• Aucun résultat trouvé

Article pp.159-164 du Vol.1 n°1 (2003)

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Article pp.159-164 du Vol.1 n°1 (2003)"

Copied!
6
0
0

Texte intégral

(1)

. '%674'%4+6+37'

4GICTFUETQKUÃUUWTNCHQTOCVKQPQWXGTVG GV´FKUVCPEG

Accompagner des formations ouvertes

Collectif de Chasseneuil (2001)

Conférence de consensus, Paris, L’Harmattan

Expérience rare et passionnante, pendant quatre mois, de décembre 1999 à mars 2000, sous la responsabilité scientifique de Philippe Carré, quinze spécialistes français de la Formation ouverte et à distance (FOAD) confrontent travaux et réflexions. Ils débutent par des contributions individuelles, puis se lisent et se commentent mutuellement. Enfin, au cours d’un séminaire de trois jours, ils rédigent un texte de synthèse1. L’ouvrage comprend deux présentations introductives, leurs contributions et réactions ainsi que le texte final. Le tout est sous-titré : Conférence de consensus et signé du nom que, pour la circonstance, le groupe se donne : Collectif de Chasseneuil.

La question de départ est la suivante : quels sont les dispositifs et procédures qui favorisent l’apprentissage autodirigé des adultes en FOAD ? Cette question dérive d’un constat : celui du décalage entre contextes et réalisations.

D’un côté, les contextes n’ont jamais été aussi favorables au développement de la FOAD. Sous sa forme traditionnelle, celle des stages conventionnels, l’enseignement des adultes connaît un effet « ciseau » : coûts croissants pour performances décroissantes. Incapable de répondre à la diversification des besoins professionnels, il ne correspond pas non plus à la dynamique sociale privilégiant dorénavant individualisation, personnalisation et autonomisation. Par ailleurs, les technologies d’information et de réseau sont omniprésentes au travail et à la maison.

Quoi de plus logique, dès lors, que de faire appel aux secondes pour rénover les structures et pratiques du premier ?

De l’autre côté cependant, faiblesse et médiocrité des réalisations sautent aux yeux : technologies sous-employées ; offre de formation morcelée ; opérations

1. Leurs travaux ont bénéficié du soutien de quatre organismes : l’Association pour la promotion des recherches et des innovations en éducation et en formation, la Direction générale de l’enseignement et de la recherche du ministère de l’Agriculture et de la pêche, le Forum Français pour les formations ouvertes et à distance et l’Observatoire des ressources pour la formation.

(2)

embryonnaires, fréquemment arrêtées avant terme, rarement évaluées et validées.

Les rapports qui en rendent compte juxtaposent observations décontextualisées, jugements de valeur et considérations politico-prospectives irréalistes. Le plus souvent, ils sont entachés de graves confusions notionnelles et ne se prêtent à aucune systématisation. On parle donc beaucoup de la FOAD, mais l’on n’en fait guère.

Peut-être en parle-t-on même d’autant plus que l’on en fait moins.

Tel est le constat qui motive le Collectif de Chasseneuil et en détermine implicitement les objectifs : étudier les raisons du décalage, introduire de la clarté dans un univers si embrouillé et identifier les facteurs de réussite à partir d’une réflexion sur l’accompagnement des apprenants. C’est justement là le maillon faible de la FOAD.

Faut-il pour cela passer par la « conférence de consensus » ? Assurément, répondent P. Carré et la coordinatrice, C. Degallaix. Pour notre part, nous ne sommes pas de leur avis. Du moins une pièce maîtresse du protocole fait-elle ici défaut : la participation des représentants de la société civile. Le principe de la conférence de consensus n’est pas, en effet, de communiquer au grand public des résultats préalablement discutés entre experts. Il est de promouvoir la concertation entre ceux-ci et les citoyens. Et, contrairement à ce qui est suggéré p. 32-33, la diffusion d’un rapport dans « le milieu généraliste de l’éducation », via colloques, articles et ouvrages, ne tient pas lieu de débat démocratique.

N’insistons pas, cependant. Ce qui compte, c’est qu’à la faveur d’une organisation efficace – conférence de consensus ou non –, des spécialistes ont examiné l’état du champ, dressé un bilan des expériences, établi une liste d’acquis et formulé plusieurs interrogations importantes. En soi, la performance doit être saluée.

Comme, de surcroît, état des lieux et propositions sont de grande qualité, c’est d’eux dont nous rendons maintenant compte.

Question de définition pour commencer. Que désigne « formation ouverte et à distance » ? B. Blandin (p. 43 sqq.) et plusieurs auteurs à sa suite se réfèrent à la Commission européenne (1994) : « Apprentissage ouvert : toute forme d’étude dont certains aspects souples la rendent plus accessible (...) Apprentissage à distance : toute forme d’étude qui n’est pas sous le contrôle permanent d’un directeur d’études ». Or, d’autres membres du collectif, dont A. Jezegou (p. 69-70), émettent des réserves sur la pertinence de ces formulations. Voici ce qu’à notre tour, en accentuant et prolongeant les positions en présence, nous retenons de ces stimulantes tentatives de délimitation du champ.

Les critères de la Communauté européenne (qui reprennent d’ailleurs en partie ceux de la Délégation à la formation permanente de 1992) ont le mérite de la simplicité. L’accent y est mis simultanément sur la rupture de l’unité de lieu entre formateurs et formés et sur le maintien des fonctions de médiation-prescription assurées par l’institution. Le cadre n’est donc pas celui de l’autodidaxie

« intégrale » ; l’enseignement reste formel (Carré, p. 127). Cependant, en amont et

(3)

en aval, l’ouverture des dispositifs est assurée par leur flexibilité. Idéalement, les apprenants peuvent solliciter toutes les ressources nécessaires (Coulon, p. 128) ; ils doivent également pouvoir négocier et renégocier les termes du contrat pédagogique (Choplin, p. 128). Idéalement toujours, l’institution facilite leur navigation et se doit d’être assez réactive (Tétart, p. 110) pour produire des ressources quand celles qui sont disponibles ne suffisent pas (Lebatteux, p. 86-87). Y concourt la régulation

« systémique », clé de voûte de la FOAD selon D. Paquelin (p. 133).

B. Blandin reprend ces critères dans un tableau à double entrée, où se croisent présences et absences respectives du formateur et du réseau. Pas d’autodirection accompagnée quand le formateur est absent ou peu présent : cours par correspondance et autoformation en ligne. Pas de distance si aucun réseau électronique n’est sollicité : cours par correspondance et enseignement présentiel.

Ne relèvent donc de la FOAD que les applications mobilisant formateurs et réseaux, en synchrone et asynchrone : cours en téléprésentiel, télétutorat, campus virtuels, etc. Ensuite, des distinctions plus fines demandent encore à être établies, selon que les dispositifs sont plus ou moins « hybrides » (Carré, p. 137), institutionnels (Coulon, p. 138), autonomisants (Blandin, p. 161) ou « accompagnants » (Jezegou, p. 140). Quant à la place du tutorat, elle constitue un facteur d’autant plus important que, pour des auteurs comme P. Landry (p. 154), trop de tutorat renforce la dépendance du formé.

Que reprocher à cette classification et aux définitions qui l’inspirent ? D’abord, l’un des deux critères sur lesquels elles reposent est celui de la présence/absence du formateur. Or, aujourd’hui, des systèmes techniques stimulent, évaluent et conseillent les apprenants en dehors de toute intervention humaine. Certes, les agents intelligents ne remplacent pas tuteur, enseignant ou accompagnateur. Ils en simulent toutefois partiellement les initiatives. Il n’y a donc plus de raison de donner l’exclusivité à ce critère. Il y en a d’autant moins qu’en sont du même coup sous- estimées les interactions entre apprenants, pourtant déterminantes dans la réussite de l’apprentissage autodirigé (Weidenfeld, p. 122-123).

Autre inconvénient, la classification établit un clivage entre deux familles d’applications, celles qui sont ouvertes et à distance et celles qui ne le sont pas.

T. Langouet (p. 77-84) les oppose d’ailleurs explicitement lorsqu’il met face à face les deux modèles de l’« ouvert » et du « conventionnel ». Cependant, la réalité est plus complexe. Ne serait-il donc pas pertinent de parler de degrés d’ouverture et de mise à distance plutôt que de « formation ouverte et à distance » ?

Dernier inconvénient, la classification ne dit rien de ce qui se passe entre formateurs et formés. Or, à distance, des formations peuvent fort bien être magistrales et transmissives, tandis que, présentielles, elles peuvent se centrer sur l’apprenant et adopter les principes constructivistes. Au demeurant, B. Blandin le reconnaît lui-même : « En ce qui concerne les registres pédagogiques, les modes d’expression ne me paraissent pas devoir jouer un rôle spécifique » (p. 49). L’utilité

(4)

d’une classification bâtie sur ces modes d’expression s’en trouve alors significativement diminuée.

Un deuxième point ressort de la lecture du Collectif de Chasseneuil. Il a trait à la disparité des situations en matière de FOAD. Comme l’écrit P. Morin (p. 94), il est impossible d’établir « des constats et des conclusions générales ».

Particulièrement convaincant est à cet égard le tableau dressé par C. Lépineux (p. 89-93). Diversité des infrastructures : réseau grand public, universel mais bas de gamme ; réseaux d’entreprises, ciblés et moyenne gamme ; réseaux des universités et centres de recherche, à très haut débit. Diversité des points d’accès : au terminal informatique s’ajoutent borne interactive, console de jeu et, complétons-nous, téléviseur, baladeur, agenda électronique. Diversité des degrés d’individualisation et de personnalisation, que P. Landry (p. 75) illustre en citant la gradation de B. Albéro, depuis la « dominante prescriptive » jusqu’à la dominante « libre- service » en passant par les dominantes « tutorale », « coopérante » et

« autostructurée ». Diversité des situations, dont témoignent également les deux cas rapportés par M. Benaily (p. 36-42), pourtant tous les deux dans le secteur bancaire : la première formation s’adresse à des vendeurs et fait appel au télétutorat pour atténuer ce qu’il y a d’impersonnel dans un EAO traditionnel ; la seconde consiste en l’élaboration à distance d’une base de connaissances destinée à des gestionnaires de patrimoines. De l’une à l’autre, aucune commune mesure. Diversité des usagers, depuis les apprenants aguerris, virtuoses des technologies d’information et de communication, rompus à l’art de la navigation, jusqu’aux simples novices, auxquels il faut une assistance permanente. Diversité des modèles, enfin. D’un côté, explique C. Lépineux, Mc Dupont, représente la FOAD à la française : raffinement de la pédagogie, sophistication des dispositifs et choix des technologies les plus interactives. De l’autre côté, Mc Network, est le héraut de la FOAD d’outre- Atlantique : contenus standardisés, hot line 24 heures sur 24, priorité aux économies de temps et d’argent, indifférence aux questions de pédagogie, distribution assurée par un réseau de SSII. Or, au moment où Mc Network prend pied sur le marché français, qualité, individualisation, sur mesure et apprentissage autodirigé seront-ils à Mc Dupont des défenses suffisantes ?

Un troisième point à relever dans l’ouvrage a trait aux moyens de remédier à la faiblesse inhérente aux dispositifs de formation ouverte et à distance. Leur faiblesse tient, en effet, à leur manque de lisibilité pour les apprenants (Carré, p. 147). Elle vient aussi de ce que les formateurs sont privés des modes de contrôle qui valent dans les formations directives et présentielles. Il faut donc compenser la disparition du face à face sans chercher à le reproduire à distance. Aussi D. Paquelin (p. 100) insiste-t-il sur les modalités de « repérages dans l’espace virtuel » permettant à l’apprenant de trouver des réponses aux quatre questions qu’il se pose inévitablement : où vais-je ? que puis-je faire ? comment le faire ? avec qui (les pairs) le faire ? L’autonomie n’est pas un préalable. Elle se construit.

(5)

À cette construction d’autres conditions sont également nécessaires. Comme le suggère Pierre Landry (p. 131), l’on n’apprend pas spontanément à apprendre. Il y faut des métacompétences et de la motivation. De là vient qu’il n’y a pas de one best way. Au coup par coup, les dispositifs ont à tenir compte du « rapport individuel à une formation donnée, dans un contexte donné, à un moment donné » (p. 180). De là vient aussi, corrélativement, la nécessité pour l’institution d’être la plus flexible possible.

Une réserve, toutefois. À trop vouloir éviter le « sentiment d’abandon et d’isolement » (Valdès, p. 111-113), ne court-on pas le risque de tomber dans le défaut inverse : la recherche d’une transparence généralisée ? T. Langouet (p. 83) n’est guère rassurant à cet égard, lorsqu’il propose de substituer aux « contrôles formalisés » l’enregistrement d’« un certain nombre d’indicateurs indirects collectés au fil de l’apprentissage ». L’idéal du panopticon n’est pas loin. Or, un contrôle « au fil de l’apprentissage » ne vaut pas mieux que l’opacité. Bien sûr, nous n’en sommes pas là, beaucoup de paramètres échappant a priori à toute velléité d’inspection et de formalisation. Il serait regrettable, pourtant, que les formations ouvertes et à distance soient privées, ne serait-ce qu’un peu, de ce qui fait leur vertu : les apprenants y sont protégés des excès de la surveillance.

Dernier point à signaler, relatif à l’industrialisation de la formation. Même si ce n’est que timidement, une certaine reconnaissance du phénomène se fait jour : « Les dispositifs FOAD sont axés sur la prise en compte de la singularité des apprenants, ce qui n’exclut pas l’utilisation de produits industriels comme ressources » (p. 191).

Il n’est toutefois question ici que des programmes. Pour sa part, l’ingénierie « pour produire des services personnalisés adaptés à la demande » est supposée échapper à toute tendance industrialisante.

Nos auteurs tracent donc clairement une ligne de démarcation entre produits (omnibus) et services (individuels). Les premiers seraient industrialisables, alors que les seconds ne le seraient pas. Que vaut cette opposition ? Elle est pertinente si industrialisation et standardisation sont synonymes. Elle devient factice à partir du moment où, comme en témoignent les secteurs de la restauration et de la banque, des services industrialisés se montrent capables de souplesse, d’ajustement à la demande et de production sur mesure. C’est alors d’un autre modèle industriel qu’il s’agit.

Maintenir l’équivalence entre industrialisation et standardisation revient à considérer comme irréductiblement artisanale la partie essentielle de la prestation éducative : accompagnement et autres fonctions d’assistance à l’apprenant. N’est-ce pas du même coup s’empêcher de penser les évolutions affectant actuellement le cœur de la FOAD ? Celles qui, autour des plates-formes et portails, explorent les formes inédites d’une rationalisation industrielle visant à marier réduction des coûts et prise en charge personnalisée.

Telle est la limite sur laquelle bute, selon nous, la réflexion engagée par le Collectif de Chasseneuil, aussi riche et féconde soit-elle par ailleurs. Un changement

(6)

de perspective mériterait d’être exploré, dont, par défaut, cet ouvrage fait sentir la nécessité : rendre compte des modalités de l’accompagnement des apprenants à l’heure de leur technologisation et de leur industrialisation. Mais n’attend-on pas aussi d’un ouvrage qu’il stimule son lecteur en le portant au-delà de ce qui s’y trouve ?

Pierre Mœglin Université Paris 13, Maison des Sciences de l'Homme Paris Nord pierre.moeglin@wanadoo.fr

Références

Documents relatifs

Deux revues publiant des articles en français retiendront notre attention dans ce qui va suivre, la revue bilingue (anglais-français) Journal of Distance Education – Revue

<http://www.cifop.be/pour_netscape/5publ_ntf.html> (page consultée le 15/10/02) Étude des stratégies des tuteurs dans un dispositif d’apprentissage collaboratif en ligne, dans

Des études ont montré une production importante de cytokines chez les femmes enceintes qui les protégeraient contre la survenue des symp- tômes associés au paludisme malgré la

Horizon is broadening out allowing to French, Belgian and Italian experts to meet each other and giving them the opportunity to share and compare their experience

Upon the collaboration and help of the review Acta Endoscopica, some current and future aspects of endoscopic ultrasound are pre- sented in this special issue with articles o f

Pendant ces deux jours, la discussion portera non seulement sur Ie role fondamental de l'USE mais egalement sur des sujets plus specifiques et d'avant garde tels que l'apport

L ’ American Society of Anesthesiologists (ASA) a publié en 2002 une revue de la littérature démontrant une grande variabilité, d ’ une part, dans la découverte de

Ses recherches portent sur l’articulation entre la stratégie d’entreprise et le management de projet et sur la dimension narrative dans les pratiques de gestion..