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La Chine et la France n’étaient pas favorables à « l’offensive de paix »

Les divergences et la coopération sino-français sur « la guerre du Vietnam » des États-Unis 1965-

Chapitre 5 : Le changement de la politique française relative au problème du Vietnam et la réaction de la Chine

5.2 La Chine et la France n’étaient pas favorables à « l’offensive de paix »

La position officielle de la Chine et du Nord-Vietnam concernant « l’offensive de paix » confirma la deuxième hypothèse de Manac’h. Les déclarations chinoises et nord- vietnamiennes ne présentèrent aucune possibilité d’ouverture d’une négociation avec les États-Unis. D’une part, bien que Hanoi ait reçu des aides militaires soviétiques qui équivalurent à dix millions dollars1, le Nord-Vietnam essayait de garder l’équilibre entre

Pékin et Moscou. L’assistance chinoise était également immense par rapport à l’URSS et la Chine jouait un rôle important dans la logistique des opérations militaires nord- vietnamiennes. La Chine se chargeait également du transport des aides soviétiques au Nord-Vietnam en traversant le territoire chinois. Hanoi ne voulait donc pas risquer ses relations avec la Chine. D’autre part, bien que la trêve ait rétabli la paix dans l’espace aérien du Nord-Vietnam, des bombardements et des offensives terrestres étaient toujours en cours dans Sud-Vietnam. Les États-Unis continuaient à envoyer des troupes au Sud afin de renforcer la défense, à bombarder la frontière khméro-vietnamienne en même temps. C’était « une arme » donnée par les Américains au Nord-Vietnam. Aux yeux du

1 Li Danhui, Zhong Su Guan Xi Yu Zhong Guo De Yuan Yue Kang Mei (Les relations sino-soviétiques et l’aide

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gouvernement de Hanoi, les actions diplomatiques américaines pour la paix était seulement un « rideau de fumée » pour une plus grosse attaque. Dans ce contexte, Pham Van Dong ne favoriserait donc pas une négociation1. Il semble que « la ligne chinoise » dominait le

gouvernement nord-vietnamien à ce moment-là. Le 4 janvier 1966, la déclaration du gouvernement de Hanoi critiqua fortement « l’offensive de paix » du président Johnson. Cette déclaration indiqua que les Américains n’arrêtaient pas leur ingérence dans les affaires sud-vietnamiennes et ne souhaitaient pas forcer le peuple sud-vietnamien à accepter leurs conditions dans une négociation proposée par Washington. Elle demanda un retrait de toutes les troupes américaines du Sud-Vietnam et une garantie pour la paix, en vue de l’indépendance et de l’unification du Vietnam dans le respect des accords de Genève de 19542.

Une série d’actions chinoises montrèrent que la position chinoise restait très éloignée de la solution politique. Le 3 janvier 1966, la première conférence de solidarité des peuples d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine se tint à La Havane. Le 7 janvier, en tant que chef de la délégation chinoise, Wu Xueqian fit un discours concernant le Vietnam. Il dit que 650 millions de Chinois soutenaient fermement la juste lutte du peuple vietnamien contre l’agression américaine, les quatre points de Hanoi et les cinq points du FNL. Wu souligna que le peuple chinois et le peuple vietnamien, qui étaient fraternels et inébranlables, lutteraient ensemble pour vaincre « l’impérialisme américain »3 . Le même jour, le

1 Télégramme, n° 87/94, T82, DDF, 1966, Tome I, Bruxelles, Bern, Berlin, Frankfurt/M., New York, Oxford,

Wien: Peter Lang, 2006, pp.205-206.

2 Yue Nan Wai Jiao Bu Fa Yan Ren Jiu Mei Guo « He Ping Gong Shi » Fa Biao Sheng Ming (Le porte-parole

du ministère des Affaires étrangères vietnamien publie la déclaration concernant « l’offensive de paix »),

Le Quotidien du Peuple, le 7 janvier 1966.

3 Wo Guo Dai Biao Tuan Tuan Zhang Wu Xueqian Zai Ya Fei La San Da Zhou Ren Min Hui Yi Shang Fa Yan

Zhi Yuan Yue Nan Ren Min Kang Mei Jiu Guo Ying Wei Hui Yi Zui Tu Chu Ren Wu (Wu Xueqian, chef de

la délégation, déclare que le premier objectif de la conférence est de soutenir la lutte de salut national anti-américaine du Vietnam au cours de la conférence de solidarité des peuples d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine), Le Quotidien du Peuple, le 7 janvier 1966.

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Quotidien du Peuple reproduit la déclaration de Hanoi du 4 janvier 1966, pour soutenir la position nord-vietnamienne. A la suite, certains éditoriaux du Quotidien dénoncèrent fortement « l’offensive de paix ». L’éditorial du 7 janvier considérait cette politique diplomatie du président Johnson comme « un grand piège » et comme « un grand complot ». L’éditorial indiquait que « les quatorze points » proposés par Johnson pour une solution politique étaient un chèque sans provision, parce que la base des « quatorze points », c’est-à-dire, les accords de Genève de 1954 et de 1962 étaient déjà détruits par l’intervention militaire américaine. Cet article pensait que l’objectif de « l’offensive de paix » était de forcer Hanoi à abandonner son soutien à la lutte du Viêt-Cong et de légitimer l’ingérence américaine dans cette région. « Une négociation sans condition préalable » proposé par Johnson avait donc des conditions préalables, c’est-à-dire « l’arrêt des bombardements » contre « l’arrêt de l’intervention nord-vietnamien au Sud ». L’éditorial conclut que concernant la paix du Vietnam, il fallait lutter contre les États-Unis par la force jusqu’à bout, et ne pas négocier avec eux1 . L’éditorial du 8 janvier indiquait que le

gouvernement américain voulait utiliser « les quatorze points » de Johnson de légitimer l’occupation du Sud-Vietnam afin de miner la révolution vietnamienne2. L’éditorial du 9

janvier indiqua que la négociation proposée par le gouvernement américaine n’était pas sans condition préalable. Autrement dit, le peuple vietnamien devait mettre bas les armes. « Cette condition est une insulte au peuple du Vietnam » écrit l’éditorial, « nous n’avons pas de choix. Il faut lutter contre les Américains jusqu’au bout et les chasser »3 . Le

Quotidien du Peuple cita également les articles des journaux français, par exemple, le

1 Yue Han Xun Zheng Fu De Da Yin Mou (Le complot de l’administration de Johnson), Le Quotidien du

Peuple, le 7 janvier 1966.

2 Shi Si Dian Zhu Zhang De Chu Fa Dian He Luo Jia Dian (L’objectif des quatorze points), Le Quotidien du

Peuple, le 8 janvier 1966.

3 « Xian Tan Hou Che » Jiu Shi Zhi Tan Bu Che (« Le retrait après la négociation » présente que le

gouvernement américain ne veut pas retirer ses troupes du Vietnam), Le Quotidien du Peuple, le 9 janvier 1966.

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Figaro, la Nationale et le Parisien pour montrer que la position chinoise était soutenue par des pays occidentaux1.

Malgré le fait que les États-Unis souhaitaient que la France puisse soutenir leur plan de paix, il semble que grâce à la bonne compréhension française de la position de Pékin et de Hanoi concernant le problème vietnamien, « l’offensive de paix » des États-Unis rencontra l’indifférence du gouvernement français. Le 29 décembre 1965, la lettre du président Johnson fut reçue par le général de Gaulle. Dans cette lettre, le président américain confirma au Général son intention de chercher à mettre fin à la guerre du Vietnam et à prolonger la trêve des bombardements sur le Nord-Vietnam décidée pour la période des fêtes de fin d’année, mais qu’il ne pouvait pas arrêter les autres opérations à cause de celles de Hanoi contre Saigon2. Deux jours plus tard, le 31 décembre 1966, Arthur Joseph

Goldberg, ambassadeur des États-Unis aux Nations unies, fut reçu par le général de Gaulle. Il renait de finir sa visite au Vatican dont l’objectif était de chercher si quelque développement favorable à un règlement pouvait être trouvé par l’entremise du Pape. Pendant l’entretien, Goldberg informa le Général de l’intention d’« offensive de paix » et de la négociation avec le Pape. Cependant, la réaction du président de la République française fut très négative concernant les actions américaines. Le général de Gaulle dit à Goldberg que le parti communiste nord-vietnamien avait un caractère nationaliste, donc qu’ « il ne ferait aucune concession pour l’indépendance de son pays » et n’accepterait jamais que les Américains restent au Sud-Vietnam. Le Général ne croyait pas que l’arrêt des

1 « He Ping » Yan Mu Yan Gai Bu Zhu Qin Lue Ying Mou, Xi Fang Bao Kan Cha Chuan Yue Han Xun Zheng

Fu De « He Ping » Pian Ju (« L’offensive de paix » est un complot des agresseurs. Les journaux

occidentaux démarquent la fraude de paix de l’administration de Johnson), Le Quotidien du Peuple, le 5 janvier 1966.

2 Entretien entre le général de Gaulle et l’ambassadeur Arthur J. Golberg, au Palais de l’Élysée, le 31

décembre 1965, de 12h. à 13 h.15, CR364, DDF, 1965, Tome II, op.cit.,p.824 ; Télégramme, n° 9 /15 et n° 41, T7, DDF, 1966, Tome I, op.cit., p.12.

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