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CHAPITRE 7 LE PARTENARIAT : ENCOURAGER LA COOPÉRATION

1. La cohésion au sein des secteurs

L'expérience étudiée montre que les partenariats renforcent la cohésion entre les organisations surtout lorsqu‟elles appartiennent à un même secteur. Cet effet a notamment été remarqué entre les municipalités, entre les partenaires sociaux et entre les organisations de la société civile.

Un impact sur la cohésion des municipalités d‟une même sous-région à été remarqué dans plusieurs pays et notamment en Autriche, en Espagne, en Finlande et en Italie. En Italie, la cohésion générée a été telle que les municipalités ont dans plusieurs cas décidé, après quelques années d‟expérience de participation au partenariat, de transformer le partenariat en organisme à part entière chargé du développement économique pour l‟ensemble de leur territoire. Elles ont également réparti entre elles le financement des dépenses de fonctionnement des pactes territoriaux.

15 . Une version antérieure de ce chapitre a été publiée dans OCDE (2001), Des partenariats locaux pour

Or la coopération entre les municipalités est plutôt inhabituelle dans le domaine du développement économique. Les municipalités voisines les unes des autres coopèrent afin de fournir des services pour lesquels des économies d‟échelle peuvent être réalisées. Par exemple, le transport public et la gestion des déchets peuvent être assurés plus efficacement et à un moindre coût par des groupes de municipalités que par une seule municipalité. En revanche, il est rare que des municipalités gèrent ensemble des activités visant à stimuler le développement économique et la création d‟emplois. La faiblesse des ressources disponibles pour des activités communes et la concurrence souvent vive entre les municipalités en matière d'attraction des investissements n‟ont guère incité à co-investir dans des projets de coopération dont les résultats seraient des plus incertains.

Comment les partenariales ont-ils contribué à ce résultat ? Il est bon de noter que l'établissement de relations de coopération entre les municipalités a souvent été impulsé par la mise à disposition par le gouvernement (et l'UE) de fonds destinés aux activités et projets planifiés et exécutés en partenariat. Comparées au budget que les municipalités consacrent aux activités apparentées, ces ressources se sont parfois révélées fort importantes. Ce fut notamment le cas en Italie, où le gouvernement a stimulé la coopération entre les municipalités en les associant à la mise en œuvre de toute la politique de développement économique du Mezzogiorno dans le cadre de la programmazione negoziata comme on l‟a vu au chapitre précédent.

D'autres facteurs, sur lesquels on reviendra, ont aussi contribué à renforcer la cohésion entre les partenaires en Italie : d‟abord l‟espoir de résultats concrets dans une période de temps raisonnablement courte (un, deux ans), qui a été la norme pour la plupart des projets de développement économique ; ensuite la visibilité du rôle joué par les municipalités dans les investissements réalisés par les partenariats ; et finalement la latitude accordée pour définir les critères d‟allocation des fonds pour les projets sont autant de facteurs qui ont incité les municipalités à coopérer entre elles.

Mais une plus grande cohésion au sein d‟un secteur n‟a pas nécessairement pour corollaire un renforcement de la coopération entre les secteurs, comme le révèle le cas des partenaires sociaux. Dans plusieurs pays, les syndicats et groupements d‟employeurs ont identifié des intérêts communs qu‟ils pouvaient promouvoir le plus efficacement par le biais de partenariats ou de structures tripartites. Les partenaires sociaux ont notamment passé des accords sur la gestion des ressources financières affectées aux politiques actives du marché du travail, qui profitent surtout à leurs membres et laissent peu de place aux préoccupations d'autres groupes. Ces accords aboutissent parfois à des incohérences entre l'allocation des ressources et les besoins locaux exprimés d'un point de vue plus général. L‟intégration et la réinsertion sur le marché du travail des personnes défavorisées sont des

exemples de préoccupation locale à laquelle les conseils du marché du travail n‟ont pas prêté suffisamment attention. Dans les pays d‟Europe du Nord, les politiques actives du marché du travail gérées par le service public de l'emploi, dont peuvent bénéficier les membres des syndicats et les chômeurs ayant droit aux indemnités d‟assurance-chômage, sont souvent nettement dissociées des prestations d‟assistance sociale ouvertes à d'autres groupes de bénéficiaires, comme les jeunes et les chômeurs de longue durée. Ces derniers services sont alors fournis par des autorités locales qui disposent de moindres ressources pour s'acquitter de leur tâche et n'ont aucun rôle à jouer dans la coordination des politiques actives du marché du travail.

En dépit de ces difficultés, des faits indiquent que la cohésion au sein d‟un secteur peut être un premier pas vers une coopération intersectorielle plus efficace. Au Danemark, des représentants officiels locaux et régionaux sont devenus membres du conseil d'organisations tripartites à la suite de la réforme de 1994 du SPE, conférant ainsi un certain poids aux questions locales, notamment à celles concernant les personnes ayant peu d‟expérience professionnelle, et ouvrant la voie à un équilibrage des intérêts comme nous le verrons plus loin. En Flandre, il a été demandé aux conseils tripartites du marché du travail de répondre aussi aux besoins des groupes défavorisés, ce qui a eu un effet positif sur la coopération avec les organisations de la société civile et les municipalités. En Italie, les municipalités ont compris qu‟elles avaient la possibilité de sensibiliser davantage l'administration régionale aux préoccupations locales. Par le biais de nombreuses concertations avec les acteurs locaux, l'administration régionale a élaboré un plan de développement de la région pour 2000-2006 pour lequel les municipalités, dans le cadre de partenariats, ont fourni des éléments fondés sur les préoccupations locales (en matière de développement économique, d'infrastructures et de formation professionnelle).

La dynamique de la coopération au sein des partenariats, sous l'effet de laquelle la cohésion est renforcée à l'intérieur d'un secteur puis aboutit à l'instauration de meilleures relations avec les acteurs d'autres secteurs, est un bon exemple de constitution de capital social. Le capital social est défini par les réseaux, normes, valeurs et convictions communes qui facilitent la coopération au sein des groupes et entre ces derniers (OCDE, 2001b). Si le capital social se constitue d‟abord dans les familles, les communautés locales, les voisinages, les associations bénévoles et les entreprises, les relations de confiance et les réseaux font aussi intervenir des organisations publiques. Celles-ci peuvent contribuer à la constitution de capital social par leur participation aux exercices de partenariat et tirer profit de la mise en place d‟une meilleure coopération entre elles et d‟autres acteurs importants.

L‟établissement de liens solides entre les différents secteurs d‟intervention reste cependant un défi majeur, comme en témoigne l'expérience irlandaise. En Irlande aussi les partenariats ont eu un important effet positif en renforçant la cohésion au sein des secteurs, et plus particulièrement au sein du secteur de la société civile et associatif, dynamique mais traditionnellement peu structuré. Les partenariats ont permis de concilier les différents points de vue exprimés dans ce secteur et leur ont fourni une tribune, ce qui a permis de donner plus de poids aux arguments de la collectivité dans les discussions avec les représentants des services publics sur la façon d‟améliorer l‟efficacité des programmes mis en œuvre.

Dans ce pays comme dans d‟autres, et cela a notamment pu être observé directement en Suède et en République tchèque, la qualité de la coopération entre la société civile et les services publics reste cependant sujette à controverse. Les employés des services publics sont souvent inquiets à l‟idée d'échanger des informations et d‟entreprendre des activités en commun avec des ONG, bien que le gouvernement ait montré sa volonté de faire participer la société civile aux processus de décision. Cela pose la question de savoir comment mettre en place un instrument de coopération efficace entre des secteurs dont les méthodes de travail et les critères d‟imputabilité des résultats diffèrent.