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(PRDR) un outil précieux pour l’ingénierie macromoléculaire

21 2.2Choix du bloc hydrophobe

2.2.1 Etablissement d’un modèle de prédiction thermodynamique

Plusieurs chercheurs se sont intéressés à corréler la structure chimique d’un polymère avec le paramètre de solubilité selon des considérations thermodynamiques. C’est en 1950 qu’Hildebrand proposa le terme de paramètre de solubilité, noté δ. Celui-ci est défini comme la racine carrée de la densité d’énergie de cohésion, , dans l’état du polymère à température ambiante.52

= / = / (1.3)

avec Ecoh = ∆U, la variation de l’énergie interne du polymère et V son volume molaire.

La définition du paramètre de solubilité est basée sur des considérations thermodynamiques, et plus particulièrement sur l’énergie libre de mélange ∆ . Deux substances sont mutuellement miscibles si leur énergie libre de mélange, ∆ , est négative. Par définition,

∆ = ∆ − ∆ (1.4)

avec ∆ et ∆ l’enthalpie et l’entropie de mélange respectivement.

L’entropie de mélange étant généralement positive, le signe de l’énergie libre de mélange est dominé par la valeur de l’enthalpie. Il existe alors une certaine limite de valeur positive de

∆ en dessous de laquelle la miscibilité est possible.

Selon Hildebrand, l’enthalpie de mélange par unité de volume ∆ℎ peut être déterminée à partir de la relation

∆ℎ = ( − ) (1.5)

avec , et , les fractions volumiques et les paramètres de solubilités respectifs des polymères 1 et 2 constituant le mélange.

Ainsi, selon les équations (1.4) et (1.5), ( − ) doit être le plus faible possible pour s’approcher d’un mélange thermodynamiquement miscible.

L’enthalpie d’un mélange binaire de polymères peut également être représentée par la relation de Van Laar :

∆ ( ) = ! (1.6)

avec le paramètre d’interaction de Flory-Huggins, utilisé à l’origine pour définir l’interaction d’un polymère avec un solvant.53

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Hildebrand a par la suite introduit le paramètre d’interaction entre deux polymères 1 et 2, " , afin de décrire leur miscibilité respective.

" =( # $)

# $

%& ( − ) (1.7)

avec ' et ' les volumes molaires respectifs des polymères 1 et 2. " permet ainsi d’évaluer le degré de miscibilité d’un mélange binaire.

D’après Hansen, le paramètre de solubilité peut être décomposé selon ses contributions dispersive ( (), polaire ( )), et de liaison hydrogène ( ), car l’énergie de cohésion est dépendante de ces trois interactions.54 L’équation correspondant au paramètre de solubilité devient ainsi :

= * ( + )+ (1.8)

Ces trois composantes peuvent être prédites selon la théorie de contribution de groupes qui consiste à additionner les forces dispersives, polaires ou de liaisons hydrogène propres à chaque groupement constituant la structure chimique du polymère.54 Le détail des calculs est exposé en annexe A1. Les résultats obtenus pour les polymères hydrophobes, sélectionnés initialement selon leur structure chimique, et hydrophiles sont reportés dans le tableau 1.3. Tableau 1.3 : Paramètres de solubilité déterminés selon la théorie de contribution des groupes.

Polymère ,- (J/cm3)1/2 ,. (J/cm3)1/2 ,/ (J/cm3)1/2 , (J/cm3)1/2 012 PBT 17,9 4,0 8,9 20,4 * PBnA 18,5 3,8 7,3 20,2 0,002 PVBn 16,4 3,8 7,3 18,4 0,260 P(p-Ast) 17,6 3,6 7,1 19,4 0,067 PPEA 17,8 4,1 8,0 19,9 0,017 PS 18,2 1,1 0,0 18,2 0,262 P(n-BA) 17,1 4,3 7,8 19,3 0,071 PPEGA 15,7 3,1 8,8 18,2 4,781 PDMAm 17,0 12,9 9,0 23,2 7,072 PVP 17,3 12,8 9,0 23,4 8,818

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D’après les calculs effectués, le poly(acrylate de 2-phénoxyéthyle) (PPEA) et plus particulièrement le poly(acrylate de benzyle) (PBnA) ont les paramètres de solubilité les plus proches de celui du PBT, se traduisant par une très faible valeur du paramètre d’interaction " . La différence la plus notable concerne le poly(benzoate de vinyle) (PVBn), dont la composante dispersive est la plus éloignée de celle du PBT selon la décorrélation de chacune des composantes du paramètre de solubilité.

A titre de comparaison, nous avons calculé les contributions relatives d’un polymère, dont l’unité répétitive est constituée d’un noyau aromatique seul (le polystyrène (PS)), et d’un bloc muni de groupements esters et alkyles mais privé de groupe aromatique (le poly(acrylate de butyle) (P(n-BA)). La contribution hydrogène étant inexistante dans le cas du PS (δh = 0 (J/cm3)1/2), le paramètre d’interaction du PS avec le PBT est plus élevé (Λ12 = 0,262) qu’avec celui du P(n-BA) (Λ12 = 0,071). Ainsi pour se rapprocher d’une bonne compatibilité avec le squelette PBT, le polymère doit comporter une composante dispersive comparable à celle du PBT. Les contributions hydrogènes et polaires (fonctions esters et alkyles) semblent ensuite être discriminantes.

Notons que les paramètres d’interaction entre les trois blocs hydrophiles (PPEGA, PDMAm et PVP) et le PBT sont très élevés, ce qui va dans le sens d’une séparation de phase entre la matrice PBT et chaque bloc hydrophile mentionné.

Ainsi le modèle thermodynamique prédit les blocs PBnA et PPEA comme étant les plus compatibles avec le PBT.

2.2.2 Etude de miscibilité par analyse enthalpique différentielle

2.2.2.1 Synthèse des polymères hydrophobes par polymérisation RAFT/MADIX

En vue de réaliser une étude de miscibilité par analyse enthalpique différentielle (AED), les polymères hydrophobes présentés dans le tableau 1.2 ont été préparés par voie RAFT/MADIX. La synthèse a été réalisée en présence de l’agent xanthate Rhodixan A1. Une masse molaire moyenne en nombre (Mn) proche de 10 000 g.mol-1 a été visée. La polymérisation, amorcée en température par l’AIBN, a eu lieu en solution dans le toluène. Les conditions opératoires et les caractéristiques macromoléculaires de chaque homopolymère sont présentées dans le tableau 1.4 ci-dessous.

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Tableau 1.4 : Caractéristiques macromoléculaires des homopolymères PBnA, PVBn, P(p-ASt) et

PPEA obtenus par polymérisation RAFT/MADIX en présence du Rhodixan A1.

Les conversions sont totales pour les deux monomères acryliques et partielles pour le p- acétoxy styrène et le benzoate de vinyle (égales à 0,48 et 0,80 respectivement).

Les caractéristiques macromoléculaires obtenues sont en adéquation avec les valeurs de constantes de transfert au Rhodixan A1 et interchaîne mesurées sur une large gamme de monomères (cf. §1.2.4). Ces données cinétiques prédisent effectivement un profil de valeurs de Mn expérimentales bien au-dessus des valeurs théoriques à faible conversion pour les monomères styréniques tel que le p-ASt où la constante de transfert au Rhodixan A1 a été précisément mesurée à 0,88.37 D’autre part, les valeurs des Mn expérimentales sont logiquement très proches des valeurs théoriques à conversion totale pour les deux monomères acryliques (BnA et PEA) et quelle que soit la conversion (0,80) pour le benzoate de vinyle. Il a également été montré que l’équilibre de transfert interchaîne, qui dicte les valeurs de Ð, était relativement lent dans le cas des monomères styréniques et acryliques et rapide dans le cas des monomères vinyliques (cf. §1.2.4) ce qui cohérent avec les valeurs de dispersité obtenues. Néanmoins, dans le cas du PPEA, un suivi des grandeurs macromoléculaires a été réalisé pour interpréter la valeur de dispersité anormalement élevée (Ð = 3,16). La figure 1.2 reporte l’évolution de Mn et Ð avec la conversion.

Le profil des masses molaires expérimentales est typiquement celui prédit par le modèle de Müller pour une constante de transfert à l’agent proche de l’unité, quand celui-ci n’est consommé totalement qu’en fin de polymérisation.34 Cependant, alors que le profil des valeurs de Mn expérimentales évolue peu au cours de la polymérisation, les valeurs de Ð augmentent fortement avec la conversion en PEA. Ces observations révèlent une augmentation des valeurs de Mw, caractéristique de la présence de ramifications sur les chaînes du PPEA due à des réactions de transfert au monomère et/ou au polymère. Celles-ci sont effectivement favorisées par la présence de protons labiles tels que ceux du groupement éthylène glycol.55 Polymère [AIBN]0/[M]0 ES (%)a T (°C) t (h) Conv b Mn th c (g.mol-1) Mn CES d (g.mol-1) Ð d PBnA 0,020 50 60 24 0,99 9 750 9 450 1,62 PVBn 0,020 60 0,80 8 150 7 300 1,27 P(p-ASt) 0,020 60 0,48 4 700 13 000 1,54 PPEA 0,0030 70 0,99 9 750 9 250 3,16 a ES = 100*mM/(mM + mXA1 + mtoluène). b

détermination par RMN 1H dans CDCl3. c

Mn th =

25 0 2000 4000 6000 8000 0 20 40 60 80 100 M n ( g .m o l -1 ) Conversion (%) 1 1.5 2 2.5 3 Ð

Figure 1.2 : Polymérisation RAFT/MADIX du PEA dans le toluène en présence du Rhodixan A1. T =

70°C, ES = 50 %, Mn th = 9 000 g.mol -1

, [AIBN]0/[BnA]0 = 0,0030. Evolution des Mn et Ð avec la

conversion en PEA.

Afin de diminuer la proportion d’évènements créant des ramifications et ainsi réduire la distribution de masses molaires, il faudrait stopper la polymérisation à une conversion partielle, ce qui mènerait sûrement à une consommation incomplète du Rhodixan A1.

La synthèse des quatre homopolymères hydrophobes a été relativement bien contrôlée. Il en résulte l’obtention de polymères de masses molaires expérimentales proches de 10 000 g.mol- 1

. Des améliorations peuvent être apportées (optimisation de la concentration en amorceur et du temps de réaction) dans les synthèses du P(p-ASt) et du PVBn afin d’atteindre des conversions plus élevées. Le contrôle de la polymérisation du PEA s’avère plus délicat de par la présence de réactions de transfert irréversible.

2.2.2.2 Préparation des mélanges

Les mélanges constitués de PBT (Aldrich, Mn = 38 000 g.mol-1) et de chacun des homopolymères synthétisés comme précédemment (tableau 1.4), ont été préparés selon la méthode ‘solvent casting’.56 Celle-ci consiste à former un film fin du mélange en solubilisant les deux polymères dans un solvant commun qui sera lentement évaporé. Le choix du solvant est restreint par l’insolubilité du PBT dans la plupart des solvants organiques usuels. Les mélanges ont finalement été dissous à 110°C dans le 1,1,2,2-tétrachloroéthane, puis placés dans une capsule d’évaporation laissée à pression atmosphérique et à température ambiante pendant 24 heures puis à l’étuve sous vide à 60°C durant 48 heures.

Les quatre mélanges qui seront analysés en AED sont constitués de PBT/PBnA (53/47, % massique), PBT/PPEA (58/42), PBT/PVBn (52/48) et de PBT/P(p-ASt) (62/38). Un rapport massique proche de 1/1 a été visé, afin de visualiser au mieux les évolutions de capacité calorifique (∆Cp) dans la zone de transition vitreuse.

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