• Aucun résultat trouvé

Au sein des Hautes écoles de la HES-SO20, le travail social est présenté comme une des

composantes de la régulation sociale dans ses capacités à combattre les effets négatifs de l’organisation sociale et économique pour les publics les plus défavorisés. Le constat des inégalités sociales, s’il est reconnu d’emblée, est peu problématisé et n’est pas investi comme axe d’intervention.

(…) les travailleurs sociaux s’appuient sur les ressources des usagers pour favoriser leur participation sociale dans le respect de leurs spécificités. Ils fondent leurs actions sur les concepts et valeurs des droits fondamentaux et de la justice sociale, défendus par la société sur un plan national et international. Ils s’engagent pour que chacun soit en mesure d’agir en tant que citoyen. Sur la base de ces valeurs, ils s’opposent aux inégalités, quelle qu’en soit l’origine.

20

74

Les professionnels s’appuient sur les droits fondamentaux et la justice sociale tout en relevant précédemment que le système de protection sociale se péjore gravement. Nous retrouvons un balancement inhérent à l’éducation spécialisée, entre défense politique des droits de la personne, des minorités, et accompagnement plus personnalisé basé sur les potentiels des personnes en situation de fragilité.

Au sein des Hautes écoles en travail social de la HES-SO, comme nous l’avons décrit au chapitre 1, le plan d’étude cadre de formation bachelor (2006) ne retient plus qu’une seule filière, celle de Travail social. Il ne s’agit pas que d’une simple affaire de dénomination car ce sont bien les pratiques professionnelles qui depuis de nombreuses années peinent à tenir dans leurs "propres frontières" de référence. Par exemple, le travail social hors murs se trouve typiquement à l’interstice des trois métiers

A Genève, à l’aube des années '90, les Travailleurs sociaux hors murs (TSHM) incarnent

l’une des nouvelles fonctions du social, leur mission première étant de faire du lien en eouvrant aux carrefours entre les jeunes sans qualifications, les institutions, les élus locaux et les habitants des quartiers. Tout à leur tâche d’enrayer les effets de la crise économique, ces travailleurs sociaux constatent que le dilemme entre soutien aux populations fragilisées et contrôle social ressurgit de façon marquée » (Vuille & Wicht, 2007 -21). L’action communautaire, quant à elle, chère à l’animation socioculturelle, est réactivée dans le champ du service social. Le travail lié aux toxicodépendances demande de l’interdisciplinarité ralliant les métiers du social et de la santé. Dans ces bouleversements de l’intervention sociale, les plans d’étude se doivent d’être réaménagés et actualisés aux réalités professionnelles. Suite à un travail de consultation des terrains professionnels, la filière Travail social de la HES-SO délivre un bachelor en "Travail social" avec orientations. Sur demande des employeurs, les orientations retenues sont restées liées aux trois métiers historiques. Ceci malgré des propositions issues des écoles de transformation plus radicales. Ainsi, les étudiants choisissent en deuxième partie de formation, l’orientation dans laquelle ils souhaitent se spécialiser. C’est donc dans les dimensions transversales du travail social que la formation prend son appui, offrant dans un deuxième temps, des modules de spécialisations dont les orientations font partie.

Relevons que l’orientation "animation socioculturelle" a historiquement porté les dimensions collectives et communautaires, principalement dans le champ du temps libre. Son action vise à organiser et à mobiliser des groupes et des collectivités en vue d'un changement social. L’éducation populaire est une des sources de son développement, tout comme les programmes

75

de conscientisation en Amérique du Sud portés par Paolo Freire, sans oublier l’approche communautaire portée par Saul Alinsky. L’intervention vise à permettre une participation volontaire et démocratique faisant appel à la notion de citoyenneté.

Du côté du "service social", si les apports se concentrent sur les dimensions financières d’aide à la personne, les dimensions communautaires traversent également ce champ dans l’aide à l’organisation civile de solidarités de proximité. La confrontation aux mutations du monde du travail est, de ce fait, particulièrement prégnante, à l’exemple des dimensions du chômage et de la pauvreté. Le service social est particulièrement concerné par les questions de politiques sociales et de droits sociaux, comme la protection des mineurs, les procédures de tutelle ou de curatelle par exemple. Les assistants sociaux interviennent pour contribuer à la résolution des problèmes sociaux que les personnes concernées ne peuvent résoudre d'elles-mêmes tout en faisant appel à leurs capacités, à leurs relations interpersonnelles et aux ressources de la collectivité. Notons que si les personnes se trouvent en situation de pauvreté financière et/ou morale, le professionnel va devoir construire son action en articulant plusieurs niveaux, que ce soit le développement des potentialités du sujet comme la participation à la mise en œuvre d’actions d’information et de développement sur les plans associatifs et politiques, avec l’objectif de trouver des réponses collectives et structurelles répondant aux problèmes individuels.

Au vu de la problématique retenue pour notre thèse, nous allons, pour notre part, approfondir l’éducation sociale, champ sur lequel portera notre matériel empirique.

L’orientation éducation sociale est présentée sur le site de la Haute école de travail social de

Genève21 en référence à l’article 2 des Statuts de l’Association européenne de centres de

formation au travail socio-éducatif (2005).

Par éducation sociale, il faut entendre l’action menée par un professionnel qui, après une formation spécifique, favorise par la mise en œuvre de méthodes et de techniques pédagogiques et sociales, le développement personnel, la maturation sociale et l’autonomie des personnes (…) en difficulté, handicapées ou en voie de l’être. L’éducateur social partage avec elles diverses situations spontanées ou suscitées de la vie quotidienne, soit au sein d’un établissement ou d’un service, soit dans le milieu naturel de vie, par une action continue et conjointe et avec le milieu.

Le rapport à la vie quotidienne est défini comme un axe central du métier qui amène l’éducateur à :

21

76

concevoir, organiser et exploiter les moments significatifs de la vie de tous les jours, dans les internats, les externats, voire, le milieu ouvert, pour que ceux-ci offrent aux personnes l’occasion d’enrichir leur expérience et leur maîtrise sur leur propre vie. Les repères que présentent ces expériences de vie quotidienne sont en effet des révélateurs importants des ressources et des limites des individus et des groupes.

La définition prend encore en compte les tensions que nous avons mises en exergue dans la partie consacrée aux « Défis contemporains du travail social », énoncées comme « développement de la personne et processus d’automisation, d’insertion des personnes ». Nous retrouvons l’articulation délicate entre le développement personnel, issu des théories centrées sur la personne (Carl Rogers) et la volonté d’autonomie sociale et économique par l’insertion socioprofessionnelle, clé de voûtes des politiques sociales actuelles. La notion d’"accompagnement" est relevée comme centrale, quelle que soit la diversité des problèmes et des contextes au sein desquels les éducateurs sociaux sont amenés à travailler. Les dimensions liées au travail sur mandat pénal et ainsi d’aide contrainte, sont présentées comme une des spécificités de l’intervention.