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Première partie : Comprendre la mutation d’une confrérie sous une charge traditionnelle forte dans un contexte occidental

Chapitre 1 : Construction théorique de la recherche

2) Les concepts mobilisés dans l’étude

Dans cette recherche, nous avons essayé de mobiliser trois concepts clés qui nous semblent importants de mettre à plat. Le mouridisme, la tradition et les médias informatisés représentent trois ensembles à l’intérieur desquels on mesure les pratiques et les évolutions de la communauté. Dans le mouridisme, il est question de voir les éléments constitutifs qui fondent et consolident même son essence. Ses différentes institutions comme les daaras, les dahiras et le Magal constituent son socle identitaire sur lequel repose la posture cultuelle de la communauté.

La tradition marque en elle-même les héritages, les recompositions culturelles et cultuelles, mais également les moments de vie des disciples. Cela traduit une certaine réincorporation du passé dans le présent à travers de nouvelles pratiques conçues comme traditionnelles. Nous nous sommes largement inspirés des travaux de Gérard Lenclud pour traiter ce concept.

Quant aux médias informatisés, ils révèlent la capacité de réappropriation des mourides à travers les différents dispositifs de médiations numériques. Ils symbolisent en eux l’orientation de la communauté vers de nouvelles pratiques médiatiques garantissant un accès plus rapide aux contenus. Les médias informatisés bouleversent les modes de participation et suggèrent de nouveaux rapports entre le disciple et sa communauté.

2-1) Le mouridisme

Nous ne souhaitons pas traiter ici le concept mouridisme sous une approche diachronique. Il n’est pas considéré comme un mouvement mais plutôt un concept à travailler pour mieux le fixer afin d’étudier les mécanismes constitutifs qui le composent. Pour des raisons pratiques, il serait plus simple pour nous de le voir sous une approche anthropo-communicationnelle. Mais tout de même, un bref rappel de son contexte de naissance s’impose malgré le fait qu’on y voit une visée historique25. Autrement dit, nous ne prétendons pas faire une étude historique encore moins une monographie du mouridisme. D’autres chercheurs se sont déjà attelés à cette tâche.

25 Nous ne développons pas ici une approche diachronique même s’il faut s’intéresser au contexte de naissance de la confrérie.

Pendant plusieurs siècles, la société sénégalaise a subi de nombreux changements dont la population porte toujours les stigmates. La période allant du XVIIe au XIXe siècle est marquée par une déstabilisation profonde de la « société sénégambienne ». L’islam, présent dans cette région depuis le VIIIe siècle, constitue un refuge pour les populations locales face au système colonial qui prend de l’ampleur. C’est dans cette période très tendue qu’une révolution théocratique intervient au Fouta-Toro en 1776. Au XIXe siècle, l’islam commence à gagner du terrain avec l’influence croissante des marabouts26. Selon Bassirou Dieng (2003)27,

« Le mouvement islamique prit une grande ampleur au XIXe siècle. Un soulèvement maraboutique en 1825 au Waalo (Sénégal) ne connut pas de succès. Un autre mouvement est noté au Ndiambour (région de Louga, Sénégal) contre le pouvoir royal en 1859. Ahmadou Cheikhou créa dans le Fouta une entité entre 1869 et 1875. Mbaba Diakhou organisa la théocratie du Rip en 1860. Le projet maraboutique vise la restauration des valeurs sociales et morales en s’inspirant de l’Islam. Il faut dire que les régimes Ceddo, qui instaurèrent deux siècles de violence, avaient profondément subverti les valeurs traditionnelles. Mais la pénétration française, qui se développe dans le même contexte, percevra bientôt l’Islam comme un frein à ses visées. Entre l’Islam, qui réorganisait la société en communautés solidaires, et la colonie française, qui mettait en place une administration pour une meilleure exploitation des richesses, il y eut un conflit ouvert et implacable. Des autorités coloniales comme Carrère, Paul Holle et Archinard proposèrent une action énergique contre ce qu’ils appelaient « le péril de l’islam ». L’islam était présenté comme une idolâtrie, et le fatalisme qu’il véhicule comme une opposition au progrès. Ainsi les luttes islamiques s’assimilent

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Marabout est une déformation du mot al-murabitoun (almoravid), à ne pas prendre comme charlatan mais plutôt un chef religieux qui aide et guide ses disciples dans le droit chemin.

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Dieng, Bassirou, « Oralité et Création. L’épopée et l’islamisation des traditions de l’Ouest africain » in Ethiopiques n°70. Hommage à L. S. Senghor, 1er semestre 2003.

progressivement à un combat de résistance face à la colonisation française. Les guerres menées par Cheikhou Ahmadou au Macina (1818), par El Hadji Oumar entre 1854 et 1864 (Mali et Sénégal) confortèrent l’idée d’un Jihad contre les envahisseurs ».

C’est dans ce contexte houleux qu’est né le mouridisme considéré comme une confrérie. L’appellation est ici discutable : du point de vue de la mystique, la notion de voie est préférée à celle de la confrérie. Elle renvoie davantage à une organisation institutionnalisée. En plus, dans l’appellation wolof, on dit Yônu Murid, c’est-à-dire la voie mouride. C’est ce qui explique notre réticence vis-à-vis du terme confrérie. Malgré cela, le terme continue d’être utilisé tout au long du mémoire pour des raisons de convenance et d’appellation plus simple. Le mouridisme est fondé par Cheikh Ahmadou Bamba vers 1887 (nous ne disposons pas de l’acte de fondation du mouridisme, mais la plupart de nos enquêtés fait état de cette date).

C’est dans une atmosphère sociale, émaillée par une dualité colonisateurs-rois résistants liée à la perte des valeurs identitaires qu’il juge nécessaire de mettre en place le mouridisme afin d’aider ses compatriotes à retrouver un idéal religieux. Cette organisation essaie d’apporter des réponses aux questionnements de sénégalais. Pour cela elle épouse les contours de l’Islam en proposant une réhabilitation (peut être différente du sens occidental du terme) des valeurs islamiques appliquées à l’identité culturelle sénégalaise. La réhabilitation au sens mouride du terme consiste à une remise en fonction ou une réactualisation des valeurs de l’Islam rangées aux oubliettes par une population éprouvée et déroutée par d’autres influences.

Dans une volonté de fédérer les disciples ou musulmans de tout bord, le fondateur pose la réhabilitation sous ces termes : « Je n’ai point fondé une "confrérie", j’ai plutôt trouvé la voie qu’avait scrupuleusement suivie le prophète (psl) et ses compagnons complètement flétris, je l’ai défrichée le plus proprement, je l’ai également rénovée dans toute son originalité et lancée l’appel suivant. Tout pèlerin qui désire partir peut venir, voici la voie réhabilitée : cette voie c’est celle du pacte d’allégeance » (Bamba, 1985).

Cette réhabilitation constitue le socle ou les fondements de base de la communauté mouride. Son essence tourne autour de trois principes fondamentaux : le travail, la solidarité et la prière. Il utilise le soufisme et la mystique musulmane pour guider ses disciples qui aspirent à cette voie.

Le soufisme est la science des états spirituels et des stations ou stades permanents que découvre le croyant dans la voie de Dieu. Ne peut être appelé soufi que le muhsin (vertueux) ayant atteint un très haut degré dans la pratique de cette science. Les postulants étant généralement appelés Murid (aspirants ou désirants). Selon Didier Hamoneau (1998), le soufisme est une science qui consiste à la connaissance des états et des stations, vécue, goûtée, expérimentée réellement dans le fort intérieur. Dans son aspect extérieur, il comporte la description de ces états et les moyens d’obtenir les stations, par la pratique, ainsi que par une médiation appropriée et un certain nombre de règles de bienséance spécifiques à cette discipline. La mystique mouride, quant à elle, est fondée sur quelques principes fondateurs de cette voie. Il s’agit de la foi, de la soumission et de l’action (nous ne les développons pas ici).

Selon Jean Copans (1972), le succès de ce mouvement trouve son explication et son interprétation dans le déclin et l’écroulement des structures politiques et traditionnelles. Sa naissance coïncidait à cette période où l’aristocratie Ceddo avait perdu sa mainmise sur les sociétés traditionnelles. La société wolof (l’ethnie majoritaire au Sénégal) tente une reconstruction d’un cadre nouveau, original, pour satisfaire le besoin d’encadrement des masses tout en exprimant la défiance du colonisé à l’égard du colonisateur. Par conséquent, une aventure mystique et individuelle que beaucoup ne voyaient pas de bon œil, celle de Cheikh Ahmadou Bamba, a alors servi de point départ à un regroupement de paysans autour des marabouts. Cette réaction, si nous pouvons l’appeler ainsi, augure une volonté de repli, de contrepoids devant l’envahissement colonial.

À partir de là, nous constatons que la société wolof mouride s’est durablement installée dans une culture islamique aussi étrangère que celle qu’apporte la colonisation. Et cela pour réduire les chances d’assimilation et de modernisation structurelle que veulent instaurer les administrateurs coloniaux de cette époque. Il faut le rappeler, dans ce contexte, tous les gens qui rejoignent la voie sont des incroyants qui ne vouent pas un grand intérêt à la vie spirituelle. Ce qui explique l’attachement à certaines valeurs inhérentes à la tradition et à la ruralité avec tout ce que ça incombe comme pratiques culturelles.

Cette réticence que nourrissait le mouridisme à l’égard de la politique et d’une certaine modernité culturelle s’estompe de plus en plus avec la ferme volonté d’être en phase avec le monde. Cette mutation s’est accompagnée d’un empilement des moyens de communication qui placent toujours le mouridisme au centre de l’actualité sénégalaise avec la naissance des institutions culturelles comme le Magal qui, doit permettre de maintenir son aura au sein de

la classe politique, mais également les dahiras et daaras, qui concentrent les forces énergiques du mouridisme.

Le Magal est la grande assemblée annuelle des mourides. C’est la commémoration de la date de départ du fondateur du mouridisme en exil au Gabon où il resta presque huit ans : le 12 août 1895, correspondant au 18 du mois de Safar 1313. Cette fête constitue le pèlerinage pour la umma de la mouridiya ; c’est un événement inscrit dans le temps pour une reconnaissance et une matérialisation de la dimension incontestable d’un homme de Dieu. Le Magal est célébré partout dans monde où se trouvent des disciples et sympathisants mourides ; il a pour but de se rappeler du Cheikh et de saluer à sa juste valeur son œuvre.

Sur cette nouvelle donne, il n’est pas rare de voir apparaître des difficultés entre le spirituel et le temporel. Mais il est sans doute utile de rappeler que bien avant qu’on arrive à l’échelle sénégalaise, des penseurs musulmans ont déjà posé le problème. Déjà en 1085 l’imam Al Ghazali, après avoir lu Ibn Sinan et Al Farabi, analyse les rapports entre le pouvoir politique et le pouvoir spirituel. Dans l’affrontement militaire et intellectuel, entre le sunnisme et le chiisme, entre le califat Abbasside d’une part et l’état Fatimide d’autre part, Ghazali est mobilisé. C’est ainsi que dans son ouvrage, « les vices de l’ésotérisme », il pose le problème de la légitimité des pouvoirs politiques par le spirituel, c’est-à-dire le religieux a l’ascendant sur le politique et que la laïcité est parfois mise en rude épreuve. Ce débat posé à cette époque garde toute son actualité : il résume bien encore les rapports entre le mouridisme et le pouvoir politique aujourd’hui au Sénégal. Plus tard, l’engagement dans la politique des autochtones a entraîné une nouvelle configuration. Le temporel a toujours besoin de l’onction du spirituel et semble lui vouer une dépendance. Mais ce besoin a toujours été sous-tendu par un diptyque attirance-répulsion. En dépit de tout, le mouridisme reste ancré dans ses traditions et les perpétue en les mettant en phase avec son environnement.

Il faut rappeler que le Sénégal est l’un des rares pays d’Afrique à disposer d’un régime à caractère politico-religieux particulier. En effet, même si de façon officielle il se réclame d’une république, le pouvoir religieux influence fortement le pouvoir politique. Malgré le régime républicain et laïc, on remarque que c’est le spirituel qui, de façon tacite, guide et légitime l’exécutif et le législatif. À l’approche des consultations électorales, les « leaders » politiques convoitent le soutien et l’approbation des chefs religieux. La nouvelle configuration politico-religieuse a conduit ces chefs religieux (surtout intellectuels) à convoiter et à investir

le champ profane. D’où la posture ou le statut de partenaire-adversaire occupé par le mouridisme, que nous qualifions d’attirance-répulsion.

Nous allons présenter succinctement le fondateur de la voie mouride jouissant d’une popularité grâce aux nombreux ouvrages et études qui ont été publiés sur le mouridisme. Loin d’être issu de la « plèbe » ou du « bas clergé », Cheikh Ahmadou Bamba est par ses origines très lié aux milieux dirigeants wolofs dont il partage les péripéties sous le coup de la colonisation. L’ouvrage d’Almamy Mamadou Wane (2006) nous édifie sur son univers. Il fait partie de cette aristocratie de la religion et du savoir que les princes cherchaient à se concilier parce qu’elle constituait une force relativement autonome, susceptible, comme cela s’était produit à plusieurs reprises, de concurrencer leur légitimité.

Le succès d’Ahmadou Bamba auprès des masses prend forme après la chute du Cayor28 en 1886. Il doit son exil de sept ans au Gabon en 1895 à la thèse du complot anti-français développé par les chefs indigènes qui étaient effrayés par son aura. Sa pensée privilégie une idée très inspirée du soufisme qui, tournant le dos aux biens terrestres, donne une place importante à l’étude, à une vie intérieure faite de prières et d’introspection dans le but de se rapprocher de Dieu.

Pour Christian Coulon, l’attitude d’Amadou Bamba montrait un homme soucieux de vivre sa foi hors des contingences de cette terre. Pour montrer la façon dont il vivait dans un dépouillement total de choses matérielles, nous évoquons le témoignage que le commandant de cercle de Louga29 lui a adressé : « …le plus grand chef spirituel des musulmans du Sénégal, il vit pauvrement dans la solitude, dans la prière et la méditation, l’esprit replié sur la vie intérieure. Ses plus ardents disciples ne le voyaient que très rarement (…) indifférent aux richesses comme au pouvoir, il ne garde rien des nombreuses et importantes offrandes qu’il reçoit de tous les points du territoire », (Coulon, 1981).

Cette vie que menait le Cheikh se traduit dans ses œuvres littéraires. Il incitait ses disciples à se désintéresser des choses fastes de la vie. Serigne Mamadou Lamine Diop Dagana (1960) atteste dans son ouvrage que le Cheikh ne possédait aucune poche dans aucun de ses vêtements.

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Le Cayor est un ancien royaume du Sénégal précolonial. De nos jours il correspond aux actuelles régions de Thiès et de Dakar.

L’essence du mouridisme résulte de ses principes de bases, à savoir le travail comme acte d’adoration, la prière et la solidarité. L’ouvrage de Didier Hamoneau (1998) apporte quelques éclairages sur la portée de la voie mouride. Il cite l’ouvrage du Cheikh « les cadenas de l’enfer » qui précise que les pratiques spécifiques nécessaires qui mènent le simple mouride au soufi accompli sont :

« 1-s’attacher au Coran

2-s’attacher à la souna (la tradition du prophète) et l’élu parfait. 3-fuir les passions

4-fuir les mauvaises innovations ».

« 5-respecter les chouyoukhs soumis (les maîtres bien guidés) 6-trouver des excuses à l’être humain (miséricorde)

7-prolonger le wird en aimant Dieu ».

Il exhortait les disciples à innover avec méthode tout en demeurant fidèle aux principes du mouridisme. Autrement dit, il souhaite allier traditionalisme et modernisme au profit de l’enseignement et de la transmission de son œuvre. Ce qui laisse sous-entendre, que quelque chose doit disparaître au fil des ans, mais aussi quelque chose doit « rester immuable » dans les différents domaines de la vie. Pour lui l’innovation devait commencer avant tout par l’enseignement religieux qui était essentiellement fondé sur des ouvrages composés ailleurs et à des époques très reculées, au premier siècle de l’hégire principalement. À cette époque, on ne se souciait guère de l’adaptation de ces ouvrages aux réalités locales. D’où son désir d’innovation constante. Lorsqu’on écrit un livre, on doit tenir compte d’une catégorie de lecteurs ou d’apprenants mais également du contexte spatio-temporel dans lequel on écrit. Conscient des réalités locales et des services que les livres peuvent rendre aux hommes surtout aux mourides, il réécrit, dans un langage plus accessible aux étudiants de son milieu, les grands ouvrages datant de l’hégire. C’est ainsi qu’il a versifié « Bidâyatul Hidâya » (le début de la bonne direction) de Ghazali qui devient « Malayyinul Sudûr » (celui qui adoucit les cœurs), mais également du « Khâtimatu Tasawuf » (le sceau du soufisme) d’AL-Yadâli qui devient « Masâlikul Jinân » (les itinéraires du paradis).

Cette vision du mouridisme s’est métamorphosée dans le temps, même si les enseignements du Cheikh restent toujours les soubassements. On assiste aujourd’hui à une transformation ou une évolution de la pratique avec une stratification des pratiques et des rites. Ces évolutions sont les résultats d’une capacité d’adaptation à des contextes différents des situations

habituelles. Almamy Wane (2003) souligne qu’ « une évolution du mouridisme est rendue nécessaire par la crise du monde agricole ».

Cette évolution a largement dépassé la vision wannienne, c’est-à-dire ne se limitant pas que sur la crise agricole, car le mouridisme nous offre de nouveaux contours fort intéressant à analyser. Il s’y dégage quelques organes ou ramifications noyautés par quelques-uns. C’est ainsi que l’on voit apparaître des sous-groupes ou des variantes qui dégagent de nouvelles perspectives pour une analyse de pratiques.

Dans son ouvrage, « Touba la capitale des Mourides », Cheikh Guèye (2002) dresse deux groupes sociologiquement intéressant à analyser. Il s’agit de la descendance de la lignée du Cheikh qu’il qualifie des « tenants de la mémoire » et les anciens disciples (ou leur famille) qui, au fil du temps, ont acquis un statut social enviable et convoitent aussi certaines sphères liées à l’administration centrale du khalifat. Ce groupe, il le nomme « les exclus de la mémoire ». Il serait intéressant pour nous en tant qu’observateurs de s’interroger sur les influences que peuvent avoir ces groupes sur les disciples et leurs interactions. Par « tenants de la mémoire » nous parlons des fils, petit-fils et arrière petit-fils du fondateur du mouridisme. C’est la lignée patrilinéaire qui explique le nom de famille (MBACKE) d’Ahmadou Bamba. Les « exclus de la mémoire » sont les descendants des premiers disciples et anciens compagnons d’Ahmadou Bamba. Ce qui explique les noms de famille disparates comme Diop, Diakhaté, Lô, Sarr etc.

L’évolution du mouridisme a occasionné un nouveau regard grâce à l’adoption d’une nouvelle stratégie. Celle-ci concerne la force avec laquelle les mourides ont muté des zones rurales vers les zones urbaines, mais également une facilité de s’approprier les nouveaux moyens de communication. Cela nous conduit à s’interroger sur la notion de société de l’information telle que l’a posé Yves Jeanneret (2007). Peut-on parler de la société de l’information au sein de la communauté mouride compte tenu de sa mainmise sur les médias sénégalais ?

Pour y voir plus clair, nous nous intéressons de plus près à la cellule de communication mise en place pour la première fois de son histoire par le nouveau Khalife. Ne voyons-nous pas là un signe ou une volonté de mieux adapter le mouridisme à son temps ? Dans cette perspective, le mouridisme puise la substance de sa communication dans les strates de la tradition.

2-2) La tradition

Les mourides, pour développer leur voie ont su faire preuve de détermination, d’organisation, de pragmatisme et un sens remarquable de la solidarité. La « notion » de remarquable est ici utilisée juste pour mettre en relief et appuyer le caractère singulier des mourides par rapport