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PARTIE II. CADRE THEORIQUE, CONCEPTUEL ET METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE LA RECHERCHE

Question 11 : Justifier votre réponse dans les deux cas

6.3. Analyse des entretiens avec les enseignants

En plus du questionnaire proposé aux enseignants, nous avons eu recours à un entretien semi-directif. Ces entretiens ont été réalisés avec deux PEM et six PES de langue française exerçant dans huit lycées et collèges de la wilaya de Tiaret. Ces entretiens vont nous permettre d‟avoir plus de détails sur certains items du questionnaire. Nous avons réalisé les entretiens au cours des années 2009, 2010 et 2011 avec les enseignants qui ont accepté de participer à ces entretiens.

Pour permettre aux enseignants de s‟exprimer librement et le plus longtemps possible, nous avons demandé aux enseignants d‟argumenter chacune de leurs réponses. Notre entretien se structure en deux grandes parties à savoir :

 Les nouveaux programmes et manuels.

 Les pratiques en classes surtout l'enseignement des SCE et les SCA.

Pour les items suivants : la surcharge des classes, le niveau des apprenants, la surcharge des programmes, le volume insuffisant assigné à leur matière et enfin l‟insuffisance de la formation initiale et continue, l‟une des enseignante interrogée a affirmé:

« […] la formation des enseignants que euh je juge insuffisante que se soit la formation initiale qui lui manque des modules liés à la pédagogie de l’enseignement d’ailleurs seulement en quatrième année de préparation de licence on étudie un module de didactique et un autre de psychopédagogie et lorsqu'on passe à la pratique en classe on rencontre beaucoup de difficultés enfin la carence de ce problème pardon de ce genre de formation doit être rattrapé par soit par soit disant la formation des formateurs ou la formation continue qui prend souvent forme d’une journée pédagogique ou deux à trois jours de séminaire où on parle des programmes théoriquement […] ». Ce qui ressort de cette réponse c‟est que l‟enseignante met l‟accent sur la formation initiale et continue qu‟elle juge, toutes les deux, comme étant insuffisantes vu leurs contenus qui sont beaucoup plus théoriques que pratiques.

174 Pour cette enseignante la qualité de la formation telle qu‟elle est assurée n‟aide pas les enseignants à résoudre les difficultés rencontrées en classe.

A partir de cette réponse, nous devons confirmer qu‟en plus de la formation initiale et continue, l‟enseignant doit procéder à une auto-formation continue.

Dans un second temps, nous avons demandé l‟avis des enseignants sur les nouveaux programmes de FLE et les nouveaux manuels. Nous avons voulu savoir ce que les enseignants pensent des textes, exercices et questions posés dans les manuels scolaires.

Pour la plupart des enseignants interrogés les nouveaux programmes sont sans intérêt dans le sens où les textes sont loin des intérêts des apprenants. Une enseignante a cité comme exemple le programme de troisième année secondaire où tout le premier trimestre est consacré au « texte historique ». Pour elle, les élèves n‟ont pas une formation de base en ce qui concerne ce thème. Un autre enseignant pense que le programme « est très mal conçu, il contient des textes très difficiles à exploiter à lire et à comprendre ». Pour un autre enseignant « les thèmes des textes n’ont rien à voir avec l’enseignement littéraire c'est-à-dire pour les classes littéraires ».

En ce qui concerne les textes, une PEM interrogée estime qu‟ils sont « très difficiles par rapport à leur âge milieu génération ils n’ont aucune relation avec leur vie quotidienne sincèrement ces textes qui viennent je ne sais pas sur quelle base on les a choisi mais c’est des textes qui n’ont rien à voir avec la vie quotidienne avec le vécu de l’élève avec la société dans laquelle nous vivons ». Plusieurs enseignants affirment que les manuels ne proposent pas des thèmes qui intéressent les apprenants qui sont des adolescents. Les auteurs des manuels doivent à notre avis proposer des textes qui sont en cohérence avec l‟âge, le milieu et les centres d‟intérêt des apprenants. En plus un texte proposé à un élève qui habite dans la capitale ne peut pas systématiquement intéresser un élève vivant dans l‟extrême sud algérien.

En ce qui concerne les exercices et les questions posés sur les textes et ceux de grammaire et de vocabulaire, dans les manuels, tous les enseignants interrogés confirment qu‟ils « ne sont pas à la portée des élèves car ils n’ont pas le niveau requis par rapport aux exercices choisis ». Ces réponses montrent que les enseignants sont très dépendants du manuel. A notre avis, les enseignants, au niveau des collèges et au niveau des lycées pourraient modifier ces exercices ou élaborer eux-mêmes de nouveaux.

Pour le volet des pratiques en classes surtout l'enseignement des SCE et les SCA, nous avons voulu savoir en premier lieu si les enseignants interrogés travaillaient en collaboration avec leurs collègues.

175 Les enseignants affirment avoir une heure de coordination où ils sont censés (pas tout le temps effectivement) « discuter les difficultés rencontrées en enseignant les cours, partager les pratiques, et même préparer ensemble les devoirs et les compositions ».

En ce qui concerne les choix fondamentaux (objectifs, méthodologie utilisée, contenus, progression), les enseignants affirment que ces derniers « sont de la responsabilité de l’institution » et eux « ne font qu’appliquer les directives».

Pour les choix fondamentaux dans les cours de français, les enseignants affirment qu‟ils « sont rarement négociés entre eux et leurs apprenants à cause du niveau bas des élèves ».

Nous avons ensuite voulu savoir ce qui guide ces enseignants dans leur démarche d‟enseignement. Nous avons été surprises de savoir que ce sont « les exigences de la progression collective » qui les guident plutôt que « le progrès individuel, les acquisitions des apprenants » car le nombre des élèves est important, leur niveau n’est pas homogène et puis les enseignants doivent « terminer le programme dans les délais exigés par l’institution surtout dans les classes d’examens ». Derrière tout cela nous pouvons constater que le modèle de la méthodologie traditionnelle est toujours très présent dans la pratique des enseignants. Les enseignants sont toujours dans un paradigme de l‟enseignement et non de l‟apprentissage. Tous ces critères empêchent les enseignants de prendre en compte le rythme, les besoins, les intérêts, les styles et les méthodes d‟apprentissage de chaque apprenant.

En voulant savoir pourquoi les apprenants ne prennent pas souvent part aux interactions, les enseignants ont précisé que les apprenants éprouvent des difficultés dans plusieurs domaines de l‟expression en français :

 Compréhension -lecture -expression orale.

 Expression écrite et même dans les aspects culturels.

Ces lacunes poussent l‟enseignant à être directif dans sa classe cela veut dire que les choix ne sont pas négociés entre les enseignant et leurs apprenants.

En ce qui concerne les questions qui concernent les SCE et les SCA, nous avons été surprise de constater que beaucoup d‟enseignants ignorent totalement ce concept et sa signification même s‟ils les enseignent implicitement. Tout cela est dû à notre avis à la formation initiale ou continue ou même personnelle qui est insuffisante. En expliquant ce concept en donnant des exemples, les enseignants ont tous compris ce qu‟on voulait dire par ce concept.

176 A la question, Est-ce-que vous utilisez des SCE dans vos cours? Quelles en sont les SCE que vous utilisez ? Enseignez-vous vos apprenants à utiliser des SCA ?

Les réponses des enseignants ont été très imprécises et floues. Ils disent « avoir recours à ces stratégies implicitement comme la reformulation, la paraphrase, la synonymie, etc. ».

A la question « quand vous constatez que vos élèves n’arrivent pas à vous suivre ou à vous comprendre, que faites-vous ? » la plupart des enseignants ont tous répondu qu‟ils procédaient à la reformulation.

Nous avons voulu savoir si les enseignants ont recours à certaines stratégies comme le recours à la LM. Les enseignants dans leur majorité confirment ne jamais faire appel à la LM car cette dernière peut devenir « un handicap plus qu’une stratégie » d‟enseignement ou d‟apprentissage, car les élèves vont avoir recours à la LM à chaque fois qu‟ils ne comprennent pas un item.

La dernière question quant à elle consistait à faire des propositions pour améliorer l'enseignement/apprentissage du français en Algérie. D‟après les enseignants interrogés une des propositions clés est « la formation initiale et continue qui doivent être approfondies » et qui « doivent toucher tous les domaines : les programmes, les manuels et les cours ». Pour les enseignants, « la formation doit associer les aspects théoriques et pratiques ». A notre avis, ces réponses sont une façon de rejeter la faute sur une extériorité et de ne pas se remettre en question. En plus, les enseignants demandent d’ « adapter les manuels, les programmes selon les besoins des élèves, leurs âges et leurs centres d’intérêts. »

Ce qui ressort de ces entretiens est que la formation initiale est insuffisante : les PES et PEM suivent un cursus pratique insuffisant. La formation continue est quasi absente et lorsqu‟elle existe elle se cantonne aux points théoriques. L‟autoformation quant à elle est également absente. Les élèves sont dépendants de leurs enseignants. Les enseignants sont dépendants de l‟institution et les parents sont dépendants de ces deux pôles. La dépendance est une monnaie courante qui entrave tout processus de rupture avec ces pratiques. Les enseignants interrogés confirment que mêmes « les inspecteurs déclarent souvent qu’ils n’ont pas été impliqués dans l’élaboration des nouveaux programmes. ». Le volume horaire insuffisant, le niveau bas et insuffisant des élèves qui viennent du primaire et du collège avec une formation de base insuffisante, le contenu inapproprié des manuels (texte, exercices,…) qui ne prend pas en compte l‟âge et les intérêts des élèves, les exigences institutionnelles

177 (terminer le programmes à temps), les examens, etc. sont tous des éléments qui entravent le processus d‟enseignement/apprentissage des langues68

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Donc, à partir de tous les résultats des questionnaires et des entretiens, nous pouvons confirmer notre deuxième hypothèse du départ à savoir : « les conceptions pédagogiques et didactiques ont changé sur le plan des instructions officielles dans le cadre de la réforme du système éducatif, mais les pratiques des enseignants en classes n‟auraient pas suivi ces évolutions, la formation initiale et continue des enseignants n‟aurait pas pris en compte ces changements surtout en ce qui concerne le volet de l‟enseignement de l‟oral et certaines de ses pratiques en classe du FLE ».

Conclusion

Après avoir analysé et comparé le questionnaire des collégiens et les lycéens et le questionnaire des PEM et PES, nous allons passer dans le septième chapitre à la méthodologie qui a conduit au recueil de données portant sur les SCE et les SCA au cours des activités d‟Enseignement/Apprentissage au niveau du collège et au niveau du lycée, à leur élaboration, à leur vérification, et à leur présentation. Il traite également de l‟analyse et l‟interprétation des résultats obtenus.

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Cf. les questions posées en entretiens, les enregistrements sonores des entretiens ainsi que leur transcription en annexes I et II de la thèse.

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