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La traduction littérale du mot épouse répond à la formulation suivante : « une

personne liée à une autre, par le mariage »,92 cette appellation est considérée comme légale par les différentes constitutions.

Pour Jean Giraudoux : « L’amour d’une épouse ressemble au devoir ».93

Il serait difficile de dépeindre une épouse, si ce n’est l’associer à l’endurance. Dans quelques cellules familiales maghrébines, les jeunes filles lavent, chaque soir, les pieds sales de leurs frères pour préparer celles-ci à leur destin d’épouse :

« Remplacez donc l’épouse-bonne-à- tout- faire par une employée de

maison rémunérée et l’énorme somme de tâches accomplies par la femme chez elle, prend ses titres de noblesses et s’insère dans le marché. »94

Dans La Scaléra, Bakhaï associe l’épouse aux différentes tâches pénibles. La femme devait se lever de bonne heure pour préparer le pain, puiser l’eau dans le puits, allumer le feu servant à la cuisson du pain traditionnel, chose qui demande assez d’efforts que l’homme seul est capable de faire. Mais malgré sa faible constitution physique, elle était dans l’obligation d’exécuter ces tâches assez pénibles :

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HUGO, Victor. OP ?CIT 92

Paul ROBERT. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française. société du nouveau

Littré, Paris, 1978, p.676.

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Op,cit, p. 676. 94

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« En plus de la corvée d’eau, il y avait la corvée de bois. On ramassait les branches et les brindilles qu’il fallait choisir bien sèches pour que le feu prenne. […] Les femmes allumaient le feu. C’était leur première tâche de la journée. […] Les vrais repas et les bonnes choses, c’était pour les hommes. » La Scaléra, p. 16.

Malgré tous les efforts fournis pour satisfaire les besoins de sa famille, la primauté revient à l’homme. Elle avait l’obligation de bien nourrir son homme en le faisant manger un repas copieux. Les bonnes choses étaient réservées à l’homme. Cela traduit la supériorité masculine dans l’imaginaire social.

Dans les unions conjugales édictées par le christianisme, par l’Islam dans les vastes périmètres de la (chari’aâ) ou dans les préceptes du judaïsme, la femme est un être que l’on ceint de protection.

Dans toutes les religions et voyances, la présence féminine jouit d’une considération, d’une importance. Il serait allégorique de figer la femme dans un vitrail « d’être protégé » et manifestement faible. L’épouse de Si-Tayeb dans Dounia est l’image de l’être protégé qui bénéficie de toutes les commodités de la vie vu la vie aisée qu’elle mène. Mais la richesse ne représente pas le bonheur :

« Douce et timide Zahra ! Elle n’avait pas prononcé une seule parole depuis le départ ! Dounia aimait bien la femme de son père, elle n’aurait su dire pourquoi, mais elle lui faisait de la peine. Peut-être à cause de son trop grand effacement, de sa trop grande soumission. Zahra n’exigeait rien, n’imposait rien, ne criait jamais, ne riait pas aux éclats. Zahra n’était pas la maitresse dans la maison de Si-Tayeb. On se demandait même si elle aspirait à jouer ce rôle. Pourtant, mère de deux mâles, petite- fille di caïd des Ounazera. » Dounia, p. 34.

Nous sommes ici face à l’image de la soumission de la femme, une épouse qui vit à l’ombre de son époux en respectant ses ordres et vivant sans passion malgré son jeune âge. Soulignons le rôle des alliances entre familles qui jouent dans la

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structuration du tissu communautaire et le rôle que la communauté, à son tour, joue par son poids moral et culturel sur la stabilité et l’équilibre de la famille.

Dans la société amazighe, l’égale de l’homme, a pris un tout autre chemin. Elle fut femme et détentrice de règne social, au sein de la communauté. D’allure puissante et dirigeante, l’épouse amazigh ne répondait pas au rôle d’inférieur qu’on tenta de lui assigner : « Elle a su, en quelques années, devenir le véritable chef de notre tribu. »

Izuran, p. 182.

Du rôle de chef de tribu à l’époque dans la société amazighe d’antan, elle passe au rang d’un être inférieur après avoir perdu son pouvoir. L’exemple suivant de

Mimouna dans La Scaléra en est une preuve:

« Le mariage est toujours difficile à supporter au début ; et après ça

s’arrange, la femme prend de plus en plus d’importance avec l’âge. Une femme ne doit pas compter sur ses parents mais sur son mari. » La Scaléra, p. 112.

La société romaine, présente au Maghreb, colonisatrice des terres amazighes, rappelle, à bien des égards la société occidentale qui en a hérité.

Le mariage union sacrée et légitimée par un acte communal, véritable charnière nécessaire à maintenir le lien conjugal, est cependant, parfois bafoué, l’exemple de

Mimouna dans La Scaléra le montre bien. Mimouna, une femme déçue après son

mariage le crie fort : « Mon mariage avec Mohamed a été sans doute la période la

plus difficile de ma vie. Tant d’années après, je n’y pense jamais sans un serrement de cœur. » La Scaléra, p. 105.

Les violences matrimoniales sont souvent ce qui advient après quelques années, quelques mois parfois quelques jours après le mariage. La maltraitance et l’humiliation ébranlent cette union et l’anéantisse et l’épouse en garde un goût de fiel.

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