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Équation du mouvement

1.4 Modélisation du comportement de la mousse

1.4.2 Équation du mouvement

On considère un projectile en chute libre dans une mousse. Il n’est soumis qu’à son propre poids et à l’action de la mousse. Pour décrire sa dynamique d’enfoncement il nous faut donc résoudre le système suivant :

& MdV

dt = M g − πd 2σ

1.4. MODÉLISATION DU COMPORTEMENT DE LA MOUSSE 27

Fig. 1.17 – Principe de l’intégration des équations du mouvement. L’échantillon de mousse est

divisé par la pensée en tranches horizontales d’épaisseur d. Ces tranches se comportent comme des cellules de Kelvin-Voigt indépendantes les unes des autres. Quand la bille pénètre dans une de ces cellules, celle-ci se comprime comme un ressort de raideur E. Dès que la bille a fini de traverser la couche, elle relaxe avec une viscosité ηe.

Limite des grandes vitesses

Juste après l’impact, la première phase du mouvement se fait à grande vitesse, donc à grand taux de déformation ˙ǫ = V/d. Dans l’expression de σ, le terme élastique, borné par E est alors négligeable devant le terme visqueux :

σ ∼ ηe˙ǫ ∼ ηeV /d (1.14)

Expérimentalement, nous avons vu que la vitesse pouvait varier de 30 m/s à 0 en 15 ms environ. Les accélérations mises en jeu sont donc de l’ordre de 30/0,015 = 2000 m/s2. Le poids des particules, et a fortiori la poussée d’Archimède, sont donc

négligeables dans cette phase du mouvement. Si l’on remplace dans l’équation du mouvement σ par l’expression obtenue en (1.14), on a pour des billes légères :

MdV

dt ∼ −πd

2η

eV /d (1.15)

Ceci mène à V = V0 e−t/τ, le comportement observé expérimentalement, avec :

τ = M πdηe = ρsd 2 6ηe (1.16) Pour savoir quelle viscosité équivalente utiliser dans le modèle, on mesure le temps

28CHAPITRE 1. AMORTISSEMENT DANS UNE MOUSSE TRIDIMENSIONNELLE caractéristique de ralentissement sur la courbe expérimentale, qui vaut 4,8 ± 0,4 ms. Cela correspond à une viscosité équivalente :

ηe =

ρsd2

6τ = 760 ± 30mPa · s (1.17) A titre de comparaison, la viscosité du liquide moussant vaut un peu moins de 2 mPa·s, quant à celle du gaz, elle est évidemment bien plus faible : de l’ordre de 10−2

mPa·s. Nous reviendrons en fin de chapitre sur cette valeur étonnante de la viscosité de la mousse, bien plus élevée que celles des fluides qui la composent.

Grâce à cette valeur nous pouvons calculer un nombre de Reynolds qui nous per- mettra de discuter la pertinence de ce modèle visqueux.

Re ∼ dV ρη

e

En effet nous avons choisi cette description a priori, sachant qu’elle nous permettrait d’expliquer une décroissance exponentielle de la vitesse en fonction du temps, mais elle n’est valide que si le nombre de Reynolds est faible pendant toute l’expérience. En utilisant la valeur de ηe provenant des données expérimentales, on trouve Re ∼

10 au moment de l’impact. Le mouvement commence donc à Re intermédiaire et, comme la vitesse décroît ensuite extrêmement vite, se poursuit à bas Re. L’hypothèse d’une dynamique visqueuse est donc légitime.

Limite des basses vitesses

Dans le cas où la vitesse est faible, alors le taux de cisaillement l’est aussi, et c’est cette fois le terme élastique qui va dominer dans l’expression de la contrainte :

σ = Eǫ + ηe

V

d ∼ Eǫ (1.18)

La deuxième loi de Newton s’écrit alors : MdV

dt = M g − πd

2σ (1.19)

Or, comme le taux de déformation est proportionnel à la vitesse, on peut faire disparaître V de l’équation et exprimer l’accélération en fonction de ǫ :

MdV

dt = M d d2ǫ

dt2 (1.20)

1.4. MODÉLISATION DU COMPORTEMENT DE LA MOUSSE 29 d2ǫ dt2 + ω 2ǫ = g/d (1.21) avec ω =!πdE M = ! 3E

4ρsd2, ce qui correspond à une période :

T = 2π ω = 2π

' 4ρsd2

3E (1.22)

La période des oscillations observées dans nos expériences est de 21 ms pour une bille de polypropylène de 5 mm de diamètre. On peut déduire de (1.22) un module élastique de la mousse : E = 2 3π 2ρ s d2 T2 (1.23)

On trouve alors, à partir des données expérimentales, E ≃ 300 Pa. Comme nous avons attribué la réponse élastique de la mousse à l’action des bulles déformées qui retournent à leur géométrie initiale, nous devrions trouver un module élastique proche de la pression de Laplace dans les bulles. Celle-ci s’écrit ∆P = 2γ/R, et vaut 2500 Pa pour les bulles de rayon moyen. Mais pour les plus grosses des bulles visibles sur la figure 1.3, la pression de Laplace est plutôt de l’ordre de 300 Pa. De plus, la valeur de 300 Pa est également en accord avec les expériences de rhéométrie de Gopal et Durian, qui trouvent un module élastique constant pour un taux de cisaillement compris entre 10−2 et 10 s−1 et faiblement croissant au-delà de cette

limite [32]. Il semble donc légitime d’expliquer les oscillations des pendules par la relaxation des bulles comprimées.

En lançant sur la mousse des pendules de taille et de densité variées, puis en mesu- rant la période de leurs oscillations, nous pouvons vérifier expérimentalement la loi d’échelle prédite pour T :

T ∼(ρsd2/E = d(ρs/E (1.24)

Pour chaque lancer, on mesure la période d’oscillation du pendule sur la vidéo et on calcule le temps τ = (ρsd2/E en utilisant la valeur de E déterminée ci-dessus.

Lorsqu’on compare ces deux grandeurs, on obtient le graphe représenté sur la figure 1.18 : la proportionnalité entre les deux est bien vérifiée. Ceci montre que la période des oscillations est elle aussi fixée par la taille du projectile.

Vitesse critique

On peut enfin comparer l’importance relative des deux termes présents dans l’ex- pression de σ : on a toujours Eǫ < E, donc pour que le terme visqueux domine, il suffit d’avoir ηe˙ǫ > E, ce qui donne une vitesse critique :

30CHAPITRE 1. AMORTISSEMENT DANS UNE MOUSSE TRIDIMENSIONNELLE

Fig. 1.18 – Période d’oscillation des pendules, en fonction des caractéristiques de la bille et de

l’élasticité de la mousse. La prédiction (1.24) est tracée en ligne droite sur la figure.

Vc ∼

Ed ηe

(1.25) Avec les valeurs numériques typiques de nos expériences, on trouve Vc ∼ 1 m/s.

Cette valeur est en accord avec les observations expérimentales, puisque c’est vers 1 m/s qu’on observe le changement de pente de la courbe 1.11.