• Aucun résultat trouvé

2.1 Fondements et acteurs du droit international humanitaire

2.1.2 Structure du droit international humanitaire

2.1.2.3 Acteurs

Ce sont les entités et les individus qui, en interagissant, réfléchissent, créent et appliquent les règles que comporte le DIH, agissant directement sur la structure de ce droit. Gus Waschefort relève à ce sujet cinq groupes qui influencent de façon non officielle l’agenda du droit international humanitaire, soit « les universitaires, les

241 Melzer, supra note 219 à la p 27.

242 Ibid à la p 31. « D’autre part, étant donné le mandat spécial du CICR, ses Commentaires sur les

Conventions de Genève de 1949 et leurs Protocoles additionnels sont considérés comme une interprétation de ces traités faisant particulièrement autorité »

gouvernements, les forces armées, la société civile et les organisations internationales (y compris les organisations régionales) » [Notre traduction]243. Les universitaires et

la société civile contribuent à l’avancement du droit international humanitaire en conduisant des recherches et des études sur le sujet, faisant progresser les réflexions sur les nouveaux enjeux d’actualité en lien aux conflits armés, par exemple en ce qui a trait à la question terroriste ou encore par rapport aux systèmes d’armes autonomes244.

Bien que les acteurs individuels contribuent au DIH, ce sont les États en tant qu’entité qui ont le plus de pouvoir puisqu’ils qui ont la tâche principale d’adopter les textes de droit et leur pratique détermine le droit coutumier245. Puisque les États sont les

principaux sujets du droit international246, ce sont donc eux qui ont le pouvoir de

créer des traités, de les intégrer et d’en assurer l’application. Ce sont aussi souvent les États qui prennent la décision de s’impliquer ou non dans un conflit armé, par le choix d’intervenir dans un conflit à l’étranger ou encore par la manière dont sont gérées les crises internes.

En complément aux États, plusieurs entités de leur création contribuent aussi au développement du droit : « les États ont conféré à diverses entités le pouvoir d'interpréter, d'appliquer, de faire respecter ou de développer le droit international

243 Waschefort, supra note 218 à la p 609.

244 Melzer, supra note 219 à la p 51.

245 Sandesh Sivakumaran, « Making and Shaping the Law of Armed Conflict » (2018) 71:1 Curr Leg

Probl 119 à la p 134.

humanitaire » [Notre traduction]247. Nous pouvons noter par exemple la formation de

plusieurs tribunaux tels que la Cour internationale de justice, le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) ou encore la Commission des réclamations Érythrée/Éthiopie, qui sont toutes des entités mandatées pour donner leur opinion sur des enjeux liés, entre autres, à des conflits armés.

De plus, une multitude d’acteurs non étatiques contribuent au développement des règles et de la coutume248. De ceux-ci, le Comité international de la Croix-Rouge

(CICR) est sans doute le plus influent249. En effet, bien que ce soit les États qui

adoptent les traités, le CICR prépare des ébauches de textes et organise des consultations entre différents acteurs qui sont souhaitent développer le DIH250. Son

rôle, inscrit dans son Statut, comprend la dissémination du droit international humanitaire et la préparation de son développement251, notamment en encourageant

les études, conférences et publications sur le DIH. Parmi les acteurs non étatiques qui

247 Sivakumaran, supra note 245 à la p 139.

248 Ibid à la p 142.

249 Pour un aperçu de la contribution du CICR au développement du DIH au courant de son histoire,

voir : Francois Bugnion, « The International Committee of the Red Cross and the Development of International Humanitarian Law » (2004) 5:1 Chic J Int Law 191.

250 « What is the ICRC ’s role in developing and ensuring respect for IHL? » (14 août 2017), en ligne :

ICRC Blog <https://blogs.icrc.org/ilot/2017/08/14/what-is-the-icrc-s-role-in-developing-and-ensuring- respect-for-ihl/> .

contribuent au développement du DIH, on compte aussi des groupes d’experts, des ONG et différents groupes armés252.

En plus des acteurs qui prennent part au développement du droit et de sa structure, plusieurs catégories de personnes interagissent durant les conflits armés. Celles qui ont le statut de combattant·e·s et les autres classés comme étant des civils participant directement aux hostilités sont celles qui combattent, mais il y a aussi sur le terrain les catégories de civils ainsi que le personnel religieux et médical253.

En somme, le DIH est une combinaison d’interactions entre différentes entités, traités, jurisprudence, coutumes et principes. Étant en évolution constante – quoique lente – la transformation du DIH reste toutefois dépendante des choix des sujets abordés par les différents acteurs254. Cela a l’avantage de mettre à l’ordre du jour les

thèmes importants du moment, mais, comme nous allons en discuter plus bas, dirige l’attention sur des enjeux considérés comme importants spécialement pour les acteurs influents. Gardant donc en tête ce portrait de ce qu’est le DIH et des interactions le construisant, nous allons dans la prochaine section tenter une seconde application des théories queer, mais cette fois au droit international, dans le but d’informer notre critique du DIH.

252 Par exemple, onze mouvements de libération nationale ont pris part aux négociations entourant les

Protocoles additionnels aux Conventions de Genève en tant que membres observateurs. Pour en apprendre plus sur comment les groupes armés pourraient davantage contribuer au DIH, voir : Sophie Rondeau, « Participation of Armed Groups in the Development of the Law Applicable to Armed Conflicts » (2011) 93:883 Int Rev Red Cross 649 à la p 658.

253 Melzer, supra note 219 à la p 95.