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Consolidation et recompositions du pouvoir cardinalo-condéen (1635-1648)

LES PARLEMENTS MERIDIONAUX ET LES CADRES DE LA VIE POLITIQUE PROVINCIALE

PARLEMENTS ET POUVOIRS MILITAIRES EN PROVINCE

2. Consolidation et recompositions du pouvoir cardinalo-condéen (1635-1648)

Lorsque Louis XIII et Richelieu décidèrent d’engager le royaume dans la guerre contre l’Espagne en 1635, les provinces méridionales et leurs gouverneurs étaient donc davantage intégrés au dispositif de pouvoir établi à partir des années 1624-1626. En Languedoc, le gouvernement était entre les mains de Charles de Schomberg, duc d’Halluin. Son père, le vainqueur de Castelnaudary, n’ayant pas survécu longtemps à son succès, mourant à Bordeaux en novembre 1632, il lui succéda immédiatement à l’âge de trente-et-un ans. Ce nouveau gouverneur, à la stature imposante et aux yeux bleutés que soulignaient un teint, des cheveux et une moustache sombres, se serait fait apprécier dans la province grâce à son esprit et ses qualités militaires, ainsi que par l’attachement qu’il eut à apprendre le languedocien74. Le duc d’Halluin se rendit à Toulouse le 3 août 1633 pour prêter serment au Parlement. Sa réception dans la ville attira, selon son secrétaire Jean-Baptiste Baltazar, cinq-cents gentilshommes du Haut-Languedoc et fut sans doute l’occasion pour le nouveau gouverneur de commencer à bâtir sa propre clientèle languedocienne. Il remit lors de ce séjour toulousain les lettres patentes de Louis XIII qui amnistiaient les membres de la noblesse qui avaient suivi Gaston d’Orléans et le duc de Montmorency. Le duc d’Halluin ne manqua pas d’insister à cette occasion sur la bienveillance de Richelieu qui aurait favorisé cette amnistie75. Il s’agissait pour la noblesse provinciale d’une occasion d’intégrer la nouvelle configuration du pouvoir.

En réalité, Richelieu avait déjà commencé à recruter des fidèles en Languedoc avant même l’été 1632. À Montpellier, depuis 1627, le gouverneur de la ville Gabriel de La Vallée, marquis des Fossés, était l’un de ses hommes. Il pouvait aussi compter sur l’archevêque de Narbonne, Claude de Rebé, et les évêques de Mende, Sylvestre de Crusy de Marcillac, et de Béziers, Clément de Bonzi, tous trois intronisés en 1628. Le premier président de Toulouse Jean de Bertier avait été

73 Guillaume Girard, Histoire de la vie, op. cit., p. 506. Lettre de Louis XIII à Jean-Louis de Nogaret de La Valette, duc d'Épernon, Saint-Germain-en-Laye, le 1/10/1634 ; Nicholas Buck Fessenden, Epernon and Guyenne, op. cit., p. 117 ; A.D.G., 1B 23, f° 220.

74 André Delort, Mémoires, op. cit., p. 44-45.

75 A.D.H.-G., B 1915, f° 200 v° ; B.n.F., coll. Baluze, ms. 333, f° 7. Lettre de Jean-Baptiste Baltazar à Denis Charpentier, Toulouse, le 11/8/1633 ; A.D.H.-G., ms. 148, « Collections et remarques du palais » par Malenfant (greffier du Parlement), ff° 5-9.

recruté par Richelieu dès la fin décembre 163176. La « guerre de Monsieur » permit de jauger les fidélités au pouvoir du ministériat. Si ceux qui soutinrent la prise d’armes se virent bien dépouillés de leurs charges et leurs biens confisqués, ils furent remplacés par d’autres membres de la noblesse provinciale qui avaient su miser sur la bonne faction curiale. Le duc de Ventadour fut contraint de se défaire de sa lieutenance générale du Languedoc et celle-ci fut divisée en trois. Le Haut-Languedoc revint à Hector de Gélas de Voisins, marquis d’Ambres, ancien sénéchal du Lauragais et baron des États de Languedoc. Le Bas-Languedoc fut attribué à Louis d’Arpajon, marquis de Sévérac. Les Cévennes furent prises en main par Just-Henri de Tournon, comte de Tournon, ancien sénéchal d’Auvergne. Tous trois appartenaient à l’ancienne noblesse languedocienne et intégraient ainsi la clientèle de Richelieu77. Le cardinal de Richelieu obtint le gouvernement de Louis XIII de Carcassonne pour le marquis d’Ambres78. Le duc d’Halluin reçut, en plus de son gouvernement du Languedoc, le gouvernement de la ville de Montpellier et l’un des clients de Richelieu, Jacques d’Avoine, sieur de La Jaille-Gatine, fut nommé à la charge de lieutenant du roi de la citadelle de la ville. En 1634, La Jaille devint aussi sénéchal de Montpellier, à la place de Restinclières, client de Montmorency qui avait échappé à une condamnation pour son attitude en 1632, sans doute uniquement grâce à l’entregent de son frère le maréchal de Toiras79. À Toulouse, le sénéchal François II de La Valette, baron de Cornusson, conserva sa charge, ayant combattu à Castelnaudary aux côtés du maréchal de Schomberg. Le duc d’Halluin pouvait aussi compter sur le gouvernement d’Aigues-Mortes qui avait été confié à François de Nagu, marquis de Varennes, et qui ne pouvait recevoir d’ordre que du gouverneur de la province, sur le gouvernement de Narbonne, tenu par son client M. de Persy, ou encore sur le nouvel évêque d’Albi, son cousin Gaspard de Daillon du Lude, qui remplaçait Alphonse Delbène qui avait pris la fuite en Italie80.

76 André Delort, Mémoires, op. cit., p. 11 ; William Beik, Absolutism and Society in Seventeenth-century France. State Power and

Provincial Aristocracy in Languedoc, Cambridge, Cambridge University Press, 1985, p. 236 ; Sur le recrutement de Jean de

Bertier, baron de Montrabe, dans la clientèle de Richelieu, voir infra chapitre II.

77 Danielle Gallet-Guerne, « Une conséquence des troubles féodaux sous Louis XIII : les confiscations royales de 1629 à 1641 », Bibliothèque de l’école des chartes, t. CXXVII, livraison 2, 1969, p. 329-354 ; A.D.H.-G., B 1915, ff° 229 v° et 239 v° ; id., B 1916, f° 1 v° ; A.D.H.-G., ms. 148, « Collections et remarques du palais » par Malenfant (greffier du Parlement), ff° 12-17 et 205-206 ; François-Alexandre Aubert de La Chesnaye des Bois, Dictionnaire de La

Noblesse, t. VII, Paris, Antoine Boudet, 1774, p. 160-161 ; Louis Moréri, Le Grand dictionnaire historique, t. VI, Paris,

1725, p. 833 et t. I, Amsterdam, 1740, p. 655-656.

78 Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), op. cit., t. V, p. 934. Copie d’une lettre du cardinal de Richelieu à Hector de Gélas de Voisins, marquis d’Ambres, Ruel, le 30/8/1635.

79 André Delort, Mémoires, op. cit., p. 48 et 55 ; Charles d’Aigrefeuille, Histoire de la ville de Montpellier, Montpellier, Jean Martel, 1738, p. 577-578 et 637 ; Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), op. cit., t. IV, p. 337, n. 1.

80 Jean-Baptiste de Courcelles, Histoire généalogique des pairs de France, t. I, Paris, 1822, p. 44 ; Ernest Roschach (éd.),

Histoire générale de Languedoc, op. cit., t. XI, p. 1100 ; A.M.N., AA 116, f° 114 v° ; Joseph Bergin, The Making of the French Episcopate, 1589-1661, Londres, Yale University Press, 1996, p. 463.

Après le tournant de 1632, la bataille de Leucate, le 28 septembre 1637, fut un autre moment clé dans les relations clientélaires en Languedoc. Le duc d’Halluin repoussa l’armée espagnole qui tentait d’assiéger la ville, action pour laquelle il fut grandement félicité par Richelieu et récompensé par Louis XIII par un bâton de maréchal81. Le nouveau maréchal de Schomberg avait été assisté d’une bonne part de la noblesse languedocienne, dont d’anciens soutiens des Montmorency. Parmi ceux-ci, se signalèrent Louis de Cardaillac et Lévis, comte de Bioule et François-Jacques d’Amboise, comte d’Aubijoux qui siégèrent alors au conseil de guerre82. Leucate fut sans conteste l’acmé de la relation de confiance entre le maréchal de Schomberg et Richelieu, oubliant sans doute un élément central du pouvoir cardinal : son allié le prince de Condé. En effet, dès l’année 1638, les opérations militaires dans le Sud-Ouest furent confiées à Henri II de Bourbon-Condé, reléguant le maréchal de Schomberg à un second rang83. Le prince de Condé et le maréchal de Schomberg coopérèrent difficilement dès l’été 1638. En 1639, Condé demanda son propre rappel, accusant le maréchal de Schomberg et son entourage de susciter des difficultés pour le financement de la guerre et Richelieu rendit compte au gouverneur du Languedoc des rumeurs qui commençaient à circuler à la cour au sujet de sa mauvaise volonté. Leur mésentente se conclut en avril 1641, lorsque Louis XIII accorda au prince de Condé le pouvoir de commander seul dans le Languedoc. Le maréchal de Schomberg se trouvait évincé de sa province sans être formellement destitué. Lors de son entrée dans la ville de Toulouse le 25 avril, aucun honneur particulier ne lui fut fait et un ancien capitoul pouvait assurer le prince de Condé qu’il était reconnu comme leur seul protecteur84. C’est seulement en raison de l’impéritie du Prince au combat que celui-ci fut relevé de son commandement à la fin de l’année 1641, laissant la place au roi en personne pour commander au Roussillon, et permettant ainsi à Schomberg de tenter de se rétablir85.

En Guyenne, l’autorité du duc d'Épernon avait été amoindrie dans sa confrontation avec l’archevêque de Bordeaux Henri d’Escoubleau de Sourdis. S’il n’y eut pas de purge similaire à

81 Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), op. cit., t. V, p. 1060. Lettre du cardinal de Richelieu à Charles de Schomberg, duc d’Halluin, Charonne, le 10/10/1637.

82 C.E.J. Caldicott, « Le gouvernement de Gaston d’Orléans en Languedoc (1644-1660) et la carrière de Molière »,

XVIIe siècle, n° 116, 1979, p. 28 ; les membres du conseil de guerre du duc d’Halluin devant Leucate sont indiqués

dans Le Mercure François, t. XXI, p. 456.

83 A.D.H.-G., ms. 148, « Collections et remarques du palais » par Malenfant (greffier du Parlement), ff° 70-73. 84 A.C., série M, t. XIV, ff° 53 et 119. Lettres de Charles de Schomberg, duc d’Halluin à Henri II de Bourbon-Condé, Béziers, les 28/6 et 10/7/1638 ; id., t. XVIII, ff° 188-194, « Mémoire envoyé à M. des Noiers », s.l.n.d. (1639) ; Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), op. cit., t. VII, p. 222. Copie d’une lettre du cardinal de Richelieu à Charles de Schomberg, duc d’Halluin, s.l., le 9/5/1639 ; A.C., série M, t. XXII, f° 296, lettre de Paul Ducros à Henri II de Bourbon-Condé, Toulouse, le 26/4/1641 ; id., f° 311. Lettre des présidents trésoriers généraux de France de Toulouse à Henri II de Bourbon-Condé, Toulouse, le 30/4/1641.

85 M.P. Montarlot (éd.), « Correspondance du maréchal de Brézé », Mémoires de la société Éduenne, t. XXIV, 1896, p. 282. Lettre d’Hercule Vauquelin à Urbain de Maillé-Brézé, Montauban, le 15/11/1641 ; M. le duc d’Aumale, Histoire

celle du Languedoc après 1632, ce dernier n’était pas le seul client du Cardinal dans la province. À Bordeaux, le premier président du parlement, Antoine d’Aguesseau était l’un de ses fidèles86. Le président à mortier Sarran de Lalanne avait été nommé par Richelieu, en tant que Grand maître et surintendant général de la Navigation, son lieutenant en Guyenne et en Saintonge87. Le gouverneur du Béarn et de la ville de Bayonne, qui était aux avant-postes sur la frontière espagnole, Antoine Ier de Gramont, maria son fils, Antoine II de Gramont, avec une nièce de Richelieu en 163488. Le gouverneur de Blaye, qui contrôlait l’embouchure de la Garonne et le commerce bordelais, Claude de Rouvroy de Saint-Simon fut récompensé du titre de Duc et Pair en 1635 et se maintint dans la confiance du Cardinal jusqu’en octobre 163689. Le propre fils du duc d'Épernon, le duc de La Valette qui devait lui succéder à la tête de son gouvernement, était dans la parentèle de Richelieu, le Cardinal déclarant néanmoins à Sourdis qu’il « [lui ferait] tort si [il croyait] qu’une alliance fut capable de [l’]empescher de [l’]assister90 ».

Le duc d'Épernon et ses alliés se trouvaient pris au piège du pouvoir cardinal dans leur propre bastion. Seules les émeutes antifiscales bordelaises de mai et juin 1635 permirent au gouverneur de rétablir en partie son autorité dans la capitale de la province91. Alors que Sourdis avait quitté la Guyenne pour se consacrer à l’armée navale que Richelieu lui avait confiée, laissant sans protection ses clients, la première mesure que le duc d'Épernon prit après la sédition fut de destituer les jurats bordelais qui avaient été installés par l’archevêque en 1634. Par la suite, en 1636, il réussit à obtenir des lettres de cachet du roi pour nommer à la jurade ses propres candidats et en 1637 et 1638 furent réélus les jurats qui avaient été destitués par Sourdis en 163492. L’offensive espagnole en Guyenne à l’automne 1636 permit au duc d'Épernon d’organiser la défense de sa province, et d’affirmer de nouveau son autorité en matière militaire, secondé par le comte de Gramont et, à sa demande, par son fils Bernard de Nogaret de La Valette. Il semblerait que le cardinal de Richelieu comptait alors réellement sur la collaboration du duc de La Valette, à qui il était à présent allié, pour s’assurer de la loyauté de son père et du bon

86 Sur le premier président Antoine d’Aguesseau comme client de Richelieu, voir infra chapitre II.

87 A.D.G., 1B 22, f° 48 ; Marcel Gouron, L’amirauté de Guyenne, Paris, Librairie du recueil Sirey, 1938, p. 254-255. 88 Antoine II de Gramont, selon Tallemant des Réaux, aurait alors confié à Richelieu que « c’était Son Éminence qu’il épousoit, et non ses parentes, et qu’il prendroit celle qu’on lui donneroit » (Louis Monmerqué (éd.), Les historiettes, op.

cit., t. II, p. 342) ; Antoine-Alfred-Agénor de Gramont, Histoire et généalogie, op. cit., p. 214.

89 Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), op. cit., t. V, p. 640. Minute d’une lettre du cardinal de Richelieu à Claude de Rouvroy de Saint-Simon, s.l., le 23/10/1636 ; François Formel-Le-Vavasseur, « Un seigneur de La Ferté-Vidame, Claude de Saint-Simon, père du mémorialiste : un tricentenaire inédit (1693-1993) », Bulletin Municipal La

Ferté-Vidame, 1992-1993, p. 49-54.

90 Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), op. cit., t. IV, p. 790. Lettre du cardinal de Richelieu à Henri d’Escoubleau de Sourdis, s.l., fin 11/1634.

91 Sur les événements bordelais de 1635, voir supra chapitre V. 92 Inventaire sommaire, op. cit., t. VIII, p. 314-317.

déroulement des opérations militaires en Guyenne93. Mais en réalité, au même moment, le duc de La Valette prenait part à un complot fomenté par Gaston d’Orléans pour se défaire de Richelieu. Claude de Bourdeille, comte de Montrésor, fut chargé par Monsieur d’obtenir le ralliement du duc d'Épernon après que le duc de La Valette se soit engagé à soutenir leur cause. Néanmoins, le duc d'Épernon refusa de prendre part à l’affaire et celle-ci fut finalement découverte par Richelieu. Il apparaît que le Cardinal ne fut pas immédiatement assuré de l’engagement du duc de La Valette dans le complot, ne lui en faisant le reproche qu’au mois de mai 163794. Le duc de La Valette, à la demande de son père malade, avait pris la tête des armées en Guyenne au début de l’année 1637 et la victoire qu’il remporta sur les Croquants du Périgord le 1er juin lui permit de s’assurer du pardon de Richelieu95. Le Cardinal l’engagea alors à mener ses troupes contre les forces espagnoles96. Mais ni le duc de La Valette, ni le duc d'Épernon, ne remportèrent de victoire décisive, contrairement à la situation languedocienne où le duc d’Halluin triomphait à Leucate. Louis XIII et Richelieu décidèrent alors en octobre de donner le commandement des troupes au prince de Condé97. À nouveau, c’était l’alliance condéenne qui était mobilisée par le Cardinal.

Condé reçut un pouvoir de commandement ample, portant son autorité sur les armées de Guyenne, du Languedoc et de Navarre qu’il fit vérifier par le parlement de Bordeaux le 19 avril 1638, tandis qu’un ordre était donné au duc d'Épernon de se retirer, comme en 1633, dans son château de Plassac98. Mais la campagne militaire fut catastrophique, l’armée royale, dirigée par le prince de Condé secondé du duc de La Valette et de l’archevêque de Bordeaux, subissant une importante défaite à Fontarabie le 7 septembre 1638. Condé et Sourdis s’empressèrent d’en faire porter la responsabilité au duc de La Valette99. Louis XIII et Richelieu prirent le parti de Condé, ordonnant à La Valette de venir rendre raison de son comportement à la cour et au duc

93 A.N., KK 1216, ff° 473 et 483. Lettres de Jean-Louis de Nogaret de La Valette, duc d'Épernon, au cardinal de Richelieu, Bordeaux, les 10/8 et 10/9/1636 ; Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), op. cit., t. V, p. 698. Minute d’une lettre du cardinal de Richelieu à Bernard de Nogaret, duc de La Valette, s.l., le 27/11/1636.

94 Joseph-François Michaud et Jean-Joseph-François Poujalat (éd.), Mémoires de Montrésor, t. III, Paris, 1838, p. 205-205 ; Guillaume Girard, Histoire de la vie, op. cit., p. 549-550 ; Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), op. cit., t. V, p. 718 Lettre du cardinal de Richelieu à Léon Bouthillier, comte de Chavigny, Ruel, 27/12/1636 ; id., p. 780. Minute d’une lettre du cardinal de Richelieu à Bernard de Nogaret, duc de La Valette, s.l., le 30/5/1637.

95 A.N., KK 1216, f° 73. Lettre de Jean-Louis de Nogaret de La Valette, duc d'Épernon, au cardinal de Richelieu, Bordeaux, le 20/12/1636 ; Nicholas Buck Fessenden, Epernon and Guyenne, op. cit., p. 152 ; Yves-Marie, Histoire des

Croquants. Etude des soulèvements populaires au XVIIe siècle dans le sud-ouest de la France, Genève, Dalloz, 1974, p. 426-427.

96 Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), op. cit., t. V, p. 1056-1057. Lettre du cardinal de Richelieu à Bernard de Nogaret, duc de La Valette, s.l., 24/6/1637 ; Guillaume Girard, Histoire de la vie, op. cit., p. 553.

97 Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), op. cit., t. V, p. 871. Lettre de Louis XIII à Jean-Louis de Nogaret de La Valette, duc d'Épernon, s.l., le 10/10/1637 ; id., p. 1060. Lettre du cardinal de Richelieu à Jean-Louis de Nogaret de La Valette, duc d'Épernon, s.l., le 10/10/1637.

98 A.D.G., 1B 24, f° 81 v° ; A.M.Bx., ms. 788, ff° 646-647, R.S. du 19/4/1638 ; Joseph-François Michaud et Jean-Joseph-François Poujalat (éd.), Mémoires du cardinal de Richelieu, t. IX, Paris, 1838, p. 248.

99 Véronique Larcade, « L'affaire de Fontarabie (1638-1639) : l'exploitation politique d'une défaite », dans Maurice Vaïsse (éd.), La défaite. Études offertes à Annie Rey-Goldzeiguer, Reims, P.U.R., 1994, p. 29-42.

d'Épernon de ne plus sortir de Plassac, tandis que le gouvernement de Guyenne était confié au Prince100. Le duc de La Valette préféra prendre la fuite, à la manière du duc de Guise sept ans plus tôt, et prit depuis Bordeaux le premier navire pour l’Angleterre autour des 22-23 octobre. Dès le 16 octobre 1638, le prince de Condé avait fait vérifier par le parlement de Bordeaux son nouveau pouvoir de gouverneur de Guyenne, retrouvant une charge qu’il avait exercée de 1596 à 1618101. Début décembre, Condé destitua les jurats de Bordeaux et changea le gouverneur du château Trompette, tous soupçonnés de sympathie envers le duc d'Épernon102. Un client du prince de Condé, M. de Millières, fut installé dans le château. Le duc de La Valette, jugé in

abstentia le 24 mai 1639 par une commission spéciale présidée par Louis XIII, fut condamné à

mort. Le 8 juin, dans les villes de Paris, Bordeaux et Bayonne, son effigie fut pendue sur la place des exécutions103. Le duc d'Épernon, étroitement surveillé par les agents de Richelieu et de Condé, fut contraint en juin 1641 de prendre pour nouvelle résidence forcée son inoffensif gouvernement de Loches, loin de la Guyenne en Touraine, où il mourut le 13 janvier de l’année suivante104.

En Provence, le successeur du duc de Guise, le maréchal de Vitry entretenait une relation difficile avec Richelieu. En 1611, Nicolas de L’Hospital, marquis de Vitry, avait succédé à son père à la charge de garde du corps du roi. Il obtint la faveur particulière de Louis XIII en 1617 lorsqu’il accepta d’exécuter Concino Concini, le favori de Marie de Médicis. Il l’abattit de trois coups de pistolet sur le pont dormant à l’entrée du Louvre et fut récompensé par le roi du titre de maréchal de France105. De la sorte, il devait sa situation en ayant mis à mort le premier protecteur de Richelieu, ce qui valut au Cardinal sa première disgrâce et celui-ci lui en conserva une sourde inimitié. Le maréchal de Vitry dut sa nomination au gouvernement de Provence à la seule protection de Louis XIII que le roi semble avoir imposé à Richelieu. Vitry n’hésitait pas à écrire au Cardinal pour lui rappeler la protection que le roi lui aurait promise lorsqu’il lui remit le commandement de cette province, forçant ainsi Richelieu à lui apporter son soutien106. Le visage

100 Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), op. cit., t. VI, p. 191-192, « Copie d’un mémoire envoyé à M. de Chavigny sur le sujet de Mrs d’Espernon et de La Valette », le 22/9/1638.

101 Véronique Larcade, Jean-Louis Nogaret de La Valette duc d'Épernon, op. cit., p. 133 ; A.D.G., 1B 24, f° 99 ; A.M.Bx., ms. 788, ff° 741-744, R.S. du 16/10/1638.

102 A.M.Bx., ms. 788, ff° 767-771, R.S. du 3/12/1638 ; Inventaire sommaire, op. cit., t. III, p. 212 et t. VIII, p. 318-321. 103 Véronique Larcade, Jean-Louis Nogaret de La Valette duc d'Épernon, op. cit., p. 136 ; Nicholas Buck Fessenden, Epernon

and Guyenne, op. cit., p. 166-167.

104 A.C., série M, t. XV, f° 386. Lettre de Joseph d’Andrault à Henri II de Bourbon-Condé, Bordeaux, le 12/3/1639 ;

id., t. XXIV, f° 162. Lettre de Joseph d’Andrault à Henri II de Bourbon-Condé, Bordeaux, le 22/7/1641 ; Guillaume

Girard, Histoire de la vie, op. cit., p. 586-590.

105 Édouard Lelièvre (éd.), Mémoires authentiques, op. cit., t. IV, p. 33-38.

106 B.n.F., ms. fr. 9354, ff° 131 et 171. Lettres de Nicolas de L’Hospital au cardinal de Richelieu, Aix-en-Provence, les 10/4 et 25/10/1633.