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3. Revue de littérature

3.2. Les agents abiotiques de dégradation du bois en région tropicale

3.2. Les agents abiotiques de dégradation du bois en région tropicale

Le bois exposé aux agents atmosphériques subit plusieurs types de dommages, parmi lesquels, la décoloration des bois, la dégradation photochimique, le lessivage des produits solubles du bois et des dommages mécaniques liés à l’humidification et au séchage alterné des bois (Zabel & Morrell, 1992). Ces agents abiotiques sont responsables de la détérioration des grumes et des produits du bois, ils favorisent également la colonisation par les agents de dégradation biotique. La dégradation par les agents abiotiques altère principalement la valeur esthétique des bois, d’où la nécessité de les protéger par des produits de préservation.

Les bois des essences tropicales exposés à la lumière du soleil subissent une dégradation photochimique. Les travaux de recherche des effets de la lumière sur le bois ont montré que la lumière du soleil provoque un changement de couleur du bois (Baar & Gryc, 2012; Tolvaj et al., 2011). La surface des bois exposée à lumière devenait foncée dès les premières heures d’exposition (Baar & Gryc, 2012). La lumière agit également sur la lignine et les extractibles du bois (Sudiyani et al., 2003; Yamauchi et

al., 2004). Selon Yamauchi et al. (2004), l’action de la lumière combinée

à celle de la pluie provoque une fracture des groupes phényle par la lumière et la lixiviation des produits dépolymérisés.

La température également a une influence sur la dégradation des bois en forêt tropicale. Les travaux de recherche de Chambers et al. (2000) ont montré une forte corrélation entre la température moyenne annuelle et le taux de décomposition des gros débris ligneux des essences tropicales. Toutefois, l’influence de la température dans la détérioration des bois est également reliée à la nécessité de ce facteur dans les processus biologiques.

Les champignons Basidiomycètes utilisent l’oxygène de l’air en milieu terrestre pour dégrader le bois. Par contre dans les bois immergés, saturés en eau il y a peu d’oxygène disponible. Ces bois exposés aux conditions d’humidité sont généralement dégradés par les champignons de caries molles. Les bactéries font également partie des agents qui dégradent le bois saturé en eau.

3.3. Les agents biotiques de dégradation du bois en région tropicale

La dégradation des bois est causée par plusieurs agents, dont les bactéries, les insectes et les champignons. Durant le processus de carie, les champignons cohabitent dans le bois avec les insectes, les nématodes, les bactéries, les protozoaires et même les algues et les mousses (Zabel & Morrell, 1992).

Les attaques par les bactéries ont lieu essentiellement dans les milieux humides ou durant le transport des grumes par voies maritime et fluviale (Singh et al., 1987; Williams & Amburgey, 1987).

Les attaques dues aux insectes en régions tropicales se font aussi bien sur les arbres vivants que sur les grumes ou bois morts. Plusieurs familles d’insectes ont été recensées dans les plantations tropicales africaines. Il s’agit par exemple des Acridiens, Bostryches, Cérambycidés, Coléoptères, Gryllidés, Hémiptères, Lépidoptères, Platypodidés, Psylles, Scolytidés, Ténébrionidés et Termites (Isoptères) (Brunck, 1965). Selon ce dernier, les animaux ne sont pas en reste et participent également dans la dégradation des arbres debout. Parmi les espèces impliquées, on retrouve les antilopes, buffles, éléphants, rongeurs et singes.

Les champignons jouent un rôle majeur et sont considérés comme les agents les plus importants dans le processus de dégradation du bois. Les champignons adoptent deux principales stratégies de nutrition lors de la dégradation des bois, ils sont parasites (ou pathogènes) et/ou saprophytes. Outre ces deux stratégies, les champignons adoptent une attitude symbiotique où le champignon et son hôte tirent des bénéfices

d’attaquer les tissus vivants. Les champignons saprophytes dégradent le bois sur les substrats non vivants comme le bois mort et les bois de duramen composé de cellules mortes.

Dans la classification des champignons, l’embranchement des Basidiomycota (phylum) est très hétérogène, il regroupe des espèces affichant une diversité de formes et de tailles. Les champignons du phylum Basidiomycota impliqués dans la décomposition du bois appartiennent aux ordres des Agaricales (champignons pourvus de chapeaux à lamelles), Aphyllophorales (champignons dépourvus de lames) et Tremellales (champignons globuleux à ellipsoïdes avec des cloisons verticales ou diagonales) (Gilbertson, 1980). Selon ce dernier, les champignons appartenant aux deux premiers ordres sont souvent retrouvés sur les arbres vivants. Parmi les espèces de l’ordre des Aphyllophorales, on retrouve les champignons polypores souvent impliqués dans le processus de carie du bois. Ces champignons dont le nombre est estimé à 25 000 espèces (Zjawiony, 2004) sont répandus sur l’ensemble de la planète (Hawksworth, 2001). Les polypores sont pourvus de pores ou tubes au niveau de l’hyménophore. Ils appartiennent à la classe des Agaricomycètes (Fig. 2) et sont disséminés au sein des ordres des Corticiales, Gloeophyllales, Hymenochaetales, Polyporales, Russulales et Thelephorales (Gibertoni, 2009; Hibbett et al., 2007). Plusieurs études sur les champignons polypores en région tropicale ont été menées. Les travaux de Ryvarden and Johansen (1980) sur les polypores de l’est de l’Afrique ont permis de recenser les polypores appartenant à quatre principales familles à l’instar des Corticiaceae, Ganodermataceae, Hymenochaetaceae et Polyporaceae. Toutefois, très peu d’études sur les espèces appartenant à ces familles ont été réalisées au Gabon et dans le Bassin du Congo.

Figure 2 Classification et phylogénie des Basidiomycètes (Extrait de Hibbett et al. (2007)) : classe des Agaricomycètes

3.4. Les types de caries du bois

Il existe trois types de caries du bois causées par les champignons, soit les caries molles, les caries blanches et les caries brunes. Ces caries se distinguent par le type de composé du bois qu’elles affectent et l’aspect qu’elles provoquent sur le bois lors de la dégradation ainsi que par les organismes en cause (notamment leur arsenal d’enzymes capables de dégrader le complexe lignocellulosique).

Les caries molles, observables en milieux humides, sont causées en grande partie par des Deutéromycètes6. Il s’agit des bois en contact direct avec le sol ou des bois immergés. Les champignons de caries molles dégradent plus particulièrement la cellulose du bois et causent de faibles dégradations de la lignine (Schwarze & Jeffery, 2004). Sur le bois, on observe des tunnels de formes angulaires dont les ouvertures sont en forme de V ou de diamant dans le bois (Schwarze & Jeffery, 2004; Worrall

et al., 1997).

Les caries blanches, tout comme les caries brunes, sont causées en majorité par les champignons du phylum Basidiomycota. Ceux causant les caries blanches dégradent particulièrement la lignine, tandis que la cellulose et l’hémicellulose sont dégradées faiblement dans les mêmes proportions (Blanchette, 1991; Highley & Dashek, 1998; Tuor et al., 1995). Le bois prend une texture fibreuse et une couleur pâle (Highley & Dashek, 1998). Les caries blanches sont causées également par certains

6 Les Deutéromycètes ne constituent pas un groupe naturel. Il s’agit d’un pseudo- embranchement qui n’est plus reconnu dans la taxonomie moderne. Les données moléculaires démontrent que la majorité des Deutéromycètes sont en fait des Ascomycètes.

champignons du phylum Ascomycota comme ceux appartenant à l’ordre des Xylariales (Schwarze & Jeffery, 2004; Worrall et al., 1997). On observe une récurrence de ce type de caries sur les arbres feuillus (Schwarze & Jeffery, 2004; Tuor et al., 1995).

Contrairement aux champignons de caries blanches, ceux de caries brunes dégradent la cellulose et l’hémicellulose en particulier et modifient la structure de la lignine (Green & Highley, 1997; Highley & Dashek, 1998). Cela se traduit par une couleur beaucoup plus foncée du bois accompagnée de perte de masse et de perte prononcée de résistance mécanique du bois (Green & Highley, 1997). Le bois acquiert une texture cubique qui se transforme en une masse pulvérulente brune (Grosclaude, 1993).