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ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

Dans le document NOR : INTX1801788L/Bleue-1 (Page 52-55)

C HAPITRE III : L’ ACCÈS À LA PROCÉDURE ET LES CONDITIONS D ’ ACCUEIL DES DEMANDEURS D ’ ASILE

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le projet de loi modifie plusieurs dispositions du titre 1er du livre VII et complète l’article L.114-1 du code de la sécurité intérieure. Il modifie plusieurs dispositions du titre II, du titre III et du titre IV du livre VII du CESEDA.

Plusieurs de ces mesures complètent la transposition de dispositions facultatives prévues par le droit communautaire de l’asile, tel que défini en particulier par les directives 2011/95/UE du 13 décembre 2011 (dite directive « qualification ») et 2013/32/UE du 26 juin 2013 (dite directive « procédures ») et participent à la convergence des systèmes juridiques nationaux des Etats membres.

S’agissant du régime applicable aux demandes d’asile tardives en Guyane, celui-ci respecte les exigences de l’article 73 de la Constitution, selon lequel les lois et règlements peuvent faire l'objet d'adaptations tenant aux « caractéristiques et contraintes particulières » des collectivités régies par cet article. L’adaptation proposée se justifie ainsi par la situation particulière de la Guyane décrite plus haut.

Cette adaptation est ensuite en lien avec l’un des objectifs poursuivis par la loi, à savoir réduire les délais de traitement des demandes d’asile et décourager celles qui sont étrangères à un besoin de protection. Elle doit en effet permettre de traiter en procédure accélérée les demandes d’asile des personnes dont la motivation première n’est pas leur besoin de protection mais la prolongation de leur séjour sur le territoire, ce qui se traduit notamment par la tardiveté de leurs demandes.

Eu égard enfin au respect du principe d’égalité, cette adaptation entraîne une différence de traitement très limitée puisque les demandeurs d’asile susceptibles d’entrer dans le champ d’application de ces dispositions bénéficient par ailleurs de toutes les garanties de procédure applicables aux étrangers relevant de la procédure accélérée qui au demeurant sont les mêmes que celles dont bénéficient les demandeurs placés en procédure normale : mêmes garanties devant l’OFPRA et droit à un recours suspensif devant la CNDA. Le délai de soixante jours pour le calcul de la tardiveté constitue au surplus une durée raisonnable, conforme aux exigences de l’article 31-8-h) de la directive « procédures » (qui parle de « délais les plus brefs ») et ne saurait s’analyser comme une entrave au droit de demander l’asile.

53 En ce qui concerne la réduction d’un mois à quinze jours du délai de recours devant la CNDA, cette mesure contribuera à l’accélération de la chaîne de l’asile, sans constituer aucunement une entrave à l’effectivité du droit de recours. Ce délai est conforme à l’article 46-4 de la directive « procédures » qui ne fixe pas de délai plancher mais précise seulement que « les délais prévus ne rendent pas cet exercice impossible ou excessivement difficile ». Eu égard au caractère relativement simple de la préparation du recours qui porte sur les mêmes questions que celles soulevées devant l’OFPRA, de la possibilité de compléter ultérieurement le recours initial, ainsi que de la possibilité de demander l’aide juridictionnelle dont les modalités d’octroi restent inchangées, les droits du requérant sont intégralement préservés, et ce délai doit être considéré comme « raisonnable » au sens de l’article 46-4.

Sur la constitutionnalité du recours à la visio-audience devant la CNDA, sans le consentement du requérant, il ressort en particulier de la décision DC 2011-631 du 9 juin 2011 que le Conseil constitutionnel n’a pas entendu faire du consentement une condition de la constitutionnalité du dispositif. Relevant que le dispositif de visio-audience contribue à la bonne administration de la justice, il a précisé les mesures qui entourent sa mise en œuvre - sans citer parmi elles le consentement - pour conclure que les dispositions contestées garantissaient de façon suffisante la tenue d’un procès juste et équitable (considérant 93).

S’agissant de l’aménagement du régime juridictionnel applicable à certaines décisions de rejet de l’OFPRA prises en application de la procédure accélérée : cette disposition ne méconnait aucune exigence constitutionnelle ou conventionnelle et est conforme au droit européen. En particulier aucune norme constitutionnelle n’exige un recours pleinement suspensif devant le juge de l’asile contre les décisions prises par l’OFPRA rejetant une demande d’asile et le conseil constitutionnel a considéré « qu’au regard des exigences de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public, le législateur pouvait, dès lors qu’il garantissait la possibilité d’un recours, prévoir que l’intéressé n’aurait pas droit à être maintenu pendant l’examen de ce recours sur le territoire français » (décision° 93-325 DC du 13 aout 1993 (considérant87)). Cette jurisprudence a été confirmée dans sa décision n° 2003-485 DC du 4 décembre 2003 (considérant 56).

De même aucune norme internationale n’impose un recours pleinement suspensif contre les décisions de refus d’asile et la seule obligation découlant de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme est que, lorsqu’un État décide de renvoyer un étranger vers un pays où il existe des motifs sérieux de croire qu’il serait exposé à un risque réel de traitements contraires à l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des Droits de l’homme et des libertés fondamentales, les intéressés disposent d’un recours de plein droit suspensif contre l’exécution de la mesure permettant leur renvoi (arrêts Gebremedhin c.

France du 26 avril 2007) afin que soit assurée l’effectivité du recours exercé prévue à l’article 13 de la CEDH. En droit français le recours contre l’OQTF satisfait à ces conditions.

L’article 46-6 de la directive « procédures » reflète les exigences de la jurisprudence de la Cour en précisant que pour certaines décisions de refus d’asile, concernant en particulier les demandes examinées en procédure accélérées « une juridiction est compétente pour décider si

54 le demandeur peut rester sur le territoire de l’Etat membre….si cette décision a pour conséquence de mettre un terme au droit du demandeur de rester dans l’Etat membre et lorsque dans ces cas, le droit de rester dans l’Etat membre dans l’attente de l’issue du recours n’est pas prévu par le droit national ». Selon la Cour (IM c/France du 2 février 2012) la convention n’exige pas une forme particulière de recours et l’organisation des voies de recours relève de la marge d’appréciation des Etats.

Le dispositif d’aménagement du recours suspensif proposé à cet égard dans le projet de loi répond à l’ensemble de ces prescriptions.

Sur la disposition prévoyant que le droit au maintien sur le territoire du demandeur d’asile cesse à compter de la lecture de la décision en audience publique et non plus à sa notification : il convient de rappeler que la notification régulière d’une décision de justice conditionne son caractère exécutoire et fait partir le délai de recours. En revanche, les décisions de justice acquièrent leur autorité dès leur lecture, voire leur prononcé. Le conseil d’Etat a eu l’occasion de se prononcer sur le cas des décisions du juge de l’asile (Conseil d’État, n°138967, 26 novembre 1993 ; Conseil d’État, n°145144, 31 juillet 1996 ; Conseil d’État, n° 172345n 29 décembre 1997).

4.2. IMPACTS SOCIAUX

En réduisant les délais de procédure, les dispositions de ce texte permettront aux demandeurs d’asile bénéficiant d’une protection de s’engager plus rapidement dans un parcours d’intégration. Ces mesures contribueront à assurer une plus grande fluidité dans le parc d’hébergement des demandeurs d’asile. S’agissant des personnes dont la demande est en définitive rejetée, il rendra plus aisé le retour dans le pays d’origine parce que les personnes concernées auront développé moins d’attaches en France.

4.3.IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Le raccourcissement des délais d’instruction des demandes participera à une réduction des coûts afférents à la prise en charge des demandeurs d’asile.

A terme, ces dispositions devraient décourager les personnes dont la motivation de la demande est étrangère à un besoin de protection et par conséquent réduire la charge pesant sur les autorités et juridictions intervenant dans toute la chaîne de l’asile.

Enfin, la dématérialisation de la notification des décisions de l’OFPRA, au nombre de 70 319 en 2016 et 89 307 en 2017, permettra de réduire de façon notable les coûts attachés à leur expédition par lettre recommandé avec accusé de réception (6 euros par courrier) lesquels représentent actuellement plus de 420 000 euros.

55 4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Plusieurs des dispositions de ce projet de loi concourront à clarifier, simplifier et à moderniser les procédures administratives notamment devant l’OFPRA. Tel est en particulier le cas des dispositions sur la clôture, de celles sur la notification des décisions de l’office et des dispositions prévoyant que la demande d’asile concerne l’ensemble de la famille, comme celles prévoyant que le demandeur doit indiquer, en amont, les langues dans lesquelles il peut être entendu en entretien. Ces mesures faciliteront l’organisation des entretiens par l’office, notamment en ce qui concerne le recours aux interprètes.

4.5.IMPACTS SUR LE FONCTIONNEMENT DES SERVICES LA JUSTICE

Les dispositions élargissant les possibilités de recours à la vidéo-audience devant la CNDA devraient faciliter l’organisation des audiences.

De même, l’aménagement du recours suspensif dans certains cas pourrait conduire à alléger à terme la charge pesant sur la Cour et découlant du traitement de ces contentieux en procédure « courte ».

Simultanément, conférer à la juridiction administrative, dans ces mêmes hypothèses, le soin d’apprécier s’il y a lieu ou non d’accorder le caractère suspensif au recours ne devrait pas entraîner une charge excessive puisque cette mission s’exercera dans le cadre du contentieux de l’éloignement.

Les dispositions prévues relatives au statut des juges doivent améliorer l’efficacité de la juridiction et contribuer à une plus grande cohérence entre les fonctions exercées par les magistrats judiciaires et administratifs officiant à la CNDA.

Dans le document NOR : INTX1801788L/Bleue-1 (Page 52-55)

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