• Aucun résultat trouvé

Article pp.15-35 du Vol.3 n°1 (2011)

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Article pp.15-35 du Vol.3 n°1 (2011)"

Copied!
22
0
0

Texte intégral

(1)

doi:10.3166/r2ie.3.15-35 © 2011 Lavoisier SAS. Tous droits réservés

Intelligence économique et créativité au sein de la PME/PMI :

une compétence offensive à organiser

Par Yann Bertacchini

a

et Catherine Strasser

b

a Maître de Conférences, H.D.R, Université du Sud Toulon Var, France, bertacchini@univ-tln.fr

b Doctorante, Université du Sud Toulon Var, France, cstrasser@orientcom.com

Résumé

Les PME et PMI créent la majeure partie de la richesse nationale et des emplois, réalisent plus de la moitié des investissements productifs de notre pays. Si par leur taille, leur histoire, leur souplesse d’adaptation, elles sont souvent le creuset de l’innovation et sources d’informa- tions convoitées par la concurrence, l’acteur au sein d’une organisation structurée en mode projet créatif comme l’utilisateur de ses produits, y tient une place principale dans le mana- gement de l’information et l’émergence de nouvelles idées. La place de la veille stratégique et de l’intelligence économique dans leurs processus de développement, de diversification, d’innovation et de prise de décision n’est plus à démontrer.

Cependant si l’aspect défensif leur est devenu plus familier, l’aspect offensif se borne sou- vent à un rôle de collecte, de traitement de l’information et d’instauration de processus de veille. Le volet offensif de l’intelligence économique telle que nous l’envisageons dans notre propos a trait à la créativité en tant que support d’une intelligence compétitive et aux tech- niques publicitaires qui peuvent contribuer à définir, puis à intégrer un modèle offensif au sein des PME PMI. Un modèle qui ne serait pas l’apanage des seuls services de veille, mais à la portée de chaque acteur de l’entreprise afin qu’il puisse être source de diversification, d’innovation et de prise de décision.

Nous nous référerons à la sociologie de l’acteur réseau ou sociologie de la traduction développée par Latour, Callon et Latour (1991 et suivantes), ainsi qu’aux propositions récentes que nous avons appelé de « reverse creativity » ou les usages nouveaux et utili- sations nouvelles imaginées ou détournées de produits occupent une proposition perti- nente. Nous prendrons appui sur la méthode de création de la connaissance Nonaka et Takeuchi (1997) qui soutient que le salarié est l’acteur principal de l’entreprise car il pos-

(2)

sède les connaissances, traite l’information et interagit avec son organisation pour y faire émerger de nouvelles propositions. Enfin, nous analyserons les techniques créatives publi- citaires, et notamment la technique de la « disruption » que l’on doit au publicitaire Jean Marie Dru (1996 et 2003), et tenterons de démontrer qu’un modèle qui relierait le domaine de la « connaissance » à celui de la « créativité », servirait les objectifs tactiques et straté- giques de l’entreprise. © 2011 Lavoisier SAS. All rights reserved Mots clés : acteur, créativité, intelligence compétitive, intelligence économique, offensive, projet, stratégie.

Abstract

The breath of Creativity within SMEs/SMI organisation : from the inner potential to the competitive intelligence. SMEs and SMIs create most of our national wealth, create most of our jobs and make more than half the productive investments in our country. Al- though, thanks to their size, their history and their flexibility, they are often the melting pot for innovation and sources of information coveted by competitors, in creative project mode, it is the player within a structured organisation, as the one that uses their products, that has a major role to play in information management and the emergence of new ideas. The importance of strategic monitoring and economic intelligence in their development, diver- sification, innovation and decision-making processes no longer needs to be demonstrated.

However, although the defensive aspect has become more familiar, the offensive aspect is often restricted to gathering and processing information and introducing a monitoring pro- cess. The offensive wing of economic intelligence, as we see it in our context, takes creati- vity as a means of conveying competitive intelligence and advertising techniques that may contribute to the definition and subsequent integration of an offensive model within SMEs and SMIs. This model would be a model which is no longer the prerogative of monitoring services alone, but is within reach of each company player such that it becomes a source of diversification, innovation and decision making.

We refer to the sociology of the network player or translation sociology developed by Latour, Callon & Latour (1991 and following), and to the recent proposals that we have called « reverse creativity » or the new uses and new imagined or misappropriated uses of products which constitute a relevant proposal. We shall build on the Nonaka and Takeuchi knowledge crea- tion method (1997) which supports the scenario in which the employee is the main player in the company since he possesses knowledge, processes information and interacts with its structure in order to cause new proposals to emerge. Finally, we will analyse the creative ad- vertising techniques, the « disruption technique », in particular, for which we can thank the advertiser, Jean Marie Dru (1996 & 2003), and we will attempt to demonstrate that a model which associates the fields of knowledge and creativity, shall, in fact, be furthering the tactical and strategic objectives of the company. © 2011 Lavoisier SAS. All rights reserved Keywords : Player, creativity, competitive intelligence, economic intelligence, offensive, project, strategy.

(3)

Propos introductifs de mise en situation

Nous portons à la connaissance du lecteur que cet article s’inscrit dans une Recherche conduite dans le cadre d’une thèse de doctorat en Sciences de l’Information et de la Communication dont l’objet central porte sur l’intégration de l’intelligence économique dans un volet offensif ceci, afin de permettre le développement ou l’augmentation de la créativité au sein de Pme/Pmi dont nous présenterons les caractéristiques plus en avant dans notre contribution. Nous présenterons aussi le scénario de notre intervention ainsi que les circonstances de la rencontre. Pour cela, nous utiliserons et adapterons à notre objet central, le développement de la créativité dans la Pme/Pmi, des techniques publicitaires et notamment la disruption. Nous visons à ce que la créativité, ainsi révélée et produite dans le cadre d’une équipe organisée en mode projet, puisse être suscitée et acquise par l’organisation, en permettant aux entreprises concernées de développer de nouveaux procédés, de nouveaux produits afin d’être en mesure de maintenir, renforcer voire augmenter leur part de marché.

Dans ce paragraphe introductif, et afin de mettre en perspective notre contribution, somme toute modeste en regard des forces en présence et compte tenu des enjeux pointés, nous avons choisi tout d’abord de faire appel à trois articles pour n’en mentionner que les principaux termes, puis de recourir à la notion de destruction créatrice proposée par l’économiste Schumpeter pour poser le cadre général et introduire des mots clé ou mots jalon, illustratifs de notre démarche.

L’appel à ces contenus nous est utile pour illustrer chaque pilier de notre appareillage épistémologique et scientifique ainsi que chacune de nos hypothèses : le concept de « des- truction créatrice » (Schumpeter, 1942), cadre général destiné à positionner la créativité, la méthode de création de la connaissance Nonaka et Takeuchi (1997) qui soutient que le salarié est l’acteur principal de l’entreprise, la sociologie de l’acteur réseau ou sociologie de la traduction développée par Latour, Callon & Latour (1991 et suivantes) parce que notre objet, la créativité, relève à notre sens de la traduction-médiation, cette nécessité amplifiée par les ressources concurrentes disponibles dans les pays émergents ainsi qu’aux propositions récentes que nous avons appelé de « reverse creativity », enfin, la technique de la « disruption » que l’on doit au publicitaire Jean Marie Dru (1996 et 2003).

Lors d’une rupture de cycle, se poser les bonnes questions

Le premier extrait d’article que nous convoquons porte sur un entretien avec Sam Pitroda, ministre d’État chargé des infrastructures publiques d’information et de l’innovation d’Inde, pays émergent, publié dans le journal Le Monde daté du 9 juillet 2010. À la question du journaliste « Vous venez de participer aux rencontres du Cercle des économistes d’Aix-en- Provence qui avaient pour thème la nouvelle croissance. Qu’en avez-vous pensé ? » Voici sa réponse : « C’était intéressant mais les gens ne se posaient pas les bonnes questions.

Ils se demandent comment revenir à la situation d’avant la crise. Mais c’est impossible ! Il faut se demander comment nous organiser dans le nouvel ordre mondial ».

La créativité se répand, se partage et peut s’échanger

Le second article est daté du 17 février 2010 « La créativité bon marché des émergents profite aux multinationales occidentales » et dont Le Monde nous fournit un résumé

(4)

« De plus en plus de groupes s’appuient sur leurs laboratoires de recherche d’Asie ou d’Europe de l’Est pour concevoir des produits astucieux et adaptés au développement durable. L’innovation n’est plus l’apanage des pays développés. La créativité des chercheurs et des ingénieurs des pays émergents est désormais mise à contribution pour concevoir des produits mondiaux. Une nouvelle étape est ainsi franchie dans la mondialisation de la recherche. Un site Internet, www.indovations.net, vient ainsi d’être créé pour promouvoir les innovations indiennes et créer des liens entre innovateurs indiens et entreprises occidentales. »1

Un vaste mouvement et des facteurs endogènes

Le troisième article est daté du 7 août 2010 de Michel Delberghe intitulé « Plus de 168 000 emplois salariés ont été détruits dans le secteur industriel en 2009. » s’inscrit dans un mouvement plus vaste.

La mise en contexte

Dans un contexte économique et social marqué par la globalisation des économies, l’internationalisation des échanges et leur virtualisation par l’usage des Tic, les organisa- tions marchandes et non marchandes (Pme/Pmi, ONG, Association, Université) ont encore à écrire le scénario de leur futur marqué par une crise exceptionnelle, que personne n’a prévu et dont on ne mesure pas complètement aujourd’hui les effets malgré que Laïdi (2010) impute ces difficultés à des facteurs endogènes, « un renchérissement du coût du travail, un prélèvement sur la valeur ajoutée deux fois plus élevé en France qu’en Allemagne, une politique de délocalisation désastreuse.2 »

La difficulté de cette écriture prospective réside dans la nécessité de conjuguer à la fois l’abandon d’une partie de la vision du monde de la modernité – séparation du monde en acteurs, institutions et territoires – et l’adoption d’une vision résolument novatrice « hyper- moderne » qui met l’accent sur la médiation, le réseau, la traduction et, in fine, la mobilisation de compétences formées et cultivées individuellement3. L’intention de notre contribution, en réponse à la mise en situation précédente, peut être formulée par ces interrogations.

Les bordures de notre contribution

Pour les délimiter, nous procéderons par chaîne itérative d’interrogation.

L’homme, n’est-il pas au cœur du processus de veille stratégique, proche de toute source d’amélioration de la compétitivité de l’entreprise ? La mise en place d’un modèle d’intégra- tion au sein des entreprises ne permettrait-elle pas de favoriser l’intelligence compétitive ? L’apprentissage par les acteurs de l’entreprise de ce modèle d’intégration pourrait-il favo- riser la mise en exergue d’avantages concurrentiels ? Les acteurs de l’entreprise ne sont-ils pas les mieux placés pour améliorer les savoir-faire existants, ou pour analyser les causes

1 Extrait fourni par Le Monde de l’article de Annie Kahn « La créativité bon marché des émergents profite aux multinationales occidentales », publié le 17 février 2010.

2 Laïdi, Z., « Substituer le « juste-échange » au libre-échange relève d’une vision erronée », Débats Horizons, p. 15, Le Monde, 15 mai 2010.

3Bertacchini, Y., « Intelligence territoriale : une lecture rétro-prospective », Revue Internationale d’Intelli- gence Économique 2 (2010) 65-97.

(5)

d’échec ou d’insuccès des produits ou des services de leur entreprise. Leurs diagnostics ne sont-ils pas plus éprouvés que tout autre outil de veille et en tout cas ne doivent pas être écartés de l’analyse stratégique de l’entreprise ?

Enfin, nous conclurons temporairement cette mise en situation par l’évocation de la notion de « destruction créatrice » qui désigne le processus de disparition de secteurs d’activité conjointement à la création de nouvelles activités économiques. Cette expres- sion est fortement associée à l’économiste Joseph Schumpeter (1883–1950) et elle fut popularisée dans son livre Capitalisme, socialisme et démocratie publié en 19424. Dans la vision de Schumpeter du capitalisme, l’innovation portée par les entrepreneurs était la force motrice de la croissance économique sur le long terme, même si cela impliquait une destruction de valeur (ou « ouragan perpétuel » selon Schumpeter) pour les entreprises établies qui jouissaient d’une position dominante, voire d’un monopole.

Les entreprises qui ont révolutionné et dominé leur marché jadis – telles que Xerox pour les photocopieurs ou Polaroïd pour les appareils photo instantanés - ont vu leurs marges se réduire et leur domination disparaître avec l’arrivée de rivaux ayant un meilleur design ou des coûts de fabrication très inférieurs. La destruction créatrice peut parfois constituer des monopoles plutôt que les détruire. C’est le cas de Wal-Mart, une entreprise qui, aux États-Unis, domine progressivement le commerce de détail en utilisant de nouvelles techniques de gestion des stocks, de marketing et de gestion des ressources humaines en faisant disparaître de nombreuses entreprises plus anciennes ou plus petites.

En fait, l’innovation lorsqu’elle est couronnée de succès conduit à un pouvoir de mono- pole temporaire sur un marché, en diminuant les profits et la puissance des entreprises éta- blies, et à terme elle peut les faire disparaître face à la concurrence des nouveaux produits commercialisés par les nouveaux entrants. La destruction créatrice est un concept très puissant car il permet d’expliquer les dynamiques du changement industriel et la transition d’un système compétitif à un monopole et inversement. Il est à l’origine de la théorie de la croissance endogène et de l’évolution économique. Mais la destruction créatrice peut s’accompagner de pertes d’emploi, le temps que les compétences devenues obsolètes et donc inemployables puissent être remplacées par d’autres plus à même de répondre aux besoins des entreprises5.

De nombreux types d’innovation conduisent à la destruction créatrice 6 :

• les nouveaux marchés ou nouveaux produits

• les nouveaux équipements

• les nouvelles sources de travail et de matières premières

• les nouvelles formes d’organisation et de management

• les nouveaux moyens de transports

• les nouveaux moyens de communication (par exemple internet)

• les nouvelles méthodes de publicité et de marketing

• les nouveaux moyens financiers ou de fraude

• les changements législatifs ou de nouvelles façons d’influencer les décideurs politiques.

4 In http://fr.wikipedia.org consulté le 18 août 2010

5 In http://fr.wikipedia.org, Op.Cit

6 ibidem

(6)

Schumpeter (Op.Cit) distinguait à l’origine cinq types d’innovations :

• la fabrication de biens nouveaux

• les nouvelles méthodes de production

• l’ouverture de nouveaux débouchés

• l’utilisation de nouvelles matières premières

• une nouvelle organisation du travail.

Au fil de notre contribution, nous retiendrons quelques idées principales de ces extraits d’articles et des éléments contenus par la proposition de « destruction créatrice » émise par l’économiste Schumpeter malgré que nous soyons désormais en mesure de nous interroger sur l’à propos de cette association destruction-créatrice- à la situation contemporaine qui voit l’Asie devenir l’épicentre de la croissance économique mondiale.

À la recherche de la bonne vision et la sollicitation de l’intégration

Depuis toujours les entreprises sont à la recherche de la « bonne vision stratégique », c’est- à-dire à la recherche de la trajectoire idéale résultat de leur capacité à analyser, à comprendre leur environnement pour leur permettre de choisir les bonnes décisions qui se traduiront par une diversification bien conduite, le maintien de leur savoir faire, un développement en relation avec leurs ressources et qui assureront in fine leur compétitivité. Autant les grandes entreprises ont pu recourir et passer du modèle de Porter (1993 et suivantes), à celui des stratégies de planification ou de positionnement, ou encore s’efforcer de retirer les leçons des expériences réussies de leur concurrence, pour autant, les Pme/Pmi dont la taille induit des ressources plus limitées, ont des difficultés à formaliser une stratégie qui leur soit adaptée.

Et pourtant, ce sont elles qui créent la majeure partie de la richesse nationale et des emplois et qui réalisent plus de la moitié des investissements productifs de notre pays.

Par leur taille, leur histoire, leur souplesse d’adaptation, elles sont souvent le creuset de l’innovation et des sources d’informations convoitées par la concurrence. Mais elles sont aussi, en retour, probablement les plus exposées. La place et les concepts associés à la veille stratégique et à l’intelligence économique dans leurs processus de développement, de diver- sification, d’innovation, de prise de décision y sont certes davantage perçus et progressent certainement. Mais si l’aspect défensif leur est devenu plus familier, l’aspect offensif, qui est ici décliné, ressemble davantage au cycle de renseignement, se borne souvent à un rôle de collecte, de traitement de l’information et d’instauration de processus de veille.

Ce qui a fait écrire à Dou7 (1995, p. 4) « La veille technologique pour les entreprises qui produisent des biens et des services reste cependant le palier de base à partir duquel peut se développer l’activité d’intelligence économique. Il serait illusoire de croire que la simple manipulation du concept d’intelligence économique est suffisante pour inscrire une position forte de l’entreprise dans la durée. »

Notre conviction, associée à notre pratique de la Pme/pmi, est d’avancer que celles-ci ne peuvent pas envisager l’intelligence économique sur le même schéma que celui mis en place dans les grandes entreprises. La problématique est double parce que plus qu’une pro- blématique économique, c’est une problématique de maintien d’un réservoir de compétitivité permanente qui est au cœur des stratégies des entreprises de taille petite et moyenne. Leur

7 Dou, H., Veille technologique & Compétitivité, Dunod, Paris, 1995.

(7)

structure, leur mode de fonctionnement ont besoin d’une approche spécifique à chacune, voire difficilement reproductible, d’inventer un nouveau modèle de parcours stratégique, un parcours qui pourrait favoriser et s’appuyer sur la créativité des hommes travaillant au cœur de l’entreprise en privilégiant leur connaissance du terrain, du métier, c’est-à-dire du travail concret, et leur capacité à révéler puis à la traduire en force de propositions. Les Pme Pmi peuvent (doivent) faire appel à leurs ressources endogènes pour construire une intelligence compétitive, plus qu’une intelligence économique qui se situe plus au niveau des États. En regard de leurs résultats, la situation particulière des SCP (ex SCOP) mérite de s’y attarder et pour cela, nous introduisons ici les propos de Patrick Lenancker relatifs à leur situation8.

« Mais concrètement, alors que les défaillances d’entreprises en France ont progressé de 24 % sur les deux années de crise 2008 et 2009 par rapport à 2006 et 2007 cumulées, le taux de défaillance en SCOP est resté stable à période équivalente. Les SCOP – y compris de l’industrie – démontrent leur capacité de résistance. Pourquoi ?

D’abord parce qu’elles disposent de fonds propres importants et stables. En effet, au minimum 16 % des résultats sont mis en réserves (dans la pratique 40 à 45 % en moyenne) avec un atout-clé : les réserves constituées restent définitivement la propriété de l’entreprise, assurant la consolidation de ses fonds propres et sa stabilité financière dans la durée.

Ensuite, parce que dans les SCOP, les salariés sont des co-entrepreneurs associés majori- taires au capital de leur entreprise et donc associés à la gouvernance et impliqués dans le bon fonctionnement de leur entreprise. Ainsi donc, par nature le dirigeant n’est pas isolé et peut compter sur l’implication de son encadrement comme des co-entrepreneurs très attachés à la pérennité de leur emploi et donc à celle de leur entreprise tout comme à son indépendance. C’est pourquoi avec les SCOP, le centre de décision demeure naturellement au cœur du territoire. »

Plus exposées aux aléas de la crise économique que nous traversons, les entreprises de taille moyenne doivent puiser dans leurs ressources humaines et organisationnelles pour traverser cette crise et les cycles inhérents au système économique capitaliste, qui amène- ront à d’autres crises. « Les historiens l’ont constaté : les phases de crise sont inhérentes à la logique financière.9 ».

La créativité est alors plus souvent mise à contribution et prend toute son ampleur pour tenter de répondre au défi pointé par Dou (Op.Cit) lorsqu’il évoque la veille technologique et qui traduit avec précision notre problématique « Comment peut-on, dans la mesure du possible, analyser, prédire à court ou moyen terme, les évolutions d’une technologie, ou comment, à partir de l’analyse de l’évolution sociale, peut-on envisager des changements technologiques ? ».

Dans la position que nous argumenterons, nous associerons ou plutôt, nous combinerons (au sens de l’analyse combinatoire) intelligence économique et évolutions d’une technologie avec évolutions sociales et intelligence compétitive.

Récemment, l’entreprise General Electric a été prise comme exemple10, sur sa façon de tirer parti de l’incroyable savoir-faire des utilisateurs indiens de leurs produits. Eduqués dans un contexte de frugalité, et non d’abondance à l’occidentale, ils ont pensé à d’autres vecteurs de commercialisation pour l’électrocardiogramme MAC 400 et l’appareil à ultrasons

8 Lenancker, P., « La France peut garder ses Pme industrielles », LEMONDE.FR | 19.04.10.

9 Aglietta, M., La crise. Les voies de sortie, Michalon éditions, Paris, 2010.

101 « La Créativité bon marché des émergents profite aux multinationales occidentales », Le Monde, 17 février 2010.

(8)

de G.E. Ces appareils sont à présent utilisés aux États-Unis pour des applications nouvelles auxquelles les Américains n’avaient pas pensé, à savoir examiner des blessés sur un lieu d’accident, mettant en exergue sa fabuleuse maniabilité, insuffisamment exploitée aupa- ravant et accroissant pourtant considérablement les marges du constructeur sur ce produit.

Nous reviendrons dans un autre article sur ce que nous avons appelé reverse creativity.

En miroir du double questionnement émis par Dou (Op.Cit), s’agissant de la veille technologique, et positionnement par nous adopté et présenté plus haut, nous résumerons ainsi l’objet central du propos de notre contribution et de notre thèse « La créativité peut- elle être un support d’une intelligence compétitive et les techniques publicitaires, grandes consommatrices de créativité, peuvent-elles contribuer à définir, puis à intégrer un modèle offensif au sein des PME PMI ? ». Nous évoquons un modèle qui ne serait pas réservé aux seuls services de veille, mais à la portée de chaque acteur de l’entreprise afin qu’il puisse être source de diversification, d’innovation et de prise de décision.

Bien que le terme « créativité » ne soit pas un terme directement associé au domaine de l’intelligence compétitive, notre projet ici est de poser les bases de ce paradigme de la créativité telle que nous l’évoquons dans notre recherche, comme point de départ de notre démarche avec un triple objectif croisé :

• souligner et démontrer la nécessité de placer l’homme et ses connaissances au cœur du processus de la créativité, en nous appuyant sur l’approche japonaise des travaux de Nonaka et Takeuchi (1997) qui peut s’apparenter à une modalité organisationnelle de type projet.

• tenter de démontrer la similitude ou le parallélisme entre le cycle d’une technique créative publicitaire et le cycle informationnel de l’intelligence compétitive qui reposerait sur des éléments de l’approche de la traduction-médiation au sens de Latour (1991) ;

• poser les bases de ce paradigme de la créativité inscrit dans le contexte des techniques créatives publicitaires, plus précisément dans la technique de « disruption » que l’on doit au publicitaire Jean Marie Dru (Op.Cit).

Dans chaque compartiment de notre appareillage épistémologique énoncé plus haut, nous relevons d’ores et déjà trois éléments en commun, certes présents à des degrés, volume divers et très certainement organisés, articulés dans un ordre peut être différent d’une situation à une autre. Ces points en commun sont le fractionnement, l’analyse, l’intégration qui mettent en œuvre un processus informationnel et de communication. À chacun de ces points, nous y associons des mots clé. Le fractionnement : des idées, des propositions, des sources –disruption- ; l’analyse : des idées, des sources, des contenus – approche japonaise - ; et l’intégration : des propositions, des contenus, des synthèses – médiation/traduction -.

Dou (Op.Cit, p. 65) écrit à propos des sciences d’intégration « éléments moteur de la créativité, de l’innovation et de la maîtrise de la complexité qui nous entoure, celles-ci se développent rapidement dans tous les pays avancés11. Elles permettent en fait la liaison, le dialogue entre des experts de sciences très éloignées les unes des autres, mais dont les objets d’études sont indispensables à la réalisation de grands projets./.. ».

11 Dou écrit « la science française, par la structure verticale de son enseignement et de sa répartition en domaines souvent très cloisonnés, prend difficilement en compte les sciences horizontales et pluridisciplinaires. » (les sciences d’intégration)

(9)

Nous pensons que le développement de la créativité au sein des organisations petites et moyennes relève de l’idée de grand projet parce qu’il s’agit d’emploi et de maintien de l’emploi.

Nous y voyons là, la justification partielle de la cohérence de notre appareillage épis- témologique telle que nous l’avons présenté en introduction.

Si Anderson exprimait dès (1959)12 les principes de base de la créativité, Porter (1993) les expose dans son ouvrage Forecasting and management of technology13. Nous les pré- sentons ici succinctement.

• Fluency : facilité à présenter et à intégrer des idées nouvelles, des concepts nouveaux.

• Flexibility : aptitude à changer de concepts et de référentiels, à transposer des appli- cations dans des champs différents.

• Originilaty : capacité nécessaire pour lutter contre le conformisme.

• Awareness : ouverture vers des visions imaginatives et nouvelles.

• Drive : être motivé.

Ces principes de base de la créativité, présents à des degrés divers chez les hommes qui composent l’organisation ne peuvent être révélés qu’en situation perçue, partagée par les membres de cette communauté de destin économique. Mais ces parties d’un tout ne pour- ront se fondre pour se transformer en compétitivité qu’à la condition d’être des éléments informationnels physique.

La créativité, élément informationnel physique de la solidarité vécue14

Jusqu’alors réservé, confiné à la psychologie, la philosophie, neurologues et artistes conviennent d’associer la créativité à d’autres fonctions de l’esprit telle que l’ima- gination, la perception, l’émotion (Pfenninger, SHubik, 2001) « The exploration of creativity, that quintessentially human and most remarkable power of the mind, used to be confined to the domains of psychology and philosophy…/…The origins of creativity examines in a cross-disciplinary fashion the biology of the brain and creativity, as well as associated functions of the mind, such as imagination, perception, and emotion…/…

Artist and neuroscientist agree that the way our brains process information determines how we perceive, with the brain matching perceived images with innate or learned visual symbols to elicit a reaction.15»

Nous avons écrit à propos de l’environnement et la construction de la réalité actionnable.

(Bertacchini, 2010) Op.Cit en résultat du processus informationnel qui détermine notre per- ception. « L’environnement tel que nous le percevons, est notre invention. » (Von Föerster, 2003). “À growing body of new knowledge suggests that what we call reality is actually something we construct.” Et Morin d’écrire (2005, p 144) « Je suis d’accord avec von Foerster pour dire que les informations n’existent pas dans la nature. Nous les extrayons de la nature ; nous transformons les éléments et événements en signes, nous arrachons

12 Traits of creativity, Interdisciplinary Symposia on Creativity, 1957-1958, New York, Harper & Row, 1959.

13 Porter, A.L., Roper, A.T. , Mason, T., W., Rossini, F.A., Banks, J., Widerholt B.J., New York, John Wilez & Sons, 1993.

14 En écho à la proposition de Morin (2005, p 124) « à la limite, une organisation qui n’aurait que des libertés, et très peu d’ordre, se désintégrerait à moins qu’il y ait en complément de cette liberté une solidarité profonde entre ses membres. »

15 Pfenninger, K-H., Shubik, S., The origins of creativity, Oxford University Press, 2001.

(10)

l’information au bruit à partir des redondances. Bien entendu, les informations existent dès que des êtres vivants communiquent entre eux et interprètent leurs signes. Mais, avant la vie, l’information n’existe pas. »

La conscience planétaire, écologique, est liée à la cybernétique, née de la seconde guerre mondiale, en réaction contre elle (Bougnoux, 1993) et Serres (1990) dans le Contrat naturel, d’évoquer les lois puis de nous inviter à les suivre pour respecter notre environnement.

Certes, nous baignons au sein d’environnements variés, proche, intermédiaire et éloigné mais, comment, d’après nos pairs, nous les vivons puis comment l’intelligence compétitive associée à la créativité se situe dans cette réponse.

Si l’être vivant perçoit et selon Lévy (2002) compute le monde, cela signifie que l’indi- vidu projette sa réalité intérieure dans le monde, tout en étant pénétré par lui, par le biais d’une interaction circulaire qui met à mal le partage entre le sujet et l’objet.

L’être vivant s’auto organise, stipule lui-même son but, détermine ses critères propres de distinction, d’action et calcule un milieu incertain en pratiquant un tri, une sélection ou traduction en visant la transformation d’un désordre en son ordre (Bougnoux, Op.Cit).

• le sujet auto organisé vit retranché derrière sa clôture informationnelle ou cognitive ;

• cette clôture informationnelle est elle-même produite par la clôture organisationnelle de l’organisme ;

• le vivant interprète les relations avec son milieu (la clôture sémiotique et le j’ai l’image- mentale : la tiercéité, (Deleuze, 1983), et ne les limite pas exclusivement à celles d’avec ses pairs (Peirce, 1931-1935).

Les éléments épistémologiques précédents mettent l’accent sur l’approche relationnelle, la pragmatique ou de sujet à sujet, ou lorsqu’en interagissant avec l’autre, nous découvri- rons ainsi la certaine incertitude quant à la règle du jeu, la manière de décrire le système et, sur le constructivisme. Mucchielli (2004, p. 130) propose une « approche communi- cationnelle compréhensive » d’un phénomène comme élément d’un système en action composé « d’acteurs et d’objets cognitifs externes et comme élément contribuant, dans un mouvement circulaire, à l’émergence d’un autre phénomène. ». Ce sera donc se situer dans le paradigme de la complexité, paradigme mis en lumière par les travaux d’E. Morin (1991 et 2005 en réédition).

Est complexe ce qui ne peut se résumer en un maître mot, ce qui ne peut se ramener à une loi, ni se réduire à une idée simple. (Morin, 2005) ou la réouverture des clôtures (Bertacchini, Gramaccia, Girardot, 2006) nous invitent à re-chercher, au cas par cas, sur le terrain, immergé dans le milieu, l’inter, le maillage, les dispositifs et Sitic, les faits sociaux et, l’action. C’est pourquoi, comme l’expliquent Breton & Proulx (1989) « la communication constitue ainsi la dernière et la meilleure des idéologies ou des religions de rechange : idéologie de la conciliation universelle car elle ne se connaît pas d’ennemi, sinon le démon inévitable du bruit. ». Bougnoux (1993, p. 14) décrit le pivot de la relation partout où il pénètre « le modèle communicationnel pose la relation avant les termes de celle-ci. Il étudie non des choses mais des flux et remplace la vision sectorielle et statique du monde par l’approche de sa complexité dynamique. ».

Et pour faire illustration de notre titre « La créativité, élément informationnel physique de la solidarité vécue » en tant que perception, relation puis lien, et pour exposer le contexte dans lequel nous positionnons le terme de créativité dans notre recherche, nous citerons l’article

(11)

de Lombardo, Bertacchini, Malbos (2006) écrit sur le passage de l’interaction16 dans une relation pédagogique à l’interactivité en situation d’apprentissage en explication du passage de la perception par une organisation d’un environnement appelant une réponse adaptative en terme de créativité à une mobilisation effective par les acteurs composant cette organisation.

La créativité, capacité –ressource latente endogène mobilisable- de création, d’imagi- nation se distingue de la création « action de donner l’existence, de tirer du néant. »

Dans le contexte de notre recherche, nous abordons la créativité comme l’art de « trans- former » cet ingrédient - l’imagination - en production de sens et de signes, en idées, en innovation, en produits ou en services innovants à l’échelle de la Pme/Pmi et nous nous attachons à souligner l’importance de savoir la susciter, la révéler, la traduire, la partager avec tous les acteurs de l’entreprise. Cette démarche implique une résonance sur la mentalité des hommes qui composent l’entreprise, une démarche de changement rendue acceptable afin de favoriser les échanges de compétences à partir de visions stratégiques.

Morin (2005, p 92) « Si vous avez le sens de la complexité vous avez le sens de la solidarité ». Si la complexité, selon E. Morin nous présente une réalité multidimension- nelle tissée d’ordre et de désordre, il en va de même de la créativité et de ses techniques.

À l’instar du principe de complexité solidaire qui enjoint de relier, tout en distinguant et tout en traitant l’incertitude, la créativité se nourrit des chemins de traverse. Nous pouvons citer l’une des plus connues d’entre elles, « le brainstorming », dont la traduction même

« remue-méninges » (Alex Osborn, 195317) évoque l’entre-deux de l’ordre et du désordre.

Irriguer la pensée, formuler les éléments, les idées, les rejoindre afin qu’allant vers les mêmes objectifs, ils se créent une identité propre, fidèles à la pensée d’E. Morin, « le tout est plus que la somme des parties ».

Ce détour « créatif » par les travaux d’E. Morin, nous permet de mettre en perspective notre recherche, identifiant la possibilité à tout acteur au sein de l’entreprise, d’accéder aux informations, de les maîtriser et d’acquérir la possibilité de les articuler et de les organiser selon un schéma créatif qui serait propre à l’entreprise, reconnu par ses membres et révélé par un modèle intégrateur de techniques appropriées.

Du concours de la créativité à l’innovation dans le processus de l’intelligence économique

En prolongement du détour créatif précédent et en ouverture de cette partie, il est néces- saire de rappeler notre position pour mieux la discuter18 et l’illustrer lors de la présentation de nos applications. Dans la position que nous argumentons, nous associerons ou plutôt, nous combinerons (au sens de l’analyse combinatoire) intelligence économique et évolu- tions d’une technologie avec évolutions sociales et intelligence compétitive (Dou, Op.Cit).

Nous nous référerons à la définition que donne Alex Osborn (Op.Cit) de la créativité

« the mental capacity to visualize, to forsee, and to generate ideas ». La créativité traduit

16 Lombardo, E., Bertacchini, Y., Malbos, E., « De l’interaction dans une relation pédagogique à l’interactivité en situation d’apprentissage. », Revue International Journal of Information Sciences for Decision Making, n° 24, 2006.

17 Osborn, A.F., Applied imagination : principles and procedures of creative thinking, New York, Charles Scriber’s Sons, 1953.

18 Position présentée page 7 du présent article.

(12)

et se nourrit de l’environnement, interne et externe de l’organisation, et est une activité double qui fait appel à l’imagination et doit produire des résultats à la fois originaux et utiles, selon Guy Aznar, c’est « une aptitude à produire du nouveau » par l’association de l’individu et de l’organisation.

Si la créativité est distincte de l’imagination, qui nous éloigne de la réalité contingente et productive, nous transporte vers la rêverie, l’imagination est un des composants de la créativité à encourager et à transformer en production, en création, en innovation pour assurer à l’entreprise une meilleure compétitivité et savoir impliquer les hommes.

« La complexité de la relation ordre/désordre/organisation surgit donc quand on constate empiriquement que des phénomènes désordonnés sont nécessaires dans certaines conditions, dans certains cas, à la production de phénomènes organisés, lesquels contribuent à l’accrois- sement de l’ordre. » (Morin, Op.Cit, p. 85). Les évolutions sociales, facteurs de changement, interfèrent avec l’intelligence économique qui, dès lors, est appelée à devenir de l’intelligence compétitive, mobilisable pour l’organisation parce qu’engendrée par elle-même.

Dans le cadre de l’intelligence économique comme Guilhon et Levet (2002) le notent

« L’information et la connaissance sont complémentaires, elles peuvent faire émerger une structure de sens, l’une des priorités consiste alors à développer des modes d’apprentis- sage organisationnels, à introduire des changements de comportements pour renouveler et transformer les connaissances. L’ouverture sur l’environnement, la collecte et le traitement de l’information devenant un moteur d’apprentissage ». Les évolutions d’une technologie interfèrent avec l’intelligence économique parce que ces évolutions résultent, soit d’usages nouveaux, soit de produits nouveaux.

Au fil de notre contribution, nous nous employons à démontrer comment les techniques publicitaires créatives peuvent s’inscrire en tant que nouvelles approches organisationnelles servant un objectif d’intelligence compétitive, c’est-à-dire d’intel- ligence économique dans un volet offensif. En substance, nous pouvons écrire que si l’imagination nourrit la créativité, la créativité autorise alors l’innovation qui mène à l’amélioration de la compétitivité de l’entreprise. Nous retournons à notre démarche combinatoire, les évolutions sociales interfèrent avec l’intelligence compétitive et les évolutions d’une technologie interfèrent avec l’intelligence économique. Cette démarche combinatoire fait écho aux propositions de Dou (Op.Cit) quant à une science de l’intégration à savoir l’intégration d’un modèle (les évolutions d’une technologie interfèrent avec l’intelligence économique) couplé avec un processus (les évolutions sociales interfèrent avec l’intelligence compétitive).

Pour conclure cette mise en perspective sommaire, mais nécessaire, nous présenterons la créativité « comme un chemin stratégique, une traduction, une médiation, un changement, une nécessité d’adoption par les responsables d’entreprises, d’une nouvelle perception de la traduction et de la médiation. » Dans tous les cas, il doit s’agir d’un mouvement à initier, mouvement dont la vitesse de conduite et d’application prend une importance majeure dans la course à la compétitivité. Il permettra moins au sein de l’entreprise de passer d’un « cahier des charges de problèmes ou de situations » à un ensemble d’idées et de solutions que de révéler et conduire à un changement de culture organisationnelle. Nous allons maintenant évoquer la technique créative de la disruption comme moyen de thésauriser l’information puis nous l’appliquerons à l’exemple cité plus haut d’un produit développé par General Electric et destiné initialement au marché indien.

(13)

La Disruption

« La Disruption a été mise au point comme un moyen de remettre en cause le statu quo, de contester l’ordre établi. » Jean Marie Dru19, ancien président de l’agence de publicité TBWA.

Son but vise à inciter les entreprises à redéfinir la façon dont elles orientent leur activité marchande, leurs stratégies, la façon dont elles innovent pour rester compétitives.

La méthodologie se décompose ainsi en trois étapes : - Repérer ce qui fige la pensée : la convention.

- La remettre en cause par une idée en rupture : la disruption.

- La recadrer dans un sens déterminé à l’avance : la vision.

Issue du domaine de la publicité, la technique créative de la disruption rejoint notre recherche, et plus encore, l’appareillage épistémologique construit pour répondre à sa pro- blématique celle d’une compétence offensive à organiser par la rencontre de l’intelligence économique et de la créativité, en cela qu’elle a besoin de thésauriser l’information sur la marque, les produits et d’analyser (la convention). Parce qu’une marque ne peut pas être réduite à un ensemble de valeurs et d’émotions pour chacun de ses produits, elle doit être évoquée comme une représentation vivante au cœur de tout ce que l’entreprise réalise. La convention insuffle la cohérence à la marque.

Savoir remettre en cause cette représentation de la marque (la disruption), s’autoriser à vivre d’autres univers de référence, adopter la pensée connexe et latérale sont des actions qui bousculent les idées reçues et provoquent le chaos tout en conservant à l’esprit la vision souhaitée (la vision).

Trois étapes publicitaires créatives composent ce cycle que nous mettons en écho des étapes du processus du cycle de renseignement de l’intelligence économique.

Si nous reprenons l’exemple de la nouvelle utilisation des appareils d’imagerie à ultra- sons de General Electric (Op.Cit) développés à l’origine pour l’Inde rurale et qui in fine sont destinés, en retour, à d’autres usages dans leur pays de conception, le modèle de la disruption se déclinerait comme suit :

- Repérer ce qui fige la pensée : la convention « utilisation des appareils en Inde rurale seulement pour des habitants de villages reculés ».

- La remettre en cause par une idée en rupture : la disruption « pourquoi ne pas mieux utiliser son avantage de maniabilité dans des contextes la nécessitant ? ».

- Recadrer dans un sens déterminé à l’avance : la vision « faire face plus aisément aux situations d’urgence (aux USA, sur les lieux d’accidents) grâce à la maniabilité de l’appareil.

Le modèle de la disruption présenté puis associé à l’application décrite ci-dessus illustre le cadre épistémologique de notre proposition que nous rappellerons. Dans la position que nous argumenterons, nous associerons ou plutôt, nous combinerons (au sens de l’analyse combinatoire) intelligence économique et évolutions d’une technologie avec évolutions sociales et intelligence compétitive.

Nous allons maintenant présenter un extrait de l’application associée à notre Recherche en rappelant la question centrale de Recherche, le protocole de Recherche et de sélection

19 Dru, J-M., Disruption live : Pour en finir avec les conventions, Village global, 2003.

(14)

des entreprises, l’évaluation de la situation de l’entreprise et de ses produits ou services, l’évaluation de la situation de l’entreprise et de son offre, la composition de la cellule créa- tive et les modalités de séances de travail. Enfin, nous porterons une attention particulière au cas d’une entreprise.

Présentation de notre application avec un focus sur les entreprises.

Nous rappelons ici notre question centrale de Recherche : « les techniques créatives publicitaires peuvent-elles favoriser l’installation d’un modèle intégrateur et support de l’I.E offensive au sein de la Pme/Pmi ? »

Pour vérifier la validité de la proposition initiale et des hypothèses associées, l’application est menée au sein de 10 entreprises volontaires, de secteurs d’activités divers : Informatique/

Électronique de pointe/ Logiciels de gestion de pharmacies/ Hifi Automobile/ Automobile/

Prêt à Porter/ Assurance/ Agence de Naming/ Alimentation.

Nous exposons ici le protocole de Recherche et de sélection des entreprises.

La recherche et la sélection des entreprises portèrent sur des entités locales et régionales, PME-PMI, dont la taille est définie à partir d’un nombre d’employés compris de 10 à 250.

Afin de composer le portefeuille de Pme/Pmi, deux voies se sont ouvertes à nous : - la première voie fut celle d’entreprises prospectées afin de leur proposer la participation

à l’étude sur la base d’un engagement de 3 mois à raison de 2 réunions mensuelles.

- la seconde voie fut de proposer la même démarche à des entreprises, soucieuses de faire appel à la Loi de Sauvegarde, sur la même base d’un engagement de 3 mois à raison de 2 réunions mensuelles, mais comportant une phase d’analyse préalable et sensible au vu du contexte de difficultés traversées.

L’évaluation de la situation de l’entreprise et de son offre, la composition de la cellule créative et les modalités de séances de travail respectèrent les phases suivantes.

- Rencontre avec le dirigeant d’entreprise ou responsable du département concerné pour définir les attentes, les limites de l’étude.

- Recrutement des interlocuteurs qui constitueront ce que nous avons dénommé la

« cellule créative »

- Définition des objectifs poursuivis : diversification d’un produit ou d’un service, développement à l’international, augmentation du chiffre d’affaires.

- Réalisation des simulations créatives, pistes d’investigations expérimentales et phase d’analyse.

Les séances de travail de la Cellule Créative furent organisées ainsi.

1re séance et 2e séance

Collecte de l’information : identification de ce que l’on croit connaître de l’entreprise, de son identité, de ses produits et services puis confrontation des perceptions des acteurs de la cellule créative.

Puis intervint la définition des objectifs poursuivis.

3e séance et 4e séance

“The mental capacity to visualize, to forsee, and to generate ideas.” (Alex Osborn, Op.Cit) Il fut ainsi procédé au rappel de la définition des objectifs poursuivis.

Mise en situation : être prêts à créer, produire des idées qui font sens, accepter de se projeter dans un système de réflexion différent, accepter de penser autrement, formuler

(15)

d’autres raisonnements stratégiques, les partager, les diffuser, les confronter.

Élaboration d’une modélisation des perceptions détaillées à la 1re séance.

Choix de la méthode créative et explication de son déroulement.

Scénarii créatifs en application.

5e séance et 6e séance :

Scénarii créatifs en application puis débriefing des scenarii et sélection des idées.

Adéquation avec les objectifs prédéfinis et feed-back.

Présentation et détails du travail mené sur une des entreprises du portefeuille

Société d’Électronique Industrielle

Activité : électronique industrielle, ajustage, pièces, nettoyage, réglage des machines outils, maintenance générale, surtout dédiée aux industriels.

Créé en 1994, 80 salariés, entreprise de type patrimonial.

Entreprise en difficulté en janvier 2009.

L’entreprise consciente de ses difficultés a souhaité bénéficier de la protection de la Loi de Sauvegarde, se donnant l’opportunité de prendre du recul sur son activité, sans se focaliser sur la gestion des problèmes financiers. La Loi de Sauvegarde offre à l’entreprise un espace-temps pour prendre les décisions nécessaires à la pérennité de l’activité et des emplois et notamment le temps de travailler sur sa redéfinition d’objectifs.

Constat : baisse des commandes sur ses clients principaux représentés par le secteur automobile, l’explication de la crise qui a touché rapidement l’industrie automobile en est la cause essentielle, par répercussion.

Objectif : piste de travail permettant de trouver un nouveau développement de chiffre d’affaires.

La cellule créative : 6 interlocuteurs : cadres, personnels intermédiaires travaillant sur des machines, et personnel administratifs. La cellule créative est d’autant plus motivée qu’elle sait qu’en 11/09, un plan social sera mis en place si les résultats restent insuffisants.

La constitution de la cellule créative décidée avec le dirigeant est sans nul doute le point le plus délicat de l’étude. Elle doit être composée d’hommes et de femmes issus de divers services afin d’assurer un métissage favorable à la créativité. Elle doit être composée de personnes de confiance car elles seront détentrices d’informations qu’habituellement le manager peut considérer comme « sensibles ».

Elle doit être composée de personnes qui s’engagent sur une durée minimum de 3 mois à participer aux réunions d’une fréquence minimale mensuelle et avec l’objectif d’aboutir à une solution concrète.

Au cours de ces réunions, il devient clair qu’il ne suffit pas d’avoir une vision stratégique, il faut la rendre opérationnelle, sinon les réunions deviennent informelles. On a pu constater que l’élaboration d’une vision stratégique est avant tout une démarche intellectuelle, qui se situe dans le monde de la pensée et non dans celui de l’action, elle a pour but de changer la manière de voir les choses- la perception- et il faut mener le travail jusqu’à ce qu’elle change aussi la réalité.

Technique créative appliquée : la disruption

« La disruption a été mise au point comme un moyen de remettre en cause un statut quo, de contester l’ordre établi », technique élaborée par Jean Marie Dru, ancien président de l’agence de publicité TBWA.

(16)

La technique de la disruption se base sur le principe du « saut créatif ». Elle doit briser les conventions et redessiner une nouvelle identité à l’entreprise. Trois étapes sont néces- saires pour la mener à bien :

1re étape - La convention : cette étape permet de valider les habitudes figeant les pen- sées, les stéréotypes qui emprisonnent les perceptions. Les conventions ne sont pas des faits mais des opinions. Nous nous sommes aidés pour modéliser cette étape du prisme de l’identité de marque (Kapferer, 1995) largement utilisé dans les techniques publicitaires pour analyser les valeurs d’une marque.

Lors de la phase de collecte de l’information au sein de l’entreprise, une sémantique a été mise en exergue que l’on peut traduire sur ce prisme. En réponse à la question : si l’entreprise était une personne comment la qualifieriez-vous ?

2e étape - La rupture : le moment de remise en question qui permet à l’entreprise de se repositionner. Il s’agit de détecter les conventions qui écrivent les « normes » c’est-à-dire le stock d’idées reçues qui maintiennent les choses en l’état et s’en écarter.

Analyse de la sémantique de la cellule créative.

L’entreprise, issue d’une entreprise familiale, a été qualifiée comme une entreprise ancienne qui ne s’est pas imprégnée des nouvelles techniques de management, qui est restée sur son segment de prédilection, le secteur automobile qui a satisfait jusqu’au moment de la crise, son cœur de métier. Enferrée dans ses traditions, les salariés la perçoivent comme une entreprise non-reconnue, ils sont peu fiers d’y travailler, le travail reste répétitif.

Les mots « bruits », les adjectifs « terne, gris » reviennent souvent dans l’analyse.

3e étape - La remise en cause : La vision : produire un nouveau sens à l’entreprise à ses services en laissant place à l’imagination.

Analyse de la sémantique de la cellule créative.

« et si on pouvait travailler à l’air libre », « et si nous étions une nouvelle entreprise et non une entreprise de plus de 20 ans » et « si nous déménagions » « repousser les murs, respirer, silence, notoriété, souffle, air… ».

La synthèse des trois étapes : convention, disruption, vision

Convention

L’entreprise, d’origine familiale, possède un savoir-faire qu’elle a consacré au secteur principal de l’industrie automobile de professionnels, qu’elle maîtrise depuis des années mais n’a pas su donner de nouveau souffle. Le secteur automobile subissant la crise, l’entreprise subit la crise. Elle reste enfermée dans son carcan, se crée des frontières.

Disruption

L’entreprise n’est pas dédiée qu’aux professionnels du secteur automobile, l’entreprise devient visible aux yeux du grand public, est plus ouverte.

Vision

Respectant les choix sémantiques traduits par la cellule créative Il a été décidé de s’ouvrir et de prendre l’air :

Par l’organisation de Portes Ouvertes : cela n’avait jamais été fait car la clientèle était

(17)

exclusivement industrielle. Cependant outre le fait de valoriser les équipes heureuses de partager leur quotidien, cela a donné naissance à un nouveau marché : celui du particulier qui faisant de plus en plus de gros travaux, ressent parfois les besoins de services professionnels.

Encore plus d’ouverture et d’air : élargissement de l’horizon par l’invitation d’une entreprise industrielle bulgare en Relations Publiques (aide CCI au détour recherche concur- rence) ; Une délégation de 5 personnes a été invitée à venir découvrir le savoir-faire, pour la construction de pièces automobiles. Une compétence au sein de l’équipe des ajusteurs, a été découverte : la parfaite maîtrise de l’anglais, non exploitée auparavant qui a permis de faire le lien entre les deux pays et de traverser les frontières.

Les résultats obtenus

Commandes vers les particuliers : nouveau marché = +35K€ en 3 mois Commandes vers la Bulgarie : + 150K€ jusqu’en décembre 2009.

À ce jour, l’entreprise reste fragile, mais le plan social a été évité.

Un point d’étape sur les autres entreprises étudiées

Nous présentons maintenant un point d’étape sur les autres entreprises qui ont fait l’objet de notre étude.

Agence de Naming

Exposé de la problématique : Créer des noms d’entreprises ou de produits n’est pas une activité à fort renouvellement. Une fois le nom créé, l’entreprise le garde quelques années avant d’en changer. Alors où trouver de nouveaux clients friands de noms ?

En utilisant la technique de la divergence, nous avons aidé l’entreprise à mettre en exergue le secteur des médicaments génériques qui est grand consommateur de création de noms de médicaments pouvant illustrer au mieux la molécule et le symptôme traité. Par extension, un médicament traversant les frontières, la démultiplication de la création des noms de médicaments pour les laboratoires est venue naturellement au sein de l’équipe créative, insufflant de ce fait une dimension internationale à l’entreprise. À ce jour l’agence de naming a remporté plusieurs budgets et notamment le budget suisse du laboratoire Roche pour une molécule en cours d’autorisation sur le marché.

Prêt à Porter

Problématique : comment faire face à la faible demande sur le prêt à porter de marque chez les enfants de moins de 10 ans. Un événement, un coup de cœur, mais rares sont les mamans qui achètent tous les mois des vêtements de marque à leurs enfants de moins de 10 ans.

En utilisant la technique de la disruption, le point de vente a adopté la vente pour 2 mois.

Toute cliente peut « louer » un vêtement à moindre coût pour une durée de 2 mois.

Une fois le vêtement rapporté, la cliente bénéfice d’une remise sur un autre vêtement soit

« acheté », soit « loué ». Le point de vente recycle les vêtements retournés vers des dépôts- ventes récupérant une partie de sa marge et a, ainsi, mis en place un système de fidélisation à toute épreuve qui lui garantit l’attachement de sa clientèle.

Convention

inutile de dépenser beaucoup pour le prêt-à-porter des moins de 10 ans, ils ont à peine le temps de les porter, qu’ils ont grandi.

Disruption

et si les enfants s’offraient des vêtements de marque comme les grands. Ce n’est pas

(18)

une question d’âge, mais une question de temps. « les grands ont le temps de porter leurs vêtements longtemps, les enfants juste le temps de les enfiler, qu’ils sont déjà plus grands ».

Vision

« donnons aux enfants, le droit de s’habiller aussi comme les grands »

Autant de travaux menés sur la base de techniques créatives et sur la base d’exercices sémantiques qui élargissent la vision de l’entreprise, lui permettant d’avoir toujours une longueur d’avance sur le terrain de la compétitivité.

Ajouter aux étapes des stratégies d’intelligence économiques classiques – Expression des besoins- Collecte d’informations- Traitement et analyse- l’étape de la production d’idées par des techniques créatives- avant de passer à la-Diffusion, c’est peut-être mettre à la portée d’entreprises de taille moyenne, une réelle intelligence compétitive en ajoutant la notion de compréhension et d’intuition à celle de l’information chère à l’intelligence économique.

Conclusion temporaire

La créativité, un réservoir de compétences à la disposition de l’Intelligence Économique offensive.

L’approche japonaise des travaux de Nonaka et Takeuchi (1997) développe l’idée que la connaissance n’est pas aisément visible ni exprimable et détaille les racines explicatives du succès des entreprises japonaises dans les années soixante-dix à 80, à savoir leur capacité à créer de nouvelles connaissances, par le fait qu’elle place l’homme au cœur du processus, favorisant une interaction intensive et créative entre les membres d’une même équipe.

Aussi, l’un des points essentiels de notre modèle dit intégrateur est la mise en place d’un management par projet propice au développement des techniques créatives, une cellule créative fonctionnant selon le schéma du management par projet.

La créativité est alors plus souvent mise à contribution et prend toute son ampleur pour tenter de répondre au défi pointé par Dou (Op.Cit) lorsqu’il évoque la veille technologique et qui traduit avec précision notre problématique « Comment peut-on, dans la mesure du possible, analyser, prédire à court ou moyen terme, les évolutions d’une technologie, ou comment, à partir de l’analyse de l’évolution sociale, peut-on envisager des changements technologiques ? ».

Dans la position que nous avons argumenté, nous y avons associé ou plutôt, nous avons combiné (au sens de l’analyse combinatoire) intelligence économique et évolu- tions d’une technologie avec évolutions sociales et intelligence compétitive. C’est en cela que nous défendons l’hypothèse principale de notre Recherche, que la créativité peut être un modèle intégrateur d’une intelligence économique offensive à savoir l’intelligence compétitive.

La créativité, est une compétence qui peut être mise au service de l’Intelligence Économique lorsqu’elle est révélée puis employée dans la fonction de production de l’entreprise et au-delà, comme nous l’avons indiqué, dans sa recherche permanente de la bonne vision la conduisant à la bonne trajectoire. La créativité, cette aptitude à produire du nouveau, à déceler et à résoudre des problèmes, à donner naissance à des idées, peut être accessible à tout acteur de l’entreprise et peut faire l’objet d’un apprentissage. La créativité est une disposition d’esprit que l’on peut acquérir avec de la méthode et n’est pas le monopole des professionnels de la création, des publicitaires.

Jean Claude Wydouw20, psycho-sociologue, avance que « pour créer, il faut pouvoir créer, vouloir créer, savoir créer ».

20 Wydouw, J-C., Créativité mode d’emploi, Éditions d’Organisation, 1998.

(19)

Pour pouvoir créer, ou résoudre un problème ou produire des idées, il faut avant toute chose, identifier, exprimer les besoins, collecter l’information nécessaire, et avoir analysé les contraintes, les données.

Pour vouloir créer, il faut organiser l’information collectée différemment, l’analyser, la traiter et l’interpréter. Il faut savoir produire des idées, il faut avoir la profonde envie de se projeter dans un système de réflexion différent, accepter de penser autrement, formuler des raisonnements stratégiques en vue d’innover, de conduire de nouveaux projets. Il s’agit d’un espace à définir, à structurer, à organiser au sein de l’organisation et perméable à l’organisation. Il faut confronter ses idées à celles des autres, les partager, les diffuser, les enrichir, échanger pratiques et savoirs.

« Identifier, collecter, compiler et traiter l’information, l’organiser, la diffuser », les étapes créatives sont très proches des étapes du cycle de renseignement des stratégies d’intelli- gence économique, à une étape près cependant, -l’étape 5- celle de la production d’idées nouvelles où s’exprime la volonté de penser autrement, d’accepter de quitter les canons de pensées habituelles.

La stratégie créative peut s’imposer avec la même rigueur, en intégrant une étape créativité au cycle du renseignement et une étape de traduction-médiation lors de la pro- duction des idées, autorisant ainsi chacun à regarder vers des horizons différents avant de se recentrer sur la solution ou l’innovation. Guy Aznar21, un des pionniers de la créativité, n’a-t-il pas été jusqu’à évoquer la mise en place d’agents créatifs dédiés dans l’univers professionnel pour résoudre des problèmes ponctuels. Les entreprises qui prendront le temps de former leurs équipes à cette compétence créative, bénéficieront alors d’un véritable outil d’aide à la décision. Dans cette acception, l’intelligence créative devient une compétence que les hommes de l’entreprise doivent acquérir, un potentiel qui ne demande qu’à être repéré, entraîné, sollicité, une stratégie offensive garante d’un regard différent sur l’activité de l’entreprise, une possible remise en question afin d’assurer la compétitivité, la certitude de ne pas céder à la tentation du cloisonnement mental et de redonner droit de cité à l’imagination.

L’homme, actif stratégique de l’entreprise, possède les connaissances, traite l’information et interagit avec l’organisation. Ainsi, notre recherche s’attache à proposer qu’un modèle d’intégration qui relierait le domaine de la connaissance à celui de la créativité, servirait efficacement les objectifs tactiques et stratégiques des organisations de taille moyenne.

L’expression d’une nouvelle vision du développement de la compétitivité des entreprises modifie notre regard sur les processus stratégiques classiques et démontre que sur fond de crise, la nécessaire création sous contrainte, ouvre des perspectives en termes de manage- ment et de développement économique. L’utilisation des techniques créatives publicitaires, l’appel à la créativité de tous les acteurs de l’entreprise, peut permettre de faire face au temps toujours plus compté pour la réactivité stratégique des entreprises.

« Creativity is just connecting things. When you ask creative people how they did something, they feel a little guilty because they didn’t really do it, they just saw something. It seemed obvious to them after a while. That’s because they were able to connect experiences they’ve had and synthesize new things. And the reason they were able to do that was that they’ve had more experiences than other people. »Steve Jobs

21 Aznar, G., Exposé introductif, Colloque Créativité, Université de Paris René Descartes, 7 et 8 juillet 2005.

(20)

Références bibliographiques

Articles & communications lors de colloques :

Anderson, H-H., Traits of creativity, Interdisciplinary Symposia on Creativity, 1957-1958, New York, Harper

& Row, 293 p, 1959.

Aznar, G., Exposé introductif, Colloque Créativité, Université de Paris René Descartes, 7 et 8 juillet 2005.

Bertacchini, Y., « Intelligence territoriale : une lecture rétro-prospective », Revue Internationale d’Intelligence Économique 2 (2010) 65-97.

Bertacchini, Y., Girardot, J-J., Gramaccia, G., (2006) « De l’intelligence territoriale. Théorie, Posture, Hypothèses, Définitions. », in : Actes du 5e colloque « TIC et Territoire : quels développements ? », Lyon, International Journal of Information Sciences for Decision Making, http://isdm.univ-tln.fr, juin 2006, n° 26 Bertacchini Yann., « Métiers émergents de la nouvelle économie : identification des compétences attendues et

typologie des métiers exercés », Revue Terminal n° 84, Paris, juin 2001.

Bertacchini Yann., « Univers technologique et Pratiques pédagogiques », Revue Humanisme et Entreprise, Cahiers du Centre d’Études et de Recherche, La Sorbonne Nouvelle, n° 241, juin 2000.

Laïdi, Z., « Substituer le « juste-échange » au libre-échange relève d’une vision erronée », Débats Horizons, p. 15, Le Monde, 15 mai 2010.

Lenancker, P., « La France peut garder ses Pme industrielles », LEMONDE.FR, 19 avril 2010.

« La Créativité bon marché des émergents profite aux multinationales occidentales », Le Monde, 17 février 2010.

Lombardo, E., Bertacchini, Y., Malbos, E., « De l’interaction dans une relation pédagogique à l’interactivité en situation d’apprentissage. », Revue International Journal of Information Sciences for Decision Making, http://isdm.univ-tln.fr, n° 24, 2006.

M. Porter, H. Takeuchi, and M. Sakakibara, Can Japan Compete ? Tokyo : Diamond Publishing, 2000. (English ed., Basingstoke : MacMillan, 2000) and New York : Basic Books and Perseus Publishing, 2000.

M. Porter, On Competition., Boston, MA : Harvard Business School Press, 1998.

M. Porter, Canada at the Crossroads : The Reality of a New Competitive Environment. Ottawa, Canada : Business Council on National Issues and Minister of Supply and Services, 1992.

Cynthia A. Montgomery (introduction de)., Michael E. Porter., Strategy : Seeking and Securing Competitive Advantage, Boston 1991.

Michael E. Porter., Mark R. Kramer, “The Competitive Advantage of Corporate Philanthropy” Harvard Business Review, December 2002.

Michael E. Porter, “What is Strategy ?” Harvard Business Review, November-December 1996.

Citations

« Au total, la fragilisation de notre puissance économique ne peut que remettre en cause la compétitivité de l’économie française. À terme, c’est bien l’enjeu de la maîtrise par la France de son destin qui est en cause : insertion dans l’Europe et l’économie mondiale ou dilution ? Économie en puissance ou future zone de sous-traitance ? Tel est bien le défi que doit relever notre stratégie économique. », Jean-Louis Levet, Les Échos, 22 mai 2003.

« La curiosité maladive ne garantit pas le succès en recherche et donc en innovation. Il s’y ajoute une autre qualité, la créativité, grâce qui bouscule les dogmes, les idées reçues.

Et la sélection universitaire française basée sur des dons d’accumulation des connaissances peut nuire à la naïveté infantile qui inspire souvent les artistes. » Pierre Douzou, Libération, 10/1/1995, « Qu’est ce qui fait qu’un chercheur trouve ? »

Références

Documents relatifs

D ’ autres travaux réalisés dans des condi- tions similaires ont montré que le dosage du lactate déloca- lisé était plus performant que le seul excès de base pour détecter

Malgré les risques de mésusage et d ’ intoxications, la méthadone, qui était prescrite en France essentiellement sous forme de sirop, a été commercialisée depuis 2008 sous forme

Des cas d ’ acidose lactique sur déficit en thiamine ont en effet été décrits dans la littérature [6,7], notamment chez des patients en nutrition parentérale exclu- sive

Objectif : Évaluation comparative à trois et six mois d’une intervention brève effectuée par un thérapeute (travailleur social) [Th] ou assistée par ordinateur (AO), sur la

Vivien B, Adnet F, Bounes V, et al (2011) Recommandations formalisées d ’ experts 2010 : sédation et analgésie en structure d ’ urgence (Réactualisation de la conférence d

En témoignent deux citations : « Le nouveau-né appartient à l ’ obstétricien comme les suites opératoires appartiennent au chirurgien », déclarait peu d ’ années plus

Malgré le professionnalisme qui entoure une relation d ’ écoute entre un soignant et une personne malade, il est probable que les règles qui régissent les relations d ’ écoute

Trois pistes pour la recherche en intelligence économique pour sortir de la triple impasse de l’innovation.. Par Séverine