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RESOLUTION DU PROBLEME COUPLE DANS LE DOMAINE TEMPOREL

IV. B.1. Ondes transversales et longitudinales de la corde

La formulation des équations de mouvement des cordes est sujette à de multiples discussions et nombreuses sont les études sur le sujet [Flet64, Wein77, Conk96b, ChAs98, EtCM15]. La représentation la plus simple d’une corde est l’équation de d’Alembert [Alem47, S.214–249] : une EDP linéaire représentant une seule onde transverse avec des partiels harmoniques. Cependant, cette formulation est très sommaire et très loin de rendre compte des phénomènes réels. Chaigne [CKBD08] met notamment en évidence que de nombreux phénomènes interviennent dans les cordes de piano : vibrations transversales et longitudinales, double polarisation, in-harmonicité des partiels, non-linéarités, etc. Le modèle MGE (Modèle Géométriquement Exacte) de Chabassier [Chab12, ChCJ13] est le plus à même de représenter au mieux la réalité puisqu’il intègre toutes ses composantes. Toujours dans l’optique d’écrire un modèle simplifié et de le complexifier par étapes successives, la formulation sans la double polarisation est privilégiée :

{ ̈ ( ) ( ) ̈ ( ) ( ) √ ( ) (IV.1)

où représente la masse volumique de la corde ; sa section ; le module de Young ; la tension ; et les déplacements transversaux et longitudinaux.

Ce système met en évidence un échange d’énergie « direct » entre les deux ondes présentes dans la corde représenté par des termes transverses dans l’équation d’onde

couplage entre les ondes transversales et longitudinales est d’une importance capitale [Conk96b]. Celle-ci est par ailleurs étroitement liée à l’existence d’un précurseur dans le son, comme l’ont montré de nombreux travaux [Aske93, CKBD08], qui est décrit comme une « présence » vibratoire dans l’accélération au chevalet précédant l’arrivée des ondes transversales, d’où son nom. Ainsi la participation des ondes longitudinales est susceptible d’expliquer ce phénomène puisque celles-ci se propagent à une vitesse bien supérieure que les ondes transverses. Le marteau frappant la corde sur une portion et non ponctuellement, celui-ci excelui-cite directement les ondes longitudinales même s’il agit dans une moindre mesure que sur les vibrations transverses. Comme précisé, l’effort injecté par le marteau sera en conséquence incliné de façon à exciter majoritairement l’onde transverse et à solliciter légèrement l’onde longitudinale. Cela nous amène à imposer un effort longitudinal d’environ 2% de l’effort total.

Même sans cela, l’échange d’énergie induit par les non-linéarités viendrait exciter ces ondes longitudinales qui donneraient naissance à un précurseur dans le son. Ce dernier aspect est pour l’instant écarté pour être abordé plus tard en fin de chapitre. Via un développement de Taylor à l’ordre 0, ce modèle est linéarisé donnant ainsi deux équations d’onde indépendantes :

{

̈

̈ (IV.2)

Il n’y a donc plus d’échange d’énergie « direct » entre les deux ondes. On retrouve deux équations très classiques : la première correspondant à l’équation de d’Alembert pour les ondes transverses ; la seconde correspond à une équation de poutre en traction / compression. Nous observerons par la suite que le couplage avec la table d’harmonie engendre un échange entre les deux ondes cette fois ci de façon « indirecte » puisque la rotation du chevalet vient solliciter longitudinalement la corde. L’inharmonicité sera quant à elle apportée par le contact au chevalet qui, étant mobile, apporte un décalage entre les partiels.

Conformément au schéma de principe donné à la Figure IV–1, l’effort du marteau ainsi que les deux efforts de contact sont ajoutés au second membre de l’équation (IV.2) où les distributions de Dirac les rendent ponctuels :

{

̈ ( ) ( ) ( ) ( ) ( )

Selon le même formalisme que dans les chapitres précédents, les déplacements transversaux et longitudinaux de la corde sont décomposés sur la base des modes encastrés / encastrés d’une corde de longueur totale . Soit :

{

( ) ∑ ( ) ( )( ) ( )( ) ( )

( ) ∑ ( ) ( )( ) ( )( ) ( )

(IV.4)

lesquels sont injectés dans le système d’équations de mouvement (IV.3). La projection sur des modes d’indices et quelconques permet alors d’écrire le problème sous forme matricielle :

{̿ ̈( ) ̿ ( ) ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )( )

̿ ̈( ) ̿ ( ) ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )( )

(IV.5) où ̿ , ̿ , ̿ et ̿ sont les matrices de masses et de raideurs ; ( ) et ( ) les vecteurs amplitudes modales des ondes dans la corde ; ( )( ) et ( )( ) les vecteurs propres généralisés appliqués à la position .

L’usage des propriétés d’orthogonalité des modes permet d’écrire les matrices de masses et de raideurs diagonales telles que :

̿ ̿ ( ( ) ( ) ) ̿ ( ( ) ( ) ( ) ) ̿ ( ( ) ( ) ( ) ) (IV.6)

IV.B.2. Table d’harmonie dans le domaine temporel

Du côté de la table d’harmonie, l’effort de contact transversal vient appliquer un effort ponctuel normal à la table. Le travail d’un tel effort a été explicité dans le cas d’une excitation harmonique dans le CHAPITRE II section II.D.3 à l’équation (II.19). Sans faire l’hypothèse d’un effort pulsant à une fréquence précise, l’expression de l’effort généralisé est ici directe. On

( ) ( ) ( ) (IV.7) Concernant l’effort de contact qui assure la continuité dans la direction de la corde, le raisonnement est moins immédiat. Ce dernier applique un effort perpendiculaire au sommet du chevalet. Conformément au champ de déplacements dans le chevalet explicité à la section III.B.1 du CHAPITRE III équation (III.4), le déplacement dans cette direction est donné par :

( ) ( ) (IV.8)

Le travail d’une force ( ) appliquée en haut du chevalet est alors donné par :

( ) ( ) ( ) ( ) (IV.9)

où est le bras de levier défini par la somme de la demie épaisseur de la plaque plus la hauteur du chevalet au niveau du point d’excitation de coordonnées ( ) dans le plan de la plaque.

En substituant le déplacement transversal de la plaque ( ) par la décomposition modale sur les modes de plaques en appui simple équation (II.9), il devient possible de minimiser l’action de ce moment comme il l’a été fait tout au long des chapitres précédents. Il vient alors l’expression suivante du moment généralisé :

( ) ∑ ∑ ( ) ( ) ( ) ( ) ( ( ) ( )) ( ) ( ) (IV.10) où ( ) ( ) ( ).

Analogiquement à ce qui a été réalisé dans les chapitres antérieurs, les efforts et moments généralisés enrichissent au second membre l’équation matricielle représentant la table d’harmonie. Celle-ci peut s’exprimer soit dans la base simplement supportée soit dans la base propre de la table d’harmonie (base raidie) en utilisant la relation (II.14) :

̿ ̈ ̿ ( ) ( ) ( ) ( )

̿ ̈ ̿ ( ) ̿ ( ) ( ) ̿ ( )

(IV.11)

avec ̿ ̿ ̿ ̿ et ̿ ̿̿ ̿.

IV.B.3. Système d’équations couplées cordes / table

Des sections précédentes découle un système d’équations matricielles représentant le problème couplé cordes / table d’harmonie où les sous-systèmes sont reliés par les efforts de contacts au chevalet, eux-mêmes des inconnues du problème. Il manque encore aux expressions (IV.5) et (IV.11) des termes dissipatifs. Conformément à la section II.D.5 du CHAPITRE II, l’amortissement est introduit sous la forme d’une matrice d’amortissement modal noté ̿ par la suite, dont les termes sont explicités à l’équation (II.28). L’amortissement des modes transversaux et longitudinaux des ondes dans la corde est introduit de façon identique. On notera respectivement ̿ et ̿ les matrices d’amortissement des modes transverses et longitudinaux. On donne alors le système de 3 équations suivant :

{

̿ ̈ ̿ ̇ ̿ ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )( )

̿ ̈ ̿ ̇ ̿ ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )( )

̿ ̈ ̿ ̇ ̿ ( ) ̿ ( ) ( ) ̿ ( )

(IV.12)

où les facteurs de pertes modaux des cordes sont représentatifs d’un acier standard et sont considérés comme constants tel que - .

Comme mentionné auparavant ( ) et ( ) sont des efforts de contact qui assurent une double continuité des déplacements entre la corde et la table d’harmonie à chaque instant . Intéressons-nous tout d’abord à la continuité des déplacements transversaux, soit :

( ) ( )

∑ ( ) ( )( ) ∑ ∑ ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ̿ ( )

(IV.13)

et à la continuité des déplacements dans la direction perpendiculaire au chevalet, soit la direction de la corde :

( ) ( )

∑ ( ) ( )( ) ∑ ∑ ( ) ( )

( )( ) ( ) ( ) ̿ ( )

(IV.14)

Au final, la résolution du problème couplé cordes / table d’harmonie se résume à la résolution d’un système de 5 équations à 5 inconnues dont les solutions sont valables à chaque pas de temps et dont les conditions initiales de ce calcul sont, pour rappel, déplacements et vitesses nuls à .