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1.2 L’énergie éolienne en France

1.2.3 Cadre législatif et réglementaire en France pour les projets éoliens

1.2.3.1.3 Cadre réglementaire propre à la participation

- La concertation

L’article L. 110-1 II 4° du Code de l’Environnement, issu de la loi n°95-201 du 2 février 1995 consacre le principe de la participation : « chacun doit avoir accès aux informations relatives à l’environnement, y compris celles relatives aux substances et activités dangereuses et le public est associé au processus d’élaboration des projets ayant une incidence importante sur l’environnement ou l’aménagement du territoire ». La loi Grenelle 2, à travers l’article 247, autorise les préfets (« le représentant de l’État dans le département ») à mettre en place des instances de concertation et de suivi associant tous les acteurs sur les projets d’installations classées, dont font partie les éoliennes. L’article 249 encadre la définition des critères de représentativité des acteurs environnementaux, qui seront amenés à siéger dans les instances de concertation.

Au niveau européen, les Directives 85/337/CEE du Conseil (27 juin 1985) sur l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement, prévoient l’organisation de procédure de concertation et transposent la Convention

d’Aarhus78 au niveau européen.

- L’enquête publique

L‘objectif de l’enquête publique est d’informer le public et de recueillir l’avis de la population. Engagée par le Préfet et conduite par un Commissaire Enquêteur (CE)

78La Convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public, au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (signée le 25 juin 1998, ratifiée par la France en 2002) définit les principes de la participation du public.

désigné par le président du Tribunal administratif, ces enquêtes sont des enquêtes de

type « Bourchardeau »79.

« Déroulement d’une enquête publique

- 1 Préparation du projet par les autorités compétentes (Maire, Préfet, avec services concernés, Aménagement du Territoire, D.D.E., etc.) ;

- 2 Décision d’ouverture d’enquête. Arrêté préfectoral. Nomination d’un Commissaire Enquêteur pris dans une liste départementale d’aptitude à la fonction ;

- 3 Publicité : annonce légale dans la presse locale, un mois avant l’ouverture de l’enquête et affichage en mairie, en préfecture. Outre les références de l’autorité signataire, l’annonce légale comporte : l’objet de l’enquête, la date d’ouverture et de fermeture, les dates, heures et lieux de consultation du dossier, le nom du C.E. et ses dates de réception du public, les conditions particulières permettant l’expression des différents avis, les possibilités de consulter le rapport du C.E. ; - 4 Intervention du public, déroulement de l’enquête. Durée : un mois ;

- 5 Rapport du C.E. dans le mois qui suit la fermeture de l’enquête. Décision à partir de ses «conclusions motivées» ;

- 6 Réalisation ou non du projet ».80

L’enquête publique est donc le point de départ (ou d’arrêt) du projet. Chaque citoyen peut ainsi s’exprimer et faire évoluer le projet selon ses recommandations. Le C.E. n’a pas la seule mission de récolter les avis : il doit être capable de renseigner toute personne qui en fait la demande. Tous les documents du dossier sont consultables sur la ou les commune(s) concernée(s) par la ZDE.

Chaque remarque est enregistrée au registre d’enquêtes, qui constitue la base de la réflexion du C.E. pour donner une « conclusion motivée » sur le projet.

« L’important est que le commissaire enquêteur soit capable de comprendre tous les enjeux du projet soumis à l’enquête : enjeux techniques, socio-économiques, politiques,

79 Ministre de l’Environnement en 1985 qui créa les enquêtes publiques. 80 Source : http://www.amisdelaterre.org/

environnementaux et sociaux ; qu’il soit capable de comprendre les différents points de vue qui peuvent s’exprimer autour de ces enjeux et qu’il sache, le cas échéant, en prenant les initiatives nécessaires, clarifier le débat entre ces différents points de vue et

exprimer son avis en toute clarté et en toute indépendance. »81

Cependant l’enquête publique fait l’objet de nombreuses critiques :

- il est souvent difficile d’inciter la population à se déplacer (manque

d’informations, d’intérêts, etc.) ;

- donner son avis implique d’expliciter ses critères de jugements ;

- à ce stade, le projet est bouclé et peut difficilement être discuté avec la population

(il le sera éventuellement avec le Préfet) ;

- la marge de manœuvre de la population est faible : recours gracieux auprès du

préfet et attaque des décisions du préfet en contentieux devant le tribunal administratif. Ces deux moyens placent la population en position d’opposition et non de proposition. La population est obligée de radicaliser sa posture pour faire entendre sa voix.

L’enquête publique et l’avis du commissaire enquêteur ont été largement critiqués du point de vue de la représentativité (avis personnel non représentatif), des compétences (pour les participants mais aussi pour le commissaire enquêteur), de la neutralité de l’administration fortement liée à l’enquête, du degré de généralité des intérêts défendus, etc.

L’enquête publique n’est certes pas suffisante en tant que lieu d’échanges et de concertation, car elle arrive généralement à un stade tardif dans la prise de décision. Elle permet cependant de mettre en lumière des intérêts purement locaux qui n’auraient peut-être pas été considérés jusque-là.

« L’information du public trouve ses fondements dans la nécessité d’expliquer et de faire comprendre les raisons qui ont conduit les pouvoirs publics à retenir tel ou tel projet. Elle s’impose aussi pour obtenir des habitants intéressés le maximum de réactions et de propositions susceptibles d’éclairer l’autorité publique avant le choix ou la mise en œuvre du projet. Ainsi c’est bien dans une double perspective qu’il convient d’agir : celle

81 Proposition de réflexion sur un texte signé par Monsieur J. THOMAS, rédacteur de la loi Bouchardeau en 1985 et Président du Tribunal Administratif de Cergy en 2004.

d’une meilleure information des habitants au sujet des projets mis au point par les pouvoirs publics, et celle d’une meilleure connaissance par les pouvoirs publics des

besoins des habitants »82.

- Le recours

Il existe deux types de recours contre une décision administrative : les recours administratifs et les recours contentieux.

Les recours administratifs permettent de demander directement à l’administration de réexaminer la demande et de statuer sur les droits dont l’administré se prévaut. Ils sont libres et gratuits.

Les recours administratifs peuvent être :

- gracieux : il s’agit de demander à l’administration qui a pris la décision de revenir

sur cette dernière,

- hiérarchique : il consiste à demander à l’administration hiérarchiquement

supérieure à celle qui a pris la décision de revenir sur cette dernière (par exemple : pour contester la décision d’un maire, c’est au préfet qu’il faut s’adresser).

Les recours doivent être motivés et demandés dans les deux mois qui suivent la publication de la décision. Les recours gracieux et hiérarchique peuvent être formés simultanément ou successivement.

Les recours contentieux peuvent être formés suite à une décision négative de l’administration. Pour contester une décision de l’administration, il faut en référer à un juge administratif dans un délai de deux mois suivant la décision litigieuse.

Un recours contentieux implique le paiement d’un timbre fiscal de 35€. Devant le tribunal administratif, il n’est pas obligatoire d’être représenté par un avocat si la demande n’est pas indemnitaire ou ne concerne pas un contrat. Les recours contentieux sont motivés par une requête introductive qui justifie la demande d’annulation de la décision.

Si le recours permet de faire entendre la voix citoyenne, il peut aussi être abusif. Aujourd’hui, environ 40% des permis délivrés sont attaqués. Ces recours qui bloquent les financements et ralentissent le développement éolien sont pourtant dans quatre cas

sur cinq rejetés par le juge83 qui seul peut considérer si le recours est abusif ou non.