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4.3.1 ECG et bandelette urinaire comme examens de dépistage

Cette action d’évaluation des pratiques a été présentée pour la certification v2 de l’HEGP en 2009 (cotée A) et présentée en communication orale dans un congrès national (Steichen et Plouin, 2007d).

Thème et référentiels

Le but de l’évaluation était de vérifier que les examens pour le dépistage du re- tentissement de l’hypertension au niveau cardiaque (électrocardiogramme, ECG) et rénal (bandelette urinaire) sont réalisés en consultation d’hypertension et que leur résultat conditionne la prescription des examens de confirmation lors d’une hospi- talisation ultérieure. Les référentiels utilisés pour définir l’utilisation judicieuse du résultat de ces examens étaient le guide français pour la prise en charge de l’hy- pertension (Haute Autorité de Santé, 2006) et le guide européen (Mancia et al., 2007). Selon ces guides, le dépistage de l’hypertrophie ventriculaire gauche (HVG) est recommandé au moyen de l’électrocardiogramme, avec confirmation par une échographie le cas échéant. La bandelette urinaire permet de dépister une protéinu- rie significative, à confirmer par une quantification biochimique le cas échéant. En l’absence de protéinurie à la bandelette, la recherche d’une microalbuminurie peut aider à stratifier le risque cardiovasculaire et rénal du patient.

Patients et méthodes

Les patients consultant pour la première fois dans le service entre le 01/01/2001 et le 31/12/2006 ont été inclus. L’HVG électrique était définie par un indice de So- kolow > 35 mm. L’HVG échographique était définie par un index de masse ventri- culaire gauche > 115 g/m² chez l’homme et 95 g/m² chez la femme. La protéinurie à la bandelette était considérée comme positive à une croix ou plus. La protéinu- rie était tenue pour significative au dessus de 0,3 g/24h (ou par litre à défaut d’un recueil sur 24h). Les comparaisons ont été faites avec le test du Chi².

Résultats de l’évaluation initiale

Au total, 6890 hypertendus ont consulté pour la première fois dans le service entre 2001 et 2006 : des résultats d’ECG étaient notés pour 5757 (84%) et une recherche de protéinurie à la bandelette pour 3426 (50%) ; 3419 (50%) ont bénéficié d’une hospitalisation de jour ou de semaine dans les 4 mois suivants.

Le nombre d’hypertendus hospitalisés ayant bénéficié d’une échographie car- diaque était de 229/325 (70%) en cas d’HVG électrique, 1614/2690 (60%) en l’ab- sence d’HVG électrique et 235/404 (58%) en l’absence d’ECG (p < 0,001). L’écho- graphie trouvait une hypertrophie ventriculaire gauche respectivement chez 104/229 (45%), 472/1614 (29%) et 67/235 (29%) patients (p < 0,001).

Le nombre d’hypertendus hospitalisés ayant bénéficié d’une mesure de protéi- nurie était de 360/468 (77%) en cas de bandelette positive, 898/1438 (62%) en cas de bandelette négative et 946/1513 (63%) en l’absence de bandelette (p < 0,001). La mesure biochimique trouvait une protéinurie significative respectivement chez 140/360 (39%), 35/898 (4%) et 115/946 (12%) patients (p<0,001).

Interprétation des résultats initiaux

La positivité des examens de dépistage augmente la réalisation des examens de confirmation. Toutefois, la mauvaise valeur discriminante de l’indice de Sokolov – rapport de vraisemblance positif à 1,6 – remet en question son intérêt pour le dépis- tage de l’hypertrophie ventriculaire gauche dans cette population très sélectionnée. En revanche la bandelette urinaire conserve une très bonne valeur de dépistage dans cette population avec un rapport de vraisemblance positif à 9,8 ; elle mérite- rait d’être réalisée plus systématiquement en consultation spécialisée et son résultat mieux pris en compte pour la décision de prescrire une mesure de protéinurie ou non lors d’une hospitalisation ultérieure. Les problèmes identifiés sont les suivants : – En consultation : le patient n’a pas uriné avant la consultation (vessie vide) et ne revient pas après avoir vu le médecin, malgré la consigne donnée par l’infirmière ; les résultats de la bandelette ne sont pas transcrits sur la fiche remise au médecin ; les résultats ne sont pas saisis dans l’observation par le médecin, notamment lorsque la bandelette est négative.

– En hôpital de jour : le patient n’a pas apporté d’urines des 24h ; les urines des 24h sont acidifiées et ne permettent pas d’effectuer la mesure (concurrence avec les analyses hormonales).

Actions correctives et objectifs

Un courrier du chef de service a été adressé à l’ensemble des prescripteurs (FIGURE 4.1), demandant aux médecins de systématiquement transcrire les résul-

tats de la bandelette urinaire dans Artemis, même s’ils sont négatifs. Par ailleurs, il était rappelé l’intérêt de prendre en compte ce résultat lors de la prescription des quantifications de protéinurie. Des actions à l’intention des infirmières ont été coor- données par la cadre de soins. Une réunion d’information a été mise en place pour présenter l’étude et ses résultats, analyser les causes et définir un plan d’actions cor- rectives. Ce plan comportait un volet pour la consultation et un autre pour l’hôpital de jour.

Pour la consultation, une mention a été ajoutée à la convocation des nouveaux patients, leur demandant d’arriver vessie pleine. Si le patient n’a pas envie d’uriner au moment de son passage au box infirmier (pour la pesée et la mesure de pression artérielle), l’infirmière doit insister pour qu’il revienne en fin de consultation pour la réalisation de la bandelette urinaire. Si le patient ne revient pas malgré la consigne, l’infirmière doit en garder trace dans ses transmissions.

Pour l’hôpital de jour, la protéinurie était réalisée sur les urines des dernières 24h apportées par le malade. Or le recueil de ces urines était souvent optimisé pour les dosages hormonaux. Ces dosages requièrent que les urines soient acidifiées, ce qui les rend impropres à la quantification de la protéinurie. Il a été décidé de quantifier la protéinurie (rapportée à la créatininurie) sur un échantillon d’urines fraîches émises par le patient à son arrivée dans le service. Le formulaire de convocation a été modifié pour demander au patient d’arriver vessie pleine.

Réévaluation

L’idéal serait que tous les primoconsultants aient un résultat de bandelette uri- naire noté dans leur observation et que la quantification de la protéinurie soit faite de manière systématique en hôpital de jour. Les objectifs fixés pour la réévaluation étaient de réduire de moitié l’écart entre les pratiques observées et ces pratiques idéales et donc un résultat de bandelette urinaire dans l’observation de 75% des pri- moconsultants et une protéinurie quantifiée pour 82% des patients hospitalisés de jour. La réévaluation a été réalisée entre le 01/06/2008 et le 30/09/2008. Le résul- tat de la bandelette était saisi pour 212/313 (68%) des primoconsultants et 162/180 (90%) des patients hospitalisés de jour avaient une protéinurie quantifiée. Ces ré- sultats confirment qu’il est plus efficace de rationaliser une organisation (modalités

Professeur PF Plouin, unité d’hypertension

HEGP et Université Paris Descartes

20 rue Leblanc, 75908 Paris cedex 15, France Tel 33 1 56 09 37 73 Fax 33 1 56 09 37 91 pierre-francois.plouin@egp.aphp.fr

Mercredi 2 avril 2008 A L Amar, M Azizi, C Battaglia, C Lepoutre

Copie E Billaud, M Cambillau, JN Fiessinger, F Leviel, C Loury, F Millet, N Postel Vinay, C Tessier

Chers amis,

Les recommandations en vigueur demandent le dépistage d’une protéinurie à la bandelette urinaire (BU) lors d’une première consultation pour hypertension artérielle. L’observance et l’utilité de ce dépistage ont été analysées rétrospectivement par l’un d’entre nous (OS) dans le cadre de l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP).

Son observance est mauvaise : sur 6890 patients vus pour la première fois en consultation entre janvier 2001 et décembre 2006, 50,3% n’ont pas eu de résultat de BU enregistré dans le bordereau Artémis de première consultation et, parmi les 3419 séjours suivant une 1ère consultation, 35,5% n’ont pas comporté de mesure de protéinurie. Les explications de cette mauvaise observance sont multiples : 1. Le patient n’a pas uriné avant la consultation

2. La présence, ou surtout l’absence, d’une protéinurie à la BU n’a pas été enregistrée dans le bordereau ARTEMIS

3. Lors du séjour, le patient n’a pas apporté d’urine ou a apporté des urines acidifiées ne permettant pas la mesure

Son utilité est bonne : parmi les patients informatifs, la sensibilité et la spécificité de la présence d’une protéinurie de 1 croix ou plus pour prédire la présence d’une protéinurie étaient de 80%.

Il faut faire mieux :

1. On peut à nouveau demander au patient une miction après la consultation

2. Il faut toujours enregistrer le résultat de la BU, même négatif, dans la vue Biologie d’Artémis 3. Nous allons désormais demander aux infirmières d’HS ou HJ d’obtenir un échantillon d’urine à

l’arrivée ; de faire sur cet échantillon l’analyse par BU ; puis d’envoyer systématiquement cet échantillon au laboratoire pour mesure de l’albuminurie (ou de la microalbuminurie) et de la créatininurie. S’il n’y a pas de mesure hormonale, le patient n’apporte pas d’urine.*

* S’il y a des mesures hormonales programmées, elles sont faites sur un recueil de 24h obtenu en sus de l’échantillon ci-dessus et envoyé en hormonologie. Il faudra adapter le formulaire de convocation en fonction.

Le principe de l’EPP est d’assurer un suivi des pratiques et nous ferons un nouveau point dans 6 mois.

Mille mercis,

G Bobrie O Steichen PF Plouin

de recueil des urines) que de simplement essayer de changer des habitudes (noter un résultat dans l’observation médicale).

4.3.2 Traitement des hypertendus adressés en consultation

Le deuxième exemple concerne l’évaluation du traitement antihypertenseur pres- crit par les médecins généralistes aux hypertendus qu’ils envoient dans un service spécialisé. Il s’agissait de voir si des indicateurs de conformité aux recommanda- tions s’amélioraient entre 2001 et 2006. Ce travail a fait l’objet de deux commu- nications (Steichen et Plouin, 2007b,e) et d’une publication (Steichen et Plouin, 2008c).

Patients et méthodes

Tous les patients consultant pour la première fois en 2001 ou 2006 dans une unité d’hypertension artérielle ont été inclus. L’évolution de leurs caractéristiques et des traitements antihypertenseurs sous lesquels ils étaient adressés a été étudiée, ainsi que deux indicateurs thérapeutiques spécifiques.

Le premier indicateur est la place des thiazidiques dans les associations antihy- pertensives, en particulier dans les trithérapies ou plus. Cet indicateur évalue l’adé- quation de la prise en charge des hypertendus « difficiles à équilibrer ». Le deuxième indicateur est la place des inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) chez les pa- tients hypertendus à haut risque (diabète ou prévention secondaire). Cet indicateur évalue l’adéquation de la prise en charge du risque cardiovasculaire.

Les résultats sont présentés sous forme de proportion pour les variables binaires et de moyenne pour les variables quantitatives. Les valeurs de 2001 et 2006 sont comparées avec le test du Chi² pour les variables binaires et le test t de Student pour les variables quantitatives (seuil de significativité : p < 0,05).

Résultats

Les 1259 patients de 2001 et des 1160 patients de 2006 étaient comparables, avec globalement : age moyen 54 ans, femmes 50%, index de masse corporelle 27 kg/m², diabète 13%, dyslipidémie 36%, tabagisme actif 15%, antécédents fami- liaux 23%, antécédent vasculaire cérébral 9%, insuffisance coronaire 5%, insuffi- sance cardiaque 6%, insuffisance rénale 4%, ancienneté de l’hypertension 9 ans et pression artérielle systolique 149 mmHg.

Les patients traités recevaient en moyenne 2,24 classes thérapeutiques en 2001 et 2,44 en 2006 (p = 0,002). Trois classes ont progressé entre 2001 et 2006 : les inhibiteurs calciques étaient compris dans 49% des traitements antihypertenseurs en 2001 et 56% en 2006 (p = 0,007), les antagonistes de récepteurs de l’angiotensine dans 28 et 42 % (p < 0,001) et les thiazidiques dans 31% et 39% (p = 0,001). La prescription des autres classes est restée stable, en particulier celle des IEC autour de 25%.

En 2006, 55% des associations antihypertensives comportaient un thiazidique, contre 48% en 2001 (p = 0,02). Cependant, malgré les recommandations, ils demeu- raient employés dans moins de deux tiers des trithérapies : 55% en 2001 et 62% en 2006. La prescription des IEC chez les patients à haut risque cardiovasculaire n’a pas progressé : 34% en 2001 et 29% en 2006 (p = 0,30). Cependant, la proportion des patients à haut risque recevant un traitement inhibiteur du système rénine angio- tensine augmente de 59% en 2001 à 71% en 2006 (p = 0,008), grâce à la progression des sartans de 28% à 46% (p < 0,001).

Conclusion

La prise en charge de l’hypertension des patients adressés en consultation est globalement plus intensive en 2006 qu’en 2001. Les classes thérapeutiques mises à contribution pour cette intensification thérapeutique sont les inhibiteurs calciques, les sartans et les diurétiques thiazidiques. Cependant, les diurétiques thiazidiques restent sous-utilisés et sont en particulier absents de deux-tiers des bithérapies et d’un tiers des trithérapies en 2006. La prescription des sartans augmente fortement chez les patients à haut risque cardiovasculaire, alors que celle des IEC, qui ont une meilleur niveau de preuve, ne progresse pas. Le résultat de cette évaluation des pratiques a fait l’objet d’une communication par l’Inserm à l’intention des médecins généralistes (FIGURE 4.2).