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II Caractérisation des fibres de renfort

3 Caractérisations physico-chimiques des fibres de renfort

3.2.3 Étude de la composition chimique en surface .1 Analyses dispersives en énergie

3.2.3.2 Étude de la composition chimique en surface

Des analyses de spectroscopie photoélectronique par rayons X (XPS) réalisées sur les fibres de basalte ont permis d’approfondir les premières observations obtenues à l’aide de l’EDS. Les conditions d’observation sont présentées dans le tableau 2.10. Dans le cadre de cette analyse, il est possible de parler d’une zone d’analyse mixte (comprenant zones sèches et zones ensimées) car le diamètre de l’aire analysée est de 200 µm. Les éléments majoritaires que l’on retrouve à la surface sont le carbone, l’oxygène et le silicium (cf. tableau 2.21). Ce résultat signifie que les deux ensimages sont bien mis en évidence puisque le carbone et l’azote ne sont pas des constituants du basalte et sont seulement présents dans les formulations d’ensimages.

Réf Zone C O N Si Al Fe Mg Zn Ca

BIS59 Mixte 59.7 26.7 3.4 6.4 2.2 - 0.7 - 0.9

BIS74 Mixte 53.3 34.9 1 6.6 2.4 - 0.9 - 0.8

Tableau 2.21 Compositions atomiques des fibres de basalte BIS59 et BIS74 déterminées par XPS

Des spectres à hautes résolutions ont été réalisés pour les énergies d’intérêt. De 280 à 296 eV, il est possible de visualiser les composantes du pic C 1s :

• 284,5 – 284.8 eV : liaisons C-C / C-H pour les composés aliphatiques et/ou forme graphite et/ou forme aromatique

• 286,4 – 286,8 eV : liaisons C-O et/ou C-N • 287,8 eV : liaisons O-C-C et/ou C=O • 288,6 – 289,3 eV : liaisons O-C=O

Les proportions des différentes formes chimiques du carbone pour les deux fibres de basalte, obtenues par la décomposition du pic C 1s sont données dans le tableau 2.22.

Référence C-C / C-H / C-Si C-O / C-N C=O / O-C-O O-C=O

BIS59 70 22 5 6

BIS74 50 44 4 2

Tableau 2.22 Interprétation du pic de décomposition du C1s

Il est mis en évidence que 70 % des liaisons des atomes de carbone sont des liaisons C, C-H ou C-Si pour les fibres BIS59 contre seulement 50 % dans le cas des fibres BIS74. Les autres liaisons engagées avec le carbone sont de nature réactive, signifiant ainsi que l’ensimage IS74 présente une plus forte fonctionnalité.

Les analyses précédentes réalisées par EDS indiquent que les zones présentant de fortes concentrations d’ensimage (agglomérats et stries) ont un pourcentage atomique de carbone et d’oxygène respectivement supérieur et inférieur à ceux des zones sèches. Dans ces zones, il est ainsi possible de déterminer le rapport atomique C / O, dont la valeur est caractéristique de l’ensimage. Cette valeur déterminée par EDS peut être minimisée par la taille du volume d’interaction qui peut également interagir avec le basalte ne comprenant pas de carbone mais davantage d’oxygène.

Dans le cas de la technique d’analyse XPS, le calcul de ce rapport doit nécessairement donner lieu à des valeurs égales ou supérieures à celle obtenues pour l’EDS si l’ensimage est déposé de manière homogène. En effet, du fait de la faible profondeur d’analyse (10 nm) et des épaisseurs d’ensimages habituellement rencontrées (< 100 nm), il n’y a pas ou peu d’interactions possibles entre le faisceau d’électron et le basalte. À partir des rapports déterminés sur le tableau 2.23, il est ainsi possible de confirmer que les deux fibres de basalte présentent des ensimages non uniformes avec des zones non ensimées (ou < 10 nm). Les rapports C / O obtenus avec la technique XPS sont systématiquement inférieurs à ceux de la technique EDS. Réf BIS59 BIS74 Rapport EDS (Zone ensimée) XPS (Zone mixte) EDS (Zone ensimée) XPS (Zone mixte) C / O 4.9 2.2 1.9 1.5

Tableau 2.23 Pourcentages atomiques déterminés sur les fibres de basalte BIS59 et BIS74 par XPS

3.2.4 Évaluation de la quantité d’ensimage

Les analyses thermogravimétriques ont été réalisées sur les deux fibres de basalte. L’appareil utilisé pour cette analyse est une ATG Perkin TGA 8000. Les thermogrammes obtenus pour les deux références sont présentés sur la figure 2.24. Les quantités d’ensimages présentes à la surface des deux fibres sont bien différentes puisque la perte de masse totale mesurée pour la fibre BIS59 est de 2.25 % masse contre 0.75 % masse pour les fibres BIS74. Deux dégradations successives sont observées pour les fibres de basalte BIS59. Elles correspondent aux éléments présents dans les formulations : la première perte de masse s’effectuant entre 220 et 400 °C reflète la dégradation des lubrifiants, agents d’aide process, agents antistatiques, des agents filmogènes présents dans l’ensimage et des agents de couplage adsorbés à la surface. La seconde perte de masse à partir de 400 °C correspond aux organosilanes greffés à la surface du basalte [27] [28].

Dans le cas de la dégradation de l’ensimage IS74, il est plus difficile d’observer une dégradation en deux étapes bien qu’il semblerait qu’un second mécanisme intervienne après

400 °C. Thomason et al [28] ont décrit dans leurs travaux que le thermogramme caractéristique de la dégradation des ensimages de type époxy des fibres de verre était constituée d’une étape majoritaire liée à la forte composition de ces ensimages en résine époxy (60 – 70 %

masse), les 30 % masse restants étant des molécules de type époxy silane, surfactants et lubrifiants. D’après le thermogramme obtenu pour l’ensimage IS74, 70 % masse de l’ensimage a été dégradé à 400 °C. Cependant, rien n’indique à ce stade que cet ensimage est essentiellement composé de résine époxy.

Figure 2.24 Thermogrammes ATG des fibres de basalte BIS59 et BIS74 (10°C.min-1, Air)

De manière analogue aux fibres de carbone, il est possible d’évaluer une épaisseur théorique d’ensimage déposée à la surface des fibres en considérant un dépôt homogène. Cependant, d’après les clichés MEB (cf. figure 2.20) il est évident que cette hypothèse ne pouvait être considérée. Un modèle tenant compte des irrégularités de dépôt pour déterminer le taux de recouvrement de l’ensimage a été développé par Thomason et Dwight [29] dans les années 2000. Les auteurs ont traité des données provenant de mesures XPS associées aux mesures ATG pour calculer le taux de recouvrement.

Le modèle schématisé sur la figure 2.25 donne accès au nombre de carbone, silicium et oxygène détectés par XPS. De nombreux paramètres sont connus (f et e, les masses volumiques de la fibre et de l’ensimage, , le libre parcours moyen des électrons, , l’angle de mesure) et d’autres restent à déterminer (f, le taux de recouvrement x, le rapport atomique C / O de l’ensimage, e, l’épaisseur de l’ensimage, k, la concentration massique de silice en surface).

Dans leurs travaux, les auteurs ont utilisé des fibres de verre avec différents taux d’ensimage pour déterminer par extrapolation la valeur de k. L’épaisseur de l’ensimage est déterminée à partir de l’équation (2.18), elle dépend du taux de recouvrement f. Connaissant ces paramètres, les nombres d’atomes de carbone, de silicium et d’oxygène détectés, respectivement Nc, Nsi et No sont alors déterminés par les relations suivantes :

( ),

16 14

a c e

N

N fxρ P t d

x

 

=

+

 

(2.21)

(1 ) (1 )

60 60

a a Si f f

N N

N =fkρ P  + −f kρ  

   

   

(2.22)

( ) ( ) 2 ( ) 2

, 1 1

16 14 60 60

a a a O e f f

N N N

N fρ P t d P f ρ

x

     

= + − + −

+

     

(2.23)

Avec P, la probabilité de collecter les photoélectrons de l’ensimage et de la zone de basalte recouverte (voir [29]). Les rapports C / Si et O / Si extraits des analyses XPS permettent d’obtenir un jeu de deux équations avec deux inconnus (f et x).

Figure 2.25 Modèle de Thomason et Dwight pour calculer le taux de recouvrement de fibres de verre à partir de données XPS [29]

Contrairement à Thomason, la valeur de k n’a pas été déterminée à partir d’une extrapolation O / Si vs C / O car un seul taux d’ensimage était disponible à l’étude pour les références BIS59 et BIS74. La proportion massique de silice en surface a été déterminée à l’aide des analyses de surface EDS dans les zones sèches. On considère qu’en ces zones, la réponse de l’ensimage est largement négligeable devant le volume d’interaction avec le basalte. Procédant ainsi, la valeur de k déterminée pour les deux fibres est de 0.6. Les taux de

recouvrement théoriques de l’ensimage f et les rapports C / O des ensimages ont pu être calculés à l’aide de ce paramètre.

Les résultats obtenus sur le tableau 2.24 suggèrent un taux de recouvrement similaire entre les deux fibres avec 77 et 78 % pour les fibres BIS59 et BIS74. Du fait d’un taux d’ensimage appliqué supérieur sur les fibres BIS59, l’épaisseur de cet ensimage est estimée par le modèle à 160 nm contre seulement 54 nm à la surface des fibres BIS74. Enfin, les valeurs des rapports C / O des ensimages IS59 et IS74, caractéristiques de leur nature sont respectivement de 11.1 et 4.3.

Il est intéressant de souligner que Thomason et Dwight [29] avaient mis en évidence que les ensimages à vocation thermodurcissables et thermoplastiques présentaient des rapports C / O bien différents. Les ensimages thermoplastiques, dédiés au polypropylène dans leurs travaux, avaient des rapports supérieurs à 10 quand les ensimages époxy avaient des rapports proches de 5, signifiant une réactivité bien supérieure. Cette observation est validée dans notre cas de figure puisque l’ensimage IS59 est un ensimage pour matrice thermoplastique et celui de l’IS74 est un ensimage de type époxy.

BIS59 BIS74 E n tr ée s O / Si 4.17 5.3 C / Si 9.3 8.4 Résult ats f (%) 77 78 C / O 11.1 4.3 e (nm) 161 54

Tableau 2.24 Résultats de l’application du modèle de Thomason pour les fibres BIS59 et BIS74