• Aucun résultat trouvé

Après avoir présenté la pyramide Scan Express produite par l’IGN, (§D.1.1), dont un extrait nous servira de cas d’application (§D.1.2), où nous tenterons d’améliorer la fluidité de navigation initiale en ajoutant des représentations intermédiaires à la pyramide existante.

D.1.1. Cas d’application : la Pyramide Scan Express

Nous avons choisi de construire notre cas d’application à partir d’un extrait de la pyramide Scan Express produite par l’IGN [IGN 2014], déjà mentionnée à plusieurs reprises dans cette thèse. Cette pyramide couvre le territoire administratif français et est aujourd’hui composée de huit cartes définies du 1 : 5k au 1 : 1M, affichées sur 14 niveaux de zoom (dans le Géoportail de l’IGN). Elle contient donc moins de cartes que de niveaux de zoom disponibles.

Les données sources de ces cartes sont dérivées de différentes bases de données du référentiel de l’IGN (BD TOPO®, BD CARTO®, BD ALTI®, ROUTE 120®). D’une part, cela signifie que les cartes à différentes échelles de la pyramide Scan Express peuvent donc être issues de différentes bases de données sources, elles-mêmes obtenues par différents processus : elles peuvent donc présenter des incohérences de contenu. D’autre part, les représentations cartographiques à différentes échelles sont donc produites indépendamment et leurs relations multi-échelles ne sont pas toujours connues. Ainsi, il n’est pas trivial de mettre en correspondance ou d’apparier les données de cette pyramide à différentes échelles, pour vérifier leur cohérence ou prendre en compte ces représentations existantes lorsque l’on produit des représentations intermédiaires.

Par ailleurs, cette pyramide a été spécialement conçue pour répondre aux besoins des utilisateurs d’avoir des données plus actualisées. Il est ainsi prévu que les cartes à grande échelle de la pyramide Scan Express soient mises à jour chaque semestre [IGN 2014]. Pour diminuer les coûts et délais de production et ainsi permettre une réédition plus fréquente, des processus de généralisation quasi-automatiques sont utilisés à grande échelle [Lafay et al., 2015]. Seules quelques corrections interactives complètent ce processus, comme le placement manuel des toponymes majeurs, lorsque l’algorithme de placement automatique ne parvient pas à fournir un résultat satisfaisant. Pour réussir ce challenge, la qualité du résultat cartographique a été revue à la baisse. En particulier, des conflits spatiaux entre objets voisins ou des géométries invalides persistent dans la pyramide Scan Express. Pour garantir le bon fonctionnement des processus que nous utilisons et la cohérence de nos pyramides, nous serons donc parfois obligés de corriger ces données initiales avant de pouvoir les généraliser.

En termes de symbolisation cette fois, la pyramide Scan Express utilise des légendes homogènes au fil des échelles [IGN 2014]. Rappelons que dans la partie §B.2.1, nous avons identifié les hétérogénéités de légende comme un facteur potentiel de désorientation, que nous avons choisi d’écarter de nos travaux. Parmi les légendes proposées par l’IGN illustrées précédemment en Figure 60, nous avons choisi d’utiliser la légende Standard. Comme nous l’avons déjà mentionné, cette légende a été spécifiquement choisie pour que la pyramide Scan Express puisse servir de fond de carte topographique à des surcouches de données thématiques, ses couleurs sont donc atténuées par rapport aux cartes traditionnelles de l’IGN. Cependant, ces choix de légende ont été réalisés à grande échelle, puis propagés aux différentes échelles en fonction des données existantes. Il est donc toujours possible de trouver localement des hétérogénéités de symbolisation entre les cartes à

Juin 2018 121 différentes échelles dans la pyramide Scan Express, comme nous l’illustrons dans la partie §D.1.2. Pour évaluer l’amélioration apportée par les représentations intermédiaires que nous allons produire, il nous faudra visualiser la pyramide ainsi créée. Par définition, la pyramide Scan Express est principalement destinée à être utilisée au format numérique, notamment pour des cas d’application nécessitant une navigation multi-échelle. Elle est consultable sur le Géoportail français1, mis en œuvre par l’IGN pour le partage et la consultation de l’information géographique de référence. Son interface de visualisation respecte la suite d’échelles d’affichage définie par le standard WMTS. La relation entre échelle d’affichage et échelle de symbolisation que nous présentions dans la partie §B.3.3 est également respectée, excepté aux petites échelles où les cartes disponibles dans la pyramide Scan Express ne suffisent pas à fournir une représentation adaptée à chaque niveau de zoom (points bleu clair sur la Figure 40). Par ailleurs, le Géoportail n’utilise pas de système de zoom continu pour le moment, mais réalise un zoom animé lors d’un changement d’échelle, proposant ainsi des opérations de zoom relativement fluides en termes d’affichage. Néanmoins, sa structure reste limitée aux échelles définies par le standard WMTS. Nous ne pourrons donc pas nous en servir pour visualiser des pyramides contenant des représentations intermédiaires à d’autres échelles que celles du standard. Nous devrons donc identifier un système de visualisation multi-échelle, qui en plus de fournir un zoom continu, permettrait de paramétrer précisément l’intervalle d’affichage de chaque représentation cartographique, sans se limiter au standard WMTS. Nous détaillons ce choix dans la partie §D.5.

Cette thèse étant réalisée au sein de l’IGN, nous avons également choisi cette pyramide car nous avions un accès facilité aux données vectorielles sous-jacentes et à son équipe de production. En pratique, nous avons récupéré ces données sous la forme d’une base de données PostGIS, extraite de la base de travail de cette équipe. La partie suivante explique comment nous avons préparé notre matériel initial à partir de ces données.

D.1.2. Préparation et Limites du Matériel Initial

Nous choisissons d’étudier plus spécifiquement la transition existante entre les deux cartes illustrées par la Figure 71.

Figure 71. Extrait de la pyramide Scan Express, des cartes existantes définies au 1 : 25k et au 1 : 100k.

1 https://www.geoportail.gouv.fr/carte?c=-1.66,43.38&z=15&l0=GEOGRAPHICALGRIDSYSTEMS.MAPS.SCAN-EXPRESS.STANDARD::GEOPORTAIL:OGC:WMTS(1)&permalink=yes

122 Marion Dumont Ces cartes sont respectivement définies au 1 : 25k et au 1 : 100k et sont affichées dans le géoportail au 1 : 10k et 1 : 50k (niveaux 14 et 12 du standard WMTS), ce qui est cohérent avec la relation entre échelle de symbolisation et échelle d’affichage que nous avons mise en évidence en §B.3.3. Dans la suite de ce chapitre, nous désignerons ces cartes existantes par leur échelle de symbolisation. Si l’on reprend les ordres de grandeur de [Lacoste 1980, p21], on peut dire que ces cartes représentent respectivement le niveau de détail du quartier, avec des bâtiments individuels et un réseau routier très détaillé ; et de l’agglomération, avec les aires urbaines et les axes routiers majeurs.

Nous choisissons ainsi d’étudier les transitions de représentation entre grande échelle (supérieure à 1 : 50k) et moyenne échelle (inférieure à 1 : 500k), telles que définies par [Robinson et al., 1995]. D’une part, cette transition de représentation nous semble parmi les plus complexes à appréhender pour l’utilisateur, à cause des changements importants d’échelles et de niveaux d’abstraction, en particulier pour le thème du bâti. D’autre part, cette gamme d’échelles et d’abstraction géographique est traitée par l’ensemble des producteurs cartographiques : nos conclusions seront donc utiles au plus grand nombre.

Dans la pyramide Scan Express en particulier, il existe entre ces deux cartes existantes une autre carte, définie au 1 : 50k et affichée au 1 : 25k, illustrée par la Figure 72. Cette représentation reprend majoritairement le contenu de la carte définie au 1 : 25k, seul le bâti étant simplifié en une représentation en aires urbaines (en beige). Nous préférons ne pas considérer cette carte dans la construction de nos pyramides car cela limiterait beaucoup nos choix en termes de répartition des intervalles d’affichage et de transition de représentation. Néanmoins, nous utiliserons cette carte dans notre pyramide dite initiale, composée uniquement des trois représentations existantes aux 1 : 25k, 1 : 50k et 1 : 100k, qui servira d’étalon de comparaison pour évaluer l’amélioration apportée par nos propositions à la fluidité de navigation.

Figure 72. Extrait de la carte définie au 1 : 50k dans la pyramide Scan Express, le bâti étant représenté sous forme d’aires urbaines (en beige).

Par ailleurs, pour limiter le temps de production du matériel de test, nous choisissons de limiter la taille de notre zone d’étude à la taille utile à notre expérience, c’est-à-dire recouvrant l’écran utilisé pendant notre expérience, à l’échelle d’affichage du 1 : 50k (où est initialement diffusée la carte existante au 1 : 100k). Nous avons ainsi défini une zone d’étude d’environ 30 km par 15 km dans la région de Saint-Jean-de-Luz (Pyrénées-Atlantiques), illustrée par la Figure 73.

Juin 2018 123

Figure 73. Situation géographique de notre zone d’étude, dans le sud-ouest de la France (en rouge à droite), sur une emprise de 30 km par 15 km autour de Saint-Jean-De-Luz (à gauche). La carte Scan Express définie au 1 : 250k sert ici à des fins d’illustration et n’est pas utilisée par ailleurs.

Cette zone a également été choisie en fonction de son contexte géographique. Elle regroupe des paysages géographiques variés (littoral, montagne, urbain, rural) nous permettant de confronter nos réflexions à leurs différentes caractéristiques. La proximité avec la frontière espagnole et la présence d’une zone maritime et de zones urbaines en quantité limitée nous ont aussi permis de réduire un peu le temps de production.

Pour limiter la complexité de notre expérience (côté utilisateurs) et le temps de production de notre matériel de test, nous choisissons également de n’utiliser qu’une partie des thèmes géographiques représentés dans les cartes Scan Express. Nous laissons ainsi de côté la représentation du relief et des points d’intérêt touristiques, thèmes particulièrement saillants et sources de complexité visuelle. Notre pyramide initiale ne représentera donc que les thèmes de la végétation, de l’occupation du sol, de l’hydrographie, des limites administratives, des réseaux ferré et routier, des structures publiques non bâties (cimetières, terrains de sport) et enfin du bâti. Par ailleurs, nous supposons que la représentation multi-échelle des toponymes joue un rôle important dans la fluidité de navigation, mais ne souhaitons pas couvrir cette problématique dans notre expérience. Pour éviter un quelconque biais dû aux toponymes, nous choisissons de n’intégrer que les noms des six villes les plus importantes de la zone, avec une position et une typographie invariantes au fil des échelles. Le rendu des représentations existantes avec ces simplifications est présenté dans la Figure 74. Un extrait de la pyramide initiale ainsi construite à partir des données Scan Express est aussi présenté en Annexe G.1.

A partir de la base de données cartographique fournie par l’IGN, nous avons ainsi construit notre propre base de données à partir des classes d’entités nécessaires pour représenter ces thèmes géographiques, en extrayant les données présentes sur notre zone d’étude uniquement. Dans la suite de cette thèse, nous ferons référence à cette base de données initiale lorsque nous mentionnerons les données sources du processus de production cartographique. Une première analyse de ces données sources a mis en lumière des problèmes de redondance, principalement aux frontières du quadrillage de production utilisé par l’IGN, que nous avons corrigées. Pour le thème du bâti, nous avons également identifié de nombreux chevauchements dans la carte au 1 : 25k, issus du processus de généralisation quasi-automatique. Les algorithmes de généralisation que nous utilisons étant sensibles à ces conflits spatiaux, nous avons corrigé les données sources en déplaçant les

124 Marion Dumont bâtiments en intersection, voire en éliminant certains bâtiments lorsque c’était nécessaire. L’algorithme utilisé pour ce faire sera décrit plus en détail dans la partie §D.4.2.

Figure 74. Comparaison entre les représentations existantes (à gauche) et le matériel de test (à droite), après sélection des thèmes géographiques, pour la carte au 1 : 25k (en haut) et au 1 : 100k (en bas).

Avant de passer à la production de représentations intermédiaires, nous avons aussi étudié les relations entre objets homologues entre les deux représentations existantes au 1 : 25k et au 1 : 100k, pour détecter d’éventuelles incohérences entre échelles. Ces relations ne sont pas explicitement fournies dans les données sources, qui sont issues de bases de données différentes et produites avec des processus de généralisation indépendants [IGN 2014]. Nous avons donc effectué une première phase de détection d’incohérences basée sur une sélection par intersection entre les objets au 1 : 25k et au 1 : 100k, pour les différents thèmes géographiques utilisés. Etant donné la quantité et la gravité des incohérences estimées par cette méthode, nous avons considéré qu’un traitement global n’était pas nécessaire sur notre zone d’étude. Nous avons donc fait le choix de corriger localement ces incohérences lorsqu’elles étaient potentiellement gênantes selon nous pour la navigation de l’utilisateur. Par exemple, quand un tronçon routier était présent au 1 : 100k sans homologue connu au 1 : 25k, nous avons choisi de le supprimer de la représentation moins détaillée pour homogénéiser la pyramide initiale. Néanmoins, sur une zone d’étude plus importante, il faudrait certainement appliquer un processus plus robuste, basé sur un algorithme d’appariement de réseaux multi-échelle [Mustière et Devogèle, 2008] voire multicritères [Olteanu-Raimond et al., 2015]. Au-delà du contenu, nous avons également identifié quelques hétérogénéités de légende entre les cartes existantes au 1 : 25k et au 1 : 100k, notamment entre les symbolisations des routes comme

1 : 25k 1 : 25k

Juin 2018 125 déjà mentionné. Sur la Figure 75, la classification des routes change entre les deux cartes, impliquant des changements de symbolisation pour certains objets. Les routes de moyenne importance, en jaune sur la carte au 1 : 25k, passent ainsi en blanc sur la carte au 1 : 100k, comme les quelques routes de moindre importance conservées. Ces changements s’expliquent par une simplification de la classification des routes, pour réduire la complexité du réseau global à petite échelle, mais peuvent présenter un biais pour notre expérience s’ils interviennent sur des objets qui servent de repères à l’utilisateur.

Figure 75. Hétérogénéités de légende entre les représentations des routes dans les cartes existantes : l’autoroute, particulièrement saillante en bleu sur la carte au 1 : 100k, ne l’est plus en rouge au 1 : 25k ; les routes secondaires en jaunes au 1 : 25k sont représentées en blanc au 1 : 100k.

Ainsi, l’autoroute en bleu sur la carte au 1 : 100k est représentée en rouge au 1 : 25k. Cet objet est particulièrement saillant par sa forme et sa position, visuellement structurante de notre zone géographique. Il nous semble donc particulièrement dangereux pour la significativité de notre expérience de conserver ce changement de représentation, au risque que ce facteur perturbe nos participants. Nous choisissons donc de corriger la carte au 1 : 25k pour homogénéiser la représentation des autoroutes. En revanche, nous choisissons de conserver les hétérogénéités de légende en l’état pour les autres objets cartographiques, car homogénéiser ces symbolisations (en jaune ou en blanc) risquerait de diminuer la qualité de l’une des cartes. Depuis cette étude, l’IGN a d’ailleurs pris la décision d’homogénéiser la représentation des routes entre les différentes échelles de sa future pyramide cartographique.

Nous avons choisi d’étudier la transition existante entre les cartes Scan Express définies au 1 : 25k et au 1 : 100k. Nous avons construit notre matériel de test initial à partir d’un extrait de ces représentations, sur une zone d’étude autour de la région de Saint-Jean-de-Luz. Dans la partie suivante, nous présentons les choix de construction des représentations intermédiaires que nous allons créer pour simplifier cette transition initiale.