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CHAPITRE I : Formation du PA et régulation des PLD au cours de la phagocytose

C. Caractéristiques des macrophages proprement dits

1. Fonctions et pathologies associées

Tout comme les autres cellules phagocytaires, le macrophage remplit différentes fonctions médiées principalement par le processus de phagocytose.

Dans les organismes pluricellulaires, la phagocytose participe au remodelage des tissus au cours du développement ainsi qu’après la naissance. Durant l’embryogénèse, les macrophages ont pour fonction d’éliminer les cellules qui sont mortes par apoptose lors de la formation des organes (Penaloza et al., 2006). Dans la vie courante, les macrophages jouent un rôle dans l’élimination de débris cellulaires et de cellules nécrotiques en cas de blessure (Krysko et al., 2006). Ils contribuent aussi à l’angiogenèse, via l’absorption des composants de la matrice extracellulaire et la sécrétion de métalloprotéases, ainsi que de facteurs de signalisation ou de croissance. De ce fait, ils peuvent être associés au développement de cancers (Cassetta et Pollard, 2018). Les macrophages régulent également l’homéostasie lipidique, en contrôlant l’accumulation des lipides dans le foie par le biais entre autres de leurs récepteurs scavengers. On peut par exemple signaler qu’une ingestion trop élevée d’acides gras oxydés peut induire la formation de macrophages spumeux, étape décisive dans le développement de la sclérose en plaques par exemple (Lapenna et al., 2018).

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La fonction primordiale des macrophages reste la défense immunitaire, qui est tributaire de la réponse inflammatoire (Flannagan et al., 2012). Néanmoins, leur contribution à l’inflammation ne se limite pas uniquement à la phagocytose. Ils possèdent également des capacités de sécrétion de cytokines pro-inflammatoires, qui amplifient l’inflammation en entraînant l’infiltration et l’activation de nombreuses autres cellules immunitaires telles que les lymphocytes T. Un mauvais contrôle de cette production peut par ailleurs mener à une inflammation systémique, provoquant des dommages vasculaires irréversibles et une défaillance des organes, symptômes caractéristiques de la septicémie (Stearns-Kurosawa et al., 2011). Enfin, ce sont des acteurs à l’interface avec l’immunité adaptative, participant à son élaboration grâce à la présentation des antigènes par le complexe majeur d’histocompatibilité (CMH) de type II. Les peptides antigéniques résultant de la dégradation des agents pathogènes peuvent en effet être placés sur ce complexe membranaire et présentés aux lymphocytes T afin de déclencher une réponse immunitaire spécifique (Mantegazza et al., 2013).

2. Les macrophages de la lignée RAW 264.7

La partie de mes travaux de thèse portant sur la phagocytose a été effectuée à partir de la lignée cellulaire de macrophages murins RAW 264.7. De par leur grande plasticité, ces cellules adoptent différentes morphologies en culture, mais présentent généralement des prolongements cytoplasmiques. Elles sont le plus souvent mononucléées et de taille importante (20 μm de diamètre en moyenne, pouvant s’étendre jusque 60 µm en phagocytose). La lignée RAW 264.7 a été largement utilisée pour caractériser la machinerie moléculaire gouvernant la phagocytose, et les résultats obtenus ont pu être confirmés par la suite dans les macrophages primaires. Les cellules de cette lignée étant facilement transfectables par électroporation ou lipofection, elle représente un modèle de choix pour la surexpression de protéines de fusion ou l’utilisation d’ARN interférents.

Le processus de phagocytose peut être stimulé aisément dans ces cellules par l’ajout de particules telles que des billes de latex ou du zymosan, opsonisées ou non (figure 30). L'activation des récepteurs de surface avec ces particules déclenche des cascades de signalisation qui conduisent à l'internalisation de la particule dans un phagosome et à sa dégradation ultérieure. Chez cette lignée, la capacité de phagocytose a cependant tendance à diminuer graduellement avec le nombre de passage des cellules. Comparés à des macrophages en culture primaire, les macrophages RAW 264.7 présentent une phagocytose plus lente et une faible capacité de dégradation des particules organiques ingérées. Ceci peut être considéré comme un inconvénient dans l’étude du processus de maturation, mais peut au contraire se révéler être un avantage dans le cas de l’observation de la formation du phagosome, un processus extrêmement dynamique.

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III. Mécanismes moléculaires de la phagocytose et rôles des lipides

Les nombreuses études portant sur la phagocytose ont permis de construire un modèle qui comprend les différentes étapes largement conservées de ce processus (figure 31). La phagocytose étant un mécanisme d’internalisation de particules de tailles importantes, ces étapes nécessitent des réarrangements massifs de divers compartiments cellulaires, afin d’aboutir à la formation d’une vésicule de grande taille dans laquelle la particule sera enfermée, dégradée, puis éventuellement recyclée.

Figure 30 : Illustration de la formation du phagosome au cours de la phagocytose de billes de latex par un macrophage

(Huynh et al., 2007)

Figure 31 : Les principales étapes de la phagocytose

Le processus de phagocytose se compose de 4 grandes étapes : 1) Des motifs spécifiques sur la particule sont reconnus par les récepteurs phagocytaires, ce qui active des voies de signalisation ; 2) Ces voies conduisent à la formation d’un phagosome via un remodelage du cytosquelette d’actine ainsi qu’un apport membranaire au niveau du site d’interaction du macrophage avec la particule ; 3) Le phagosome précoce subit des phases de maturation le long de la voie d’endocytose et notamment des fusions avec des lysosomes ; 4) La particule est dégradée progressivement par les enzymes lytiques et les composants peuvent être recyclés, notamment pour être présentés via le CMH de classe II.

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Suite à la reconnaissance de molécules sur les récepteurs phagocytaires, ceux-ci se regroupent pour permettre la transduction du signal. Les voies impliquées peuvent varier en fonction du type de récepteur qui déclenche la phagocytose. L’activation de plusieurs cascades de signalisation conduit à des réarrangements du cytosquelette, ainsi qu’un remodelage membranaire au niveau des sites d’interaction ligand-récepteur, entraînant l'extension de pseudopodes autour de la particule pour former une coupe phagocytaire. Lorsque les pseudopodes ont totalement entouré la particule, ils fusionnent grâce à un mélange d’activité contractile médiée par le cytosquelette d’actine, couplée à l’activité de la dynamine, et de réarrangements de la membrane (Araki, 2006 ; Marie-Anaïs et al., 2016). Cela conduit à la formation d’un phagosome, qui est internalisé puis transporté sur les microtubules jusqu’à la région périnucléaire. Durant ce transport, le phagosome subit des étapes de maturation pour se transformer progressivement en phagolysosome, après différentes interactions avec la voie endolysosomale. Ce dernier compartiment permet la dégradation du contenu du phagosome. Il est caractérisé par un milieu vésiculaire acide, ainsi que la présence d’enzymes de dégradation et d’espèces réactives de l’oxygène (Stuart et Ezekowitz, 2008). Les peptides antigéniques issus de la dégradation peuvent être préservés et chargés sur le CMH de classe II afin d’activer les lymphocytes T, acteurs de l’immunité adaptative permettant une réponse spécifique (Mantegazza

et al., 2013). Les autres produits de dégradation seront recyclés comme nutriments ou rejetés par exocytose dans le cas de déchets. Enfin, en parallèle de ces étapes de trafic membranaire, l’activation des macrophages s’accompagne de la production de cytokines, de chimiokines, et de défensines qui participent à la réponse inflammatoire.

En résumé, la phagocytose peut être décomposée en deux phases principales : la formation du phagosome, suivie de sa maturation (Aderem et Underhill, 1999). Au vu de mon sujet d’étude, je me concentrerai sur la formation du phagosome, sans rentrer dans les détails de sa maturation ni la réponse intercellulaire médiée par l’activation des macrophages. Ce chapitre décrira les acteurs impliqués dans cette étape initiale, incluant le cytosquelette d’actine, les GTPases des familles Rho et Arf, et s’intéressera particulièrement au rôle des lipides.