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Analyses des syntagmes verbaux produits par l’enseignante

Deuxième partie :

2. Paroles réunionnaises : observables et modélisation qualitative. qualitative

2.1. Observations de la parole d’adultes

2.1.2. Discours d’enseignants en cours de créole

2.1.2.1. Parole d’une enseignante de l’école maternelle

2.1.2.1.3. Analyses des syntagmes verbaux produits par l’enseignante

Même en naviguant à l’intérieur du répertoire créole où une certaine complexité peut être mise en évidence, la partie créole de la macro-langue garde une organisation, une stabilité quasi prédictible au niveau des syntagmes verbaux. Nous avons isolé dans le tableau qui suit les syntagmes verbaux produits par MC en les numérotant de 40’ à 392’

soit trois cent cinquante-deux énoncés.

Tableau 17. Syntagmes verbaux produits par MC.

zordi nou sa travay si bann devinèt pou fé sa

zot i doi pa mont zot kamarad zot zimaj zot i doi dir

zot i doi dékri le zimaj é di kosa zot i voi san dir le non le zimaj

bann kamarad i devine kosa néna dan zot min éske zot lé dakor Noa i travay avèk Cerise zot de i kashèt le zimaj

zot de i travay ansanm

Constance i travay avèk Yannick

217’ kisa na poin / toulmonde nana zot i réfléshi

tout bann torti lé vèrte na d’foi lé maron

kosa nou pe dir pou èd Constance donk la nou di mi pèt olie moin i pèt

97’ 98’

July i travay avèk Rénaldi Thomas i travay avèk Tomy

Cerise avèk euh-Noa va komansé komans azot

Noa èd out kamarad zot de i travay ansanm ou doi dékrir out zimaz ou doi dékri out zimaj

Constance èd in ti pe out kamarad lès azot

la nou lé avèk Constance banna trann travay trann di anou nou doi trouv zimaj

koman i di in-une porte an fran-an kréol kosa néna

moin la pa bien antandu moin nana bann port

parfoi moin na kat port toultan la poin kat port moin néna la vit

157’ kosa ou gingn dir ankor

kosa i fé avèk sa Julie

le shien i shérsh amoin partou lé bien

Joany té gingn pa bien dékrir son zimaj mont out bann kamarad

mont out bann kamarad sé la ké

shakinn son tousel i sa travay

mé la zot i pe mont zot kamarad zot zimaz la nou travay vréman se kou si

shakinn i èd inn é lot mi done shakinn in zimaj zot i travay tousel zot i doi trouv tousel in devinèt pou trouv le zimaj bann kamarad i koné kosa zot i dékri i doi dir si lé bon ou pa bon

alor nou lès euh- Cerise kozé moin lé lan zot i ékout zot kamarad zot i ékout pu zot kamarad moin nana bann poil desu nou la pokor trouvé kosa néna su in payanke apré kosa néna ankor

poukosa nou la bezoin ou pou alume defe

alors on va s’arrêter / on écrira / on va s’arrêter là maîtresse t’a parlé comment là / on va s’arrêter je parle comment là

nou va arété nou sa aréte anou nou va alé asiz su tapi

in not zour nou va ékri le bann devinèt

Toutes les constructions syntaxiques sont conformes aux descriptions

« canoniques » faites du créole réunionnais. En nous inspirant du tableau concernant le système verbal commun du créole proposé par Staudacher-Valliamée (2004 : 86), nous pouvons classer les syntagmes verbaux produits dans le tableau suivant.

Tableau 18. Classement des syntagmes verbaux produits par MC.

Temps 0 non

accompli 40’ à 43’, 52’, 54’ à 58’, 60’ à 63’, 65’, 67’ à 69’, 71’, 72’, 74’ à 81’, 83’ à 85’, 87’ à 89’, 91’ à 100’, 102’, 104’ à 110’, 112’ à 122’, 124’, 127’ à 132’, 134’ à 138’, 140’, 142’, 145’ à 155’, 157’

à 164’, 166’ à 177’, 179’ à 181’, 183’ à 186’, 189’, 191’, 193’ à 198’, 200’ à 205’, 207’ à 212’, 214’, 215’, 217’, 218’, 220’ à 224’, 226’ à 235’, 239’ à 242’, 245’ à 260’, 262’ à 280’, 284’, 285’, 288’, 290’, 291’, 294’, 297’ à 301’, 303’, 305’, 306’, 308’ à 321’, 323’ à 325’, 327’ à 331’, 333’, 339’ à 348’, 350’ à 352’, 354’, 358’ à 370’, 372’ à 375’, 377’, 381’ à 383’

Temps 0

progressif 139’, 141’, 216’, 283’, 357’

Temps 0

terminatif 244’

Temps 0 sans

aspect 384’

Passé accompli 44’,73’, 123’, 125’, 165’, 178’, 237’, 238’, 261’, 286’, 287’, 289’, 292’, 296’, 302’, 332’, 338’, 353’, 355’, 356’, 371’, 379’

Passé inaccompli 182’

Futur non

accompli 45’, 46’, 50’,

51’, 111’, 143’,156’, 187’, 219’, 236’, 243’, 293’, 326’, 337’, 349’

, 376’, 386’, 387’, 388’, 389’, 391’, 392’

Futur progressif 47’, 49’, 53’, 64’, 66’, 101’, 206’, 322’, 390’

Infinitif 48’, 59’, 70’, 82’, 86’,

90’, 103’, 144’, 188’, 190’, 199’, 213’, 281’, 282’, 304’, 307’, 385’

Enoncés en

français 133’,192’, 225’, 334’,335’,336’,378’, 380’

Enoncé d’un élève répété par l’enseignante “mi lé”

126’

Par moment, lors de la séance, l’enseignante prononce des formes non conformes aux descriptions du système verbal. Dans ces cas les énoncés n’émanent pas de l’enseignante et sont des reformulations à la recherche d’une rigueur syntaxique relative à la norme de classe. Comme il a été demandé aux enseignants de surveiller certains points syntaxiques particuliers dont l’emploi des verbes « lé » et « néna », à plusieurs reprises lors de la séance observée MC demande aux élèves une surveillance particulière quant à l’emploi jugé erroné de ces formes. Nous analysons ces recadrages dans le tableau qui suit où nous réintroduisons la parole de l’élève (noté El).

Tableau 19. Demandes de reformulation syntaxique de la part de MC.

Lignes Segments conversationnels Commentaires 124 certaine discipline et d’une attitude d’écoute studieuse de la part des autres El: le shien i shèrshe amoin partou En : le shien i shérsh amoin partou / lé bien / kontinu aou

Emploi de la forme « mi lé » par l’élève, répétition (157) mais non reprise par l’enseignante plus soucieuse du maintien de la discipline.

En: an kréol silteplé (en créole s’il te plaît)

Prise de parole en français par l’élève et rappel de la langue de la séance par l’enseignante (168).

Emploi de la forme « mi lé » par l’élève avec demande de reformulation de l’enseignante et confirmation de la forme jugée correcte par l’enseignante. l’élève avec demande de reformulation de l’enseignante (203) et confirmation de la forme jugée correcte par l’enseignante (204).

209 El : mi lé vèr

En : moin lé vérte / tout bann torti lé vèrte

Emploi de la forme « mi lé » par l’élève et reformulation (209) par l’enseignante de la forme jugée correcte.

216 pe dir pou èd Constance

El : mi pèt dann- mi fé d’pèt mise en évidence par l’enseignante de la forme employée par l’élève, proposition sans explication de l’enseignante de la pronom personnel sujet première personne du singulier, confirmation de la part de l’enseignante de la forme jugée trouvé kosa ou lé trann dékrir

Emploi de la forme « mi na » par l’élève et reformulation de la forme jugée correcte par l’enseignante.

Enfin, nous faisons remarquer que, lors de la séance observée, certains élèves emploient parfois le français. L’enseignante est alors intervenue pour réorienter l’échange en créole.

Tableau 20. Interventions de MC pour reformuler en créole des énoncés produits en français.

Lignes Segments conversationnels Commentaires

144

El: je sais c’est quoi maîtresse El: je koné

En: mi koné

Prise de parole en français de l’élève, reformulation approximative par rapport au créole par un autre élève et correction en créole par l’enseignante.

168 El: je suis doux

En: an kréol silteplé (en créole s’il te plaît)

Prise de parole en français par l’élève et demande de reformulation en créole par l’enseignante.

289 El: il y a un truc

En : il y a / la di il y a eske sa sé an kréol (est-ce que ça c’est en créole) El : moin néna

Prise de parole en français par l’élève, mise en évidence par l’enseignante de la prise de parole de l’élève et reformulation en créole de l’élève.

Nous avons analysé ici les prises de parole de MC qui adopte en classe une attitude très normative envers certains éléments repérés de la partie créole du répertoire langagier de ses élèves. Cette attitude est induite par la situation de communication (une situation d’enseignement) et par les représentations de la norme de l’enseignante. Elle demande par moment des reformulations lexicales pour des mots communs aux deux

langues qui sont implicitement qualifiés de non créoles. Pourtant elle-même ne maintient pas la norme basilectale demandée tout au long de la séance. Elle tente de se rapprocher pour certains éléments phonologiques d’une prononciation éloignée de celle du français sans pour autant parvenir ici aussi à chasser l’intégralité des variantes acrolectales. La même attitude est observée au niveau de certains points syntaxiques. Même avec une volonté délibérée et artificielle de se rapprocher du pôle basilectal, MC ne peut échapper à l’étendue du pôle créole de son répertoire. Néanmoins, une régularité quasi prédictible et conforme aux descriptions syntaxiques du créole est observée et se manifeste au niveau des syntagmes verbaux.

Nous nous proposons maintenant d’analyser la parole d’une autre enseignante n’adoptant pas une attitude aussi normative que MC.