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Chapitre 3 Méthodologie de recherche

1. Échantillon et méthode d’échantillonnage

1.1. Explication du choix

Puisque l'étude vise à connaître les perceptions des usagers, la collecte de données primaires pour tenter de répondre à la question de recherche a été faite directement auprès des auditeurs des radios d'opinion. Ces radios ont été identifiées dans le précédent chapitre décrivant le cadre théorique de la recherche. Les deux principales stations de la ville de Québec spécialisées dans la talk radio (à l'américaine) aussi appelée radio d'opinion (Lemieux, 2012 ; Giroux et Sauvageau, 2009), identifiées par Giroux et Sauvageau en 2009, sont CHOI Radio X et FM93.

Selon les propositions de recherche qui ont été formulées au précédent chapitre, il s'agit de connaître et comprendre l'adhésion des auditeurs, leur fidélité ainsi que leur niveau d'engagement dans l'écoute de la station (discussion informelle avec leur entourage de propos entendus, interventions en direct sur les ondes). Nous voulions aussi mettre en parallèle les témoignages recueillis avec les résultats d’études sur les auditeurs des talk radio conservatrices américaines comme le Rush Limbaugh Show. Il nous apparaissait donc indispensable de nous adresser à des auditeurs réguliers de l’une ou l’autre station (ou les deux) pour obtenir des données fiables et pertinentes.

Pour sélectionner les participants, nous avons constitué un échantillon de type intentionnel, non probabiliste, en sélectionnant les interviewés sur la condition qu'ils consomment les radios d'opinion CHOI Radio X et FM93 sur une base régulière, c’est-à-dire au minimum deux fois par semaine, ce seuil ayant été fixé dans les études déjà effectuées sur le sujet

(Turow, Cappella et Jamieson, 1996 : 3, 12). Les usagers interrogés sont des habitués de ces radios et peuvent avoir même participé en appelant l’une ou l’autre station pour discuter directement avec les animateurs.

1.2. Description de la population de référence de la recherche

À la suite des remarques de Sears et Freedman (1967) concernant les caractéristiques sociodémographiques des consommateurs des médias et l'influence possible que celles-ci pourraient avoir sur le choix de l'exposition à un média, nous allons présenter les profils d’auditeurs de la radio identifiés par les recherches effectuées sur le sujet, à la fois aux États-Unis et à Québec.

1.2.1. Caractéristiques des auditeurs américains

Les résultats de sondages analysés par Gaziano (1988) identifiaient deux groupes d'usagers critiques des médias aux États-Unis. Précisons que leurs perceptions négatives s’appliquent aux médias en général plutôt qu'à leur média de prédilection. Le premier groupe est caractérisé par un fort niveau d'éducation, des revenus élevés, une forte consommation médiatique, une forte connaissance et une grande expérience des médias ainsi que par des attitudes conservatrices. L'autre groupe se situe, lui, à l'opposé de l'échelle socio- économique. Il est moins éduqué, a moins de connaissances des médias et des grandes questions de société. Lee (2010) confirme ces informations : le cynisme serait lié à un haut niveau de conservatisme et à une forte adhésion au Parti républicain. Les auditeurs de Limbaugh sont, eux, plus conservateurs (70%) et plus républicains (61,4%) que les auditeurs des autres talk-shows conservateurs, comme ceux de Sean Hannity ou Bob Grant (47,8% conservateurs et 44,8% républicains) (Turow, Cappella et Jamieson, 1996 : 13). Les auditeurs de Limbaugh sont plus concernés par les valeurs de sécurité, de tradition et de conformité (sécurité de la famille, sécurité nationale, ordre social, propreté, harmonie, stabilité) que les auditeurs de talk-shows libéraux (Lyons, 2008 : 153). Ce sont d'ailleurs des sujets souvent évoqués et mis en valeur par leur animateur-vedette. Les auditeurs de la PTR en général sont majoritairement des hommes (69.2%) et à 90.5% des Blancs.

they can listen to the radio while commuting to and from work, unlike those who are unemployed » (Tsfati, 2002 : 435).

Enfin, des similarités entre les auditeurs se retrouvent en termes de participation politique, d'emploi des médias, de sens de l'efficacité politique, de conscience des questions de société, de suivi de la politique, de connaissance personnelle assumée et de connaissance effective des questions politiques (Turow, Cappella et Jamieson, 1996 : 32 ; Hofstetter et al., 1999 : 355).

1.2.2. Caractéristiques des auditeurs québécois

Les recherches et sondages ont montré que les auditeurs des radios d'opinion de Québec étaient en majorité des hommes et en grande partie âgés entre 18 et 34 ans (Marcoux et Tremblay, 2005 ; Lemieux 2012 ; Couture et Fiset, 2005). Il s'agit principalement d'hommes, à 66%, politiquement conservateurs. Les recherches ne s'accordent pas toutes concernant la catégorie socio-professionnelle des auditeurs. Pour Marcoux et Tremblay et Lemieux, les auditeurs sont des jeunes hommes au statut d'emploi et au niveau de vie précaires par rapport à la population totale de Québec qui est en grande partie constituée de fonctionnaires. Ils sont employés dans le secteur privé inférieur, ont un faible taux de syndicalisation, une faible sécurité d'emploi et peu d'options de promotion (Marcoux et Tremblay, 2005 : 4). Ils appartiennent à la classe moyenne inférieure. Quant à ceux qui font encore des études, ils se dirigent vers le même type d'emploi, selon les chercheurs. Leurs habitudes de vie sont liées à celles de la génération X qui baigne dans la société de loisirs et de consommation à laquelle ils ne peuvent pas accéder complètement. Ce sont des individus à forte conscience individuelle (Couture et Fiset, 2005 : 1). Ils sont de grands consommateurs d'information et s'informent par d'autres biais que la seule radio d'opinion, lisent le Journal de Québec, regardaient TQS (en 2005). Ils choisissent d'autres médias privés (Marcoux et Tremblay, 2005 : 5). La recherche de Giroux et Sauvageau (2009) ajoute également un pourcentage significatif, un peu plus de 30% de « cols blancs », professionnels et cadres supérieurs, parmi les auditeurs.

Il semble donc que le genre des auditeurs, de même que leur appartenance politique, leur propension à consommer des médias et à s'intéresser à l'actualité soient des

caractéristiques communes aux radios des deux pays. Les données concernant les catégories sociales d'appartenance pourraient également se rejoindre. Des différences pourraient s'observer en termes de tranches d'âges.

Cependant, le public lui-même ne peut être considéré comme une masse uniforme mais doit plutôt être vu comme une somme d'usagers aux connaissances différentes. C'est ce que nous allons nous attacher à prendre en compte dans notre recherche.

1.3. Le recrutement

Pour des raisons pratiques d'obtention du consentement et parce que l'objet de la recherche ne porte pas sur des personnes mineures, nous avons recruté des personnes adultes, à savoir de plus de 18 ans, qui est l'âge légal de la majorité au Québec. L’échantillon se voulait diversifié, en cherchant à être le plus représentatif possible de l'éventail des auditeurs qui écoutent régulièrement ces stations de radio, en termes d’âge, de sexe et de catégorie sociodémographique. Les études réalisées sur le thème des radios ont été utilisées comme base pour définir un panel représentatif.

Tout d'abord, les recherches et sondages ont montré que les auditeurs des radios d'opinion de Québec sont en majorité des hommes (66%) et en grande partie des jeunes âgés entre 18 et 34 ans (près de 60%). L’audience est ensuite constituée à plus de 25% par les 35-44 ans (Marcoux et Tremblay, 2005 ; Giroux et Sauvageau, 2009). Pour joindre une partie de la tranche la plus jeune du public, nous avons utilisé le courriel de recrutement rejoignant les étudiants et les membres du personnel de l'Université Laval (voir annexe A).

Nous avons tenté de joindre les 18-34 ans qui n’étaient pas étudiants par le même biais que les travailleurs. Les auditeurs des radios parlées de Québec sont typiquement employés dans le secteur privé inférieur, dans les domaines techniques, des ventes et des services (Marcoux et Tremblay, 2005 : 14). Pour atteindre cette population, nous avons procédé à un affichage annonçant l’étude dans différents supermarchés de quartiers ciblés de Québec, ainsi que dans des salles de sport et magasins de rénovation, endroits étant susceptibles d’accueillir la clientèle cible. L’affiche précisait également en détails le but de l’étude, la durée, la compensation offerte et invitait les personnes intéressées à y participer (voir

des habitants rejoignait celui des auditeurs des radios d’opinion et où les résultats électoraux correspondaient aux idées véhiculées par ces radios, notamment dans les quartiers populaires en périphérie de la ville et dans la banlieue de Québec, y compris la rive sud. Une annonce a également été postée sur Reddit, plateforme de discussion en ligne, dans un forum intitulé « Québec » qui compte 44607 membres (voir annexe C). Cette forme de recrutement est suggérée par l'étude de Shatz (2017).

1.4. Des incitatifs et conditions favorables

À l’instar des conclusions de l'étude de Marcoux et Tremblay (2005) sur les comportements de ces auditeurs qui sont des adeptes de la société de consommation, nous avons convenu que des incitatifs seraient utilisés dans les annonces pour pouvoir obtenir un nombre suffisant de participants. Les récompenses offertes étaient des cartes-cadeaux placées dans des enveloppes à tirer au sort à la fin de chaque entrevue.

Pour des raisons pratiques et pour offrir aux participants un environnement favorable à la discussion informelle, il a été proposé, en fonction de la disponibilité des participants, de les rencontrer dans un lieu de leur choix dans la ville de Québec, à la condition que l'endroit soit tranquille et peu bruyant. Le but de la recherche étant de recueillir les perceptions des participants et donc de faciliter leur libre expression, des conditions favorables devaient être créées. Rappelons que les radios d’opinion et par extension leurs auditeurs n’ont pas, à Québec, une perception très positive de l’Université Laval, et plus particulièrement des chercheurs en sciences humaines et sociales. Au vu de cette contrainte, la stratégie de recrutement se voulait la plus ciblée possible pour parvenir à toucher les populations visées mais cherchait aussi à faire tomber une éventuelle résistance à la participation.