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I. Le capital humain, les compétences et les dynamiques d’apprentissage

2. Le concept et les différentes approches du capital humain

2.4. Le capital humain, le changement technologique et les dynamiques d’apprentissage

Afin de comprendre comment les entreprises et les industries évoluent au fil du temps, il est nécessaire d'étudier les processus fondamentaux de changement technologique et les dynamiques d'apprentissage. Durant ces dernières années, les chercheurs du changement technologique ont en effet commencé à examiner le rôle des facteurs internes des entreprises (Cohen, 1995). Cette recherche s'est appuyée à la fois sur l’approche évolutionniste (Nelson et Winter, 1982) et l’approche basée sur les ressources (RBV Ressource-based View) (Penrose, 1959 et Wernerfelt, 1984). Ceci suggère qu'il y a une certaine organisation spécifique des actifs comme les connaissances accumulées sur de longues périodes, qui rend une entreprise différente des autres et plus performante. L'apprentissage technologique est la façon avec laquelle les entreprises accumulent les capacités technologiques (Malerba, 1992). La capacité technologique est la connaissance, les compétences et l'expérience nécessaires pour produire et innover au sein des entreprises (Lall et Wignaraja, 1998). Elle requiert beaucoup de ressources comme les connaissances, les compétences et l'expérience acquise grâce à l'apprentissage par la pratique, l'interaction etc. Une entreprise qui s'efforce d'améliorer sa capacité technologique grâce à des moyens d'apprentissage, de formation, d'accumulation des connaissances et d'autres tels que la R&D, renforce son développement du capital humain. Chaque fois que les changements technologiques prennent place, il y a toujours une acquisition de nouvelles connaissances, d'idées et d'informations qui vient s’ajouter aux connaissances tacites existantes. Les changements technologiques et le renforcement des capacités par l'apprentissage et la R&D améliorent le capital humain ainsi que la capacité d’absorption au sein de l’entreprise (Lucas, 1988; Cohen et Levinthal, 1990). La plupart des connaissances technologiques nécessaires pour les PME dans les pays en développement sont incrémentales et pourraient souvent être acquises par l'apprentissage élémentaire (Lall, 1982). A mesure que la production et les processus de fabrication deviennent complexes, l’entreprise a besoin de

nouveaux types de connaissances et de changements organisationnels. L'apprentissage dans les entreprises est une source majeure de changement technique incrémental et en tant que telle une entreprise est une organisation en apprentissage permanent, et par les connaissances qu'elle accumule, transforme continuellement son capital de connaissances (Lundvall et al, 2002). Une entreprise est caractérisée par un certain niveau de connaissances techniques et organisationnelles. Elle s'appuie sur une large variété de sources de connaissances (fournisseurs, sous-traitants, fournisseurs d’équipements et de machines) qui peuvent être dans son environnement local ou souvent en dehors des frontières nationales (Lundvall, 1988). Les processus d'apprentissage sont liés à des sources spécifiques de connaissances technologiques et productives (la formation et les fabricants d'équipement entre autres). Les acteurs externes avec lesquels les entreprises interagissent sont cruciaux pour l'apprentissage dans les entreprises. Les sources de connaissances externes par lesquels les entreprises internalisent les nouvelles capacités comprennent les fournisseurs d'équipements, les universités et les instituts de recherche.

Les processus d'apprentissage sont liés aux trajectoires du changement technique incrémental par l'accumulation des stocks de connaissances dans les entreprises (Malerba, 1992). En d'autres termes, le sens du changement technique est lié aux types de processus d'apprentissage. Les différents types d'apprentissage identifiés dans la littérature sont: l'apprentissage par la pratique (Arrow, 1962), l'apprentissage par l'utilisation (Rosenberg, 1982), l'apprentissage par la R&D (Dosi et al, 1988.), l'apprentissage par l'interaction (Lundvall, 1988); l'apprentissage par l'exploitation (Teubal, 1987; Scott-Kemmis et Bell, 1988); l’apprentissage par le changement (Katz et Ablin, 1987); l’apprentissage par la formation (Dahlman et Fonseca, 1987); par l'embauche (Katz, 1987) et enfin l'apprentissage par la recherche (Dahlman et Fonseca, 1987).

2.4.1. Les contributions de l’approche basée sur les ressources

La théorie basée sur les ressources offre un cadre de référence permettant de fonder l'influence de l'utilisation des TIC et du capital humain sur la performance des entreprises (Barney, 1991 ; Grant, 1991 ; Hunt et Morgan, 1995). Une entreprise est une combinaison de ressources tangibles et intangibles dont la nature et/ou les attributs déterminent sa compétitivité et sa performance. Grant (1991) utilise la notion de profit pour signifier la performance de l’entreprise. Cyert et al., (1993) considèrent que l’ampleur de la performance de l’entreprise, représentée par son profit, est fonction de l’avantage concurrentiel de

l’entreprise. Ainsi une entreprise performante est forcément une entreprise qui possède une compétitivité plus importante que ses concurrents. L’approche basée sur les ressources initiée par Penrose (1959) a connu un réel développement avec Wernerfelt (1984) et Barney (1991). Wernerfelt (1984) a introduit l’idée qu’il convient de se focaliser sur les ressources de l’entreprise afin d’expliquer sa performance. Plusieurs chercheurs ont étudié les caractéristiques des ressources pouvant contribuer à l’obtention d’un avantage concurrentiel durable (Barney, 1991 ; Dierickx et Cool, 1989). Selon Barney (1991) les ressources sont distribuées d’une manière hétérogène entre les firmes et ne peuvent pas être transférées sans frais. Ainsi, les ressources qui sont à la fois rares et de valeur, peuvent induire un avantage concurrentiel. En étant inimitables, non substituables et non transférables, ces ressources peuvent être à l’origine d’un avantage concurrentiel durable.

2.4.2. Les contributions de la théorie de l'apprentissage organisationnel

L’apprentissage organisationnel joue un rôle fondamental dans l’évolution des capacités. L’apprentissage est souvent associé à la notion de connaissance (Bogner et Bansal, 2007). La théorie évolutionniste place l’apprentissage au centre. Pour Nelson et Winter (1982) les entreprises sont un ensemble de routines et de compétences dont l’évolution est liée à la recherche et l’apprentissage. Pour Penrose (1995), l’entreprise est un répertoire de capacités et de connaissances où l’apprentissage est central pour sa croissance.

Les tenants de la théorie de l'apprentissage organisationnel défendent l’idée selon laquelle l'information constitue un input et son traitement un levier de l'apprentissage organisationnel. L'entreprise est considérée comme un système de traitement de l'information. L'accès à l'information, son traitement et sa diffusion constituent des éléments essentiels du processus d'apprentissage (Argyris, 1993 ; Cohen et Levinthal, 1990, 1994 ; Huber, 1991). Les travaux de Cohen et Levinthal (1990, 1994) et Levinthal (1992) sur le concept de capacité d'absorption constituent les contributions les plus influentes dans le domaine de l'apprentissage organisationnel. Pour Cohen et Levinthal (1990, 1994), la capacité d'apprentissage et d'innovation d'une entreprise dépend de sa capacité à absorber une nouvelle information (ou connaissance). La capacité d'absorption représente la capacité de reconnaître la valeur, à assimiler et à exploiter une nouvelle information (ou connaissance) à des fins commerciales. Elle permet de comprendre et d'exploiter les nouveaux progrès dans un domaine donné et de mieux évaluer l'intégration des innovations disponibles et d'en prévoir les développements ultérieurs. Les connaissances préalables, qu'une entreprise possède dans

un domaine donné, représentent les bases de cette capacité d’absorption. Pour Cohen et Levinthal (1990) afin d’absorber une nouvelle information dans un domaine particulier, l’organisation doit posséder au préalable des connaissances et des compétences riches liées à ce domaine (niveau élevé, diversité, facilité d’utilisation, pertinence, etc.).

2.4.3. Les contributions de l’approche basée sur les capacités dynamiques

A l’heure des nouvelles tendances du marché de plus en plus globalisé et marqué par une diversité des ressources, des innovations et des processus de production ; et de la difficulté d’adaptation au changement, les entreprises ont la nécessité de développer des capacités dynamiques (Teece, 2007). L’approche des capacités dynamiques se base sur l’évolution des ressources et des compétences d’où une vision dynamique de l’organisation (Wang et Ahmed, 2007). Teece (2007) a défini les capacités dynamiques comme l’aptitude d’une entreprise à intégrer, construire et reconfigurer les compétences internes et externes en réponse aux changements rapides de l’environnement. Deux courants de pensée ont permis le développement de l’approche basée sur les capacités dynamiques: l’approche entrepreneuriale et l’approche évolutionniste.

L’approche entrepreneuriale, considère les managers/entrepreneurs comme la source des capacités. Elle se base sur des facteurs managériaux. Pour Adner et Helfat (2003) ainsi que Teece (2007) les managers permettent la reconfiguration des ressources et des compétences. Adner et Helfat (2003) parlent même de capacités dynamiques managériales. Pour Peteraf et Maritan (2007), les capacités dynamiques font intervenir des processus à la fois managériaux et organisationnels.

L’approche évolutionniste des capacités dynamiques est basée sur les théories de l’évolution organisationnelle (Nelson et Winter, 1982 ; Penrose, 1995). Cette approche se base principalement sur des facteurs organisationnels. Les capacités dynamiques reposent sur l’évolution des capacités organisationnelles (Helfat, 2000) et sur les mécanismes d’apprentissage.