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CHAPITRE 3 : étude électrochimique d’éléments et d’alliages du bloc p

II. 2 – Caractérisations électrochimiques

II.2. b – Analyse du comportement électrochimique de P1 (In-Pb:C)

La première magnésiation du composé P1, avec une insertion d’environ 2,9 Mg2+ dans la phase In-Pb du composite In-Pb:C, donne une première capacité de 488 mAh.g-1 (par gramme de la phase active In-Pb), proche de la capacité théorique de 494 mAh.g-1. Une grande irréversibilité est toutefois observée après la première démagnésiation (figures 3.15 et 3.16), avec une rétention de capacité de seulement 58 %. La polarisation est d'environ 70 mV au premier cycle et augmente progressivement lors de cycles ultérieurs (figure 3.15).

La figure 3.16 présente en détail le premier cycle de magnésiation/démagnésiation de In-Pb:C. Au tout début de la première magnésiation, le potentiel chute jusqu’à atteindre ∼0,07 V vs Mg2+/Mg (figure 3.16a) puis remonte par la suite progressivement pour atteindre un plateau de potentiel. Comme cela a déjà été vu pour l’indium (chapitre 3, I.1), cette chute de potentiel en début de cyclage est certainement liée à un équilibre entre la nucléation des premiers grains et la croissance des particules. La première magnésiation d’In-Pb:C semble exhiber un seul plateau électrochimique à ~ 70-80 mV vs Mg2+/Mg, proche du potentiel de la réaction biphasique entre In et Mg (~ 60 mV vs Mg2+/Mg [1]) conduisant à la formation de MgIn. Cependant, la courbe de capacité incrémentale correspondant au premier cycle de l'électrode In-Pb:C, présentée sur la figure 3.16b, affiche deux pics cathodiques centrés à ~ 72 et 60 mV

vs Mg2+/Mg. Ces derniers mettent en évidence deux processus biphasiques avec les plateaux d'alliage de Pb et de In avec Mg, liés respectivement à la formation de Mg2Pb et MgIn. Au cours de la charge (démagnésiation), un seul pic large est noté à 0,14 V vs Mg2+/Mg. Ce pic peut contenir à la fois les contributions de MgIn et de Mg2Pb sachant que les plateaux de démagnésiation des deux phases sont assez proches (MgIn : 130 mV vs Mg2+/Mg et Mg2Pb :

Figure 3.14 : (a) Premier cycle de magnésiation/démagnésiation du système In-Pb:C P1/Mg et (b) capacité incrémentale correspondante. Electrolyte : EtMgCl : Et2AlCl@THF ; régime C/100.

127 128 mV vs Mg2+/Mg) [1,4]. Un petit épaulement est observé autour de 0,15 V vs Mg2+/Mg en charge avec un profil beaucoup plus arrondi, souvent associé dans la littérature à la formation de particules amorphes ou mal cristallisées [16,17]. Une nanostructuration in situ de la poudre lors des réactions avec Mg pourraient justifier la présence de particules mal cristallisées donnant lieu à cet épaulement.

Afin de mieux appréhender les paramètres thermodynamiques et cinétiques de la réaction d’In-Pb avec le magnésium, un cyclage de type GITT a été appliqué sur le premier cycle d'une électrode In-Pb:C (figure 3.17). Comme il a été expliqué précédemment (chapitre 2, II.3), lors du cyclage GITT, l'électrode atteint un état d’équilibre après chaque période d’OCV, donnant accès au potentiel thermodynamique du matériau. Cette caractérisation électrochimique, présentée sur la figure 3.17, confirme la présence d’un plateau unique de potentiel à ~ 100 mV

vs Mg2+/Mg pour la première magnésiation (voir zoom 3 sur la figure 3.17). Afin de comparer cette valeur de potentiel à celles des réactions biphasiques de In et de Pb, nous avons calculé les potentiels d’alliages théoriques des composés MgIn et Mg2Pb à partir de l'énergie de formation théorique de ces phases (-46,6 et pour Mg2Pb [18] et -17 kJ.mol-1 pour MgIn [19,20]) selon l’équation de Nernst [21]:

𝑉𝐴(𝐴𝑥𝑀) = −𝐸(𝐴𝑥𝑀)

𝑧𝑥𝐹 (𝟑. 𝟖)

où AxM correspond à l’alliage formé avec ici A = Mg et M=métal, E (AxM) l’énergie de formation

de l’alliage, z le nombre d’électrons transférés par ion, x le nombre d’ions impliqués dans la réaction d’alliage et F la constante de Faraday.

Ces estimations théoriques conduisent à des potentiels de formation de 121 mV vs Mg2+/Mg pour la phase Mg2Pb et 88 mV vs Mg2+/Mg pour la phase MgIn. La valeur de 100 mV observée pour In-Pb est donc parfaitement située entre les potentiels thermodynamiques de Mg2Pb et MgIn.

En comparant précisément l’allure des courbes en début de magnésiation par GITT (zoom 1 figure 3.17) et GCPL (figure 3.16), il est possible de confirmer que la chute de potentiel apparaissant au tout début de la décharge (figures 3.16 et 3.17) est attribuée à un effet cinétique. Dans le cas du cyclage galvanostatique (GCPL), le potentiel chute à une valeur inférieure à celle du potentiel de réaction (70 mV vs Mg2+/Mg). Au contraire, dans le cas du cyclage GITT, le profil OCV atteint la valeur du potentiel thermodynamique (~ 100 mV vs Mg2+/Mg). Le temps de relaxation permet donc d’amorcer directement la nucléation à ce potentiel en opposition au cyclage classique (GCPL) où un potentiel bas doit être atteint pour amorcer la croissance des grains. D’un autre côté, nous pouvons noter que le potentiel d’équilibre en OCV sur le cyclage GITT n’est pas complètement atteint même après une

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relaxation de 2 h (zoom 2 et 4, figure 3.17), témoignant de limitations cinétiques lors des réaction d'alliage/désalliage. Comme décrit au chapitre 2, II.4, les coefficients de diffusion de Mg au sein du matériau peuvent être déterminés grâce aux mesures GITT (équation (2.2)). Un coefficient de diffusion (DMg) de l’ordre de 10-16cm2.s-1 a ainsi été estimé pour la première démagnésiation sur plusieurs séquences de pulse/OCV à partir des ΔEt et ΔEs déterminés sur la courbe de la figure 3.17 (tableau 3.2). Cette valeur, plus ou moins constante durant la décharge, est très basse, ce qui confirme la diffusion lente du magnésium dans les solides. A titre de comparaison, la diffusion du lithium dans le silicium présente un coefficient de diffusion DLi ~ 10-12 cm2.s-1 [22]. A l’inverse, en charge, la valeur du coefficient de diffusion du Mg atteint ~ 10-12 cm2.s-1 en début de charge puis diminue jusqu’à atteindre 8.10-15 cm2.s-1 en fin de démagnésiation. Nous pouvons supposer que la diffusion du Mg est améliorée au sein des phases magnésiées Mg2Pb et MgIn en raison de la présence du magnésium au sein des phases mais aussi des structures et interfaces particulières présentes au sein du matériau. Au fur et à mesure de la charge, les phases s’appauvrissent en Mg entrainant une limitation de la diffusion et donc une baisse du coefficient DMg. Notons toutefois que la détermination du

Figure 3.15 : Profil de cyclage GITT du système InPb:C P1/Mg basé sur des pulses de courant d'1 h à C/50 entrecoupés par des périodes d'OCV de 2 h. Les encadrés 1 et 3 montre un zoom du début de magnésiation et de la polarisation respectivement. Les encadrés des zones 2 et 4 présentent l’évolution du potentiel en fonction du temps pour quatre cycles de pulse/OCV. Electrolyte : EtMgCl : Et2AlCl@THF.

129 coefficient de diffusion a été difficile sachant que le potentiel d'équilibre n’a pas été totalement atteint après la période d’OCV. Les zooms 2 et 4 de la figure 3.17 montrent l’aspect des courbes à la fin des périodes d’OCV de 2 h. Ces dernières tendent vers une asymptote sans jamais toutefois l’atteindre. Nous supposons donc que les valeurs de DMg sont ici surestimées. Pour déterminer ce coefficient de diffusion de manière plus précise, il faudrait reproduire cette caractérisation avec un temps de relaxation plus long (exemple 4 h) pour atteindre un plateau de potentiel thermodynamique en OCV. L’expérience présentée sur la figure 3.17 ayant duré 12 jours, un cyclage avec un temps de relaxation de 4 h (2 h de courant / 4 h d’OCV) nécessiterait 23 jours. Nous avons fait le choix de ne pas reproduire cette expérience par souci de gain de temps.

Tableau 3.2 : Tableaux récapitulant pour différents points de la magnésiation (premier tableau) et de la démagnésiation (deuxième tableau) les ΔEt et ΔEs déterminés à partir de la figure 3.17 (GITT) et les coefficients de diffusion (DMg) calculés.

MAGNESIATION

Temps (h) x ΔEt (V) ΔEs (V) DMg (cm2.s-1) 60,0 1,1 0,007 1,14.10-4 3,8.10-16 (±1,7.10-16) 96,0 1,8 0,017 3,24.10-4 4,9.10-16 (±0,6.10-16) 126,0 2,3 0,025 5,73,10-4 6,9.10-16 (±0,6.10-16) 168,0 3,1 0,044 1,58.10-3 16,8.10-16 (±0,6.10-16)

DEMAGNESIATION

Temps (h) x ΔEt (V) ΔEs (V) DMg (cm2.s-1) 203,4 3,1 2,41.10-4 2,86.10-4 1,8.10-12 (±0,3.10-12)

221,4 2,7 4,85.10-4 5,15.10-4 1,5.10-12 (±0,6.10-12) 245,5 2,3 4,74.10-4 1,34.10-4 1,0.10-13 (±0,6.10-13) 263,5 2.0 0,014 1,05.10-3 7,4.10-15 (±1,6.10-15)