers groupements et associations s'accaparèrent la thématique du travail forcé pour mieux le condamner. On peut par exemple citer les organisations pan-nègres tel que le Comité de Défense de la Race Nègre (CDRN), puis la Ligue de défense de la race nègre, créés respectivement en mars 1926 et mars 1927, et dont les journaux La Voix des nègres e t la race nègre furent animés par leur fondateur Lamine Senghor327. De multiples conférences contribuèrent à amener sur le devant de la scène une critique de plus en plus généralisée du travail forcé. Le travail forcé et obligatoire fut à l'ordre du jour de la conférence impérialiste de Bruxelles de février 1927 et au cœur des débats du congrès de l'internationale ouvrière et socialiste de juillet 1928. L’Institut colonial international en fit aussi son thème principal de session en 1929328. Au niveau politique, la révolution russe d’octobre 1917 et la fondation de l’Internationale communiste (ou Troisième internationale) par les bolcheviks en 1919 furent très sévères envers l'exploitation coloniale.

Par ailleurs, à un niveau plus réglementaire, l'adoption de la Convention relative à l'esclavage de 1926 marqua véritablement la prise en compte, à l'échelle internationale, de principes généraux au sujet du travail forcé et obligatoire329. C'est dans ce cadre que la SDN fit appel au BIT « en vue d'étudier les modalités les plus appropriés afin d'éviter que le travail forcé ou obligatoire n'amène une situation analogue à l'esclavage »330. Le BIT était une des trois structures de

326 Les écrits d'Albert Londres et d'André Gide dénonçant les atrocités du travail forcé en sont les poignants témoignages. Londres Albert, Terre d'ébène, Paris, Arléa, 1927, 221 p. ; Gide André, Voyage au Congo : carnets de

route, Paris, Gallimard, 1948, 249 p.

327 Liauzu Claude, Histoire de l'anticolonialisme en France du XVI à nos jours, Paris, Armand Collin, 2007, p. 155-156.

328 Sans condamner le travail forcé pour autant. Folliet Joseph, Le Travail forcé..., op. cit, 1934, pp. 149-153 ; Fall Babacar, Le travail forcé..., op. cit., p. 255.

329 Voir pour plus de détails l'analyse de Joseph Folliet sur la naissance d'une opinion internationale Folliet Joseph, Le

Travail forcé..., op. cit., pp. 142-147.

l'Organisation Internationale du travail (OIT) créée par les États signataires du traité de Versailles en 1919. L'OIT était dotée d'une structure tripartite composée d'une conférence générale réunissant les représentants des États membres (représentants des gouvernements, employeurs et travailleurs), d'un conseil d’administration et d'un secrétariat permanent (BIT).

C'est ainsi que le BIT s'empara de la question de la contrainte au travail en réunissant un comité d'experts en juillet 1927 afin de préparer un rapport général sur la législation et la pratique du travail forcé et obligatoire dans les territoires coloniaux331. Ce rapport initia la XIIème conférence internationale du travail qui s'ouvrit à Genève le 30 mai 1929, avec la participation de cinquante États membres. Chaque État était représenté par des délégués gouvernementaux, des délégués patronaux et ouvriers, ainsi qu'un groupe de conseillers techniques332. La France, plutôt favorable aux débats lancés par la conférence, se rendit donc à Genève confiante, arguant que sa volonté première était d'émanciper les populations dont elle avait la tutelle333. Une autre raison qui peut expliquer la relative confiance des représentants français résidait dans le fait que le directeur du BIT de l'époque, Albert Thomas et Jules Gautier, président de la commission du travail forcé, étaient tous les deux français. Néanmoins, en coulisse, l'attitude française fut quelque peu différente et différents groupes de pression coloniaux évoquèrent les craintes suscitées par l'organisation d'une telle conférence. Une lettre de l'Union coloniale française, daté du 16 avril 1929, soit un mois avant le début de la XIIème conférence, évoqua « la gravité de la question [du travail forcé] » et souhaitait tout mettre en place afin de se « prémunir contre des manœuvres »334 opérées par le BIT qui, selon certains, était proche de l'Internationale ouvrière, très critique vis-à-vis de la colonisation335.

Les premières discussions de la conférence révélèrent en effet des positions clairement contradictoires entre les délégués patronaux favorables au travail obligatoire au nom des intérêts économiques coloniaux et de sa vertu éducative, et le groupe ouvrier, dont le représentant français, Léon Jouhaux, alors secrétaire général de la Confédération Générale du Travail (CGT), défendait l'abolition pure et simple de toute forme de travail forcé. Les débats se déplacèrent ensuite devant une commission restreinte composée de 36 membres (12 de chaque groupe) afin d'établir un avant-projet de Convention et un questionnaire à adresser aux États membres. Là encore, de nombreux désaccords apparurent et la commission aboutit à deux rapports distincts après que le groupe ouvrier

coloniaux, la manœuvre des colonialistes », Article du journal Le peuple, 14 juin 1930.

331 Pour une analyse générale voir l'article de Maul Daniel Roger, « The International Labour Organization and the struggle against forced labour from 1919 to the present », Labor History, vol. 48, n° 4, 2007, pp. 477-500.

332 88 délégués gouvernementaux, 37 délégués patronaux, 36 délégués ouvriers et 282 conseillers techniques. Folliet Joseph, op. cit., p. 156.

333 Mouton Fabrice, L'Organisation internationale du travail face au travail forcé dans les colonies françaises

d'Afrique, Maîtrise de science-politique, Science Po Paris, 1987, p. 62.

334 ANOM, AGEFOM, Carton 382, Dossier Travail obligatoire, Note de l'Union coloniale française sur la position du BIT, 16 avril 1929.

335 C'est en particulier la position de Blaise Diagne qui fustigea le climat politique de la conférence en pointant du doigt l'influence de la Deuxième Internationale « installée également en maître dans la place ». ANS, 1Z25, Rapport après la conférence internationale du travail de Genève, 1930.

ait déposé un rapport de minorité. Le groupe ouvrier jugeait en effet que le projet de questionnaire et l'avant-projet de Convention n'étaient pas véritablement axés sur l'abolition totale du travail forcé. Comme l'évoqua Léon Jouhaux, « la nature des questions posées inclinait non pas vers la suppression du travail forcé mais vers une espèce de codification de ce travail »336. L'attitude très active du groupe ouvrier et le retentissement des déclarations de certains représentants indigènes (l'indonésien Hadj-Salim, le tunisien Dali Yahia ou l'indien Shiva Rao) ont ainsi marqué un véritable tournant dans les débats. Ils réussirent à faire passer un amendement prévoyant l’abolition du travail forcé ou obligatoire337.

Après avoir été revu et corrigé, le questionnaire fut adopté par 101 contre 15338 et la commission décida de porter la question du travail forcé à l'ordre du jour de la quatorzième session de la conférence internationale du travail prévue en 1930. Le questionnaire fut soumis aux États membres de la SDN et seuls la Belgique, la France, l'Espagne, le Portugal, l'Allemagne, la Grande-Bretagne et l'Italie firent parvenir une réponse au BIT. Ce questionnaire devait fournir à la conférence la plus large documentation possible sur le travail forcé et obligatoire dans les colonies afin d'envisager les aspects d'une réglementation et proposer des modalités pour en atténuer les pratiques avant sa suppression totale339. Les thématiques abordées par le questionnaire interrogeaient principalement les modalités pratiques d'application du travail forcé dans les colonies. Les questions étaient très diverses, se focalisant sur une définition stricte du travail et du travailleur forcé, sur la durée du travail, sa rémunération, sur les déplacements des populations engendrés par les travaux obligatoires, sur le type de travaux forcés (pour des particuliers, des entreprises privées, etc.), les organes de contrôle et de surveillance des conditions de travail sur les chantiers, ainsi que le délai d'une potentielle abolition.

Le gouvernement français envoya le questionnaire aux différents gouverneurs des fédérations, ainsi qu'à de nombreuses associations coloniales telles que l'Académie des Sciences coloniales, l'Union coloniale Française, ou encore la Ligue maritime et coloniale340. Le ministre des Colonies développa alors les grandes lignes de la position française qui se résumait en trois points : la Convention ne pouvait concerner le « travail forcé pour fins publiques », les prestations et la seconde portion du contingent ne devaient pas faire l'objet d'une réglementation et enfin, la France ne souhaitait « aucun contrôle de la part du BIT sur les méthodes de mise en valeur »341. Il insista en

336 Cité par Mouton Fabrice, L'Organisation internationale du travail..., op. cit., p. 55.

337 Mouton Fabrice, L'Organisation internationale du travail..., op. cit., p. 52.

338 Pour le détail des amendements relatifs au questionnaire, voir Folliet Joseph, Le Travail forcé..., op. cit., pp. 157-159.

339 Anouma René-Pierre, Aux origines de la nation ivoirienne, 1893-1946. Volume II, Corset colonial et prise de

conscience, 1920-1946, Paris, l'Harmattan, 2005, p. 362.

340 À ce titre, le rapport de la Ligue maritime et coloniale montre bien les enjeux et les craintes que soulevèrent une potentielle réglementation internationale du travail forcé. ANOM, SUPCO, Carton 16, Communication sur le travail forcé du directeur de la Ligue maritime et coloniale à l'institut colonial, 18 novembre 1929.

341 ANS, K143(26), Note du ministre des Colonies à propos du questionnaire relatif au projet de Convention internationale sur le travail forcé, 19 septembre 1929.

outre sur la nécessité de défendre et élaborer cette position dans le questionnaire : « il y a lieu en conséquence de tenir compte de l'esprit de ce nouveau questionnaire ou de faire œuvre fort étudiée, étayé sur les considérations générales précitées »342.

Nous reviendrons plus en détail dans les pages suivantes sur les deux premiers points. Le dernier point est quant à lui intéressant car le gouvernement français soulignait sa crainte de voir sa souveraineté atteinte dans la gestion de la main-d’œuvre indigène. De nombreuses critiques furent alors adressées au BIT au motif que l'action de Genève tendait à réduire la marge de manœuvre des autorités coloniales françaises. De nombreux articles de la presse coloniale se firent l'écho de ces critiques343, arguant que la conférence allait placer « directement [les] gouverneurs et [les] administrateurs sous la surveillance de Genève »344. Ils mirent par ailleurs en cause la légitimité d'une telle conférence, critiquant le fait que la majorité des pays présents à cette conférence, n'ayant pas de colonies, n'étaient pas en mesure de comprendre les difficultés rencontrées sur les territoires coloniaux pour le recrutement des travailleurs345. L'enjeu était de taille puisque le risque pour le gouvernement français était de se voir lié par une Convention internationale condamnant le recours au travail forcé alors même que toute l’œuvre coloniale reposait sur cette pratique.

Au final, l'élaboration des réponses au questionnaire du BIT a permis au gouvernement français de porter un regard nouveau sur ses propres pratiques et de formuler une ligne de conduite adéquate pour peser de tout son poids à la XIVème session de la conférence. La circulation des réponses au questionnaire fit prendre connaissance aux Empires coloniaux des réglementations et de leur application sur le terrain de chacun346, et permit à la France de se positionner et d'élaborer un argumentaire précis afin de maintenir certaines formes de travail obligatoire dans ses territoires, indispensable à ses intérêts coloniaux.

342 Ibid.

343 Voir en particulier le dossier entier ANS, K65(19), Conférence internationale du travail à Genève : travail forcé aux colonies, articles 1929-1930.

344 ANS, K101(26), « Le travail colonial forcé », Article de Maurice Ajam paru dans La dépêche coloniale, 11 Décembre 1929.

345 ANS, K65(19), « Le travail forcé dans les colonies », Article paru dans La dépêche coloniale, 20 Novembre 1929.

346 C'est l'idée soulevée par Frederick Cooper qui suggère que « the moral construction of the new colonialism at the end of the XIX th century implied not only a duty to save africans from each other, but an obligation on colonial powers to examine each others practices ». [La construction moral d'un nouveau colonialisme à la fin du XIXè siècle n'impliquait pas seulement le devoir de sauver les populations africaines d'elles-même, mais impliquait aussi une obligation pour les pouvoirs coloniaux d'examiner leurs pratiques respectives] (traduction personnelle). Cooper Frederick, « Conditions analogous to slavery: imperialism and free labor ideology in Africa », in Cooper Frederick, Holt Thomas, Scott Rebecca Jarvis, Beyond slavery..., op. cit., p. 129. Dans la même perspective, côté Empire portugais, voir Bandeira Jerónimo Miguel, « Internationalism and the labours... », op. cit., pp. 142-163. Pour avoir une idée des positions de chaque Empire, voir aussi ANS, K143(26), Note du ministre des Colonies à propos du questionnaire relatif au projet de Convention internationale sur le travail forcé, 19 septembre 1929.

3.2 Débats et dispositions de la conférence de Genève

Les débats de la XIVème session de la conférence internationale du travail s'ouvrirent le 10 juin 1930 sur fond d'opposition claire entre groupe patronal et groupe ouvrier. Une nouvelle ligne de fracture apparut, mais cette fois entre les différents Empires coloniaux présents à la conférence. La Grande-Bretagne, l'Italie et l'Espagne s'opposèrent à toute forme de travail forcé, souhaitant ainsi sa suppression la plus rapide347. La position de la France, de la Belgique et du Portugal fut tout autre puisque les délégués gouvernementaux, bien que résolus, à terme, à supprimer le travail forcé ou obligatoire, souhaitaient prolonger l'utilisation de la contrainte dans le recrutement à des fins d'intérêts publics.

Ce fut la thèse ardemment défendue par le délégué Français Blaise Diagne, rare représentant noir africain à la conférence de Genève. Ses prises de positions, soutenant la ligne de conduite du gouvernement français en faveur du travail forcé, lui valurent un grand nombre de critiques virulentes dont celle, entre autres, d'être dépeint comme « le délégué adjoint du patronat colonial »348. Un représentant anonyme évoqua le « spectacle douloureux que celui du député noir du Sénégal réclamant au nom de la France des Droits de l'Homme, la prolongation du travail forcé »349. L'intervention de Hadji Salim, délégué ouvrier des Indes néerlandaises allait même plus loin :

« Je suis dans cette conférence qui se charge de voter une Convention pour travailleurs coloniaux, le seul représentant d'un pays colonial se trouvant sous la domination d'un pays européen. Je peux d'autant moins m'abstenir de prendre la parole qu'un autre membre de cette assemblée vient de prononcer un discours où, loin de défendre les intérêts de sa race, il nous montre quelle peut être l'influence d'un gouvernement étranger et d'une éducation étrangère sur la mentalité des peuples soumis. »350

Les attaques se firent encore plus sévères dans une partie de la presse sénégalaise. Certains articles d u Périscope africain, organe officiel de Galandou Diouf, opposant politique à Blaise Diagne, allèrent jusqu'à qualifier le délégué Français de « traître nègre qui demandait à Genève, au nom de la République française [...] le travail forcé pour sa race »351. Ces attaques ab hominem s'inscrivaient dans le procès plus large du travail forcé et des exactions coloniales. Henri Bellamy, journaliste au Périscope africain écrivait ainsi que le travail forcé était en Afrique « une abomination »352. Malgré ces condamnations nombreuses, la ligne de conduite du gouvernement français ne fut pas ébranlée

347 Fall Babacar, Le travail forcé..., op. cit., p. 157.

348 ANOM, 28PA, Carton 4, Dossier 127, Attitude de Blaise Diagne au BIT, non daté.

349 Ibid.

350 Ibid.

351 Anonyme, « La parole agréée », Le Périscope africain, 1930.

352 Bellamy Henri, « Après le vote sur le travail forcé : les colonies sont-elles faites pour les colons ou pour les indigènes ? », Le Périscope africain, 23 août 1930.

pour autant et s'appuya sur divers points.

Premièrement, une question d'ordre casuistique. La notion de travail obligatoire fut préférée au terme de travail forcé par le gouvernement français, car l'expression travail forcé renvoyait, selon les autorités, aux « travaux forcés », évoquant l'image des bagnes coloniaux. Le terme de travail obligatoire symbolisait quant à lui l'obligation plutôt que la coercition, éveillant ainsi dans l'opinion « la simple obligation morale au travail »353, base de la rhétorique coloniale. Cette nouvelle qualification, qui fut utilisée dans les rapports coloniaux – il est en effet extrêmement rare de voir, après 1930, le terme travail forcé apparaître dans les archives coloniales –, relève d'un certain pragmatisme de l’administration coloniale qui établit une nouvelle nomenclature, une nouvelle catégorie, afin de dissimuler des pratiques réelles de travail forcé dans ses colonies. La Convention de Genève, signée le 29 juin 1930354, utilisa, quant à elle, les deux termes, définissant ainsi le « travail forcé ou obligatoire » comme « tout travail ou service exigé d'un individu sous la menace d'une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s'est pas offert de plein gré »355. Avec ce débat sémantique, l'objectif de la puissance coloniale française était de vider de sa substance réglementaire le texte de la Convention :

« Pleurs de crocodiles, grimaces de requins, sensibilité de négriers... les efforts [des coloniaux] tendent, non pas à empêcher le vote d'une convention – de toute manière il y en aura une – mais à ramener cette convention à un texte inopérant, et de surcroît à empêcher toute application de ce texte […]. »356

Deuxièmement, un argument de type plus politique. Un document intéressant à analyser est la lettre du ministre des Colonies envoyée à Blaise Diagne, délégué du gouvernement français à la conférence357. Le document indique que d'un point de vue réglementaire, la France était favorable à une convention, mais une convention de principes établissant des lignes directrices à suivre en laissant « aux puissances coloniales le soin de la réglementation en détail »358. En clair, la France se positionnait pour l'établissement d'une convention de principes seulement si il lui été laissé la marge de manœuvre nécessaire pour faire comme bon lui semblait dans ses territoires.

Troisièmement, la France s'opposait à toute réglementation sur le système des prestations et la seconde portion du contingent359. Pour les prestations, bien qu'elles fussent considérées par le BIT comme une forme de travail forcé non rémunéré360, le gouvernement français entendait ce système

353 Folliet Joseph, Le Travail forcé..., op. cit., p. 5.

354 Pour un compte rendu détaillé ANS, K246(26), Compte rendu provisoire BIT, 15 juin 1929.

355 Article 2 de la Convention (n°29) sur le travail forcé de 1930, http://www.ilo.org/dyn/normlex/fr/f? p=NORMLEXPUB:12100:0::NO::P12100_ILO_CODE:C029 (consulté le 2 octobre 2015).

356 ANOM, Papiers Marius Moutet (28PA), Carton 4, Dossier 127, « le travail forcé ou obligatoire dans les territoires coloniaux, la manœuvre des colonialistes », Article du journal Le peuple, 14 juin 1930.

357 Cité dans ANS, 1Z25, Rapport après la conférence internationale du travail de Genève, 1930.

358 Ibid.

359 Ibid.

avant tout comme une charge fiscale, un impôt qui devait rester en dehors de la réglementation du travail forcé :

« La main-d’œuvre prestataire constitue un impôt personnel qui existe aussi bien en France et que peuvent racheter la plupart des indigènes exerçant une profession ; c'est une charge très légère, strictement réglementée et qui ne dépasse jamais douze jours par an. »361

Outre le fait qu'on puisse mettre en doute ce type de commentaire, puisque la réalité fut tout autre362, ces propos sont caractéristiques de la crainte des autorités françaises de voir ce système de corvée supprimé, alors même que la construction et la rénovation de l'ensemble du réseau routier colonial en AOF reposaient sur les travailleurs prestataires :

« Il n'en est pas moins vrai qu'on réclame avec force à Genève sa suppression et il faut envisager dès