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Chapitre 3. Méthodologie

3.3. Analyse des données

L’analyse des données se fait en plusieurs étapes et à différents niveaux de lecture. Les étapes d’analyse sont inspirées par la méthode proposée par Anne Laperrière pour la recherche en sciences sociales (2009). La première étape consiste à effectuer une observation générale décrivant les grands traits de la situation. Dans ce sens, nous avons étudié la typologie des lieux/le cadre bâti/les artefacts/objets (mobilier urbain), les gens et leur attitude/comportements/gestes, actions, etc.). La seconde étape consiste à regrouper les éléments observés en catégories (ex. type de lieu/type de bâtiments/type d’activités, types de gens/type de comportement ou d’attitudes, etc.). Par exemple, réunir les différents éléments d’observation évoquant l’action « jouer avec l’eau » (ex. : « éclabousser ses amis », « sauter sur le jet d’eau », etc.).

Les usagers sont aussi regroupés par types, surtout si ces types semblent présenter des attitudes et caractéristiques semblables (ex. : en majorité, les enfants jouent plus avec l’eau que les adultes). À cette étape, on tient également compte de sa propre expérience et des éventuels échanges informels avec les personnes présentes ou des bribes de conversations entendues qui pourraient fournir des indications sur leur expérience d’usage. La troisième étape consiste à trouver les interrelations entre les différents types et les comparer de manière systématique afin de faire émerger les principales tendances. Cette étape mène à la définition d’éléments et de situations spécifiques à observer de nouveau, avec une attention sélective, au besoin. Enfin, la dernière étape consiste à raffiner les hypothèses jusqu’à pouvoir émettre des conclusions (Laperrière 2009).

En outre, un biais de l’observation directe consiste à ne sélectionner ou interpréter que les faits confirmant les hypothèses de recherche. La saturation théorique et le croisement de données sont deux stratégies adaptées pour contrer ce biais. Ainsi, les observations

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indépendantes sur chaque site — suivant le même protocole — permettent de comparer les données et valider les résultats. Un autre atout provient de l’intersubjectivité : lorsque plusieurs observateurs s’accordent pour décrire une situation dans les mêmes termes, les chances de validité de cette description s’accroissent. Cette collecte de données a été le fruit d’une collaboration entre chercheurs, son intersubjectivité (à travers la construction de l’article) a permis de réduire les biais sélectifs. Les outils permettant le recueil et l’analyse des données sont une combinaison de comptes-rendus et de matériels audiovisuels (films et photographies) pris sur le site pour capter l’ambiance, la relation entre les éléments architecturaux et autres artefacts, la foule et la trame sonore, permettant à la fois de rendre compte du moment présent, mais aussi de prendre du recul durant l’analyse des données afin de limiter les biais d’interprétation.

Finalement, pour l’analyse comparative des observations des deux aménagements nous avons utilisé une grille de critères à différents niveaux de lecture, afin de faciliter le regroupement des faits. Cette grille permet de mettre côte à côte les faits des deux terrains et de faire émerger les similitudes ou différences. Notre grille d’analyse a permis d’examiner trois types d’éléments à trois échelles : l’usager (actif et passif), l’artefact (l’aménagement d’eau en tant que tel) et le contexte d’usage (l’environnement).

Cette classification révèle les comportements inconscients des individus et permet de comprendre les dynamiques de l’usage et de la socialisation au sein des aménagements d’eau.Les critères sont les suivants :

• NIVEAU MACRO : Le contexte dans lequel s’insère l’aménagement : Le profil sociodémographique des personnes présentes, le statut du quartier au sein de la ville, les activités et services du quartier, l’accessibilité et la fréquentation du quartier. Ce niveau résulte davantage d’une prise de connaissance préalable aux observations effectuées à l’aide de sources secondaires d’informations (rapports officiels, journaux, web, etc.). Les autres niveaux de lecture sont analysés pendant et après les observations.

• NIVEAU MÉSO : La relation entre l’objet, l’architecture et l’environnement direct : l’analyse typomorphologique et l’intégration au cadre bâti, la configuration spatiale, les formes et les relations avec le paysage.

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• NIVEAU MÉSO/MICRO : les stimulations sensorielles et psychologiques : les aspects sensoriels (visuels, acoustiques, tactiles) et les aspects affectifs (ex : freins psychologiques, marqueurs émotionnels).

• NIVEAU MICRO : toutes les dynamiques de l’interaction objet-usager : d’une part l’observation des usagers (déplacement, fréquentation, socialisation autour de l’objet, actions, gestes, faciès, etc.), et d’autre part, les caractéristiques de l’objet en tant qu’artefact : l’installation, sa matérialité et son fonctionnement ainsi que les différentes manières de l’utiliser et d’interagir avec les jets.

Figure 15. Modèle des trois niveaux d’analyse des observations et de leurs champs disciplinaires (Candau 2019)

Le but de ces différents niveaux d’analyse est de permettre le regroupement des données comme annoncé dans les étapes. Ultimement, la classification permettra l’identification de tendances émergentes favorables au succès des aménagements — tendances pouvant éventuellement transcender les échelles et les disciplines (Figure 15). Néanmoins, étant donné la nature exploratoire des observations, les tendances émergentes ne pourraient être anticipées et la grille de lecture servira de cadre de référence et ne limitera pas la

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nature des éléments observés. Les étapes ci-dessus proposées permettent une construction progressive de la compréhension et de l’interprétation du terrain, au fil des découvertes de la chercheuse.

3.3.1. Croisement des données

L’interprétation des résultats de la recherche documentaire et de l’analyse comparative des observations directes sera synthétisée au cours de la discussion en reprenant les thèses du cadre théorique et on comparant les résultats aux critères de la ville à échelle humaine de Jan Gehl (Gehl 2012). Cela nous permettra de formuler des critères de conception non exhaustifs, adaptables et contextualisables.

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