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Confrontation des données et analyse des divergences

LES METHODES D’EVALUATION DE LA PRODUCTION ISSUE DES ACTIVITES SOUTERRAINES

3.1.2. Analyse et évaluation des comptes

3.1.2.1. Confrontation des données et analyse des divergences

La confrontation des données provenant des différentes sources est partie intégrante de l‟établissement des comptes nationaux. Elle peut également servir à identifier les erreurs et les disparités qui subsistent. Dans l‟idéal, la confrontation des données devrait précéder l‟établissement des comptes nationaux, pour pouvoir vérifier les statistiques et améliorer leur qualité autrement dit, améliorer le système de collecte d‟information économique. La confrontation des données peut se faire de différentes manières :

 données tirées d‟enquêtes auprès des entreprises contre données fiscales ; salaires versés contre déclarations à la caisse sociale ; ventes de biens et services assujettis à la TVA perçue ; production contre impôts sur la production ;

 données tirées d‟enquêtes auprès des entreprises concernant la production de produits de base contre données tirées d‟enquêtes auprès des entreprises concernant les achats de produits de base ; ressources en biens et services contre emplois de ces biens et services ;

 données issues d‟enquêtes sur les dépenses contre données issues d‟enquêtes sur les revenus ; dépenses des ménages contre revenu disponible ;

 données tirées d‟enquêtes auprès des entreprises contre données tirées d‟enquêtes sur la population active ; emplois de la main-d‟œuvre contre ressources en main-d‟œuvre ; chiffre d‟affaires, valeur ajoutée, consommation intermédiaire, etc. contre emplois de la main-d‟œuvre.

Les points suivants illustrent l‟idée générale de cette approche au moyen d‟exemples lorsque cela est possible d‟en fournir.

a) Taxe sur la valeur ajoutée réelle contre taxe sur valeur ajoutée théorique.

Cette analyse est utile lorsque le montant de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) perçue est élevé. Le montant réel de la TVA perçue par les services fiscaux est comparé au montant

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théorique de la TVA qui aurait dû être perçue, calculé à partir des tableaux des ressources et des emplois. En principe, le montant théorique équivaut aux recettes de la TVA qui devraient être perçues par l‟administration fiscale s‟il n‟y avait pas fraude dans ce domaine. Dans la pratique, des différences apparaissent pour des raisons statistiques et juridiques, comme les faillites, les accords au cas par cas. Par conséquent, la TVA théorique devrait toujours être supérieure de 5% 5, disons, à la TVA réelle. Si la différence est moindre, ou pire encore, si la TVA théorique est inférieure à la TVA réelle, on peut supposer sans risque de se tromper qu‟il existe des activités économiques souterraines qui ne sont pas incluses dans les comptes nationaux.

b) Déclarations d’impôts réelles contre impôt sur le revenu théorique.

Le revenu à la disposition des ménages calculé sur la base des déclarations d‟impôt est comparé à celui qui est calculé à partir des comptes nationaux. Outre quelques différences dues à des éléments statistiques et juridiques comme la faillite et les défalcations au cas par cas, on peut supposer que les différences entre les deux chiffres résultent de la fraude fiscale, d‟une part et de l‟ES, d‟autre part. Une telle analyse s‟avère particulièrement utile lorsque les comptes nationaux ne se servent pas des statistiques de l‟impôt sur le revenu comme source de données, ce qui est le cas notamment aux Pays-Bas. Van de Laan et De Waard (1985) décrivent de quelle façon l‟office statistique des Pays-Bas a utilisé ce type d‟analyse pour établir une estimation de la fraude fiscale. Ils ont calculé que la différence entre les deux estimations du revenu s‟expliquait pour les trois quarts environ par des différences de définitions. De 1977 à 1985, la différence restante ressort en moyenne aux alentours de 6%, comme le montre le tableau 3.3. En principe, la différence entre les comptes nationaux et les statistiques de l‟impôt sur le revenu devrait donner des indications sur l‟ampleur de l‟activité économique qui est dissimulée pour des raisons liées à l‟impôt et qui a été incluse dans les comptes nationaux. Il convient cependant de signaler que cette analyse reste agrégée et qu‟elle doit être accompagnée par une analyse plus détaillée qui mettrait à jour plus d‟informations susceptibles de tirer de meilleures conclusions. Quelques années plus tard, cette étude a été reconduite une seconde fois. La situation avait évolué sur le plan juridique. Depuis 1987, les intérêts perçus sont devenus

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imposables. Par conséquent, les revenus d‟intérêts dissimulés par les ménages dans leur déclaration d‟impôt ont fortement diminué, passant de près de 30% du total pendant la période 1983-1987 à 15% environ en 1988-1990. D‟où l‟importance de vérifier et mettre à jour les hypothèses entrant les modèles d‟ajustement.

Tableau 3.3. Revenu primaire des ménages selon les comptes nationaux et les statistiques de l‟impôt sur le revenu pour les Pays-Bas 1977-1985.

En milliards de florins

1977 1979 1981 1983 1985

a) Statistiques de l‟impôt sur le revenu 192.2 223.9 246.0 264.6 283.8

b) Comptes nationaux 203.0 235.3 258.2 282.9 301.6

Différence b)-a) en% de b) +5.3 +4.8 +4.7 +6.5 +5.9

Source : Van de Laan et De Warrd, 1985.

c) Estimation du revenu national dans l’optique du revenu contre estimation du revenu national dans l’optique des dépenses.

Dans de nombreux pays, les comptes nationaux se prêtent parfaitement à une analyse des divergences, car ils fournissent des estimations du revenu national à la fois dans l‟optique du revenu et dans l‟optique des dépenses [MacAfee, (1980) ; O‟Higgins, (1989)]. La première estimation n‟inclut pas les revenus dissimulés pour des raisons fiscales, mais la seconde le fait. En conséquence, la différence entre ces deux estimations peut être attribuée en partie à la fraude fiscale. Cette divergence peut également être due à un décalage dans le temps et à des erreurs statistiques. Néanmoins, selon MacAfee (1980), la moyenne de ces dernières causes est de zéro à long terme. Bien entendu, il existe probablement des omissions dans les estimations dans l‟optique des dépenses, comme les dépenses concernant les stupéfiants, le jeu et l‟alcool.

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d) Emplois de la main-d’œuvre contre ressources en main-d’œuvre.

Les salaires et l‟emploi mesurés sous l‟angle des emplois (employeur) et celui des ressources (employé) peuvent être comparés. Après la prise en compte des différences conceptuelles les mesures obtenues devraient être identiques [Hayes, K. et E. Lozano (1998)]. L‟examen des divergences peut donner des indications sur l‟ampleur des activités qui manquent (donc cachées) dans les données relatives aux entreprises. En fait, cette approche est d‟une efficacité telle que l‟analyse des ressources en main-d‟œuvre est un des mécanismes prescrit par la communauté européenne en 1994 pour évaluer l‟exhaustivité des estimations du PIB. Les états membres de l„Union européenne sont tenus de comparer systématiquement les estimations de l‟emploi qui fondent le calcul de leur PIB avec les estimations de l‟emploi tirées des ressources des ménages. Les états membres doivent procéder de la manière suivante :

Estimation de la main-d‟œuvre utilisée à la base des estimations du PIB. Il s‟agit de calculer la main d‟œuvre utilisée qui est présente dans les sources de données utilisées pour établir les estimations du PIB.

Estimation de la main-d‟œuvre utilisée à partir des données des enquêtes auprès des

ménages. Habituellement ces données sont obtenues par le biais d‟une enquête sur la population active.

Normalisation des estimations de la main-d‟œuvre utilisée. Conversion des estimations de la main-d‟œuvre utilisée à partir des données fournies par les entreprises (emplois) et des ménages (ressources) en unités identiques, comme les heures de travail et les emplois équivalents plein-temps.

Comparaison des deux séries d‟estimation. Il s‟agit d‟analyser les divergences. Un excédent de la main-d‟œuvre utilisée estimée à partir des données provenant des ménages par rapport à l‟estimation à partir de données des entreprises témoigne de l‟existence d‟une production dissimulée. Il s‟agit d‟une limite inférieure car une partie de la main-d‟œuvre utilisée pourrait être manquante dans les deux sources. Une absence de différence ou un surplus de main-d‟œuvre utilisée d‟après les données des entreprises par rapport aux données des ménages indique que ces dernières n‟élargissent pas le champ de couverture.

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La dernière étape de la procédure d‟exhaustivité de l‟EU consiste à calculer un coefficient multiplicateur permettant d‟ajuster les estimations de la production et de la valeur ajoutée afin de tenir compte de la production dissimulée. On reviendra sur ce point dans les sous sections 3.2.2.1 et 3.2.2.3 qui contiennent respectivement une description plus complète de la méthode de la main-d‟œuvre utilisée en tant qu‟instrument de mesure et d‟ajustement et un exemple de son application par l‟Istat.