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Comme Octuaire, duc des Bissenoys, s’esleva contre les gardes que Constantin avoit en Bretaigne ordonnez et se fist roy sus Bretons, et comme il maria sa fille a Maximien senateur, et qui depuis fut impereur de Romme, et des guerres qui a celle cause advindrent entre Conan, neveu de celuy Octuaire, et ledit Maximian.

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Var. touz

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Var. souventesfoiz a lui en ceste maniere

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A l’encontre des lieutenants que Constantin avoit en Bretaigne ordonnez pour gouverner le royaume, s’esmeut par guerre Octuaire, duc des Biscennoys, et les fist touz mourir, puis occupa le siege royal et saisit tout le gouvernement du regne. Mais quant l’empereur Constantin l’entendi, il envoia contre lui Tahern le senateur atout trois legions de gens d’armes pour lui restituer sa dignité royalle, lequel Tahern, trois jours aprés ce qu’il fut arrivé, print la cité de Kaerpery. Auquel lieu Octuaire lui alla a l’encontre et lui livra bataille, en laquelle il le suppedita et, tous ses gens d’armes divisez, s’en fuit Tahern es parties d’Escoce, lesquelles il commença a gaster. Si le suyvi Octuaire et derechieff combatirent ensemble, mais Tahern y demoura victorieux et ne cessa de Octuaire insecuter jucques a ce qu’il lui tollit le diadesme royal. Lors que ledit Octuaire se1 vit privé de sa dignité, il fut grandement angoesseux et traicta avecques les secretz familiers Tahern qu’ilz labourassent de toute leur puissance a le faire mourir. Lesquelx, corrumpuz par les riches dons et grans promesses de Octuaire, acomplirent son voulloir, car ilz occirent Tahern leur seigneur ainsi qu’il passoit de cité en autre pour visiter son peuple. De laquelle mort comme la nouvelle en venist a Octuaire, qui par long temps avoit esté fuitiff, s’en retourna2 en Bretaigne et, touz les Romains qu’il peut trouver par lui dissipez, recouvra la regence des Bretons, laquelle il possida et tint jucques au temps de Gratian et de Valentinian, empereurs de Rome. Mais aprés ce que le roy Octuaire fut tellement enveilly que scelon le cours naturel il ne pouait plus gueres longuement vivre, pour ce qu’il n’avoit nul heir de sa chair fors une seulle fille, il enquist a ses conseillers lequel de sa lignie lui succederoit. Lesquelx conseillers furent en ce differants, quar les ungs lui louaient donner sa fille en mariage a aucun noble romain afin d’acquerir paix perpetuelle envers les Romains, et les autres lui conseilloient eslever ung sien neveu appellé Conan en siege royal et marier sa fille a aucun

[f.42v] prince d’estrange contree. Adonc fut present Carodocus, le duc de

Cornouaille, qui devant touz print les parolles en conseillant au roy donner sadicte fille et son royaume a Maximian senateur de Rome, affermant que par celle alliance ledit royaume demouroit en pacience pardurable. Pour quoy Conan, neveu du roy, qui tendoit a la succession dudit royaume, fut grandement indigné et, en desdeignant le conseil du duc Carodocus, esmeut toute l’assemblee des conseillers, qui furent pour celle chose troublez et se partirent sans riens conclure. Mais Carodocus, ne se desistant pas de son jugement, incontinent envoia a Rome ung sien filz, appellé Maurice, lequel estoit prudent et de grant proesse, pour nuncer a Maximian la controversité et difference qui estoit entre les seigneurs bretons sur la succession du royaume. Si fut Maurice, quant il arriva a Rome, a grant honneur receu par ledit Maximian, entre lequel et Gratian et Valentinian, freres de l’empereur, avoit lors grant discencion, pour ce qu’ilz levoient la tierce partie de l’empire en laquelle ledit Maximian demandoit porcion. Et quant Maurice le vit ainsi oppressé par ces deux empereurs, il lui compta la cause de sa venue comme Carodocus son pere l’envoioit querir pour venir en Bretaigne. A laquelle chose se consenti Maximian legierement, et promptement se partirent de Romme lui et Maurice pour en Bretaigne venir, avecques eulx grant compeignie de chevalliers romains, lesquelx passerent par Gaule en la subjugant, en assemblant or et argent a grant foison et en acompaignant chevalliers de toutes pars, puis monterent sur mer et sillerent tant qu’en brieff temps leurs neffs arriverent au port Hamon. Si fut tantost nuncé au roy Octuaire comme audit port estoit arrivé grant navire, pour quoy il cuida que ce fussent ennemis malveillans a son regne, et contr’eulx envoia Conan son neveu avecques toute la

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Octuaire le vit privé (correction d’après 8266)

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chevallerie du paÿs pour en defendre la descence. Et quant Maximian et Maurice virent si grant multitude de combatans davent eulx rengiez sur le rivage, ilz furent moult angoesseux et esbahiz, quar ilz n’estoient pas de la moitié si grant numbre. Et pour ce Maurice respondit qu’il n’apartenoit pas a eulx a combatre contre tant de chevallerie, mesmes qu’ilz n’estoient pas venuz pour celle cause, et supplierent paix a Conan, disans estre venuz en legacion de par l’empereur de Rome par devers Octuaire le roy de Bretaigne. Et adonc issirent des neffs doze barons romains des plus discretz, tenants en leurs mains en signe de paix chaicun sa branche d’olive, ausquelx les Bretons firent reverence pour l’onneur qu’ilz veoient en eulx et leur enseignerent la vaye pour aller a Londres porter les nouvelles au roy, et y alla Conan en leur1 compeignie. Quant les Romains furent venuz en la presence du roy Octuaire, ilz lui firent reverence honnorable et de par l’empereur et les [f.43] senateurs lui donnerent salut, de par lesquelx ilz lui presenterent Maximian, disans que a celle cause estoient devers lui transmis. Si fut lors presant Conan qui leur demanda pour quoy ilz estoient donc venuz tant grant numbre de gens et que ce n’estoit pas la maniere d’aller en legacion. Auquel respondit Maurice que ce eust esté deshonneur a si noble chevallier qu’estoit Maximian s’il ne fust acompaigné suffisaument, et mesmement qu’il doubtoit la rencontre de ses ennemis, dont il avoit pluseurs. Si fut Conan en volunté de lui mener guerre, mais Carodocus, le duc de Cornouaille, et maints autres de ce faire le refraignirent. Et aprés ce que touz les seigneurs furent retraiz de la presence du roy, ledit Carodocus et son filz Maurice lui sermonnerent en telle maniere : « Sire Roy, voyez cy ce que desiroient de long temps ceulx qui par vroy desir et obeissance servent loyaument a la majesté de ta coronne. Voyez cy comme il a pleu a Dieu te transmettre ce noble juvenceau Maximian de la noble ligniee royalle des Romains, auquel ne differe pas marier ta fille, si tu vieulx joïr de perpetuele transquillité. » Aux parolles desquelx Carodocus et Maurice se consenti le roy incontinent, et sans demeure donna sa2 fille en mariage a Maximian avecques tout son royaume de Bretaigne aprés son deceix. Pour laquelle chose fut adonc Conan remply de grant felonnie et indignacion, si se transporta tantost en Escoce et cuilit et assembla toute la chevallerie du paÿs, puis trespassa le Humbre et commença a gaster le païs a l’environ et trebucher les citez, chasteaux et villes qui illecques estoient, pour quoy Maximian lui alla a l’encontre et le desconfist en bataille, tant qu’il le contreigny a fuir. Mais pour tant ne se desista pas Conan de poursuir son emprinse, ains au mieulx qu’il peut assembla ses gens d’armes et victorieusement3 envaÿ le païs Maximian, en faisant destruction merveilleuse es parties ou il habitoit, tant que les seigneurs bretons et leurs conseillers et amis, considerans la guerre estre non convenable entre lesditz Maximian et Conan, qui germain estoit de la royne sa femme, s’entremirent de leurs discords et entr’eulx mirent union. Aprés laquelle chose regnerent en paix par l’espace de cinq ans, puis atout grant ost passerent en Gaulle ou ilz conquirent le royaume d’Armoricque, qu’ilz appellerent Bretaigne armoricque ou la Petite Bretaigne a difference de la Grant Bretaigne insulaire. Mais pource que, scelon le divis fait au commancement de ceste compillacion, ceste matiere appartient a la tierce partie d’icelle, anczois qu’en ladicte matiere je procede plus avant, je diviseroy partie de la situation et maniere de ladicte Bretaigne armoricque.

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Cy fine la seconde partie de ceste compillacion et commancent les rubriches de la tierce.