Donc pour tout λ ∈ R, l’idéal Kλ engendré par In et λ1A−dkn inclut strictement
In.
On sait que Sp(dknn) est un fermé non vide de C, borné donc on peut choisir
λkn∈Sp(dknn)(notons qu’une famille de fermés bornés non vides de K2, ou même de Kn, admet une fonction choix). Ainsi In⊊Kλkn ⊊A (puisque λkn∈Sp(dknn)). On pose alors In+1 l’adhérence de l’idéal Kλkn (In+1 est propre).
Enfin on pose M = ⋃
n∈NIn.
Si (In)nstationne, M est maximal. Sinon, la suite (In)n est strictement croissante, soit j le premier entier tel que djM ∉ K1AM. Comme djM ∉ K1AM il est clair que ∀n ∈ N, dj
n
∉ K1A n
, donc ∀n ∈ N, j > kn (puisque kn est le premier entier tel que
dkn ∉ K1An) : contradiction. Donc M est maximal.
5.1.4.4 Représentation de Gelfand pour les algèbres de Banach unitaires
Si a est un élément d’une K-algèbre de Banach unitaire A, on note ˜a l’application
évaluation en a : ˜a ∶ ΩA → C
f ↦ f (a) . Il est clair que ˜a est continue (pour la topologie
∗-faible) (˜a est la restriction à ΩA de la projection canonique pa∶ CA
→ C).
Théorème* 5.1.7. [51, p.15]
Soit A une C-algèbre de Banach unitaire. L’application F ∶ A → C(Ωa A)
↦ ˜a est un
morphisme d’algèbres.
L’application F est contractante i.e. pour tout a ∈ A, ∣∣F (a)∣∣ = ∣∣˜a∣∣∞≤ ∣∣a∣∣. Si ΩA est non vide, l’application F est unitaire.
Preuve :
Pour montrer que F est contractante, on utilise l’inclusion {f (a) ∣ f ∈ Ω(A)} ⊆ Sp(a), qui se fait dans ZF (Remarque5.1.8).
Remarque 5.1.10.
En particulier, si A est commutative alors T2 implique que Ω(A) ≠ ∅ et donc F est unitaire.
5.2 C
∗-algèbres
5.2.1 C
∗-algèbres
Une ∗-algèbre A est une C-algèbre de Banach (au sens des filtres de Cauchy) munie d’une application ∗ ∶ A → A satisfaisant pour tous a, b ∈ A et pour tout λ ∈ C les conditions suivantes :
— a∗∗=a (involutive)
— (ab)∗=b∗a∗
Une C∗-algèbre ([51, p.36]) est une ∗-algèbre (A, ∣∣ ∣∣), munie d’une norme d’algèbre
rendant A complète (au sens des filtres de Cauchy) et telle que pour tout a ∈ A, ∣∣a∗a∣∣ =
∣∣a∣∣2 (d’où ∣∣a∗∣∣ = ∣∣a∣∣).
Dans une C∗-algèbre unitaire A d’unité 1A, on a :
— 1∗ A=1A (en effet 1∗ A=1∗ A1A=1∗ A1∗∗ A = (1∗ A1A)∗=1∗∗ A =1A). — si a ∈ A, Sp(a∗) = {λ ∣ λ ∈ Sp(a)}. Exemple 5.2.1.
— C : l’algèbre C munie de la conjugaison est une C∗-algèbre unitaire.
— `∞(X) : si X est un ensemble, l∞(X) muni de l’involution f ↦ f (conjugaison)
est une C∗-algèbre.
— Cb(X) : si X est un espace topologique, l’ensemble Cb(X) des fonctions continues
bornées sur X à valeurs complexes muni de la conjugaison est une C∗-algèbre.
Si X est compact, Cb(X) = C(X).
— B(H) : si H est un espace de Hilbert sur C, l’ensemble B(H) des endomorphismes continus de H est une C∗-algèbre unitaire, non commutative si dim(H) ≥ 2, munie
de l’involution ∗ qui à tout u ∈ B(H) associe son adjoint u∗ i.e. l’unique
endo-morphisme v de H tel que pour tous x, y ∈ H, ⟨u(x), y⟩ = ⟨x, v(y)⟩. L’existence de cet adjoint est légitime par le théorème de projection sur un convexe complet pour les filtres de Cauchy (voir AnnexeC, page216 pour la définition de complé-tude au sens des filtres de Cauchy et la sectionC.5 page 223 pour le théorème de projection, qui se fait dans ZF).
Un élément a d’une ∗-algèbre unitaire A est hermitien si a∗=a. On note Asal’ensemble
des éléments hermitiens de A ; tout élément x de A se décompose d’une unique façon sous la forme x = a + ib, où a = 12(a + a∗) et b = 1
2(a − a∗) (a, b ∈ Asa). Un élément a d’une
∗-algèbre unitaire A est normal si a∗a = aa∗. En particulier les éléments hermitiens sont
normaux.
Exemple 5.2.2.
Soit K un compact, alors l’ensemble A ∶= C(K, C) des fonctions continues sur K à valeurs complexes est une C∗-algèbre (l’involution est la conjugaison) et Asa= C(K, R).
Remarque 5.2.1.
La ∗-sous-algèbre engendrée par un élément normal (et donc également par un élément hermitien) est commutative.
Soient A et B deux C∗-algèbres. Un morphisme de C∗-algèbres de A dans B est une
application f ∶ A → B linéaire, multiplicative qui préserve l’involution. Si A et B sont unitaires, on impose f (1A) =1B.
5.2.2 Représentation des C
∗-algèbres unitaires commutatives
(Théorème de Gelfand-Naimark), avec T2
Soit A une ∗-algèbre unitaire, d’unité 1A. On rappelle que Asa désigne l’ensemble des éléments hermitiens de A.
Proposition* 5.2.1. [51, p.37-40]
Soient A une ∗-algèbre de Banach unitaire et a ∈ Asa. Alors : 1. Sp(a) ⊆ R.
2. Si de plus A est une C∗-algèbre, alors r(a) = ∣∣a∣∣.
Proposition* 5.2.2. [51, p.40]
Soit A une C∗-algèbre unitaire. Si χ est un caractère sur A alors :
∀a ∈ A χ(a∗) =χ(a)
Théorème* 5.2.1. [Théorème de Gelfand-Naimark][51, p.41]
Soit A une C∗-algèbre unitaire commutative. On rappelle que l’on note ΩA l’ensemble
des caractères sur A. La représentation de Gelfand de A est le morphisme de C∗-algèbres
(contractant) suivant :
F ∶ A Ð→ C(ΩA)
a ↦ a ∶ Ω˜ A → C
f ↦ f (a)
où C(ΩA) désigne la C∗-algèbre des applications continues bornées de Ω(A) dans C. 1. T2 implique le résultat suivant : ΩA est un compact non vide et F est isométrique,
surjectif, unitaire.
2. Si A est séparable, le résultat précédent se prouve dans ZF.
Preuve :
1. On esquisse les étapes de la preuve :
— Avec T2, ΩA est un compact non vide (Théorème 5.1.5).
— F est à valeurs dans C(ΩA) puisque les évaluations sont continues. — F est involutive d’après la Proposition 5.2.2.
— F est contractante (Théorème 5.1.7), et si a ∈ A on a : ∣∣F (a)∣∣2 = ∣∣F (a)∗F (a)∣∣ puisque A est une C∗−algèbre
= ∣∣F (a∗a)∣∣
= r(a∗a), avec T2, (voir Théorème 5.1.5)
= ∣∣a∗a∣∣ puisque a∗a est hermitien (Proposition5.2.1)
= ∣∣a∣∣2 puisque A est une C∗−algèbre
Donc F est isométrique.
— Comme F est isométrique, alors elle est injective.
— F [A] sépare les points de ΩA i.e. si f ≠ g sont deux caractères sur A, il existe a ∈ A tel que ˜a(f ) = ˜a(g).
— F [A] sépare les points de ΩA donc par le théorème de Stone Weiertrass, F [A] est dense dans C(ΩA). Comme F [A] est fermé, il est donc égal à C(ΩA) : donc F surjective.
2. Si A est séparable, alors le Théorème 5.1.5permet de prouver le résultat précédent dans ZF.
5.2.3 Le calcul fonctionnel continu et ses conséquences
On cite un théorème ayant des conséquences importantes :
Théorème* 5.2.2 (Calcul fonctionnel continu). [51, p.43]
Soit A une C∗-algèbre unitaire, soit a ∈ A un élément normal. On note B la C∗-algèbre
(commutative unitaire et séparable) engendrée par a, a∗ et 1A. On considère z ∶ Sp(a) → C
λ ↦ λ .
Alors il existe un unique isomorphisme d’∗-algèbres ϕ ∶ C(Sp(a)) → B tel que ϕ(z) = a.
Preuve :
Soient ϕ1 et ϕ2 deux telles applications. Si f ∈ C(Sp(a)) est polynomiale en z et
z, alors ϕ1(f ) (resp. ϕ2(f )) est le polynôme en a et a∗ correspondant. Ainsi ϕ1 et ϕ2
coïncident sur le sous-ensemble dense des fonctions polynomiales en z et z. Comme ϕ1 et
ϕ2 sont continues et à valeurs dans un espace séparé, elles sont égales, d’où l’unicité. Pour l’existence, l’application ϕ est totalement déterminée sur le sous-ensemble dense des fonctions polynomiales et ϕ est uniformément continue (car linéaire continue), puis, comme B est complète, ϕ se prolonge de manière unique en une application continue ψ de C(Sp(a)) dans B.
De plus ϕ est surjective puisque a ∈ Im(ϕ), et donc l’∗-algèbre engendrée par a est incluse dans Im(ϕ) et est dense dans B. Comme ϕ est isométrique, Im(ϕ) est complète donc fermée.
Remarque 5.2.2.
Si P ∶ Sp(a) → C est polynomiale en z et z, alors ϕ(P ) = P (a).
5.2.3.1 Éléments positifs d’une C∗-algèbre unitaire
Un élément a d’une C∗-algèbre unitaire A est positif s’il est hermitien (a∗ =a) et si
Sp(a) ⊆ R+.
Remarque 5.2.3.
Si x est un élément hermitien d’une C∗-algèbre unitaire A, alors x2 est un élément positif. En effet, x2 est hermitien donc son spectre est inclus dans R. De plus Sp(x2) = {t2 ∣ t ∈ Sp(x)} ⊆ R+.
Théorème* 5.2.3. [51, p.41]
Soient A une C∗-algèbre unitaire et B un C∗-sous-algèbre unitaire de A. Alors pour
tout élément x ∈ B on a :
SpB(x) = SpA(x)
On en déduit qu’un élément x dans B est positif dans B si et seulement si il est positif dans A : B+=A ∩ B+.
En particulier, un élément a ∈ A est positif si et seulement si a est positif dans la C∗-algèbre (séparable) engendrée par a.
Le Théorème 5.2.2 induit plusieurs résultats importants concernant les éléments po-sitifs d’une C∗-algèbre (dont on trouvera les preuves dans [51, p.45]).
Théorème* 5.2.4. [51, p.45]
Soient A une C∗-algèbre unitaire :
— Si x est un élément positif de A, alors il existe un unique y positif tel que y2=x. Cet élément y est noté x12.
— Pour tout élément hermitien x, on définit :
∣x∣ ∶= (x2 ) 1 2 ; x+∶= 1 2(∣x∣ + x) ; x −∶= 1 2(∣x∣ − x)
Les éléments ∣x∣, x+ et x− sont positifs et de plus : x = x+−x−; ∣x∣ = x++x− et
x+x−=0.
Notons aussi que :
∀x ∈ Asa − ∣x∣ ≤ x ≤ ∣x∣
A noter que ∣x∣ ne désigne pas ici la borne supérieure de {x+, x−}dans le R-espace vectoriel ordonné Asa, qui peut d’ailleurs ne pas exister.
Preuve :
On prouve le premier point, pour souligner que le résultat s’obtient dans ZF, puisqu’il est basé sur le théorème de représentation de Gelfand des C∗-algèbres commutatives dans
le cas séparable (Théorème 5.2.1).
On considère B la C∗-algèbre (commutative séparable) engendrée par x. D’après le
théorème 5.2.1, on peut, dans ZF, identifier B à C(K) via la représentation de Gelfand F (où K est l’ensemble (compact) des caractères sur B).
Or la fonction f ∶= F (x) ∈ C(K) est positive (puisque x l’est), donc il existe une unique application g ∈ C(K) positive telle que f = g2 (g ∶ ω ∈ K ↦√f (w)). On pose alors y ∶= F−1(g) et on obtient le résultat.
On liste également quelques résultats utiles, également basés sur le le théorème de représentation de Gelfand des C∗-algèbres commutatives dans le cas séparable (Théorème 5.2.1) :
Proposition* 5.2.3. [51, p.46] Soit A une C∗-algèbre unitaire :
— Pour tout x ∈ Asa et tout réel t, on dispose des implications suivantes : 1. ∣∣x − t1A∣∣ ≤t ⇒ x ≥ 0
2. ∣∣x∣∣ ≤ t et x ≥ 0 ⇒ ∣∣x − t1A∣∣ ≤t
— Les deux implications précédentes permettent de montrer que la somme de deux éléments positifs est positive i.e. :
— Pour tout élément x de A : l’élément x∗x est positif et on définit l’élément positif
∣x∣ ∶= (x∗x)1 2.
De plus : ∣∣ ∣x∣ ∣∣2 = ∣∣ ∣x∣2∣∣ = ∣∣(x∗)x∣∣ = ∣∣x∣∣2
— Un élément x de A est positif si et seulement si il existe y tel que x = y∗y.
— Si a et b sont deux éléments hermitiens tels que a ≤ b alors ∀c ∈ A, c∗ac ≤ c∗bc (en
effet, comme b − a est positif, il existe u tel que b − a = u∗u et donc c∗bc − c∗ac =
c∗(b − a)c = c∗u∗uc = (uc)∗uc ≥ 0).
— Si a et b sont deux éléments positifs tels que 0 ≤ a ≤ b alors ∣∣a∣∣ ≤ ∣∣b∣∣.
5.2.4 Le R-espace vectoriel ordonné A
sa, avec unité d’ordre
Soit A une C∗-algèbre unitaire, d’unité 1A.
Remarque 5.2.4.
Si f est une forme linéaire définie sur Asa, il existe une seule façon de la prolonger en une forme C-linéaire sur A. En effet, si a ∈ A, on décompose a ∶= x + iy où x, y ∈ Asaet on pose alors f (a) ∶= f (x) + if (y).
On rappelle qu’un élément x de A est positif s’il est hermitien et si Sp(x) ⊆ R+. On note A+ la famille des éléments positifs de A. On démontre que A+ est un cône-strict :
— A++A+⊆A+ (Proposition 5.2.3).
— A+∩ (−A+) = {0} : si x ∈ A+∩ (−A+)alors Sp(x) = {0} (puisque le spectre de x est
non vide), donc r(x) = ∣∣x∣∣ = 0 d’où x = 0. — Clairement R+A+⊆A+.
Avec le cône-strict A+, l’ensemble Asa est muni d’une structure de R-espace vectoriel ordonné : pour tous x, y ∈ Asa, x ≤ y si Sp(y − x) ⊆ R+.
Remarque 5.2.5.
— Si a ∈ Asa, a2 est positif (puisque a2 est hermitien et Sp(a2) =Sp(a)2).
— Si a ∈ Asa est tel que ∣∣a∣∣ ≤ 1 alors 1A−a2 est positif (puisque 1 − a2 est hermitien et Sp(1A−a2) =1 − Sp(a)2
⊆ R+).
— Si a ∈ Asa alors a ≤ ∣∣a∣∣1A (puisque Sp(∣∣a∣∣1A−a) = ∣∣a∣∣ − Sp(a) ⊆ R+).
L’élément 1A est donc unité d’ordre de Asa puisque pour tout a ∈ Asa, −∣∣a∣∣1A ≤a ≤
∣∣a∣∣1A. On dispose donc de la semi-norme ∣∣ ∣∣1A associée à l’unité d’ordre 1A et
Remarque 5.2.6.
Il est immédiat que pour tout élément a ∈ Asa, ∣∣a∣∣1A ≤ ∣∣a∣∣.
Notons que le calcul fonctionnel continu (Théorème 5.2.2) permet de prouver que ∣∣ ∣∣ et ∣∣ ∣∣1A coïncident sur Asa. En effet, si a ∈ Asa, le calcul fonctionnel continu permet d’identifier a à un élément f de C(Sp(a)), et sur C(Sp(a)), la norme d’algèbre et celle associée à l’unité d’ordre coïncident.