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1.3 Les acteurs du secteur éolien en France 88

1.3.6 Les collectivités territoriales

Si une commune concernée par un projet éolien a un rôle crucial à jouer, son niveau d’implication va dépendre de ses ressources financières et humaines (de la simple proposition de la ZDE au préfet jusqu’à la participation au financement).

Un des rôles principaux des collectivités territoriales sera notamment l’information et la concertation avec les habitants. Il ne faut cependant pas négliger la concertation entre élus grâce à un comité de réflexion ou de pilotage par exemple. Ce comité peut être élargi dans un premier temps pour définir une position politique commune et ensuite restreindre le comité aux communes concernées et intéressées.

La gestion des réunions publiques doit être menée par les élus et non pas le porteur de projet. Ce dernier doit uniquement être présent comme support technique. Il est important que les collectivités montrent à la population et aux éventuels opposants qu’elles gardent la maîtrise du projet.

Les recettes fiscales pour une commune qui accueille un parc éolien

La taxe professionnelle (TP) a été remplacée par la contribution économique territoriale (CET). Moins incitative que la TP, la CET est composée de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et la cotisation foncière des entreprises (CFE). S’y ajoutent l’impôt forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER), ainsi que la taxe foncière sur le bâti. L’IFER représente plus des deux tiers des recettes fiscales éoliennes.

Tableau 8 : Répartition des recettes de l'IFER d'un parc éolien selon le statut de la commune113

Statut de la

commune Commune EPCI Département

Commune isolée 20% - 80%

Commune dans EPCI

à fiscalité unique - 70% 30%

Commune dans EPCI à fiscalité additionnelle

20% 50% 30%

Lorsqu’une commune n’a pas intégré une Communauté de communes, elle touche 20% des recettes fiscales, contre 80% pour le Département. Cette répartition peut être responsable de tension sur le territoire car il peut sembler injuste que le Département, non concerné par les contraintes des éoliennes, touche davantage que la commune, elle, directement concernée.

Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) sont :

les syndicats de communes (créés par la loi du 22 mars 1890) ;

les communautés de communes (créées par la loi du 6 février 1992) ;

les communautés urbaines (créées par la loi du 31 décembre 1966) ;

les communautés d’agglomération (créées par la loi du 12 juillet 1999) ;

les syndicats d’agglomération nouvelle (créés par la loi du 13 juillet 1983) ;

les métropoles (créées par la loi du 16 décembre 2010).

Ces groupements perçoivent une part additionnelle des quatre impôts directs locaux (taxe d’habitation, taxe foncière sur les propriétés bâties, taxe foncière sur les propriétés non bâties, CET).

Concrètement, dans une EPCI à fiscalité unique (ou propre), les sommes de la CET sont reversées à la Communauté de Communes qui peut choisir de ne rien reverser aux communes concernées par un parc éolien (sentiment d’injustice fort). La commune n’est pas concertée.

Dans une EPCI à fiscalité additionnelle, la commune est appelée à fixer le taux, les exonérations et à percevoir le produit de la part additionnelle de chaque impôt qui leur revient

Les simulations réalisées par le SER-FEE confirment que la nouvelle fiscalité freine le développement de la filière éolienne. La loi de finances pour 2011 a relevé le montant de l’IFER éolien de 2913€/MW à 7000€/MW, faisant passer la charge fiscale d’un parc

éolien à 8800€/MW. Malgré cette augmentation de la charge, les communes ont perdu la moitié de leurs ressources par rapport à l’ancienne fiscalité (la taxe professionnelle).

Cette cartographie ne représente que les acteurs liés à la biodiversité pour le secteur de la Marne. Focalisée sur un territoire restreint pour un domaine lui-même réduit (la biodiversité), elle met en évidence le nombre d’acteurs à prendre en considération lors du développement d’un parc éolien. Elle montre que les jeux des acteurs en présence lors de l’implantation d’un parc éolien sont complexes et fortement noués. Aux parties prenantes locales, s’ajoutent les parties prenantes nationales, donc même sur un territoire désigné (La Marne), les structures nationales interviennent lors de la phase projet (FNE – France Nature Environnement, LPO – Ligue de Protection des Oiseaux, ADEME, etc.).

Six grands types de relation sont ici révélés : - Bonne relation,

- Bonne relation avec possibilité d’influencer, - Relation à consolider,

- Relation à créer, - Relations difficiles,

- Mauvaises relations avérées.

ERELIA ne subit pas directement de mauvaises relations avec un acteur en particulier. Cependant elle subit celles existantes entre les acteurs dont certaines semblent, d’une certaine manière, logiques (La LPO en opposition à la FNC – Fédération Nationale des Chasseurs).

ERELIA doit donc sur le territoire de son projet, apprendre à identifier ces relations, qu’elles soient bonnes ou mauvaises, pour anticiper d’éventuels conflits et dialoguer au mieux avec chacun des intervenants.

Les acteurs du secteur éolien en France : Conclusion

La filière éolienne est dominée par deux grands groupes énergétiques : EDF et GDF SUEZ. EDF, à travers EDF Energies Nouvelles, développe, construit et exploite des parcs éoliens en Europe et en Amérique du Nord, pour une puissance installée de 3 533 MW en 2012. Son activité en France est moindre (17%) et EDF Energies Nouvelles n’exploite que 371 MW sur le territoire français. Cependant son offre est claire et bien identifiée, contrairement à GDF SUEZ qui accumule différentes filiales éoliennes sur le même territoire.

En effet, avec La Compagnie du Vent, Eole Generation et ERELIA, Maïa Eolis et la CN’Air, l’offre de GDF SUEZ semble confuse. De plus, pour les français, GDF SUEZ reste connecté « gaz ».

Dans une tentative de simplification, Eole Generation et ERELIA ont fusionné en début d’année 2013. GDF SUEZ exploite 23 parcs éoliens en France pour une capacité installée de 290 MW, ce qui lui vaut la seconde place après EDF.

Du côté des constructeurs, aucune entreprise française ne pèse réellement sur le marché. L’Allemagne et le Danemark se partagent les parts de marché les plus importantes, ce qui s’explique par l’antériorité de ces deux pays sur le secteur éolien. Par contre, on compte plus de 180 sous-traitants français qui produisent pour les constructeurs étrangers, des composantes de l’éolienne. Selon Windustry France, ce sont 300 entreprises françaises (développeurs éoliens, bureaux d’études, etc.) qui sont mobilisées dans la filière éolienne et représentent environ 10 000 emplois.

L’ADEME, le SER, la FEE et le CLER ont des missions similaires : promouvoir les énergies renouvelables en France auprès des différents publics ; les élus, les citoyens, les entreprises principalement. Les associations gravitent autour de ces organismes et visent le même public. Se considérant elles-mêmes comme plus objectives car indépendantes des instances étatiques ou des entreprises, elles ont le même objectif de préservation de l’environnement et de protection du patrimoine. C’est leur positionnement qui finalement les sépare : pro ou anti-éoliennes, les associations se veulent la voix des citoyens et visent à défendre leurs intérêts. Leur rôle est généralement de remettre le débat au sein d’une dimension locale, en s’intéressant à des

problématiques propres à un territoire spécifique. Elles cherchent à fournir aux citoyens une information alternative et complémentaire aux orientations nationales.

Enfin, dans le développement éolien, les collectivités territoriales jouent un rôle primordial : un projet éolien ne peut se faire sans le soutien des élus du territoire. Ce sont eux qui présentent et proposent le projet aux riverains.

Conclusion de partie

Les accidents écologiques dans les années 1980, particulièrement les nauffrages pétroliers et Tchernobyl, bouleversent l’opinion publique qui commence à réellement se préoccuper de l’environnement. Ces catastrophes écologiques ont trouvé une résonnance particulière grâce aux canaux médiatiques (qui n’étaient pas autant développés pour relayer les castastrophes précédentes). L’impact humain sur l’environnement commence à être pris en considération et le protocole de Kyoto en 1997 marque l’engagement en Europe de développer des énergies renouvelables considérées comme économiquement, socialement et écologiquement respectueuses.

Les grands groupes énergétiques, bien que présents sur la filière éolienne, cherchent à renforcer la place du nucléaire dans le mix énergétique français, en mettant en avant les

qualités du nucléaire telles que ses faibles émissions de CO2 émises par les centrales

nucléaires. Dans ce contexte, on peut légitimement se demander pourquoi EDF et GDF SUEZ, l’un axé sur le nucléaire, l’autre sur le gaz, se lancent dans les ENR et notamment l’éolien. Plusieurs raisons pourraient justifier cette nouvelle stratégie : améliorer une image d’énergéticien pollueur, faire de nouveaux profits grâce au tarif d’achat, motiver le personnel en devenant une entreprise plus « verte », développer une stratégie sur le long terme en anticipant la fin des énergies fossiles, profiter du Mécanisme de

Développement Propre114 du protocole de Kyoto, etc.

Les contraintes réglementaires sont un frein important à la filière. Depuis 2003, le cadre législatif et réglementaire a fortement évolué. De nombreuses obligations ont été imposées à l’énergie éolienne : permis de construire avec étude d’impacts et enquête publique en 2003, création des ZDE en 2005, création des Schémas Régionaux Climat Air Énergie (SRCAE) en 2009, et enfin classement en ICPE et règle minimum des 5 mâts en 2010. Le cadre réglementaire ne cesse d’évoluer et de se réajuster. Cette instabilité suscite des craintes auprès des riverains qui ont le sentiment d’un flou juridique.

114 Les pays industrialisés payent pour des projets qui réduisent ou évitent des émissions dans des nations moins riches et sont récompensés de crédits pouvant être utilisés pour atteindre leurs propres objectifs d’émissions. Les pays receveurs bénéficient gratuitement de technologies avancées qui permettent à leurs usines ou leurs installations générant de l’électricité d’opérer de manière plus efficace.

L’empilement des procédures (les ZDE sont redondantes avec les Schémas Régionaux) et l’augmentation du nombre de recours ont conduit à des délais de mise en service de plus en plus longs : 7 ans en moyenne en France contre 4,5 pour le reste de l’Europe. Économiquement d’autres contraintes se sont encore ajoutées : la réforme de la taxe professionnelle et le nouvel Impôt Forfaitaire sur les Entreprises de Réseaux (IFER) ont alourdi la fiscalité des projets, la suppression de la réduction des coûts pour le raccordement a provoqué une augmentation des charges.

Néanmoins un premier pas vers la simplification de la législation a été franchi le 11 mars 2013 lorsque la proposition de Loi Brottes, visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l’eau et sur les éoliennes a été adoptée en lecture définitive par l’Assemblé Nationale. Ce texte prévoit entre autre un allégement du cadre réglementaire relatif à l’éolien : il supprime les ZDE pour faire des Schémas Régionaux Éoliens la référence pour l’instruction des dossiers éoliens. Le seuil de cinq mâts disparaît également.

Selon le Syndicat des Énergies renouvelables, « ces dispositions vont, dans l’immédiat, libérer bon nombre de projets, en particulier dans les régions du Grand Ouest : dans les régions Pays de la Loire, Bretagne, Basse-Normandie, plus de 50% des projets en cours de développement en 2010 avaient dû être stoppés à la suite de l’adoption, dans la loi Grenelle 2, de la règle des cinq mâts. Ces mesures de simplification vont, notamment, faciliter le développement d’installations de dimensions modestes, adaptées à la topographie et aux paysages de nombreuses régions rurales, en métropole et

outre-mer »115.

Avec une production d’électricité en grande partie nucléaire, la France peine à trouver une place pour la filière éolienne. De plus son développement suscite de nombreux débats au sein de la société française. Le modèle productiviste de l’énergie éolienne condense les critiques les plus vives : la taille des parcs, la hauteur des éoliennes, etc. Un projet d’implantation d’éoliennes, tel qu’il est développé en France, est nécessairement

de grande ampleur car il est régi par une logique industrielle. Le modèle de développement de l’éolien est une transposition d’un « modèle qui a fonctionné au Europe au XIXème siècle : hors de l’industrie, point de salut. Le développement devait avoir ce seul moteur : l’industrie et les infrastructures qui l’accompagnent, le reste de

l’économie suivrait, comme par enchantement »116.

Comment par ce modèle industrialiste de développement mais également d’exploitation, l’entreprise va-t-elle contribuer à construire de l’acceptabilité ? À travers sa stratégie de communication, par quels arguments peut-elle promouvoir ce modèle et ainsi rendre acceptable sa logique industrielle ?

PARTIE 2