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14. Diversité des sources. – À la fin du XIXe siècle, l’ordre juridique de la

Colombie était en pleine consolidation. Les bases en ont alors été posées en édictant une nouvelle constitution et un code civil unique28, et en abrogeant toutes les lois

espagnoles29. Il en est allé de même en droit international privé. De cette période

datent les premiers traités qui sont entrés en vigueur en la matière, qui sont issus des premiers efforts de codification en Amérique30. Depuis, les textes n’ont cessé de

se multiplier, et même si la Colombie n’a pris part aux travaux internationaux que d’une manière passive – à l’exception des efforts d’intégration dans les Amériques, dans lesquels elle s’est montrée un peu plus active –, elle y a été très réceptive et n’a pas hésité à modifier son droit interne31. La Colombie compte donc aujourd’hui une

multiplicité de règles issues de plusieurs niveaux – interne32, international33 et

communautaire34 –, consacrant toutes sortes de méthodes35, et qui permettent de

résoudre les problèmes traditionnels de la matière.

28 La Constitution de 1886 met fin à un demi-siècle de forte instabilité politique, et à une succession de constitutions

marquées par l’échec ; elle a été remplacée par une nouvelle constitution en 1991. Le Code civil colombien, version fidèle du code chilien de 1853, est promulgué par la loi 57 du 15 avril 1887 « sur l’adoption de codes et l’unification de la législation nationale ».

29 Article 15 de la loi 153 du 24 août 1887.

30 Des efforts de création d’une organisation internationale et d’harmonisation du droit international ont été entrepris très

tôt en Amérique Latine. Un premier congrès eut lieu au Panama en 1826, et a été suivi par bien d’autres. Au congrès de Lima de 1877, les premières règles de solution de conflits de lois furent adoptées. Néanmoins, seuls les Traités de Montevideo de 1889 (au total huit traités portant sur différentes matières) sont entrés en vigueur, v. L. PEREZNIETO

CASTRO, « La tradition territorialiste en droit international privé dans les pays de l’Amérique latine », RCADI 1985, t. 190, p. 271, spéc. 368-370. La Colombie a notamment ratifié les traités de Droit civil international, de Droit commercial international et de Droit processuel international.

31 Notamment par les lois 1116, sur l’insolvabilité transfrontalière, et 1563, sur l’arbitrage international, qui ont adopté les

modèles élaborés par la CNUDCI.

32 Certains articles des codes civil et du commerce abordent des questions de droit international privé, certaines lois et des

décrets aussi, dans des matières spécifiques.

33 Il existe par exemple une convention bilatérale avec l’Espagne sur la reconnaissance et l’exécution des jugements civils

du 30 mai 1908. En outre, au niveau régional, plusieurs conventions multilatérales issues des conférences de droit international privé de l’Organisation des États Américains (OEA), aussi connues comme les conventions interaméricaines, sont en vigueur en Colombie : les conventions sur des normes générales de droit international privé et sur l’efficacité extraterritoriale des jugements et sentences arbitrales étrangers, toutes deux signées à Montevideo le 8 mai 1979, en sont des exemples. Au niveau mondial, la Colombie est partie à la convention de New York de 1958 sur l’arbitrage commercial international.

34 Dans le cadre de la Communauté Andine (CAN), qui rassemble la Bolivie, la Colombie, l’Équateur et le Pérou, certaines

Décisions –équivalentes aux règlements européens– abordent des questions concernant les relations privées transfrontalières. Sur leur place dans la hiérarchie des normes, v. Const. C-400/98 et C-1189/00, et CSJ civ. 31 mai 2007 exp. 2000-235 et 14 juillet 2009 exp. 2000-235 ; en doctrine, L. C. PLATA LOPEZ, D. YEPES CEBALLOS, « Naturaleza

jurídica de las normas comunitarias andinas », Rev. der. Univ. Norte 2009, p. 196, spéc. 201.

35 Toutes les méthodes semblent pouvoir trouver une place dans l’ordre juridique colombien, y compris la méthode de la

ROJAS TAMAYO Daniel Miguel | Thèse de doctorat | février 2017

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15. Attitude réservée à l’égard des situations internationales. – Malgré ce

cadre riche et complexe, il est important de constater que les valeurs et les idées qui prédominent en Colombie témoignent d’une certaine apathie à l’égard des situations internationales. De fait, la jurisprudence et la doctrine colombiennes ont interprété les textes d’une manière hostile à ces situations, réduisant ainsi le droit international privé colombien à quelques articles du Code civil colombien et reléguant les règles conventionnelles à des rôles secondaires. Historiquement, cette position a été justifiée par la nécessité de consolider l’indépendance des jeunes États latino- américains36, et la Colombie n’a pas fait exception ; la consolidation des républiques

et l’intégration régionale datent de la même époque.

16. Plan du titre. – Cette hostilité dépasse le discours politico-diplomatique et se

concrétise dans la manière dont le droit international privé colombien appréhende les données fondamentales de la matière. Par conséquent, il faut dans un premier temps identifier ces données (chapitre I). Dans un second temps, il sera nécessaire d’effectuer un examen critique tant de ces données que du système qui en découle (chapitre II).

sur les contrats de vente internationale de marchandises de 1980, et la Convention Unidroit relative aux garanties internationales portant sur des matériels d’équipement mobiles de 2001. D’autres textes ont adopté des règles de conflit bilatérales, tels la traité bilatéral avec l’Équateur. Sur la méthode de la reconnaissance, v. Paul Lagarde (dir.), La

reconnaissance des situations en droit international privé, Pedone, 2013.

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C

HAPITRE

I

D

ONNEES FONDAMENTALES DU SYSTEME

17. Origines non législatives du droit international privé colombien. – Il a

déjà été signalé que la jurisprudence colombienne n’est pas abondante en matière de

droit international privé37. Elle est constituée essentiellement des arrêts

d’exequatur, dont la Cour suprême de justice connaît directement et en unique instance ; cette cour a aussi rendu une poignée d’arrêts en matière de conflits de lois. Quelques arrêts en constitutionnalité et en tutelle de la Cour constitutionnelle doivent également être mentionnés38. Bien que ces deux cours adoptent parfois des

positions différentes, leur approche du droit international privé est homogène. La doctrine, de son côté, est en général peu attentive au droit positif39, mais semble

malgré tout se rallier aux grandes lignes de la théorie des Hautes Cours.

Ces dernières ont donc formulé, dans une très grande mesure, les données sur lesquelles a été bâti le système. Ce dernier repose sur des principes, qu’il faut brièvement étudier (section 1), avant de cerner leur domaine (section 2).