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L'apport des « Ateliers » dans un processus de rénovation urbaine et sociale

Interroge sur le be ne fice tire des Ateliers de la Cite a la Bricarde, Karim Messidi, acquis a la cause, en expose les effets : « D'abord ça interroge : Pourquoi ils [les artistes] viennent ? Et

ensuite : Pourquoi ils ne viendraient pas ? Pourquoi on n’aurait pas droit à la culture ? C'est un budget qui n'enlève rien au budget de l'entretien courant. Donc ça n'enlève pas de budget au bien-être de la résidence. Ça donne une valeur ajoutée au site ». D'un point de vue pratique, ce

type d'intervention tre s localise e peut e galement produire un effet d’entraî nement. Il relate en effet, comment une inauguration a e te l'occasion de proce der a de petites re parations sur un parking qui jouxtait le lieu de l'e ve nement. L'action peut ainsi, selon lui, constituer un e le ment « accélérateur » de la re novation.

Concre tement, il nous semble que l'entretien ponctuel de l'espace, son occupation re gulie re, comme les de ambulations au sein du quartier qu'occasionne une telle initiative, favorisent une pre sence et un mouvement pouvant constituer une ressource non ne gligeable face au risque de de gradation sociale et d'isolement auquel la cite est aujourd'hui expose e89.

Plus symboliquement, pour Jean-Michel Brethes, l'enjeu d'une telle action re side surtout dans le changement d'image qu'elle peut produire. Jusqu'a pre sent, en effet, la Bricarde e tait conside re e comme une belle re sidence a laquelle les habitants sont d'ailleurs toujours tre s attache s. Aussi perçoit-il l'action comme le moyen qui leur est donne « d'exprimer leur fierté

d'habiter à la Bricarde », et ainsi de re habiliter le quartier d'abord aux yeux de ceux qui y

vivent. C'est e galement l'occasion d'y amener des gens de l'exte rieur, « pas simplement pour

acheter leur came » pre cise-t-il. Un moyen, la encore, de cre er un mouvement, ne cessaire a

l'ouverture de la cite , pouvant e galement contribuer a « recréer de nouvelles identités »90.

La « Cite des Curiosite s » a en effet permis de bousculer les usages et les perceptions, en favorisant par exemple la visite du quartier par d'autres habitants de HLM, ainsi que par les salarie s de Logirem eux-me mes. Globalement, ces derniers, en devenant visiteurs, acteurs ou porteurs de ce type de projet, ont adhe re a sa philosophie et se font le relais d'un double message. Celui d'une valorisation d'un quartier devenu un lieu de cre ation, a visiter pour l'inte re t qu'il pre sente, comme celui d'un acce s le gitime a l'art et a la culture. Indirectement, cela permet de signifier aux habitants que l'on croit dans le potentiel de ce quartier et que l'on agit afin d'en re ve ler le caracte re remarquable. Une posture qui, on peut le supposer, contribue sensiblement a changer son image de l'inte rieur.

89 Celle-ci pa tit en effet, du de placement et de la ge ne ralisation des re seaux de trafic de stupe fiants. Un effet indirect de la pression exerce e sur les re seaux de la Castellane, depuis la mise en place de la « me thode globale ». 90 AUCLAIR E. « Comment les arts et la culture peuvent-ils participer a la lutte contre les phe nome nes de se gre gation dans les quartiers en crise ? ». Art. Cit.

Un enjeu d'articulation avec le PRU

L'ambition d'une de marche comme les Ateliers de la Cite vise donc deux objectifs. D'une part, il s'agit d'amener les habitants a travailler autour de leur identite comme de celle de leur quartier. D'autre part, c'est l'occasion de participer a une action me morable, permettant d'en re ve ler la singularite , et dont les habitants pourront tirer une certaine fierte . Or, la dynamique de transformation impulse e par la re novation urbaine, qui lui est concomitante, est relativement diffe rente, puisqu'elle tend pluto t vers une logique de « banalisation » des quartiers.

Comme l'explique Jean-Michel Brethes en effet, « les PRU ont la volonté de faire des

cités, des villes, avec des voies dans lesquelles le service public rentre, avec des noyaux villageois, pour au final pouvoir dire : « J'habite plus un quartier, mais une ville ». (…) L'idée c'est bien d'ouvrir le quartier qui ne peut plus être isolé puis de le valoriser. À Plan d'Aoù, on voit bien qu'on a mis en place des outils pour créer de l'espace public, comme des places, des noms de rues, pour revenir dans une normalité de ville ». Un des enjeux des Ateliers de la Cite peut donc consister,

dans le cadre du PRU Castellane/ Bricarde, a « réinjecter, comme le propose Jean-Michel Brethes, un peu de singularité pour que les habitants puissent se reconnaître ». Il semble donc tout a fait ne cessaire de soutenir l'inte gration de cette action dans le processus de re novation urbaine, dont elle peut-e tre comple mentaire.

APPREHENDER L'ACTION ARTISTIQUE DANS UN CONTEXTE SOCIAL

DIFFICILE

La mobilisation du personnel de Logirem, semble donc e tre le fait d'un processus reposant sur trois e tapes conse cutives : initiation au domaine artistique (langage, inte re t, enjeux, etc.), adhe sion au message et a la finalite de l'action, et enfin re appropriation du projet. Un processus qui pourrait s'appliquer de la me me façon a la mobilisation des habitants.

Il est toutefois ne cessaire de conside rer que les situations de pre carite quotidiennes auxquelles les habitants peuvent e tre expose s, constituent un frein potentiel dans leur inte gration a la de marche (manque de temps, pre occupations, etc.). Plus ge ne ralement, et au vu du contexte d'urgence sociale (comme en te moigne la forte attente a l'e gard des travaux de re novation) que peut connaî tre la Bricarde, se pose ine luctablement la question de l'acceptabilite d'une telle action pour les habitants. « Une situation d'urgence, c'est la Syrie, rectifie Karim Messidi (…) La culture n'a pas de rapport avec la réparation d'un ascenseur. C'est

deux cercles qui ne se touchent pas et deux temporalités différentes ».

En ce sens, il nous semble en effet pertinent de conside rer que la pre carite est un phe nome ne relatif, qui peut e tre ve cu de façon plus ou moins handicapante, et ponde re , par exemple, par le niveau de ressources, le degre d'isolement ressenti, l'inte gration a des cercles familiaux, amicaux, associatifs, etc., propres a chaque individu. J. Damon, nous met d'ailleurs en garde contre une approche trop substantialiste de la pauvrete qui conduit a construire la cate gorie des exclus, selon les crite res propres a la population dite inte gre e. Or, dit-il, « il est beaucoup

plus réaliste de considérer des continuums de situations, plutôt que d'essayer de séparer artificiellement des personnes et des groupes. L'image d'une société duale est à répudier au moins en raison du fait qu'elle consiste à figer ce qui est toujours mouvant. Aussi est-il toujours préférable de raisonner en termes de processus sociaux, de dynamiques sociales et de parcours individuels, plutôt que de statuts stratifiés »91 . On peut tirer deux hypothe ses de ce

raisonnement. D'une part, appre hender la cite sous l'angle exclusif de la pre carite pourrait conduire a remettre en question la ne cessite d'y maintenir une activite artistique, au pre texte que celle-ci ne constituerait pas une priorite pour ses habitants. Le risque e tant, alors, d'e luder le fait qu'une telle activite vise, fondamentalement, a de fendre un droit d'acce s a l'art et a la culture, pour la frange de la population qui en est prive e. En second lieu, il semble opportun de conside rer le public que forment les habitants, moins comme un public pre caire,

a priori peu enclin a accepter l'action, que comme un public he te roge ne, constitue de

personnes aux expe riences de vie diffe rentes, et pre sentant donc des degre s d'ouverture et de disponibilite diffe rents.