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2.4 Commissions techniques

2.4.1.3 Analyse fonctionnelle et spatiale 9

La présentation générale des projets, complétée de l’analyse des surfaces et de l’analyse « fonctionnelle et spatiale » occupe un volume de 80 pages (44). Les auteurs précisent en avant-propos : « le travail d’analyse effectué dans le cadre du présent rapport tient compte tout particulièrement des critères suivants : respect des fonctions et surfaces programmées, respect des prescriptions architecturales, fonctionnelles et techniques, respect des typologies des espaces définies dans le cadre du programme ». Par ailleurs, il est indiqué que « cette analyse ne comporte aucun jugement quant à la valeur architecturale des projets ».

Cependant, en dépit de ces précautions, chacun des 4 projets analysés est introduit par un texte descriptif qui constitue à lui seul une évaluation architecturale assez nette. Une note en bas de page apprend que ces textes ont été rédigés par « l’architecte du Ministère de la Justice », c’est-à-dire un acteur dont on peut interroger l’impartialité dans la procédure de concours.

Concernant le projet de Jean Nouvel, celui-ci écrit :

La proposition se situe délibérément en termes symbolique institutionnelle [sic].

L’édifice se veut représentation objectivée de l’image de la justice. Il exprime de par s a composition architecturale, en signes construits de notions de justesse, d’équité, d’équilibre, de dignité.

L’institution se donne à voir à la ville, depuis l’autre rive, mais aussi jusque dans l e s moindres détails de son espace intérieur en passant par la façade.

Le volume général est de forme pure et occupe la presque intégralité de la parcelle. Seule est laissée libre une bande à l’Est en prévision d’une extension future possible. L’organisation spatiale

La lecture se fait dès le quai, suivant trois séquences : parvis, bâtiment, jardin.

Une ceinture de fines colonnes supportant une toiture habitée par le TGI, ainsi qu’une ligne de grilles marquent l’espace du parvis.

La salle des pas perdus, espace de déambulation, sur toute la hauteur et la largeur du bâtiment, introduit aux parallélépipèdes des salles d’audiences. Trônant au milieu, a u cœur du projet, la salle d’assises renforce l’axialité de la composition.

On accède au TGI, logé sur le toit et s’articulant autour de patios sur un seul niveau par des circulations verticales latérales, faciles à repérer.

Derrière les salles d’audience, le TI, sur trois niveaux, s’ouvre également sur le jardin arrière. Fermant le tout, au Sud, un bâtiment lame sur sept niveaux abrite la tranche conditionnelle (TC et CPH).

Le traitement architectural

44. Ministère de la justice, DGPPE, Concours pour la nouvelle Cité judiciaire de Nantes, rapport de la commission technique : présentation générale des projets, analyse des surfaces, analyse fonctionnelle et spatiale (sans date)

Conçu sur la base d’une trame carrée, plans et façades expriment sur un mode classique l’équilibre et la neutralité de l’institution.

La structure en treillis métalliques toute hauteur permet de franchir, avec aisance et légèreté, les grandes portées du parvis couvert et des pas perdus.

Le monumentalisme de l’échelle ainsi obtenu souligne le caractère solennel et majestueux du lieu de la décision judiciaire.

Cette froide sobriété est accentuée par le traitement de l’éclairage zénithal e n provenance de fentes en toiture des perdus [sic] et des salles d’audiences. Effet dramatique convenant au pénal lieu de la faute, mais certes, moins approprié pour l e civil où il s’agit de concilier, de départager.

L’étage en toiture est constitué par l’entrecroisement perpendiculaire des structures d e treillis toute hauteur qui assurent la rigidité de l’ensemble et la flexibilité du plan. Les services du TGI qui s’y logent, s’organisent dans une rigoureuse orthogonalité et dans une logique parfaite.

Néanmoins, l’excessive systématisation du quadrillage de distribution et des éléments répétitifs de bureaux et de patios éliminant tout repère nuisent à la lisibilité interne. La clarté du plan rendue possible au rez-de-chaussée grâce à la monumentalité d e l’échelle risque de déboucher, ici, par un effet de densification, sur un espace fermé et confus voire labyrinthique, tant au niveau de son appréhension par l’usager que de son vécu par l’utilisateur.

Remarquons que cette description du projet de Nouvel se déploie sur 2 pages, contre 1 page (ou moins) pour les autres projets.

La suite du rapport présente les plans (sur lesquels les grandes partitions fonctionnelles sont surlignées en couleurs distinctes), l’analyse des surfaces et l’analyse spatiale et fonctionnelle. Pour ce qui concerne les surfaces, le rapport note que le projet de Nouvel présente « une augmentation considérable des surfaces » par rapport au programme (dépassement de plus de 5000 m2 deux tranches confondues) qui

s’explique essentiellement par la taille de la salle des pas perdus (3400 m2). Malgré

cela, un déficit de surfaces apparaît dans l’étage de toiture logeant le TGI : « en raison notamment du module constructif adopté, les espaces de ce plateau sont souvent sous dimensionnés. Ainsi, des bureaux programmés à 25 m2disposent fréquemment d’une

surface de 21 m2».

L’analyse fonctionnelle et spatiale est ensuite développée dans un tableau présentant une série de 6 critères évalués pour chacun des espaces. Les critères s’établissent comme indiqué ci-dessous :

Programme Projet - Analyse fonctionnelle Projet - Analyse spatiale Rappel des

exigences fonctionnelles

Accessibilité

et localisation fonctionnellesLiaisons internes

Observations Volumétrie (hauteur, surface, dimensionnement)

Ambiance

On remarque la présence d’une colonne « Ambiance » qui laisse supposer que ce critère sera développé dans l’analyse. Cependant, pour les quelque 50 et plus espaces analysés, la colonne Ambiance affiche invariablement un laconique « exigences respectées » qui ne permet pas de connaître l’évaluation de la commission sur cet aspect. Lorsqu'une observation est faite, elle concerne l'éclairage naturel, comme la mention « Nombreux bureaux aveugles » dans le projet de Hauvette, ou celle plus élaborée concernant la salle des pas perdus du projet de C. Vasconi : « Vaste volume d'environ 60 000 m3

couvert par une verrière de 2 500 m2. Problème d'entretien de cet ouvrage et de contrôle

des conditions climatiques ». Pour le projet de Nouvel, les seules exceptions a u x « exigences respectées » concernent :

- certaines salles d’audiences et annexes, pour lesquelles le rapport note : « les salles d’audiences correctionnelles ainsi que les petites salles d’audiences n e bénéficient pas d’éclairage naturel » (il s’agit des salles aveugles s a n s éclairage zénithal comme dans la salle d’assises) ;

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- l’aide juridictionnelle : le rapport mentionne que « l’espace d’accueil n e bénéficie pas d’éclairage naturel » ;

- le conseil départemental d’aide juridique : « pas d’éclairage naturel » ; - les salles de réunions bibliothèque : « l’éclairage naturel semble faible ».

La commission se livre au même exercice pour les autres projets et propose un « tableau de synthèse générale » en conclusion du rapport. Dans ce tableau tenant sur 1 page, les 4 projets sont notés pour chacune des grandes composantes fonctionnelles du palais de justice. L’échelle adoptée varie de 1 à 2 (1 : moyennement adapté, 2 : adapté) avec e n pratique 3 notes utiles : 1, 1.5 et 2. Des moyennes sont proposées qui classent les projets de la manière suivante :

- Moyenne 1.9 pour le projet Nouvel (qui recueille un 2 dans la plupart des lignes) - Moyenne 1,5 pour le projet Gaudin

- Moyenne 1,4 pour le projet Vasconi - Moyenne 1 pour le projet Hauvette

Suivant ce mode de calcul, le projet Nouvel distance les autres projets très nettement. On peut cependant s’interroger sur la façon de passer d’un ensemble de critères qualitatifs développés dans les tableaux analytiques précédents, à une note aussi réductrice que 1, 1.5 ou 2.

2.4.1.4

Synthèse générale

Le document de synthèse générale proposé par la Commission technique (45) reprend l’ensemble des éléments détaillés ci-avant. En préambule, la Commission rappelle à nouveau que « cette analyse ne comporte aucun jugement quant à la valeur architecturale des projets ». Après quoi, elle donne un tableau général des différentes analyses.

Les notes 1, 1.5 ou 2 proposées dans le document précédent sont transformées e n mention « bon » (2), « moyen » (1.5) et « faible » (1). Ainsi, sur le thème de l’adéquation au programme, le projet de Nouvel est jugé bon, ceux de Gaudin et Vasconi moyens et celui de Hauvette faible.

Les analyses du fonctionnement judiciaire et de la sûreté se réduisent également à trois mentions qui sont cette fois « satisfaisant », « moyen » et « faible ». Le projet de Nouvel est jugé satisfaisant sur le plan du fonctionnement judiciaire et moyen s u r celui de la sûreté.

Les analyses des coûts conservent les classement initiaux. Ainsi, en coût d’investissement, le projet Nouvel est le plus cher (256 MF estimés contre 246 MF, 225 MF et 208 MF pour les autres) et 3ème sur 4 pour ce qui concerne les coûts d’exploitation et maintenance. Le tableau de synthèse triche ici un peu avec le rapport d’analyse qui plaçait le projet de Nouvel dernier ex-æquo avec celui de Vasconi (devenu 4ème dans la synthèse).

Après ces classements, la suite du rapport de synthèse est constitué de la copie ou d u résumé des éléments étudiés dans les rapports spécifiques. Pour ce qui concerne l e fonctionnement judiciaire, la salle des pas perdus du projet de Nouvel est jugée « simple et fonctionnelle ». Les salles d’audience son « bien localisées et correctement conçues ». L’image de l’institution dans le contexte urbain est « satisfaisante ». Seuls l’organisation des bureaux du plateau haut est critiquée : « dimension du plateau TGI difficile à gérer malgré trame très claire. Vis à vis entre bureaux conflictuel pour certains services. (…) Nécessité d’un rapprochement fonctionnel de certains services ».

45. Ministère de la justice, DGPPE, Concours pour la nouvelle Cité judiciaire de Nantes, rapport de la commission technique : synthèse générale, 15 novembre 1993

Enfin, remarquons que la présentation du projet de Nouvel rédigée par l’architecte d u Ministère de la justice est reproduite dans une version épurée sur une seule page. Tous les éléments du texte cité plus haut sont présents sauf les paragraphes suivants :

L’édifice se veut représentation objectivée de l’image de la justice. Il exprime de par s a composition architecturale, en signes construits de notions de justesse, d’équité, d’équilibre, de dignité.

(…)

Néanmoins, l’excessive systématisation du quadrillage de distribution et des éléments répétitifs de bureaux et de patios éliminant tout repère nuisent à la lisibilité interne. La clarté du plan rendue possible au rez-de-chaussée grâce à la monumentalité d e l’échelle risque de déboucher, ici, par un effet de densification, sur un espace fermé et confus voire labyrinthique, tant au niveau de son appréhension par l’usager que de son vécu par l’utilisateur.

Le texte se termine donc par le paragraphe suivant, nuancé dans sa première version par les éléments supprimés : « L’étage en toiture est constitué par l’entrecroisement perpendiculaire des structures de treillis toute hauteur qui assurent la rigidité de l’ensemble et la flexibilité du plan. Les services du TGI qui s’y logent, s’organisent dans une rigoureuse orthogonalité et dans une logique parfaite. »