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CHAPITRE 2 : Méthodes expérimentales

I. 1 –Synthèses des matériaux actifs

I.1. b — Matériaux préparés par mécanosynthèse

I.1.b.1 – Généralités sur le broyage mécanique

Le broyage mécanique est une méthode de synthèse de poudres découverte par Benjamin et al. [2] à la fin des années 60. Cette méthode de synthèse de matériaux stables ou métastables se base sur des transformations à l’état solide à partir de précurseurs en poudre. C’est une

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technique peu coûteuse, simple et qui peut être appliquée à grande échelle au niveau industriel. Elle est donc employée pour de nombreuses applications comme les supers alliages [3], les accumulateurs électrochimiques (Ni-MH) [4], le stockage d’hydrogène [5], ...

Le terme broyage mécanique (mechanical milling), renvoie à la réduction de la taille des particules ou à l’homogénéisation de plusieurs poudres entre elles. En revanche, dans le cas de la formation d’une solution solide ou d’un alliage, impliquant une interdiffusion des éléments et une réactivité chimique, le terme de mécanosynthèse est utilisé (mechanical alloying). Le broyage mécanique repose sur des collisions entre les particules au sein d’un creuset, mais aussi entre les billes et la surface du creuset. Les collisions entrainent des successions de fractures et de soudures des précurseurs qui conduisent à la formation de défauts de structure au sein du matériau (lacunes, dislocations, joints de grains). Dans le cas de la mécanosynthèse, la création de défauts favorise la diffusion des différents éléments et conduit, dans les bonnes conditions, à des réactions chimiques entrainant la formation d’un alliage ou d’un composé intermétallique. Cette interdiffusion est dépendante de la ductilité des précurseurs et entraine donc l’existence de trois systèmes définis selon la ductilité des matériaux : ductile/ductile, ductile/fragile et fragile/fragile. Dans ce travail de thèse, nous avons utilisé la mécanosynthèse pour former des alliages et des composés intermétalliques avec des systèmes ductiles/ductiles et ductiles/fragiles [3].

Dans le cas d’un système ductile/ductile (système idéal), les différentes collisions au sein du creuset entrainent dans un premier temps une déformation plastique des poudres de départ qui se retrouvent sous forme de fines lamelles (figure 2.1). Celles-ci se soudent entre elles pour former de plus grosses particules allongées sous forme de multicouches et orientées selon une seule direction de l’espace. Au cours du broyage, ces multicouches se durcissent, ce qui entraine la fracturation et la réduction en taille des particules, et finalement la formation de structures multicouches équiaxiales (figure 2.1). Avec la diminution de la taille des particules, l’orientation des soudures devient aléatoire et la poudre devient homogène. La diminution des distances de diffusion et l’augmentation du nombre et de la densité des dislocations conduisent à la formation d’un alliage. Ce mécanisme est représenté schématiquement dans la figure 2.1. Dans le cas du système ductile/fragile, le principe de synthèse est identique, mais la

85 distribution de la phase fragile dans la phase ductile se fait de manière homogène le long des espaces inter-lamellaires du matériau ductile.

Les

conditions de broyage ont une grande influence sur la morphologie et la structure finale des poudres synthétisées [3,6]. Parmi ces paramètres expérimentaux, nous pouvons citer :

• L’énergie du broyage, qui dépend de l’énergie fournie par l’appareil et de la densité et du nombre de billes utilisées dans le creuset. Cette énergie est également influencée par le BPR (« Ball-to-Powder Ratio »), qui correspond au rapport de la masse des billes sur la masse de poudre. Plus ce rapport est élevé, plus le temps de broyage peut être diminué. En effet, dans ce cas, le nombre d’impacts par unité de temps augmente car le libre parcours moyen des billes est raccourci.

• L’atmosphère joue aussi un rôle sur les propriétés du matériau produit. De manière générale, sachant que les surfaces des particules fraichement synthétisées peuvent être très réactives, une atmosphère inerte à l’argon est préférée.

• La température peut agir sur les processus de diffusion lors du broyage. La diffusion des éléments est en effet favorisée dans le cas d’une température haute. Les températures élevées permettent aussi de diminuer le temps de broyage. Une température basse peut toutefois être employée afin de maximiser la fracturation des matériaux ductiles. La température de fusion des matériaux est aussi essentielle. Une

Figure 2.1 : Schéma représentant les différentes étapes de la mécanosynthèse dans le cas d'un système ductile/ductile. Adapté de [2].

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température de fusion des précurseurs trop basse favorise le soudage des particules et donc entraine la formation des particules de tailles importantes.

• Des additifs ou agent de contrôle, nommés PCA (process agent control) sont souvent ajoutés lors du broyage car ils jouent un rôle de lubrifiant ou de surfactant qui permet de réduire la soudure à froid ou le collage en s’absorbant à la surface des particules. L’efficacité du broyage est déterminée par l’alternance des soudures à froid et des fractures des particules. Dans un système employant un matériau ductile, de fortes déformations plastiques apparaissent et peuvent déstabiliser l’équilibre entre soudure et fracturation et donc nuire à l’efficacité du broyage. L’emploi de PCA peut donc améliorer le rendement et jouer sur la taille finale des particules.

I.1.b.2 –Synthèse par broyage planétaire des matériaux

Dans cette thèse, certains éléments du bloc p comme In, Sb et Pb ont d’abord été étudiés en tant que matériaux actifs d’électrodes négatives dans des batteries Mg-ion (MIB) sous forme de poudres micrométriques commerciales (Chapitre 3. I). Par la suite, ces éléments ont été combinés sous forme d’alliages binaires afin d’évaluer de possibles synergies sur leur comportement électrochimique (Chapitre 3. II et III). La mécanosynthèse a été choisie dans un premier temps pour produire ces alliages de façon simple et rapide. Nous avons utilisé un broyeur planétaire à billes, de type Pulvérisette Fritsch, pour synthétiser des poudres micrométriques d’alliages InSb (système ductile/fragile), In-Pb et In-Pb:carbone (systèmes ductile/ductile). Dans le cas de In-Pb:C, nous avons ajouté 30 % massique (30 %m) de noir de carbone durant le broyage comme agent de contrôle pour limiter le soudage et la fusion des particules. Les différentes synthèses des composés In-Pb et In-Pb:C seront détaillées de façon plus approfondie dans le chapitre 3 (chapitre 3, II.1). Certains des métaux purs utilisés possédant un point de fusion bas (exemple : In à 156,6 °C), il a été nécessaire d’ajouter 2 %m de PCA (ici de l’acide stéarique (sel de sodium, C18H35O2Na, Sigma Aldrich 99 %)) en tant qu’agent de contrôle afin de limiter le soudage et la fusion des particules.

Dans tous les cas, les poudres ont été placées dans un bol de broyage en acier inoxydable de 80 mL avec dix billes de 15 mm en acier inoxydable. Les creusets ont toujours été remplis et fermés en boite à gants afin d’effectuer les broyages sous atmosphère inerte d’argon. Pour tous les alliages, la synthèse a conduit à un rendement de broyage (correspondant au rapport des masses de poudre après et avant broyage) supérieur à 95 %, indiquant un collage limité entre les poudres et les billes ou les parois du bol de broyage. Les caractéristiques des précurseurs utilisés sont résumées dans le tableau 2.1 et les conditions de synthèse des matériaux dans le tableau 2.2.

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Tableau 2.1: Caractéristiques des précurseurs commerciaux utilisés

Précurseurs Fournisseur Pureté Taille des particules

In Alfa Aesar 99,99 % -325 mesh

Sb Alfa Aesar 99,5 % -200 mesh

Pb Alfa Aesar 99,9 % -200 mesh

Noir de carbone

Super P Timcal >99 % ~40 nm

Tableau 2.2 : Conditions de synthèse pour les poudres élaborées par broyage planétaire

InSb In-Pb In-Pb:C

BPR 1:70 1:70 1:70 Atmosphère Ar Ar Ar Température 25 °C 25 °C 25 °C Durée du broyage 6 h 5 h 5 ou 10 h

PCA 2 %m d’acide stéarique 2 %m d’acide stéarique 2 %m d’acide stéarique

Rendement du broyage

96 % 95 % 95 %