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Un matériau de conditionnement potentiel l'apatite

II- Les apatites

II.l- Définition

Les apatites possèdent la formule chimique générale, Meio(X04)6Y2 et cristallisent en général dans le système hexagonal, groupe spatial P63/m (Beevers et al., 1946 ; Young, 1973) où Me représente généralement un cation bivalent (Ca2+,Cd2+, Sr2+, Ba2+, Pb2+...), XO4 un anion trivalent (PO43-, AsO43-, VO43-, MnO43"...) et Y un anion monovalent (F",Cr,OH", Br"...).

L'arrangement quasi-compact des ions XC>43' constitue le squelette de la structure apatitique (Elliot, 1964). Cet assemblage rigide fait apparaître deux types de tunnels (figure 2).

Le premier de diamètre égal à 2,5 À environ (dans le cas d'apatites phosphocalciques) est occupé par des cations Me. Ces cations, au nombre de 4 par maille, présentent une symétrie de site Ch et sont notés Mel (site I). Ils sont placés sur les axes ternaires et sont entourés de 9 atomes d'O (figure 3).

Le second de diamètre plus grand que le précédent (3 à 4,5 Â dans le cas d'apatites phosphocalciques) contient les 6 autres cations Me. Ils sont situés à la périphérie du tunnel et présentent une symétrie de site Cs. Ils sont notés Mell (site II). Les cations Mell sont situés aux niveaux 1/4 et 3/4 de la maille suivant l'axe c, et forment des triangles équilatéraux alternés autour de l'axe sénaire hélicoïdal. Leur coordinence est égale à 7 : ils sont entourés d'un 0 ( 1 ) , un 0 (2), quatre O (3) et un anion Y.

Le long de l'axe de ces tunnels sont distribués les anions Y". Leur localisation le long de l'axe sénaire hélicoïdal varie suivant leur nature (figure 4).

Figure 2 : Projection sur le plan de base de la maille hexagonale de Caio(P04)6(OH)2.

Figure 3 : Environnement du calcium I dans Caio(P04)6F2 (plan horizontal).

Figure 4 : Environnement de l'axe sénaire hélicoïdal.

II.2- Substitutions dans le réseau

La structure apatitique est susceptible d'accepter un grand nombre de substitutions.

Les ions situés dans les tunnels sont relativement peu liés au reste du réseau qui constitue l'édifice stable. La dimension du tunnel leur confère une grande mobilité et par conséquent permet des substitutions aisées (Samec, 1965 ; Wright, 1969).

Un premier type de substitution consiste en un échange des ions Ca2+, PO43~ ou OH" par d'autres ions de même charge mais de taille différente (Kreidler, 1967 ; Trombe, 1973). Ce type de substitution a pour conséquence sur le plan physico-chimique une légère déformation de la maille. On sait qu'en général la substitution des ions Me2+ ouXO43" par des ions de même charge et de taille différente conduit à une variation des paramètres cristallographiques a et £ dans le même sens. Par contre, la substitution d'un ion Y" situé dans les tunnels conduit à des variations du paramètre â et du paramètre c en sens inverse (Prener, 1971 ; Trombe et Montel, 1980) ; par exemple, la substitution d'un ion Y" par un ion de plus grande taille conduit à une augmentation du paramètre E et une diminution du paramètre £.

Un second type de substitution consiste en un échange des ions Ca2+, PO43- et Œt par des ions de charge et/ou de taille différentes ou non (Grisafe et Hummel, 1970 ; Engel, 1970 ; Kreidler, 1967 ; Trombe, 1973 ; Wright, 1969).

Ainsi,

- les ions Ca2+ peuvent être partiellement remplacés par des cations monovalents (Na+, K+...), trivalents (La3*, AI3*...) ou des lacunes (D) ;

- les ions PO43" peuvent être, de même, partiellement remplacés par des groupements bivalents (SO42',CO32-, HPO42-...) ou tétravalents (GeO44", SiO44"

...). Notons qu'il n'apparaît jamais de lacunes en site XO4 (Lacout, 1983) ;

- les ions OH' peuvent être remplacés par des ions bivalents (CO32", O2'...) ou des lacunes (D).

Ce type de substitution nécessite une compensation de charges ; celle-ci peut être réalisée,

- par une substitution couplée :

(Ca2+,OH') <—> (Ln3+,O2") (Taitai, 1985) (Ca2+, F') <—> (Ln3+; s 2") (Taitai, 1985) (Ca2+,PO43') <—> (Ln3+, SKD44-) (Felsche, 1972) - par la création de lacunes :

(OH",OH") <—> (CO32-, D) (Mikou,1986)

Les apatites apparaissent ainsi comme des édifices particulièrement stables qui peuvent tolérer des écarts importants à la stoechiométrie.

Les apatites naturelles les plus courantes sont les phosphates de calcium : Caio(P04)6(OH,F,Cl)2. La forme apatitique certainement la plus connue est la fluorapatite, de formule idéale Caio(P04)6F2- Les apatites naturelles contiennent toujours des traces de carbonates ; ainsi la fluorapatite naturelle est nommée francolite.

Lorsque les ions fluor sont échangés par les ions OH" dans la fluorapatite, on obtient l'hydroxyapatite, nommée dahlite lorsqu'elle contient des traces de carbonates. La pyromorphite est une apatite dans laquelle les ions Ca^+ sont remplacés par les ions Pb^+ et les ions F" par les ions Cl" : Pbio(P04)6Cl2 et si les ions PO4^" sont remplacés par les ions VCH^", il s'agit de la vanadinite Pbio(V04)6Cl2- Lorsqu'on effectue une substitution couplée en échangeant un Ca^+ par une terre rare Ln^+ et un ion PCH^" par un ion SiO44", le minéral est dénommé britholite (Ca, Ln)io(PC>4, SiC>4)6F2- Dans ce dernier cas, il s'agit de l'échange d'ions de charge différente, sans intervention de lacune.

Les apatites synthétiques sont analogues aux apatites naturelles ; il est possible, dans le respect des règles d'électroneutralité, d'encombrement stérique et de polarisabilité, de synthétiser une grande variété de composés apatitiques.

II. 3- Applications potentielles pour les déchets nucléaires

Les apatites peuvent intervenir de différentes façons pour améliorer le confinement des déchets nucléaires :

- dans le colis de déchets : des apatites de synthèse peuvent constituer des matrices de conditionnement, dans lesquelles les déchets sont incorporés, l'ensemble étant disposé dans un conteneur (Carpéna, 1992 ; Carpéna et Lacout, 1993, Carpéna, 1995).

- en adjuvants dans les barrières ouvragées, interposées entre le colis de déchets et la formation géologique : des apatites de synthèse ou des apatites naturelles peuvent intervenir comme "barrières chimiques", en empêchant d'éventuels départs de radionucléides, en les fixant ou au moins en limitant leur migration vers la biosphère (Carpéna, 1992 ; Carpéna et Lacout, 1993, Carpéna, 1995).

- comme sorbants minéraux, par leur capacité à piéger des éléments lourds, dans le traitement de certains effluents chargés en radionucléides (Carpéna,

- en tant que matériau de blocage, dans les fûts de déchets, dans une option stockage direct, c'est-à-dire dans le cas de déchets non retraités (Carpéna et Lacout, 1993 ; Carpéna, 1995).

Des travaux américains ont porté sur l'utilisation d'apatites silicatées comme matériaux de conditionnement de certains radionucléides (Weber, 1982). Il s'agit de britholites oxygénées dans lesquelles les produits de fission sont localisés en substitution du calcium, la compensation de charge dans le cas des terres rares trivalentes se fait par substitution complète des groupements phosphate par des groupements silicate : Ca2Me8(SiC>4)6Q2. Les nucléides Me introduits dans le réseau sont le néodyme et le lanthane (Weber, 1982). Ces études ont été arrêtées et on peut supposer que ces minéraux ne répondaient pas aux critères de choix pour un matériau de conditionnement de déchets à vie longue.

Des expériences de recuit en laboratoire des traces de fission de l'uranium (tenue à l'irradiation) dans des apatites naturelles (Carpéna et Mailhé, 1985) ont montré que leur comportement à long terme dépend fortement :

- du rapport Si/P ; des études sur les cinétiques d'autoguérison de dégâts d'irradiation telles les traces de fission, dans des britholites naturelles, ont montré que ce rapport régit la tenue à l'irradiation.

- de la nature de l'anion Y, qui contrôle le comportement à long terme vis à vis de la corrosion aqueuse.

Les propriétés de sorption de l'apatite sont étudiées dans le cas d'un stockage radioactif en milieu salin (Gauglitz et al., 1992). Il s'agit d'utiliser l'hydroxyapatite Caio(PC>4)6(OH)2 comme matériau de comblement adsorbant les métaux lourds.

Suite aux différents travaux effectués sur les apatites naturelles et synthétiques, l'apatite est apparue comme un matériau de conditionnement possible pour le stockage de l'iode 129.

En effet, l'iode 129 peut se présenter sous la forme d'un anion monovalent, l'iodure I", de la famille des halogénures ; dans la structure apatitique, il est localisé dans les tunnels, en site Y".

Bien qu'aucune apatite contenant de l'iode n'ait été décrite dans le milieu naturel, il est apparu intéressant d'étudier par analogie avec les apatites naturelles une apatite synthétique du type

Meio(X04)6l2-PARTIE II