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Chapitre II Matériaux, techniques expérimentales et outil de simulation numérique

2. Méthodes et techniques expérimentales de caractérisation

2.6. Analyses de composition chimique

2.6.1.Analyses chimiques moyennes

Les analyses chimiques moyennes ont été réalisées au CRI sur des échantillons de dimensions de

30 x 30 mm² et d’épaisseur variant selon l’étape du procédé étudié, correspondant à au moins 5 g

de matière analysée. La teneur en Cr, Ni, Mo, Mn et Si des alliages a été déterminée par

spectrométrie de fluorescence X (Panalytical PW2606G). La teneur en carbone a été déterminée

par combustion sous oxygène puis mesure d’absorption infrarouge (LECO CSLS 600) et celle en

azote par fusion sous gaz inerte puis mesure de conductibilité thermique (LECO TCH 600).

2.6.2.Microsonde de Castaing

Une microsonde de Castaing (EPMA) Cameca SX50 (CAMECA Instruments Inc.) a été utilisée

pour effectuer des analyses quantitatives de composition chimique locale. Les échantillons ont été

enrobés à froid au préalable dans une résine époxy et polis selon le même protocole que pour les

observations au microscope optique (voir §II.2.2.2). Une tension d’accélération de 15 kV et un

courant de sonde de 900 nA ont été utilisés. Des profils de concentration chimique ont notamment

été réalisés avec un pas de 20 µm pour déterminer la teneur en azote des tôles nitrurées. Un système

anticontamination constitué d’un piège à azote liquide additionné d’une fuite d’oxygène balayant

la surface de l’échantillon a été utilisé. Une technique de mesure quantitative classique de hauteur

de pic par rapport à celle du fond continu a été mise en œuvre. Divers monochromateurs ont permis

d’effectuer les mesures à partir des raies caractéristiques de chaque élément : monochromateur en

fluorure de lithium (2d = 4,0267Å) pour Ni(Kα), Fe(Kα) et Cr(Kα) ; pentaérythritol (2d = 8,74 Å)

pour Mo(Lα) ; multicouches W/Si (2d ≈ 60 Å) pour N(Kα). Pour l’azote, un échantillon témoin

Fe-0,535 %N (%mas) ayant une teneur en azote proche de celle des alliages analysés a été utilisé.

2.6.3.Sonde atomique tomographique

Des mesures de composition chimique locales ont été mises en œuvre grâce à une sonde atomique

tomographique et un FIB du Centre Canadien de Microscopie Electronique (McMaster University).

2.6.3.a.Sélection d’une interface et préparation de pointes pour l’analyse

La sonde atomique tomographique a été utilisée pour l’analyse de composition chimique des

interfaces austénite/ferrite de l’acier inoxydable duplex modèle (DXM) à l’état laminé à froid et

après des recuits dans diverses conditions. L’analyse de l’interface est très locale et nécessite la

sélection d’une interface sur l’échantillon massif et le prélèvement de pointes d’une longueur de

l’ordre de la centaine de nanomètres contenant une partie de l’interface d’intérêt. La préparation

des pointes est une étape longue et délicate et la sélection de la zone d’intérêt doit, d’une part,

permettre l’analyse de la caractéristique souhaitée, et d’autre part, assurer la présence de l’interface

dans le volume prélevé. Dans le cadre de cette étude, des interfaces les plus droites possibles sur

une longueur de 25 µm ont été sélectionnées à partir d’observations de la surface d’un échantillon,

afin d’assurer la présence d’une interface dans la pointe à l’issue de l’affutage. La Figure II.13

représente la zone sélectionnée pour l’analyse d’un état recuit à 1060 °C pendant 300 s. Le contraste

cristallographique permet d’identifier un grain de ferrite et au moins trois grains d’austénite au sein

de cette zone. Les extrémités de l’interface située sont indiquées par des flèches.

Figure II.13 – Image FIB d’un échantillon d’acier inoxydable duplex modèle (DXM) recuit pendant

300 s à 1060 °C observé en section du plan DL-DN. Image acquise au CCEM.

Un dépôt de tungstène est réalisé sur la zone d’intérêt afin de protéger la surface lors du

prélèvement. Un barreau d’environ 25 (DL) x 4 (DT) µm² est prélevé sur une profondeur inférieure

à 10 µm, voir Figure II.14.(a). Il est ensuite découpé en cinq blocs et chacun d’entre eux est fixé à

un coupon en silicium à l’aide d’un dépôt de tungstène. Chaque bloc est affuté en forme de pointe

par pulvérisation annulaire à l’aide d’un faisceau d’ions gallium de tension 30 kV. L’affûtage final

d’une pointe est réalisé avec un faisceau dont la tension est réduite à 10 kV. Une image MEB de

toute la pointe est acquise, Figure II.14.(b), puis la pointe est sortie du FIB et rapidement placée

sous ultravide dans la chambre de la sonde atomique pour limiter le temps de contact avec l’air,

typiquement en moins de 3 minutes, et éviter son oxydation. L’oxydation d’une pointe de sonde

atomique, même limitée à quelques nanomètres d’épaisseur, peut entraîner sa casse prématurée lors

de l’analyse car les dimensions de cette couche d’oxyde ne sont pas négligeables devant celles de

la pointe, typiquement de quelques centaines de nanomètres de diamètre.

(a) (b)

Figure II.14 – (a) Image FIB du barreau de matière prélevé. L’emplacement approximatif des

pointes qui en seront prélevées est indiqué par des rectangles numérotés de 1 à 5. (b) Image MEB

d’une pointe affinée issue de l’emplacement 5 prête pour l’analyse en sonde atomique

tomographique. Un faible contraste cristallin entre les deux grains est encore visible et l’interface

est indiquée par des flèches (électrons secondaires).

2.6.3.b.Conditions expérimentales

L’analyse des compositions aux interfaces a été réalisée à l’aide d’une sonde atomique

tomographique à électrode locale (LEAP) Cameca 4000X HR (CAMECA Instruments Inc.). Cette

technique consiste en l’érosion d’un échantillon atome par atome en appliquant une différence de

potentiel entre l’échantillon polarisé positivement et un détecteur d’ions polarisé négativement. Cet

équipement permet d’identifier la nature et la position des atomes avec un rendement de collecte de

34 % soit environ un ion sur trois. Les expériences ont été conduites sous ultravide (P < 4,0.10

-9

Pa)

à une température de 47,7 K. Un laser pulsé émettant dans l’ultraviolet a été utilisé pour stimuler

l’évaporation des ions de l’échantillon (λ = 355 nm, 35-45 pJ, 200 kHz). Le taux de détection des

ions par pulsation a été fixé à 1 ion toutes les 100 pulsations, ce taux étant contrôlé en faisant varier

la tension continue d’évaporation. La limite supérieure de tension appliquée à l’échantillon fut fixée

à 8V, valeur au-delà de laquelle le risque de rupture de l’échantillon est trop élevé.

2.6.3.c.Méthodes de reconstruction et d’analyse des données

L’indexation des pics du spectre de masse, la reconstruction 3D des données et la réalisation des

profils de diffusion au travers de l’interface furent effectués à l’aide de la suite logicielle Integrated

Visualization and Analysis Software (IVAS) v3.8.2 (CAMECA Instruments Inc.).

La reconstruction 3D est le résultat de l’application d’une succession d’algorithmes de traitement

des données acquises. D’abord, l’étalement du temps de vol observable autour du pic d’intensité

d’un ion donné est corrigé en prenant en compte les variations temporelles de tension d’une part, et

le chemin plus ou moins courbe emprunté par l’ion d’autre part, connu par la position spatiale

d’arrivée sur le détecteur. Puis l’échelle des temps de vol est calibrée pour les pics d’intensité des

ions Fe

++

(28), Ni

+

(58) et N

+

(14). La nature des autres pics d’intensité est alors identifiée

manuellement. Enfin, la reconstruction spatiale en 3D est effectuée par comparaison du volume

reconstruit à une image MEB de la pointe prise à la fin de son affutage. Pour une même analyse,

plusieurs jeux de paramètres de reconstruction sont testés jusqu’à ce que les dimensions de la pointe

reconstruite correspondent à celles mesurées sur l’image MEB. C’est au cours de cette étape que

l’échelle spatiale de la pointe est définie. Elle reste cependant approximative car les ions provenant

de la surface de la pointe ne sont pas collectés par le détecteur, et le volume de matière reconstruit

ne comprend pas l’intégralité de la pointe que l’on mesure sur l’image MEB. Ainsi, la dimension

totale de la pointe indiquée sur les reconstructions est entachée d’une incertitude de quelques

nanomètres, et cette technique ne peut pas être utilisée pour déterminer l’épaisseur d’une interface.

Des profils de composition chimique ont été mesurés au travers d’interfaces austénite-ferrite. Pour

cela, l’interface entre les deux phases qui composent un jeu de données a été définie par une surface

d’iso-concentration de 6 %at de nickel (iso-surfaces). La composition d’équilibre en nickel de la

ferrite d’un acier inoxydable superduplex 2507 est en effet de 5,4 %mas (5,2 %at) et celle de

l’austénite est de 8,8 %mas (8,2 %at) (voir Tableau 0.1 en Annexe A). A partir d’une iso-surface,

les profils de composition chimique en éléments d’alliage ont été générés grâce à un histogramme

de proximité.

(a) (b)

Figure II.15 – Volume reconstruit d’une pointe analysée par sonde atomique tomographique

(Figure II.14.(b)) (a) observé de profil (calibration approximative) et, (b) observé à 45 ° sur lequel

est représentée la surface d’iso-concentration de 6 %at de nickel. Seuls 33 % des atomes collectés

sont représentés. Le code couleurs indique la nature des atomes et est identique pour les deux

reconstructions.

2.6.3.d.Répétabilité des mesures

Pour chaque échantillon, plusieurs pointes ont été analysées pour étudier la répétabilité des mesures.

Elles sont issues d’un même barreau dans lequel jusqu’à cinq pointes peuvent être prélevées, (voir

§II.2.6.3.a). La répétabilité des mesures s’est révélée excellente pour la plupart des essais. Elle sera

discutée lors de la présentation des résultats dans le §III.1.2.