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Variantes de la civilisation ; — Toujours dominées par les ressemblances ; — Toujours soumises à la nécessité de mettre les peuples de niveau. — L'infériorité d'une nation en présence de l'ennemi serait sa mort. — Comment les peuples se rachètent de leurs défauts.

— Pourquoi ils s'organisent en sens inverse les uns des autres. — De quelle manière toute période en quatre temps fait le tour du monde.

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p.124 Ce qui frappe d'abord l'esprit des historiens est la diversité des nations, leur opposition réciproque, leur guerre éternelle, qui semble sortir des profondeurs de la création avec une tradition de combats, de contrastes, de railleries, de malédictions répétées de siècle en siècle depuis le commencement du monde. C'est ainsi que la Bible raconte l'histoire des Juifs, constamment inspirés par leur haine contre les Égyptiens, les Assyriens, les Perses, les Mèdes et une foule de peuples qui les étonnent, les uns par leurs dieux, les autres par leurs institutions, d'autres par les villes cyclopéennes qu'ils construisent. C'est ainsi que l'Iliade nous laisse une p.125 impression indélébile, parce qu'elle oppose le camp des Grecs à la ville des Troyens, où l'on voit Hector, Andromaque, Pâris, Priam, avec des idées, des alliés, des traditions qu'Agamemnon combat et qu'Achille méprise. Quelle variété dans la revue de l'armée des Grecs, quand Hellène nomme à Priam les capitaines et les troupes qui se massent autour de Troie ! Ce sont des hommes que de longues guerres ont déjà séparés, façonnés de cent manières diverses, soumis à des divinités qui les protègent ; les uns sont voués à Mars, les autres à Minerve, chacun d'eux a choisi dans le ciel son étoile Polaire, et la variété des casques, des boucliers, des lances, des costumes, annonce qu'ils sont tous fils de terres entourées d'ennemis.

Cette diversité éclate plus saisissante encore dans l'Odyssée, où l'on observe les peuples dans leur foyer domestique, et où l'on ne passe de l'un à l'autre qu'à travers les aventures, les surprises, les combats, les

prodiges de l'art, de l'industrie, de la religion. Calypso ne peut naître chez les Phéaces, pas plus que Ménélas en Égypte.

D'où vient enfin la grandeur d'Hérodote, avec qui nous touchons à la véritable narration historique ? De ce qu'il traduit en prose et transporte de Priam à Xerxès la guerre des Grecs contre l'Asie. D'un côté on voit le grand roi, ses satrapes, une armée aux innombrables combattants, un mouvement rapide qui concentre tout à coup une foule de peuples sur l'Hellespont, le faste de la civilisation, les larges et cruelles justices de l'Orient, une p.126 sagesse qui prend toujours des proportions gigantesques, un profond mépris pour les petites villes, les peuplades républicaines, les ligues microscopiques soudées et dessoudées à chaque instant, les discordes qui prennent le nom pompeux de franchises, de libertés, de discussions ; de l'autre côté ce sont des villes suppléant au nombre par la force de l'enthousiasme, des citoyens que leur génie élève au-dessus des rois, de petites armées qui se jouent de masses stupides marchant aveuglément au carnage, des combattants doués d'une opiniâtreté surhumaine, d'une intelligence capable de découvrir une puissance dans leur propre impuissance. Hérodote peint les deux camps, en comprend tous les drames, et quand il les décompose, on voit encore dans son histoire, qui devient universelle, les peuples diversifiés par les milieux ou de longues guerres : des épreuves séculaires, des lois, des mœurs, des traditions désormais indélébiles en ont fait comme des races distinctes, même quand ils offrent les mêmes traits.

Quelle différence entre les Assyriens et les Égyptiens ? Comment comparer les Égyptiens aux Éthiopiens, qui ne peuvent comprendre les ambassadeurs des Perses ? Quel rapport entre les Perses si civilisés et les Scythes nomades, traînant après eux leurs maisons, leurs troupeaux, leurs devins, au milieu d'un climat affreux, où ils se retranchent et se défendent par la dévastation ; en sorte que Darius peut à peine se sauver, lui qui leur reprochait de fuir. Chaque peuple a sa loi bizarre : les Adyrmacides livrent leur fiancée au roi avant d'y toucher, les Nasamons la p.127 livrent aux convives ; entre les Auliens et les Agathyrs, les femmes sont communes ; les Atarantes maudissent le

soleil qui les brûle, les Massagètes au contraire l'adorent ; chez les Indiens, chez les Thraces, la femme suit son mari dans le tombeau ; quelques Indiens tuent leurs vieillards et leurs malades, d'autres les laissent mourir dans la solitude ; les Assyriens exposent au contraire leurs infirmes dans les carrefours ; jamais un Grec ne mangera son père, jamais un Galatien ne se décidera à le brûler. Tout peuple tient obstinément à sa loi.

« Si on proposait, dit Hérodote, à tous les hommes de faire un choix parmi les meilleures lois qui s'observent dans les divers pays, il est certain qu'après un examen réfléchi chacun se déterminerait pour celles de sa patrie ; tout homme est persuadé qu'il n'en est point de plus belles.

Au milieu de cette diversité, les civilisations restent équivalentes, car la guerre force tous les peuples à ne pas s'attarder d'un jour, et celui qui reste en arrière voit ses provinces envahies, sa capitale menacée. S'il ne répare pas sur-le-champ ses défaites, il disparaît à jamais. De là les nations sont obligées de s'imiter, de se copier, de se voler les idées, les découvertes, les inventions, les religions. Vous voyez les mêmes dieux en Égypte, à Tyr, en Grèce ; les oracles à Dodone comme à Thèbes d'Égypte ; le deuil et les cérémonies funèbres de Babylone sont celles de Thèbes et de Memphis ; les Perses empruntent l'habillement aux Mèdes, la cuirasse aux Égyptiens, l'amour des garçons aux Grecs, le culte de Vénus aux Assyriens, et chez Hérodote toute la Terre est déjà pleine d'habitants p.128 en communication les uns avec les autres, en sorte que les sauvages sur les confins de l'Égypte ne peuvent rester étrangers aux combats de Darius contre les Scythes, et aucun homme de la Grèce ne s'arrache à la fatalité qui l'oblige à combattre ou à défendre le despote de la Perse. Puisque tout est force dans le monde, la beauté de Vénus comme la vigueur d'Hercule, la lyre d'Amphion comme les dix mille ouvriers du temple de Salomon, la boussole comme le canon, la religion comme l'armée, cet équilibre qu'on trouve aujourd'hui entre le schisme russe, la papauté catholique, la philosophie protestante, la liberté anglaise et la monarchie française est le fait constant de toutes les époques les plus reculées de l'histoire.

Il en résulte qu'une période en quatre temps ne peut se réaliser à Memphis sans se reproduire à Athènes, sans devenir italienne, ibérienne, assyrienne, sans faire le tour du monde, sans figurer dans toutes les histoires. Rien n'est donc plus naturel que de comparer les peuples entre eux en dépit de leurs différences, et le langage même nous y entraîne avant qu'on y réfléchisse. En parlant de Rome, on dira qu'elle est supérieure par sa constance à la république d'Athènes, mais que les Athéniens surpassent les Romains dans les arts et dans les sciences, que les Spartiates, en présence des Athéniens, sont moins civilisés, mais plus héroïques. En général on tend à soumettre à une mesure unique les événements les plus variés et à chercher les héros d'un peuple chez les autres peuples. On dit à chaque instant que Romulus est le Thésée de Rome, qu'Aristide est le Caton d'Athènes, p.129 que Calvin est le Luther de la France, Knox le Calvin de l'Écosse, Albuquerque le Christophe Colomb du Portugal, Pierre Ier le Louis XIV de la Russie, et que Firmian, Dutillot, Tanucci, sont les Turgot de l'Italie, dont Joseph II est le pendant en Autriche, Frédéric II en Prusse et Catherine II à Saint-Pétersbourg. Il est impossible de ne pas reconnaître que la manie des cathédrales, la fureur des croisades, la violence des guerres civiles, la constitution des monarchies modernes, se montrent l'une après l'autre, presque aux mêmes jours dans l'histoire des nations, aujourd'hui toutes sécularisées, comme vers l'an 1000 toutes dévouées à l'Église.

Mais il y a plus : les différences des civilisations s'expliquent par leurs ressemblances. En effet, portons les ressemblances à l'excès, imitons les géomètres qui facilitent leurs calculs en se figurant des surfaces sans profondeur, des lignes sans étendue, des points sans dimensions. Supposons les deux mille nations qui habitent la Terre, toutes égales depuis le commencement du monde ; admettons que, par hypothèse, elles possèdent toutes le même nombre de lieues carrées, le même chiffre de soldats, des chefs également habiles, les mêmes dispositions à la science, aux arts, à l'industrie ; qu'en un mot la pluie, le soleil, le climat, les fleuves, l'air, la mer, la végétation s'accordent miraculeusement à leur assurer la plus parfaite égalité, et supposons-les toutes dans la première phase de leur civilisation : quelle en sera la

conséquence ? Chacune aura son histoire, qui passera d'une période à l'autre avec la régularité des p.130 mathématiques ; chaque peuple donnera les mêmes représentations à Paris et à Constantinople, à Bombay et à Yeddo ; et l'histoire de tous les peuples étant la même, le monde n'aura en réalité qu'une seule histoire commune à tous les États.

À une époque donnée, ils se construiront des capitales : l'époque suivante, ils bâtiront des temples grecs ; plus tard, ils les remplaceront par des basiliques romaines, par des cathédrales gothiques ; plus tard encore, par des hôtels de ville, par de riches palais, et enfin les palais des rois ou des embarcadères merveilleux feront oublier le luxe suranné des cathédrales. L'impossibilité de remporter des victoires réduira les guerres à des tournois, mais chacune d'elles traversera les cycles du siège de Troie, des conquêtes d'Alexandre, des croisades catholiques réduites à des fêtes nationales, dont les Homère, les Virgile, les Dante seront comme autant de Pindares aux Jeux Olympiques. Dans cette hypothèse, chaque peuple se verra dans son voisin comme dans un miroir, et les deux mille histoires seront autant de redites.

Il n'y a, certes, aucune égalité entre les nations, et on ne trouverait pas plus deux Frances dans le monde, que deux gouttes d'eau semblables dans l'univers ; mais la guerre universelle condamne les peuples à exploiter le sol, le climat, la population, les dispositions naturelles dans toute leur variété, pour en tirer des forces équivalentes à celles de leurs adversaires. L'équivalence doit être exacte, sous peine de mort : il suffit que deux peuples vivent à côté l'un de l'autre pour qu'on puisse p.131 les dire égaux au point de vue du mécanisme politique. Si l'un d'eux était doué du moindre avantage, du plus faible privilège, il subjuguerait son voisin ; dès lors, deux fois plus fort, il ne trouverait aucune résistance en présence d'un troisième peuple, et de proche en proche, les autres disparaîtraient sous sa domination sans cesse doublée par cette supériorité croissante qui étendait si rapidement les conquêtes des Grecs, des Romains, des barbares, des Arabes, des Tartares, de toutes les nations assez heureuses pour changer un moment l'équilibre d'un continent. Mais, loin d'arriver à la domination universelle, leurs conquêtes, toujours arrêtées à moitié

peine quelques siècles, et se dissolvaient au premier choc des nouvelles invasions. Toutes les civilisations se nivellent tellement, qu'on peut en quelque sorte justifier la vanité qui porte invariablement chaque peuple à se croire le premier de la Terre. Quelle que soit sa misère, il supplée à ses défauts ou par le climat, ou par les armes, ou par l'industrie, ou par la navigation, ou par l'agriculture, ou par les expédients insaisissables de la race, des mœurs, des idées, des traditions, des alliances. Malheur à lui s'il devait se dire inférieur à un autre peuple !

L'équivalence des peuples explique ainsi la variété des formes politiques, toutes tournées, les unes contre les autres, comme les instruments de leurs éternelles rivalités. Ils savent à merveille que le moindre surcroît de force donne la conquête, que la moindre infériorité

p.132 conduit à la servitude, que vivre c'est utiliser les accidents du sol, du climat, des produits, de la race, de manière à tenir tête au plus proche voisin, et à rendre inutiles tous les avantages qu'il obtient de la nature. Le sol permet-il à l'ennemi de s'organiser par la centralisation, de siéger dans une capitale formidable, de diriger une armée aguerrie ? On lui opposera la ressource des fédérations, on l'entourera de républiques, de petites principautés, de barbares quasi-nomades, de peuples pasteurs qui le harcèleront, le harasseront et le fatigueront par le nombre des combattants, par la variété des résistances, par l'inertie la plus sournoise qui déjouera son besoin d'agir, de civiliser, de séduire, d'entraîner. L'ennemi se rend-il formidable par la liberté ? On l'observera et on tâchera de conquérir les avantages du silence mystérieux, de l'obéissance passive, des armées permanentes ; on s'habituera à endurer les caprices du despotisme, compensés par des victoires en rase campagne, par la gloire de la monarchie, par la richesse du territoire étendu, et la monarchie parviendra ainsi à rendre vaine la sagesse des peuples condamnés aux discussions, aux parlements, aux révélations scandaleuses, à la discorde étalée en plein jour, érigée en système.

Il en résulte que les peuples s'organisent en sens inverse l'un de l'autre, qu'à côté de la tradition unitaire des Perses on voit sans cesse la fédération républicaine des Grecs ; la libre Angleterre combat constamment l'absolutisme français, et la monarchie française rivalise

depuis des siècles avec la fédération germanique, avec les États p.133 de Hollande, des Flandres, du Brabant, de la Suisse. Au sein même de chaque fédération, on découvre une foule de subfédérations, de ligues entourant des royaumes. Enfin chaque ligue subalterne contient aussi son ver rongeur, sa ville menaçante, comme Thèbes, qui subjuguait la Béotie, comme Zurich, où Guillaume Tell était déclaré traître à la Suisse.

Les formes tendent à s'alterner avec la régularité du blanc et du noir sur le damier ; les montagnes, les fleuves, les déserts, les golfes, les accidents du sol ne font que multiplier les contrastes dans les détails, toujours dominés d'ailleurs par la loi générale qui nous fait passer de la France unitaire à l'Allemagne fédérale, à la Russie encore unitaire, à la Tartarie livrée aux ligues, à la Chine organisée par le despotisme, en présence du Japon, terre de liberté. Quand le commerce déplace les richesses et quand les gouvernements se transforment, alors les contrastes se transforment à leur tour. Les unités deviennent des fédérations et les fédérations des unités. Alors l'empire romain, décomposé, laisse paraître l'unité au nord chez Attila, chez Charlemagne, tandis que la Pologne unitaire jette les Russies dans des conditions fédérales.

Ainsi, la Terre est couverte de peuples organisés en sens inverse l'un de l'autre. Albuquerque, en arrivant au Ceylan, y découvre deux peuples : les Bedas, établis au Nord, nus, partagés en tribus obéissant chacune à un chef, liguées, libres, ennemies de tout étranger ; et les Chingalais, au Midi, petits, policés, avec des prêtres bouddhistes, fourbes, faux, cérémonieux et unitaires. Au p.134 Bengale, Bismapore fait opposition aux autres régions. Les Péruviens, doux jusqu'à la lâcheté, incapables d'opposer la moindre résistance aux forbans titrés de l'Espagne, confinaient avec les Chiliens intrépides, dit Pietro Martire, habitués au travail, indépendants, et non seulement ils se défendirent, mais ils attaquèrent les Espagnols, si bien que le Portugais Ercilla, leur ennemi, au service de l'Espagne, les célébrait dans son poème, véritable jeu de lumière, incontestable reflet de la haine de Lisbonne pour Madrid, transportée dans les scènes de la vie américaine. Pietro Martire signale le même contraste à la Havane, où le peuple était

peureux et affable, tandis que les îles voisines appartenaient à d'affreux anthropophages.

Les navigateurs découvraient une foule de rivalités dans les archipels de l'océan Pacifique ; fêtés à Othaïti et aux îles des Amis, une race cruelle et sanguinaire les attaquait à Sandwich. Ils trouvaient des habitants sales, pauvres et pudiques à la Nouvelle-Zélande, propres, attrayants et voluptueux à Taïti. La Nouvelle-Calédonie, aux terres hostiles et désolées, s'opposait également aux Nouvelles-Hébrides, luxuriantes et hospitalières, mais livrées à l'anthropophagie.

On dit assez souvent que l'Asie et l'Afrique sont les régions du despotisme, mais on voit la liberté dans les diètes tartares, dans la fierté de la Corée, dans les fédérations de l'Inde, dans le conseil du Japon. En Afrique, Loango, le pire des royaumes, est électif, avec un roi qui peut tuer ou vendre ses ministres, mais qui n'oserait pas p.135 toucher à ses vassaux de Cabende, Malembo, Sogora et Magouba.

Qu'on lise Cadamoste.

« De mon temps, dit-il, le roi du Sénégal, nommé Zucolin, avait été élu par des seigneurs habitués à chasser leurs rois dès qu'ils leur déplaisaient. Son pouvoir n'est ni sûr, ni durable comme celui du Soudan du Caire... Les Barbacini et les Sereri, ajoute-t-il, n'ont aucun roi, aucun maître ; ils se bornent à honorer tantôt l'un, tantôt l'autre, d'après les qualités et la fortune des hommes.

Enfin, d'après Virey, les peuples chez lesquels on faisait la traite obéissaient à des gouvernements les uns despotiques, les autres libres comme l'État aristocratique d'Alchantie.

La nécessité des équivalences est telle que les races aboutissent aux plus extravagantes juxtapositions. Les Circassiens, les Cachemiriens, les Géorgiens, qui sont les plus beaux des peuples, confinent avec les hideux Kalmouks ; les Tartares Nogais rabougris, avec les Lapons ; les Samoïèdes sont en présence des grands et lymphatiques Finnois, les stupides Groënlandais des blonds Irlandais.

« Rien ne surprend plus l'émigrant européen, dit le docteur Pichéring, que la différence physique entre les habitants de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande, deux régions situées entre les mêmes parallèles.

L'Inde réunit sous le même climat les Rohillas blonds, les Népauliens à la peau jaune et les Bengalais brun foncé ; à Bornéo, les Malais habitent la côte, et les Duryaks l'intérieur.

« La plupart des voyageurs qui ont parcouru l'océan Pacifique, dit Jacqueminot, témoignent de la surprise qu'ils éprouvent en voyant deux peuples aussi p.136 voisins et aussi différents que les Rougans et les Vittiens.

La juxtaposition la plus frappante est celle des Pecherais et des Patagons sur la Terre du Feu. Les premiers, petits, maigres, vilains, avec des femmes hideuses, presque nus et teints en rouge et en blanc ; les seconds, hauts de plus de six pieds, carrés, vigoureux, avec des membres épais, un caractère doux et hospitalier. La première fois que Magellan les découvrit, en 1519, l'Europe les connut à travers les exagérations de Pigafetta, qui parlait de perles grosses comme des œufs et d'oiseaux qui entraient dans la bouche des baleines pour leur manger le cœur. Un siècle plus tard, les voyageurs donnaient aux Patagons des palais corinthiens et la stature des Titans, en réservant aux Pecherais leurs ennemis la taille des pygmées. Toujours est-il qu'après toutes les rectifications, le contraste ne saurait être plus considérable, ni conduire à deux genres de vie plus opposés. Les

La juxtaposition la plus frappante est celle des Pecherais et des Patagons sur la Terre du Feu. Les premiers, petits, maigres, vilains, avec des femmes hideuses, presque nus et teints en rouge et en blanc ; les seconds, hauts de plus de six pieds, carrés, vigoureux, avec des membres épais, un caractère doux et hospitalier. La première fois que Magellan les découvrit, en 1519, l'Europe les connut à travers les exagérations de Pigafetta, qui parlait de perles grosses comme des œufs et d'oiseaux qui entraient dans la bouche des baleines pour leur manger le cœur. Un siècle plus tard, les voyageurs donnaient aux Patagons des palais corinthiens et la stature des Titans, en réservant aux Pecherais leurs ennemis la taille des pygmées. Toujours est-il qu'après toutes les rectifications, le contraste ne saurait être plus considérable, ni conduire à deux genres de vie plus opposés. Les