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CHAPITRE 3. Positionnements conceptuels

3.2 Conclusion intermédiaire et questionnements

Dans ce chapitre, nous avons examiné certains concepts qui seront utiles pour l’approfondissement de nos témoignages et même pour théoriser des schémas d’analyses issus de notre terrain d’étude. Puisque cette recherche s’inscrit dans une perspective « en miroir », nous avons choisi des concepts

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binaires qui s’opposent et se complètent. Ainsi la construction de l’imaginaire associé à l’autochtone, même s’il n’est pas formulé ainsi par nos interlocuteurs mais qui se ressent à travers leurs descriptions (que ce soit dans les définitions de ce qu’est un Suisse, un Suisse allemand ou un Suisse romand, sur ce qui les rassemble ou sur ce qui les différencie), sera énoncée notamment en rapport avec son corollaire, soit la construction de l’imaginaire rattaché à l’étranger.

Si ces représentations conceptuelles sont dichotomiques et que les assignations identitaires sont le plus souvent statiques et univoques parce qu’elles s’inscrivent dans des rapports de force entre une majorité et une (des) minorité(s), nous avons souligné qu’il existait de nouvelles typologies liées à la mobilité qui complexifiaient la réalité migratoire ainsi que les figures possibles de l’« étranger » ; en ce sens, la migration est plutôt pluripolaire que bipolaire. Nous avons également précisé qu’une minorité est toujours définie par des identifications à des groupes et qui pourront être minoritaire ou majoritaire selon les contextes ou les critères d’évaluation : tout dépendra de la dynamique relationnelle entre les groupes en contacts alors que la marge de manœuvre pour le minoritaire et sa capacité ou la possibilité de modifier son statut sera lié à l’attitude du groupe dominant. C’est sous cet angle que nous avons amené la notion d’intégration, puisque nous sommes d’avis que la conception même du processus ainsi que les éléments perçus comme adéquats pour sa définition relèvent d’un rapport de force entre l’autochtone et l’étranger.

Face à ces assignations et catégorisations, souvent associées à des « origines culturelles », les individus connaissent des remédiations, recompositions, renégociations de leurs héritages puisque c’est devant les contraintes extérieures et intérieurs que s’effectue la (re)lecture du passé, que c’est dans le passé que se niche l’avenir suivant les projections et objectifs personnels, notamment dans le cas l’adaptation à un nouvel environnement sociolinguistique.

Nous avons ensuite abordé les concepts clés qui nous permettront de construire des catégories d’analyses. Après avoir vu plus en détails le concept de représentation, tant sur le plan de son contenu théorique que sur les trois théories structurales menant à sa schématisation, nous avons rappelé les grandes lignes de la dynamique du rapprochement et de l’éloignement puisque ce positionnement théorique avait été développé dans d’autres parties.

Notre travail cherche à comprendre si les représentations sur les langues, sur leurs statuts et sur les modes de cohabitation dans des communes rurbaines « bilingues » ont des effets sur les processus

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d’insertion sociolangagiers des « étrangers ». Or, nous pouvons ici nous interroger sur la pertinence de ces concepts et des concepts opératoires, en regard de notre étude. S’ils nous permettent de théoriser sur ces catégories et statuts, tant symboliques qu’officiels, nous nous questionnons s’ils seront réellement utiles pour observer et analyser les témoignages recueillis auprès de nos deux types d’acteurs, soit les « acteurs locaux » et les « acteurs ayant connu la migration »179. Sont-ils adéquats

pour développer des analyses qui s’inspirent de la Grounded Theory ? Seront-ils utiles pour revisiter des définitions collectives et individuelles, recouvrir des réalités propres à ce contexte de recherche ? Pourrons-nous ainsi travailler sur les autodéfinitions de chacun de ces groupes d’individus, sur leurs appartenances, leurs valeurs, leur façon de se concevoir et de concevoir l’autre ? Enfin, nos objectifs de recherches devront-ils être reformulés ? Ces objectifs de recherche, ainsi que notre problématique sont présentés dans notre cadre méthodologique, que nous développons dans la deuxième étape de cette recherche.

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DEUXIEME PARTIE. CADRE METHODOLOGIQUE

INTRODUCTION

Cette deuxième partie est consacrée à notre cadre méthodologique. Nous intéressant aux représentations des différents acteurs communaux, ainsi qu’aux dynamiques relationnelles entre les groupes, nous nous inscrivons résolument dans une perspective méthodologique qualitative. C’est pour cette raison que nous avons choisi de mener des entretiens avec nos interlocuteurs, entretiens que nous inscrivons dans l’approche compréhensive. Toujours dans cette perspective qualitative, nous allons voir que la démarche proposée par le courant de la Grounded Theory – ainsi que l’analyse inductive générale qui s’inspire de cette approche – conçoit que théorie et terrain sont connectés l’un à l’autre, puisque ce sera à partir du terrain que la théorie prendra forme, et proposera des moyens pour approfondir l’analyse du terrain. Nous verrons aussi en quoi cette particularité convient à notre propre terrain d’étude.

Cette deuxième partie est donc divisée en deux. Le premier chapitre offre tout d’abord des précisions sur notre cadre méthodologique. Alors que nous traitons des perspectives scientifiques méthodologiques qui nous ont inspirées pour notre recherche, ainsi que les différents biais dont il faut tenir compte dans une démarche qualitative, nous présentons ensuite notre propre contexte de terrain. C’est ainsi que nous apportons des éclairages plus particuliers sur la constitution de nos corpus, sur les difficultés rencontrées, sur les biais possibles ainsi que sur nos grilles d’entretien. Nous terminons cette partie par la question de notre propre démarche analytique, qui nous a permis de structurer nos données et de construire nos analyses.

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CHAPITRE 1. L’ANALYSE QUALITATIVE. POSITIONNEMENTS ET BIAIS